Attendu, selon le jugement déféré, que M. X... a demandé à être déchargé de la taxe spéciale sur les véhicules d'une puissance fiscale supérieure à 16 CV immatriculés dans la catégorie des voitures particulières payée par lui au titre des années 1981 et 1982 en vertu des dispositions de l'article 1007 b du Code général des impôts, pour la fraction dépassant le montant de la taxe différentielle applicable aux véhicules les plus fortement taxés prévue par l'article 1007 a dudit code ; que M. X... a soutenu, à l'appui de sa demande, que la taxe spéciale constituait une mesure prohibée par les dispositions du Traité instituant la communauté économique européenne ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article R. 202-2 du Livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu qu'en vertu de ce texte les jugements des tribunaux de grande instance en matière de droits de timbre et de taxes assimilées sont rendus sur le rapport d'un juge fait en audience publique ;
Attendu que le jugement déféré, rendu en cette matière, ne porte nulle mention d'un rapport fait par un juge, et qu'il n'est établi par aucun autre élément que cette prescription légale ait été en fait observée ;
Et sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 95 du Traité instituant la Communauté économique européenne ;
Attendu que, pour débouter M. X... de sa demande, le jugement a retenu que la taxe litigieuse n'avait pas d'effet discriminatoire à l'égard des véhicules importés d'autres Etats membres de la Communauté, la taxe étant applicable dans les mêmes conditions aux véhicules fabriqués par les producteurs français et étrangers et la construction de voitures imposables résultant d'un choix commercial et non d'une obligation ;
Attendu que, par arrêt rendu le 9 mai 1985, la Cour de justice des communautés européennes, saisie d'une question d'interprétation du traité instituant la communauté économique européenne par une juridiction française appelée à apprécier la compatibilité de la taxe litigieuse avec les dispositions du Traité, a décidé que l'article 95 de ce traité interdit de soumettre les voitures dépassant une certaine puissance fiscale à une taxe spéciale fixe dont le montant est plusieurs fois le montant le plus élevé de la taxe progressive qui doit être acquittée pour les voitures n'atteignant pas cette puissance fiscale, lorsque les seules voitures frappées par la taxe spéciale sont des voitures importées, notamment d'autres Etats membres ;
Attendu que la taxe instituée par l'article 1007 b du code général des impôts est une taxe spéciale dont le montant n'est pas déterminé selon un barème progressif mais, au contraire, est fixé à une somme forfaitaire unique constituant une charge spécifique qui, par son importance, peut influer sur le choix des consommateurs entre des véhicules dont la puissance fiscale se situe soit en dessous soit en dessus du seuil fixé pour l'application de cette taxe ; que, dès lors, ladite taxe, frappant les seules voitures importées en France, notamment d'autres Etats membres de la Communauté, comme cela résulte des énonciations du jugement, tombe sous le coup de la prohibition découlant du Traité tel qu'interprété par la Cour de justice ;
Attendu qu'il s'ensuit qu'en statuant ainsi qu'il l'a fait, le tribunal a violé l'article 95 du Traité susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux autres branches du moyen.
CASSE et ANNULE le jugement rendu le 10 avril 1984, entre les parties, par le Tribunal de grande instance de Saint Brieuc ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le Tribunal de grande instance de Rennes