La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/02/1987 | FRANCE | N°85-90226

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 février 1987, 85-90226


ANNULATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Mélanie, partie civile,
contre un arrêt du 12 décembre 1984 de la Cour d'appel de Pau (chambre correctionnelle) qui, ayant relaxé Y... Christiane, épouse Z..., des chefs de blessures involontaires et contravention au Code de la route, l'a déboutée de ses demandes.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, R. 10 du Code de la route, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de m

otifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme Z....

ANNULATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Mélanie, partie civile,
contre un arrêt du 12 décembre 1984 de la Cour d'appel de Pau (chambre correctionnelle) qui, ayant relaxé Y... Christiane, épouse Z..., des chefs de blessures involontaires et contravention au Code de la route, l'a déboutée de ses demandes.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, R. 10 du Code de la route, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme Z... qui, au volant de sa voiture, a renversé un piéton, Mme X..., par là même déboutée de sa demande d'indemnisation ;
" au motif que l'accident s'est produit sur l'extrémité droite de la chaussée ; qu'il ressort d'autre part du témoignage de A..., automobiliste qui suivait la voiture de Mme Z... sur la route mouillée, que celle-ci roulait bien à sa droite sans dépasser la vitesse autorisée, en feux de route, eu égard aux mauvaises conditions atmosphériques et que Mme Z... en tentant une manoeuvre d'évitement a fait un tête-à-queue ; qu'aucune faute de conduite ne se dégage des divers éléments de la procédure et que c'est à bon droit que le premier juge a relaxé la prévenue des fins de la poursuite de blessures involontaires et de défaut de maîtrise dans la conduite de son véhicule ;
" alors que le seul fait de ne pas dépasser la vitesse autorisée, soit 60 km / h, n'exclut ni la contravention à l'article R. 10 du Code de la route ni le délit de blessures par imprudence ; que la Cour ayant elle-même admis que l'accident s'était produit de nuit sous la pluie dans de mauvaises conditions atmosphériques, il lui appartenait de rechercher si la vitesse de l'automobiliste était adaptée aux difficultés de la circulation et des obstacles prévisibles ; que ce fait était d'ailleurs exclu du fait que l'automobiliste n'a ni évité le piéton heurté avec violence et qu'elle avait pourtant aperçu, ni maîtrisé son véhicule après le choc puisqu'elle a effectué un tête-à-queue " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que de nuit et en agglomération, la voiture conduite par Christiane Z... a heurté Mélanie X... qui traversait à pied la chaussée ; que poursuivie pour le délit de blessures involontaires et la contravention de défaut de maîtrise, la première nommée a été relaxée, de ces chefs, par le tribunal ;
Attendu que pour confirmer le jugement la juridiction du second degré énonce " qu'il résulte de la procédure, et notamment du croquis des lieux établi par la police, que l'accident s'est produit sur l'extrémité droite de la chaussée ; que d'autre part, il ressort du témoignage de A..., automobiliste qui suivait la voiture de Mme Z..., sur la route mouillée, que celle-ci roulait bien à sa droite, sans dépasser la vitesse autorisée, en feux de route eu égard aux mauvaises conditions atmosphériques, et que la prévenue, en tentant une manoeuvre d'évitement, a fait un tête-à-queue ; qu'aucune faute de conduite ne se dégage des divers éléments de la procédure " ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations déduites d'une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis au débat contradictoire la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision ;
Mais sur les deuxième et troisième moyens de cassation ;
Le deuxième, pris de la violation des articles 1384 alinéa 1 du Code civil, 2, 3, 470-1, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté Mme X..., piéton accidenté, de sa demande en réparation du préjudice subi du fait de l'automobiliste Mme Z... qui l'a renversée tandis qu'elle traversait la chaussée ;
" au motif que Mme Z..., relaxée pour absence de faute, est sans doute présumée responsable de l'accident sur le fondement juridique de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, mais que le piéton ne pouvait pas ne pas voir arriver la voiture de Mme Z... qui en raison des mauvaises conditions atmosphériques circulait en phares et qu'il a entrepris de traverser la route sans prendre d'élémentaires précautions au point de se faire renverser à l'extrémité du bord droit de la chaussée juste à l'instant où la voiture de Mme Z... passait ; que ce comportement de la victime constitue pour Mme Z... un événement imprévisible et irrésistible présentant les caractéristiques de la force majeure ;
" alors d'une part que le fait que le piéton ait pu apercevoir le véhicule Z... est sans incidence juridique sur l'application de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil dont la présomption ne pèse qu'à l'égard du gardien du véhicule et que dès lors l'arrêt ne pouvait le retenir comme élément de décharge de responsabilité sans violer l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
" alors d'autre part que le fait d'être renversé sur le bord droit de la chaussée ne suffit pas à caractériser la force majeure tout au contraire exclue par cette donnée non contestée : l'automobiliste avait remarqué Mme X... marchant sur le trottoir avant de la renverser " ;
Le troisième, pris de la violation des articles 2 et 3 de la loi du 5 juillet 1985 :
" en ce que la cour d'appel a confirmé le jugement déclarant que la faute commise par la victime, Mélanie X..., avait constitué un obstacle imprévisible et irrésistible pour l'automobiliste, Mme Z..., qui ainsi s'exonérait totalement de la présomption de responsabilité de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;
" alors d'une part qu'en vertu des dispositions de l'article 2 de la loi du 5 juillet 1985 relative à l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation applicable aux procédures pendantes devant la Cour de Cassation, les victimes ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d'un tiers ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait dès lors, sans violer ces dispositions, considérer que la faute de la victime avait constitué un obstacle imprévisible et irrésistible ;
" alors d'autre part qu'il résulte de l'article 3 de la loi du 5 juillet 1985 que, pour les dommages résultant des atteintes à la personne, la faute de la victime qui n'est pas conducteur ne peut être opposée à celle-ci dès lors qu'elle ne constitue pas une faute inexcusable cause exclusive de l'accident ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel ne pouvait débouter Mme X... de ses prétentions sans caractériser à son encontre une telle faute " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'en vertu des articles 1er et 3 de la loi du 5 juillet 1985, applicables aux instances en cours, les victimes autres que le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un tel véhicule ne peuvent se voir opposer leur propre faute que si celle-ci est inexcusable et a été la cause exclusive de l'accident ;
Attendu que, se prononçant sur la prétention subsidiaire de la partie civile qui en application de l'article 470-1 du Code de procédure pénale demandait, pour le cas de relaxe, que la prévenue fût, en tant que gardienne du véhicule, condamnée à réparer le dommage causé, la juridiction du second degré relève que venant d'être relaxée en l'absence de faute de sa part, et l'article 1382 du Code civil ne pouvant donc trouver en l'espèce son application, " Mme Z... est présumée responsable de l'accident sur le fondement juridique de l'article 1384, alinéa 1er, dudit Code ; que cependant le piéton ne pouvait pas ne pas voir arriver la voiture de la prévenue, qui circulait en phares, et a entrepris de traverser la route sans prendre d'élémentaires précautions, au point de se faire renverser à l'extrémité du bord droit de la chaussée juste à l'instant où l'automobile passait ; que ce comportement de la victime a constitué un événement imprévisible et irrésistible, présentant les caractéristiques de la force majeure, pour Mme Z... ; que cette dernière s'exonère donc entièrement de la présomption de responsabilité découlant de l'article 1384, alinéa 1er, susvisé, et que Mme X... sera déboutée de ses demandes " ;
Attendu en cet état que si, à la date où elle statuait, la Cour d'appel a, contrairement à ce qui est allégué dans le deuxième moyen, justifié sa décision au regard des dispositions de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, elle n'a cependant pas été amenée à se prononcer sur le caractère inexcusable de la faute retenue à la charge de la victime ;
Attendu en conséquence que, si l'arrêt attaqué n'encourt pas la censure pour s'être prononcé comme il l'a fait, il doit être annulé en vue d'un nouvel examen du litige en fonction des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 entrée en vigueur postérieurement à la date de la décision ;
Par ces motifs :
ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Pau en date du 12 décembre 1984 mais seulement en ce qu'il s'est prononcé sur la demande subsidiaire de la partie civile tendant à obtenir réparation en application des règles du droit civil ;
Et pour qu'il soit statué à nouveau conformément à la loi dans la limite de l'annulation prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la même cour d'appel.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 85-90226
Date de la décision : 17/02/1987
Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Victime d'un accident de la circulation - Victime autre que le conducteur - Faute inexcusable - Recherche nécessaire

Selon les dispositions, applicables aux instances en cours, des articles 1er et 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 les victimes, autres que le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur, d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un tel véhicule ne peuvent se voir opposer leur propre faute que si celle-ci est inexcusable et a été la cause exclusive de l'accident. En conséquence doit être annulé, pour permettre aux mêmes juges du fond de réexaminer les faits en fonction de ces dispositions, l'arrêt, rendu avant la promulgation de la loi précitée, qui pour écarter les demandes d'une partie civile relève que le comportement fautif de cette victime a constitué un événement imprévisible et irrésistible présentant les caractéristiques de la force majeure et donc de nature à exonérer la prévenue de la présomption de responsabilité édictée par ce texte


Références :

Loi 85-677 du 05 juillet 1985 art. 1, art. 3

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 12 décembre 1984

Cour de Cassation, chambre criminelle, 1986-10-07, Bulletin criminel 1986, n° 271 p. 685 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 fév. 1987, pourvoi n°85-90226, Bull. crim. criminel 1987 N° 74 p. 204
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1987 N° 74 p. 204

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bruneau, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Robert
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Morelli
Avocat(s) : Avocats :MM. Rouvière et Blanc.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:85.90226
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award