La Cour :
Sur les deux moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 1ère chambre B., 18 mai 1984), que l'Union Fédérale des Consommateurs (l'U.F.C.) fit paraître sur une page de couverture de la revue qu'elle édite, intitulée Que choisir ? une photographie représentant trois médicaments produits par la Société des Laboratoires Beaufour (la société), accompagnée du commentaire suivant : "ces trois médicaments couramment prescrits pour traiter chez l'homme les troubles intestinaux et gastriques contiennent des fibres minérales qui provoquent des tumeurs et des cancers chez les rats" ; que ce commentaire renvoyait à une enquête publiée en pages intérieures sous le titre : "des fibres dangereuses dans certains médicaments. Nous demandons aux ministres concernés le retrait immédiat de ces produits" ; que fondant sa demande sur les articles 1382 et 1383 du code civil, la société a assigné l'U.F.C. ainsi que MM. X... et Y..., respectivement directeur de publication et rédacteur en chef de la revue Que Choisir ? en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir retenu la responsabilité de l'U.F.C. alors que, d'une part, en affirmant que les propos publiés par cette association reposaient sur une extrapolation tendancieuse de l'animal à l'homme et de l'injection à l'ingestion et présentaient sous l'apparence d'une certitude une simple hypothèse scientifique, la cour d'appel aurait dénaturé l'article litigieux qui, loin de contenir une condamnation péremptoire de ces médicaments, aurait pris soin d'assortir ses conclusions de réserves appropriées sur la valeur des expérimentations animales pratiquées par injections et alors que, d'autre part, en retenant que l'U.F.C. ne pouvait sans imprudence omettre de communiquer, pour observations préalables à la publication, les résultats de son enquête à la société, et en mettant ainsi à sa charge en dehors de tout débat judiciaire une obligation du respect du contradictoire, la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, alors, enfin, qu'elle aurait encore entaché son arrêt du même vice en reprochant à l'U.F.C. d'avoir manqué à l'obligation d'objectivité et de rigueur qui lui incombait, quand celle-ci agissant dans le cadre de sa mission qui consiste à avertir le public des risques accompagnant l'utilisation des produits mis dans le commerce, se serait bornée à exprimer un doute sur l'innocuité des produits litigieux ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que l'U.F.C. avait admis que l'expérimentation animale à laquelle elle s'était référée n'avait permis que de dégager une hypothèse scientifique, l'arrêt retient par une appréciation souveraine que cette association, en se livrant à une extrapolation de l'animal à l'homme et de l'injection à l'ingestion, avait présenté au public les résultats de cette expérimentation sous une forme qui prenait l'apparence d'une certitude et portait en termes péremptoires et tendancieux condamnation des trois médicaments comme étant dangereux, avait commis une faute entraînant sa responsabilité ; que de ces seules constatations et énonciations la cour d'appel, hors de toute dénaturation et abstraction faite d'un motif surabondant, a pu, justifiant légalement sa décision, déduire que l'U.F.C. avait commis une faute entraînant sa responsabilité ;
Par ces motifs, rejette.