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18/11/1986 | FRANCE | N°84-14793

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 novembre 1986, 84-14793


Attendu, selon les énonciations des juges du fond que Ferdinand X... et Célina A..., qui s'étaient mariés sous le régime de la communauté légale de biens, sont décédés, la femme le 4 janvier 1970 et le mari le 31 octobre 1973, laissant les cinq enfants issus de leur mariage, Marie veuve B..., Elise épouse Mérel, Marcelle épouse Z..., Donat et Adrien ; qu'aux termes d'un acte notarié du 7 septembre 1949, Ferdinand X... et son fils Donat avaient acquis indivisément, dans la proportion des deux tiers pour le premier et d'un tiers pour le second, des parcelles de terre avec des cons

tructions et un matériel de scierie et qu'une société de fait ...

Attendu, selon les énonciations des juges du fond que Ferdinand X... et Célina A..., qui s'étaient mariés sous le régime de la communauté légale de biens, sont décédés, la femme le 4 janvier 1970 et le mari le 31 octobre 1973, laissant les cinq enfants issus de leur mariage, Marie veuve B..., Elise épouse Mérel, Marcelle épouse Z..., Donat et Adrien ; qu'aux termes d'un acte notarié du 7 septembre 1949, Ferdinand X... et son fils Donat avaient acquis indivisément, dans la proportion des deux tiers pour le premier et d'un tiers pour le second, des parcelles de terre avec des constructions et un matériel de scierie et qu'une société de fait s'est instituée, pour l'exploitation du fonds de commerce de scierie entre le père et le fils ; que le 27 avril 1972, Ferdinand X... a rédigé un testament aux termes duquel il a légué la quotité disponible de sa succession pour moitié à sa fille Marie épouse B... et pour moitié à son fils Adrien et qu'aux termes d'un acte notarié du 6 août 1973, il a vendu à son fils Donat le tiers des immeubles sis à Landry dans lesquels est exploitée la scierie, le tiers de ce fonds de commerce de scierie et le tiers de parcelles de terre ; que les opérations de partage de la communauté ayant existé entre les époux Y... et de leurs successions ont été ordonnées par un jugement du 20 juin 1978 et que l'arrêt attaqué a dit que la vente du 6 août 1973 constituait une donation indirecte consentie par le père de famille à son fils Donat des deux tiers des biens ayant fait l'objet de cette vente et en a ordonné le rapport dans cette proportion, a constaté la validité du testament du 27 avril 1972 et a ordonné l'attribution préférentielle à Mme Vve B... du second étage d'une maison sise à Landry et du surplus de cette maison à Donat X... ; .

Sur le premier moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu que les héritiers de Donat X..., décédé le 12 juin 1984, reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir dit que leur auteur n'est propriétaire que d'un tiers d'une maison sise à Landry, les deux tiers de surplus dépendant de la succession de son père et de celle de sa mère, alors que, d'une part, la cour d'appel, qui a constaté que cette maison avait été édifiée avec les bénéfices de la société de fait créée entre Ferdinand X... et son fils Donat, aurait en décidant que ces bénéfices s'étaient partagés entre le père et le fils dans la proportion des deux tiers pour le premier et d'un tiers pour le second, violé l'article 1832 du Code civil, suivant lequel, lorsque les apports des associés de fait n'ont pas été déterminés à l'avance, la part de chacun des associés dans les bénéfices doit être fixée à la moitié, alors que, d'autre part, la juridiction du second degré n'aurait pas recherché si la commune intention des parties n'avait pas été de partager les bénéfices par parts égales et alors qu'enfin, elle aurait méconnu les règles de la preuve en imposant à Donat X... d'établir l'étendue de son droit de propriété alors que cette preuve incombait, selon le moyen, à Mme Z... et à Mme B... qui contestaient l'étendue de ce droit ;

Mais attendu que, recherchant quelle avait été la commune intention des parties, la cour d'appel a retenu que celles-ci avaient décidé de procéder au partage des bénéfices sur la base de l'acte du 6 août 1973, qui faisait apparaître que Donat X... n'était propriétaire que d'un tiers du fonds de commerce de scierie constituant l'actif de la société de fait ; que par cette appréciation souveraine, qui ne saurait être discutée devant la Cour de Cassation, elle a, sans encourir les griefs du moyen, justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'acte du 6 août 1973 constitue une donation indirecte à concurrence des deux tiers au profit de Donat X... et qu'en conséquence celui-ci devra rapporter à la masse partageable les deux tiers des biens désignés dans cet acte et que l'intégralité de la quotité disponible de la succession de Ferdinand X... sera attribuée à Mme B... et aux héritiers d'Adrien X... décédé, alors que, d'une part, la cour d'appel, qui a constaté que Ferdinand X... avait, postérieurement à son testament du 27 avril 1972, vendu par l'acte du 6 août 1973 la portion indivise de la scierie et du fonds de commerce, ce dont il résultait qu'il avait partiellement et dans cette proportion, révoqué son testament, aurait, en imposant le rapport à la masse, violé l'article 1038 du Code civil, alors que, d'autre part, elle aurait violé l'article 843 du même code en ne recherchant pas si Ferdinand X... n'avait pas eu l'intention, par la vente du 6 août 1973, de consentir à son fils Donat une libéralité dispensée du rapport et alors qu'enfin elle n'aurait pas répondu aux conclusions de Donat X... faisant valoir que cette donation devait s'imputer sur la quotité disponible et que le testament de Ferdinand X... ne pouvait s'exécuter que dans la mesure où cette donation n'absorbait pas la quotité disponible ;

