REJET du pourvoi formé par :
- X... (Abdelrahmane), inculpé d'homicides volontaires,
contre un arrêt de la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Nîmes, en date du 6 juin 1984, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction rejetant sa demande de mise en liberté.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 135-1 alinéa 2, 172 et 591 du Code de procédure pénale,
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté de l'inculpé placé sous mandat de dépôt le 9 mai 1984 ;
" aux motifs que l'inculpé ayant répondu au juge d'instruction qu'il choisirait ultérieurement un avocat, celui-ci ne pouvait le faire comparaître à nouveau dans le délai de cinq jours pendant lequel il n'avait ni fait connaître le nom de son conseil, ni demandé la désignation d'un avocat que quinze jours plus tard ;
" aux motifs, d'autre part, que les faits reprochés à X... sont particulièrement graves ; que sa mise en liberté lui permettrait de se soustraire très aisément à la justice française en raison de sa nationalité étrangère ;
" alors que l'article 135-1 du Code de procédure pénale impose au juge d'instruction, qui a placé en détention un inculpé entendu hors la présence d'un avocat, d'entendre celui-ci dans un délai maximum de cinq jours, qu'il soit ou non assisté d'un conseil ; que la méconnaissance, par le juge d'instruction, de cette obligation, a entraîné la caducité du mandat de dépôt et qu'il appartenait à la Chambre d'accusation de constater cette caducité et d'ordonner la mise en liberté de l'inculpé ;
" et alors que la décision ordonnant la mise ou le maintien en détention doit être spécialement motivée d'après les éléments de l'espèce par référence aux dispositions de l'article 144 du Code de procédure pénale ; que ni la gravité des faits ni le fait d'être de nationalité étrangère ne sont prévus par l'article 144 pour justifier la détention ; qu'ainsi la détention de l'inculpé n'est pas légalement justifiée " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction rejetant la demande de mise en liberté de X..., poursuivi pour homicides volontaires, la Chambre d'accusation relève " qu'ayant été entendu, sur procès-verbal de première comparution, le 9 avril 1984 " l'intéressé, " après ses déclarations spontanées et sur avis du juge à son droit de choisir un conseil ou d'en demander un d'office " a répondu : " Je réfléchirai sur le choix d'un avocat " ; que ledit procès-verbal énonce " nous avisons l'inculpé que la loi nous autorise à le placer en détention provisoire, qu'il a le droit à l'assistance d'un conseil avec qui il peut communiquer librement et qui peut consulter sur-le-champ le dossier " ;
Attendu que de ces éléments la même juridiction déduit " que l'avis de l'article 135-1 du Code de procédure pénale a bien été donné à l'inculpé qui n'a pas répondu " ; qu'elle estime " qu'ayant aussitôt avant déclaré, en réponse à l'avis prescrit par l'article 114, qu'il choisirait ultérieurement un avocat, le magistrat instructeur ne pouvait le faire comparaître à nouveau dans le délai de cinq jours pendant lequel il n'a ni fait connaître le nom de son conseil, ni demandé la désignation d'un avocat d'office, l'inculpé n'ayant fait connaître la constitution de Me Sorbin que le 24 avril, soit quinze jours plus tard ; qu'il suit de là que le mandat de dépôt est régulier ;
Attendu enfin que les juges soulignent " au fond que les faits reprochés à X... sont particulièrement graves ; que sa mise en liberté lui permettrait de se soustraire très aisément à la justice française en raison de sa nationalité étrangère " ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi la Chambre d'accusation n'a nullement méconnu les prescriptions de l'article 135-1 susvisé ; qu'en effet, c'est seulement si l'inculpé ne peut être assisté immédiatement par l'avocat qu'il a choisi ou qui a été désigné d'office que le juge d'instruction, s'il l'a placé en détention provisoire, est tenu de le faire comparaître à nouveau dans les cinq jours ; que tel n'est pas le cas lorsque l'inculpé a manifesté de manière non équivoque son intention de ne pas recourir à l'assistance immédiate d'un avocat ;
Attendu, d'autre part, qu'en l'état des motifs sus-énoncés la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que la Chambre d'accusation a statué, dans les conditions prévues par l'article 148 du Code de procédure pénale, par une décision spécialement fondée sur les éléments de l'espèce, ainsi que l'exige l'article 145 du même Code, et pour des cas limitativement énumérés par l'article 144 de ce dernier ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.