| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 juillet 1983, 82-92737

STATUANT SUR LE POURVOI DE :
- J..., PARTIE CIVILE,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, DU 16 JUIN 1982, QUI, DANS UNE POURSUITE CONTRE P... ET B... DU CHEF DE DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, A JUGE LE DELIT NON CARACTERISE ET L'A, EN CONSEQUENCE, DEBOUTE DE SA DEMANDE ;
VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 23 ET 29 ALINEA 1 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, MODIFIEE PAR L'ORDONNANCE DU 6 MAI 1944, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
" EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE NON CARACTERISE LE DELIT DE DIFFAMATION PUBLIQUE DANS LES TERMES D'UNE AFFICHE PREELECTORALE ;
" AU MOTIF QUE LES TERMES EMPLOYES DANS CETTE AFFICHE NE DEPASSENT PAS LES BORNES PERMISES PAR LA POLEMIQUE ELECTORALE ;
" ALORS D'UNE PART QUE LES IMPUTATIONS DIFFAMATOIRES SONT DE DROIT REPUTEES FAITES AVEC INTENTION DE NUIRE, QUE LA CIRCONSTANCE QU'UNE IMPUTATION DIFFAMATOIRE S'EST PRODUITE AU COURS D'UNE PERIODE ELECTORALE NE MODIFIE PAS LE CARACTERE LEGAL DE CES IMPUTATIONS, QUE SI L'INTENTION D'INFORMER ET D'ECLAIRER LES ELECTEURS EST UN FAIT JUSTIFICATIF DE LA BONNE FOI, IL SERAIT INSUFFISANT A LUI SEUL POUR FAIRE DISPARAITRE L'INTENTION COUPABLE ATTACHEE DE DROIT AUX IMPUTATIONS DIFFAMATOIRES ALORS MEME QU'ELLES SONT PUBLIEES LA PERIODE ELECTORALE, QUE L'ARRET ATTAQUE QUI NE CONSTATE PAS QUE LES IMPUTATIONS NE CONCERNAIENT QUE L'ACTIVITE PUBLIQUE DE LA PERSONNE MISE EN CAUSE, QU'ELLE AVAIT ETE FAITE DANS LES CONDITIONS ET DANS UN TEMPS PERMETTANT LA REPLIQUE ET QUE LES ACTES INCRIMINES ETAIENT OBJECTIVEMENT ET FIDELEMENT RAPPORTES, N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION AU REGARD DE L'ARTICLE 29 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
" ET ALORS D'AUTRE PART QU'IL RESULTAIT DES CONSTATATIONS MEMES DE L'ARRET ATTAQUE, QUE L'AFFICHE INCRIMINEE AYANT ETE DIFFUSEE DANS LA NUIT DU JEUDI 18 AU VENDREDI 19 JUIN 1981 ENTRE LE PREMIER ET LE SECOND TOUR DES ELECTIONS LEGISLATIVES DE 1981, LE SIEUR J... N'AVAIT PAS PU S'EXPLIQUER A TEMPS, QUE L'ARRET ATTAQUE A DONC VIOLE LE TEXTE SUSVISE ;
" ET SUR LES MOYENS RELEVES D'OFFICE, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 26 DE LA CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958, 467 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
LES MOYENS ETANT REUNIS ;
VU LESDITS ARTICLES, ENSEMBLE L'ARTICLE 53 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
ATTENDU QUE L'EXCEPTION PRISE DE LA VIOLATION PRETENDUE DE L'ARTICLE 26 ALINEA 2 DE LA CONSTITUTION DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE DU 4 OCTOBRE 1958 COMMANDE UNE DECISION IMMEDIATE SUR LES CIRCONSTANCES DE FAIT ET DE DROIT DANS LESQUELLES A ETE DELIVREE UNE CITATION VISANT UN MEMBRE DE L'ASSEMBLEE NATIONALE ;
QUE FAUTE D'UNE TELLE DECISION, IL POURRAIT S'ENSUIVRE UNE VIOLATION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES ;
ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL EST TENUE DE STATUER EN FONCTION DE L'ACTE QUI LA SAISIT ET DE LA NATURE DU JUGEMENT ENTREPRIS ;
QU'IL S'EN DEDUIT QUE LORSQUE LE JUGEMENT FRAPPE D'APPEL A DECLARE NUL L'EXPLOIT INTRODUCTIF D'INSTANCE, LA COUR D'APPEL, DANS L'HYPOTHESE OU ELLE INFIRME CETTE DECISION, DOIT STATUER SUR L'ACTION PUBLIQUE COMME SUR L'ACTION CIVILE ALORS MEME QUE SEULE LA PARTIE CIVILE AURAIT USE DE CETTE VOIE DE RECOURS ;
ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR LES MOTIFS PROPRES A JUSTIFIER SA DECISION ;
ATTENDU QU'IL APPERT DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE ET DES PIECES DE LA PROCEDURE QUE P..., CANDIDAT AUX ELECTIONS LEGISLATIVES, AURAIT A AIX-EN-PROVENCE " DIFFUSE ENTRE LES DEUX TOURS DU SCRUTIN ET PLUS PRECISEMENT DANS LA NUIT DU JEUDI 18 AU VENDREDI 19 JUIN 1981 ", UNE AFFICHE, IMPRIMEE PAR B..., QUI CONTENAIT TOUTE UNE SUITE D'ALLEGATIONS QUE SON UNIQUE ADVERSAIRE, J..., A JUGE COMME LE VISANT ET COMME PORTANT ATTEINTE A SON HONNEUR ET A SA CONSIDERATION ;
QUE PAR EXPLOITS EN DATE DES 19 JUIN ET 23 JUIN 1981, J... A RESPECTIVEMENT CITE A COMPARAITRE DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, POUR L'AUDIENCE DU JEUDI 25 JUIN 1981, P... ET B... POUR DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER, AYANT AINSI QUALIFIE LES FAITS ARTICULES, ET VISE LES ARTICLES 29 ALINEA 1 ET 32 ALINEA 1 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
QUE, PAR CONCLUSIONS DEPOSEES AVANT TOUTE DEFENSE AU FOND, LES PREVENUS ONT SOUTENU LA NULLITE DES CITATIONS, P..., ELU DEPUTE, POUR MECONNAISSANCE DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 26 ALINEA 2 DE LA CONSTITUTION, P... ET B... POUR VIOLATION DES ARTICLES 53 ET 57 ALINEA 2 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
QUE PAR JUGEMENT DU 19 NOVEMBRE 1981, LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL A DECLARE NULLES LES CITATIONS DES 19 ET 23 JUIN 1981 AU SEUL MOTIF QUE LA REGLE POSEE PAR L'ALINEA 2 DE L'ARTICLE 57 DE LA LOI PRECITEE, SUIVANT LAQUELLE, DANS LE CAS DE DIFFAMATION OU D'INJURES CONTRE UN CANDIDAT A UNE FONCTION ELECTORALE, LA CAUSE NE POURRA ETRE REMISE AU-DELA DU JOUR FIXE POUR LE SCRUTIN, ETAIT " IMPERATIVE " ET D'ORDRE PUBLIC, LAISSANT EN CONSEQUENCE SANS REPONSE LES AUTRES EXCEPTIONS SOULEVEES ;
QUE, SUR LE SEUL APPEL DE J..., LA COUR D'APPEL, PAR UN PREMIER ARRET DU 4 MARS 1982, A INFIRME LE JUGEMENT ENTREPRIS, AYANT JUGE QUE " L'INOBSERVATION DES DELAIS PREVUS PAR LES ARTICLES 54 ALINEA 2 ET 57 ALINEA 2 DE LA LOI SUR LA PRESSE, N'ETANT ASSORTIE D'AUCUNE SANCTION, N'ETAIT DONC PAS PRESCRITE A PEINE DE NULLITE " PUIS A RENVOYE LA CAUSE ET LES PARTIES A LA PLUS PROCHAINE AUDIENCE " A LAQUELLE IL SERAIT STATUE TANT SUR LE MOYEN PROPOSE PAR P... QUE SUR LE FOND " ;
QUE CET ARRET EST DEVENU DEFINITIF, N'AYANT PAS ETE FRAPPE DE POURVOI ET NOTAMMENT EN MEME TEMPS QUE LE POURVOI PORTANT SUR L'ARRET AYANT STATUE AU FOND, AUX TERMES DE L'ARTICLE 59 ALINEA 2 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 ;
ATTENDU QUE PAR L'ARRET ATTAQUE LA COUR A, D'UNE PART, OMIS DE REPONDRE AUX CONCLUSIONS DE PHILIBERT FONDEES SUR L'INOBSERVATION D'UN PRINCIPE CONSTITUTIONNEL QUI, A LA SUPPOSER FONDEE, ETAIT DE NATURE A CONDITIONNER LA VALIDITE DES POURSUITES ET, D'AUTRE PART, JUGE QUE " CONFORMEMENT AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 497 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, A DEFAUT D'APPEL DU MINISTERE PUBLIC ELLE NE POURRAIT STATUER QUE SUR L'ACTION CIVILE "
ALORS QU'AYANT INFIRME LE JUGEMENT ENTREPRIS QUI AVAIT DECLARE NULS LES EXPLOITS INTRODUCTIFS D'INSTANCE, ELLE SE DEVAIT DE STATUER EGALEMENT SUR L'ACTION PUBLIQUE FAUTE D'AVOIR USE DE SON POUVOIR D'EVOCATION ;
D'OU IL SUIT QUE, POUR AVOIR MECONNU LE SENS ET LA PORTEE DES TEXTES ET DES PRINCIPES CI-DESSUS RAPPELES, L'ARRET ATTAQUE ENCOURT LA CASSATION, SANS QU'IL Y AIT LIEU DE S'ATTACHER A L'ABSENCE TOTALE DE MOTIFS ALLEGUES, A JUSTE TITRE, PAR LE DEMANDEUR, COMME NE PERMETTANT PAS A LA COUR DE CASSATION D'EXERCER SON CONTROLE SUR LE BIEN-FONDE DE L'AFFIRMATION DES JUGES DU FOND, SELON LAQUELLE LES PROPOS LITIGIEUX N'AVAIENT PAS DEPASSE LES BORNES PERMISES PAR LA POLEMIQUE ELECTORALE ;
PAR CES MOTIFS ;
CASSE ET ANNULE DANS TOUTES SES DISPOSITIONS L'ARRET DU 16 JUIN 1982 DE LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE ;