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16/12/1986 | FRANCE | N°85-13578

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 décembre 1986, 85-13578


Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond (Paris, 20 février 1985), que par une lettre du 2 juin 1982, Mme Y..., proviseur de lycée, a saisi le recteur de l'académie du problème posé par les absences d'un professeur de son établissement, Mlle X..., en demandant que soit prise toute décision utile ; que plusieurs professeurs ayant demandé des informations sur cette affaire, le proviseur a réuni une assemblée générale au cours de laquelle elle a donné lecture de sa lettre du 2 juin, tandis que Mlle X... lisait la le

ttre en réponse qu'elle avait envoyée au recteur de l'académie le 1...

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon les énonciations des juges du fond (Paris, 20 février 1985), que par une lettre du 2 juin 1982, Mme Y..., proviseur de lycée, a saisi le recteur de l'académie du problème posé par les absences d'un professeur de son établissement, Mlle X..., en demandant que soit prise toute décision utile ; que plusieurs professeurs ayant demandé des informations sur cette affaire, le proviseur a réuni une assemblée générale au cours de laquelle elle a donné lecture de sa lettre du 2 juin, tandis que Mlle X... lisait la lettre en réponse qu'elle avait envoyée au recteur de l'académie le 14 juin 1982 ; que Mlle X..., soutenant que Mme Y... avait commis une voie de fait en diffusant sa lettre du 2 juin 1982, qui constituait une demande d'ouverture d'une procédure disciplinaire, l'a assignée devant le tribunal d'instance qui, par jugement du 19 janvier 1983, a retenu l'existence d'une voie de fait en raison de la divulgation d'éléments d'une procédure disciplinaire et condamné Mme Y... à verser un franc de dommages-intérêts à Mlle X... et au Syndicat général de l'Education nationale CFDT ;

Attendu que Mlle X... et le Syndicat général de l'Education nationale CFDT font grief à l'arrêt infirmatif attaqué de les avoir déboutés de leur action en réparation du préjudice résultant de la voie de fait en retenant l'absence de faute personnelle de Mme Y... alors que, d'une part, dès qu'il y a voie de fait, le juge judiciaire est compétent pour connaître de toutes les conséquences de cette voie de fait et réparer le préjudice en résultant, même s'il a été causé par une faute de service ; alors que, de deuxième part, en se bornant à apprécier le comportement de Mme Y... au regard des instructions reçues, sans rechercher s'il ne s'agissait pas d'un fait insusceptible de se rattacher à l'exercice normal des pouvoirs d'un proviseur et s'il n'était pas porté atteinte à une liberté fondamentale, en l'espèce les garanties disciplinaires des fonctionnaires, la cour d'appel n'aurait pas légalement justifié sa décision ; alors que, de troisième part, la divulgation des faits reprochés à un enseignant constitue une atteinte aux garanties disciplinaires des fonctionnaires ; et alors que, enfin, la cour d'appel n'avait pas répondu aux conclusions de Mlle X... faisant valoir que son acceptation de lire devant l'assemblée générale sa lettre du 14 juin 1982 était contrainte ;

Mais attendu que si les tribunaux de l'ordre judiciaire ont une compétence exclusive pour statuer sur les conséquences dommageables d'une voie de fait, il leur appartient de rechercher, pour l'appréciation de la responsabilité du fonctionnaire mis en cause devant eux, s'il a commis une faute personnelle détachable du service en agissant dans une intention malveillante ou pour satisfaire un intérêt personnel étranger au service public ; qu'en l'espèce, sans se prononcer sur l'existence de la voie de fait retenue par le premier juge, la cour d'appel a constaté que Mme Y... avait agi à l'occasion et dans l'exercice de ses fonctions, l'inspecteur principal de l'enseignement technique lui ayant demandé de procéder à une enquête en réunissant éventuellement les professeurs concernés, et que son action n'avait pas eu pour mobile le désir de nuire à Mlle X... ; que par ces seuls motifs, la juridiction du second

degré, qui ne s'est pas déclarée incompétente et qui n'avait pas à répondre au détail de l'argumentation des parties, a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 85-13578
Date de la décision : 16/12/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Agents et employés d'un service public - Dommages causés par eux dans l'exercice de leurs fonctions - Faute détachable de la fonction - Intention malveillante ou recherche d'un intérêt personnel illégitime - Nécessité

* SEPARATION DES POUVOIRS - Voie de fait - Définition - Acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'Administration - Fonctionnaire ayant agi à l'occasion et dans l'exercice de ses fonctions - Défaut du désir de nuire à la personne concernée par son action

* FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - Responsabilité - Faute - Faute détachable des fonctions - Intention malveillante ou recherche d'un intérêt personnel illégitime

Si les tribunaux de l'ordre judiciaire ont une compétence exclusive pour statuer sur les conséquences dommageables d'une voie de fait, il leur appartient de rechercher, pour l'appréciation de la responsabilité du fonctionnaire mis en cause devant eux, s'il a commis une faute personnelle détachable du service en agissant dans une intention malveillante ou pour satisfaire un intérêt personnel étranger au service public. . . Est donc légalement justifiée la décision d'une cour d'appel qui, pour rejeter l'action engagée contre un agent public à raison de la voie de fait qui lui était imputée, retient que ce fonctionnaire avait agi à l'occasion et dans l'exercice de ses fonctions et qu'il n'avait pas eu pour mobile le désir de nuire à la personne concernée par son action.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 février 1985

A RAPPROCHER : Cour de Cassation, chambre civile 1, 1986-12-09, bulletin 1986 I N° 295 p. 279 (Rejet) et l'arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 déc. 1986, pourvoi n°85-13578, Bull. civ. 1986 I N° 307 p. 292
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 307 p. 292

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Sargos
Avocat(s) : Avocats :la SCP Nicolas, Masse-Dessen et Georges et la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.13578
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