Mais attendu, d'abord, que l'article 1038 du Code civil ne s'applique qu'aux legs de corps certain et déterminé et non aux legs portant sur une universalité de biens ;

Et attendu, ensuite, que Donat X... s'était borné à contester à titre principal, que l'acte du 6 août 1973, constituât une libéralité déguisée à son profit et à soutenir à titre subsidiaire que cette libéralité ne pouvait être que de la différence entre la valeur réelle des biens vendus et le prix payé, sans s'expliquer aucunement sur le caractère préciputaire ou non de cette libéralité ; que c'est à bon droit, dès lors, que la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher l'existence d'une dispense de rapport non alléguée, a fait application de la présomption de rapport instituée par l'article 843 du Code civil ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen pris en ses diverses branches :

Attendu que les consorts X... reprochent encore à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné l'attribution préférentielle à Mme B... du deuxième étage de la maison de Landry et à Donat X... seulement celle du surplus de cette maison, alors que, d'une part, les juges du fond auraient méconnu les termes du litige en accordant à Donat X..., qui sollicitait l'attribution préférentielle de la totalité de cet immeuble considéré par lui comme impartageable, une attribution limitée à une partie de cet immeuble, alors que, d'autre part, en accordant cette attribution préférentielle ainsi limitée ils auraient validé le legs d'un bien de communauté qui, fait par Ferdinand X..., seul portait sur la chose d'autrui, alors que, troisième part, Mme B... ne pouvait prétendre à l'attribution préférentielle d'un bien dont son cohéritier était déjà copropriétaire par indivis pour une cause étrangère et antérieure à l'indivision successorale et alors, enfin, que la cour d'appel n'aurait pas répondu aux conclusions par lesquelles Donat X... soutenait que la nature complexe de l'indivision dans laquelle se trouve l'immeuble qui dépend à la fois d'une indivision conventionnelle et de plusieurs successions, faisait obstacle à l'exécution du testament de Ferdinand X... et ne conférait à Mme B... aucun droit de propriété sur une partie de l'immeuble litigieux ;

Mais attendu que sans méconnaître les termes du litige la cour d'appel a décidé, par une appréciation souveraine des intérêts en présence, que Mme B... pouvait, en sa qualité d'héritière copropriétaire, prétendre à l'attribution préférentielle de la partie de l'immeuble servant à son habitation ; que la circonstance que l'immeuble dépend d'une indivision de nature à la fois conventionnelle et successorale ne fait pas obstacle à l'attribution préférentielle ; que l'arrêt attaqué est légalement justifié et que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 84-14793
Date de la décision : 18/11/1986
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° TESTAMENT - Legs - Révocation - Vente de la chose léguée - Conditions - Legs de corps certain et déterminé.

1° L'article 1038 du Code civil, relatif à la révocation d'un legs par aliénation de la chose léguée, ne s'applique qu'aux legs de corps certain et déterminé et non aux legs portant sur une universalité de biens. .

2° DONATION - Rapport à la succession - Dispense - Volonté du donateur - Recherche d'office par le juge - Nécessité (non).

DONATION - Rapport à la succession - Dispense - Volonté du donateur - Preuve - Charge - Donataire * SUCCESSION - Rapport - Dispense - Libéralité préciputaire - Conditions.

2° Ayant retenu que la vente faite par un père à l'un de ses enfants constituait une donation indirecte, et le bénéficiaire ne s'étant pas expliqué dans ses conclusions sur le caractère préciputaire de cette libéralité, une cour d'appel n'a pas à rechercher l'existence d'une dispense de rapport non alléguée et fait à bon droit application de la présomption de rapport instituée par l'article 843 du Code civil.


Références :

Code civil 1038

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 27 décembre 1983


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 nov. 1986, pourvoi n°84-14793, Bull. civ. 1986 I N° 273 p. 261
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1986 I N° 273 p. 261

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :Mme Flipo
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Barat
Avocat(s) : Avocats :la SCP Nicolay et la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:84.14793
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