CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Marie,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Chambéry, Chambre correctionnelle, en date du 19 septembre 1985, qui, pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique en état de récidive, a ordonné l'annulation de plein droit de son permis de conduire, a fixé à dix-huit mois le délai avant l'expiration duquel il ne pourrait solliciter un nouveau permis de conduire et l'a condamné à 2 500 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 58 du Code pénal, L. 12, L. 14, L. 15 du Code de la route, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a notamment prononcé l'annulation du permis de conduire de X... ;
" aux motifs que le 31 mars 1984, les gendarmes de Douvaine ont constaté que X... circulait sans avoir attaché sa ceinture de sécurité ; qu'après contrôle de son permis de conduire, ils ont constaté qu'en infraction avec les mentions de ce permis il ne portait ni verres correcteurs ni lentilles de contact ; qu'ils l'ont donc soumis à un dépistage alcoolique et qu'un prélèvement sanguin a révélé un taux d'imprégnation de 1, 58 gramme ; qu'ayant constaté que le conducteur ne portait ni verres correcteurs ni lentilles de contact, les gendarmes étaient en droit de considérer qu'il était " présumé " conduire son véhicule en infraction aux dispositions de l'article L. 12 du Code de la route, elles-mêmes comprises dans l'énumération fixée à l'article L. 14 dudit Code ; que les agents verbalisateurs étaient donc parfaitement habilités à procéder au dépistage d'imprégnation alcoolique ; que le prévenu ayant été condamné le 11 octobre 1983 à 2 000 francs d'amende et à la suspension de son permis de conduire pendant trois mois pour conduite en état alcoolique, il se trouve donc en état de récidive, de sorte que l'annulation de son permis est encourue de plein droit ;
" alors, d'une part, que le défaut de port de verres correcteurs ou de lentilles de contact ne permettait pas légalement aux gendarmes de soumettre X... à un dépistage d'imprégnation alcoolique, d'où il suit que ce contrôle, irrégulièrement effectué, ne pouvait servir de base à la condamnation prononcée ;
" alors, d'autre part, que la condamnation retenue par la Cour d'appel, au titre du premier terme de la récidive, ne comportait pas l'emprisonnement ; qu'ainsi X... ne se trouvait pas légalement en état de récidive " ;
Sur la première branche :
Attendu qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles R. 127, R. 128 et R. 129 du Code de la route, de l'arrêté du 31 juillet 1975 et de celui du 24 mars 1981 que le préfet peut, à raison de certaines incapacités physiques, restreindre la validité du permis de conduire en la soumettant à diverses conditions et notamment au port de verres correcteurs ; qu'il s'ensuit que la conduite au mépris de ces restrictions de validité équivaut à la conduite sans obtention d'un permis valable ;
Attendu qu'en conséquence, contrairement à ce que soutient le moyen, les agents verbalisateurs étaient en droit, par l'application combinée des articles L. 1er-I, L. 12 et L. 14 du Code de la route, de soumettre le demandeur aux épreuves de dépistage et de vérification de l'état alcoolique ;
D'où il suit que la première branche du moyen doit être écartée ;
Mais sur la seconde branche :
Vu l'article 58 du Code pénal ;
Attendu qu'aux termes de l'article 58 susvisé du Code pénal, il n'y a récidive que si la peine résultant de la condamnation antérieure est celle de l'emprisonnement ;
Attendu qu'en déclarant X... en état de récidive et en ordonnant l'annulation de plein droit de son permis de conduire par application de l'article L. 15-II 1° du Code de la route, alors que la condamnation retenue au titre du premier terme de la récidive ne comportait pas l'emprisonnement, la Cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la Cour d'appel de Chambéry, en date du 19 septembre 1985, et pour qu'il soit à nouveau statué conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la Cour d'appel de Grenoble.