Sur le moyen unique :
Vu l'article 1351 du Code civil ;
Attendu que Mme X..., employée aux Charbonnages de France depuis 1969, mariée et mère d'un enfant, percevait au titre de l'arrêté ministériel du 25 mai 1965, pris en application du décret du 14 juin 1946 portant statut du personnel des exploitations minières, une prime de logement limitée à 60 % du montant de celle qui était servie aux hommes mariés ; qu'estimant cette réglementation discriminatoire, elle a réclamé un complément de prime pour la période du 25 décembre 1972, date d'entrée en vigueur de l'article L. 140-2 du Code du travail relatif à l'égalité des rémunérations entre les hommes et les femmes, au 1er juillet 1978, date à laquelle l'arrêté du 25 mai 1965 a été abrogé et remplacé avec effet au 1er juillet 1978 par de nouvelles dispositions issues d'un arrêté du 2 mai 1979 ;
Attendu que par un arrêt du 21 décembre 1978, la cour d'appel a décidé que l'appréciation de la validité des dispositions réglementaires appliquées par les Charbonnages de France soulevait une difficulté sérieuse, et a sursis à statuer jusqu'à ce que la question de la légalité de l'arrêté du 25 mai 1965 soit tranchée par la juridiction compétente ; que le Conseil d'Etat, saisi par Mme X... d'un recours en appréciation de la légalité du texte précité, a, par arrêt du 11 juin 1982, déclaré cette disposition illégale comme contraire à l'article 9 du décret du 14 juin 1946 portant statut du mineur consacrant l'égalité des rémunérations entre les hommes et les femmes ; que la cour d'appel, devant laquelle Mme X... avait fixé le point de départ de sa demande à son entrée en fonctions, l'en a déboutée aux motifs que l'arrêté non encore annulé présentait un caractère de légalité lorsque les Charbonnages de France l'ont appliqué ;
Attendu cependant, d'une part, que le Conseil d'Etat, dans son arrêt du 11 juin 1982, avait déclaré que l'arrêté du 25 mai 1965 qui accorde à tous les hommes mariés, quelle que soit la situation de leur conjoint, le bénéfice de la prestation de logement prévue par l'article 23 du décret du 14 juin 1946, n'avait pu légalement le réserver aux seules femmes mariées ayant un conjoint hors d'état de se livrer à une activité professionnelle et ne disposant pas de ressources suffisantes, ce dont il résultait que ce texte était illégal dès sa parution et ne pouvait être valablement ainsi appliqué par les Charbonnages de France ; que, d'autre part, toute déclaration d'illégalité d'un texte réglementaire par le juge administratif s'impose au juge civil, qui ne peut faire application d'un texte réputé n'avoir jamais existé ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 10 novembre 1983 entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles