| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 janvier 1983, 82-91345

STATUANT SUR LE POURVOI FORME PAR :
- X... RENE, PARTIE CIVILE,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE METZ, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, EN DATE DU 12 MARS 1982, QUI, DANS UNE PROCEDURE SUIVIE CONTRE Y... ELISEO, DES CHEFS DE CONTRAVENTION AU CODE DE LA ROUTE ET CONTRAVENTION DE BLESSURES INVOLONTAIRES, A LAISSE A SA CHARGE UNE PART DE RESPONSABILITE ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN INITIAL DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE R. 189 DU CODE DE LA ROUTE, DES ARTICLES 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
" EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE DEMANDEUR RESPONSABLE POUR MOITIE DE L'ACCIDENT QUI LUI ETAIT SURVENU ;
" AUX MOTIFS QU'IL RESULTE DES ELEMENTS DU DOSSIER QUE LA ROUTE PRESENTAIT DES DOS D'ANE ;
QUE Y... VENAIT DE FRANCHIR UN DOS D'ANE QUAND IL A VU DEVANT LUI DEUX CYCLISTES QUI ROULAIENT DE FRONT ;
QUE DES VOITURES ARRIVANT EN SENS INVERSE, IL N'A PU LES DEPASSER ;
QU'IL A FREINE SUR UNE DISTANCE DE 18,40 M POUR LA ROUE DROITE ET DE 23 M POUR LA ROUE GAUCHE, ET QU'IL N'A PU EVITER LE SECOND CYCLISTE QUI A ETE RENVERSE ET BLESSE ;
QUE X... RENE EXPLIQUE QU'IL ROULAIT EN FILE DERRIERE SON FILS ;
QUE TOUTEFOIS IL VENAIT DE SE PLACER A COTE DE LUI POUR LUI PARLER ET QU'IL REPRENAIT SA PLACE DERRIERE LUI QUAND IL A ETE HEURTE ;
QUE SELON L'ARTICLE R. 189 DU CODE DE LA ROUTE, LES CYCLISTES PEUVENT ROULER A DEUX DE FRONT SUR LA CHAUSSEE ;
QUE TOUTEFOIS ILS DOIVENT SE METTRE EN FILE SIMPLE DANS TOUS LES CAS OU LES CONDITIONS DE LA CIRCULATION L'EXIGENT ET, NOTAMMENT, LORSQU'UN VEHICULE VOULANT LES DEPASSER ANNONCE SON APPROCHE ;
QU'EN L'ESPECE, Y... ROULAIT A UNE VITESSE EXCESSIVE ALORS QU'IL ARRIVAIT AU SOMMET D'UN DOS D'ANE ET QU'IL N'A PAS ETE MAITRE DE SA VITESSE ;
QUE X... A COMMIS EGALEMENT UNE FAUTE EN CIRCULANT DE FRONT AVEC SON FILS ALORS QU'IL SE TROUVAIT SUR UNE ROUTE A DOS D'ANE ET QU'IL VENAIT PRECISEMENT DE FRANCHIR UN DOS D'ANE ;
QU'IL A ETE HEURTE PAR LA VOITURE AUTOMOBILE ALORS QU'IL COMMENCAIT A SE DECALER EN ARRIERE, ET QU'IL OCCUPAIT DONC ENCORE UNE PLACE SUR LA ROUTE QUI AURAIT ETE LIBRE S'IL S'ETAIT TROUVE EN FILE DERRIERE SON FILS ET SUR SA DROITE ;
QUE LA RESPONSABILITE DE L'ACCIDENT DOIT ETRE PARTAGEE ;
" ALORS, D'UNE PART, QUE LA DECISION ATTAQUEE QUI CONSTATE QUE Y... ROULAIT A UNE VITESSE EXCESSIVE NE CONSTATE PAS QU'IL AIT AVISE LE DEMANDEUR DE SON INTENTION DE LE DEPASSER ;
" ALORS, D'AUTRE PART, QUE LES CYCLISTES DOIVENT SE METTRE EN FILE SIMPLE LORSQUE LES CONDITIONS DE LA CIRCULATION L'EXIGENT, ET NON PAS LORSQUE LA TOPOGRAPHIE DES LIEUX L'EXIGE ;
QU'EN NE PRECISANT PAS LES CONDITIONS DE LA CIRCULATION D'OU SERAIT RESULTE QUE X... ET SON FILS AURAIENT DU ROULER EN FILE SIMPLE, LA DECISION ATTAQUEE MANQUE DE BASE LEGALE ;
" ALORS, EGALEMENT, ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE TOUTE DECISION DOIT ETRE MOTIVEE ;
QUE L'INSUFFISANCE DE MOTIFS EQUIVAUT AU DEFAUT DE MOTIFS ET QU'A SUPPOSER QUE LES JUGES DU FOND AIENT PU TENIR COMPTE DE LA CONFIGURATION DES LIEUX ET NON PAS SEULEMENT DES CONDITIONS DE LA CIRCULATION, ILS AURAIENT DU MOTIVER DAVANTAGE LEUR DECISION EN EXPLIQUANT POURQUOI LA PRESENCE DE DOS D'ANE IMPOSAIT AUX CYCLISTES DE ROULER EN FILE SIMPLE ;
" ALORS, ENFIN, QUE LES JUGES DU FOND SONT TENUS DE REPONDRE AUX CHEFS PEREMPTOIRES DES CONCLUSIONS DES PARTIES, ET QUE LE DEMANDEUR AVAIT SOUTENU DANS UN CHEF CLAIR ET PRECIS DE SES CONCLUSIONS QUI ONT CONSTITUE UN MOYEN PEREMPTOIRE QUE L'ACCIDENT SE SERAIT PRODUIT DE LA MEME FACON SI LE VEHICULE QUI PRECEDAIT Y... AVAIT ETE UNE VOITURE AUTOMOBILE ;
QU'EN NE S'EXPLIQUANT PAS SUR CE POINT, LA COUR D'APPEL A ENTACHE SON ARRET D'UN DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS QUI VICIE CELUI-CI ;
" ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE X..., QUI CIRCULAIT A BICYCLETTE SUR UN CHEMIN DEPARTEMENTAL, A ETE HEURTE PAR LA VOITURE DE Y... SURVENANT DERRIERE LUI ET A SUBI DES BLESSURES N'ENTRAINANT PAS UNE INCAPACITE DE PLUS DE TROIS MOIS ;
ATTENDU QUE POUR REFORMER LA DECISION DES PREMIERS JUGES QUI, APRES AVOIR CONSTATE QUE LES CONTRAVENTIONS REPROCHEES AU PREVENU ETAIENT AMNISTIEES, L'AVAIENT DECLARE ENTIEREMENT RESPONSABLE DES CONSEQUENCES DOMMAGEABLES DE L'ACCIDENT, ET POUR ORDONNER UN PARTAGE DE RESPONSABILITE, LA COUR D'APPEL RETIENT QUE SI Y... ROULAIT A UNE VITESSE EXCESSIVE EN ARRIVANT AU SOMMET D'UN DOS D'ANE ET N'A PAS ETE MAITRE DE SA VITESSE, X... A EGALEMENT COMMIS UNE FAUTE EN CIRCULANT DE FRONT AVEC SON FILS ALORS QU'IL VENAIT DE FRANCHIR UN DOS D'ANE ;
QU'IL A ETE HEURTE PAR LA VOITURE ALORS QU'IL COMMENCAIT A SE DECALER EN ARRIERE ET QU'IL OCCUPAIT ENCORE SUR LA ROUTE UNE PLACE QUI AURAIT ETE LIBRE S'IL S'ETAIT TROUVE EN FILE DERRIERE SON FILS ET SUR LA DROITE ;
ATTENDU QU'EN CET ETAT, LE MOYEN FAIT VAINEMENT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR MECONNU LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE R. 189 DU CODE DE LA ROUTE ;
QU'EN EFFET, SI LEDIT ARTICLE PRECISE QUE L'OBLIGATION FAITE AU CYCLISTES DE CIRCULER EN FILE SIMPLE S'APPLIQUE " NOTAMMENT " LORSQU'UN VEHICULE ANNONCE SON APPROCHE, LA PORTEE DE CETTE OBLIGATION EST BEAUCOUP PLUS LARGE PUISQU'ELLE S'IMPOSE DANS TOUS LES CAS OU LES CONDITIONS DE LA CIRCULATION L'EXIGENT ;
QUE LES JUGES D'APPEL ONT ESTIME A JUSTE TITRE QU'IL EN ETAIT AINSI LORSQUE LE PROFIL DE LA ROUTE RENDAIT LA CIRCULATION PLUS DANGEREUSE ;
QU'AYANT CONSTATE QUE L'IMPRUDENCE COMMISE PAR X...AVAIT CONCOURU A LA PRODUCTION DU DOMMAGE PAR LUI SUBI, ET ALORS QU'ILS N'AVAIENT PAS A S'EXPLIQUER SUR UN ARGUMENT DE LA PARTIE CIVILE DENUE DE PERTINENCE, ILS ONT SANS INSUFFISANCE JUSTIFIE LEUR DECISION ;
MAIS SUR LE MOYEN ADDITIONNEL DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 2, 3, 485, 520 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
" EN CE QUE LA COUR, APRES AVOIR INFIRME LA DECISION DES PREMIERS JUGES QUANT AU PARTAGE DE RESPONSABILITE ENTRE LE PREVENU ET LA VICTIME, A OMIS D'EVOQUER ET DE STATUER SUR LE PREJUDICE DE LA VICTIME ;
" ALORS QUE LES COURS D'APPEL DOIVENT EVOQUER ET STATUER AU FOND, CHAQUE FOIS QU'ELLES ANNULENT UN JUGEMENT POUR TOUTE AUTRE CAUSE QUE CELLE D'INCOMPETENCE, ET SONT TENUES ALORS DE STATUER COMME SI ELLES AVAIENT ETE JUGES DU PREMIER DEGRE ;
" VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE, PAR APPLICATION DE L'ARTICLE 520 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, LORSQUE LES TRIBUNAUX REPRESSIFS ONT STATUE AU FOND EN PREMIERE INSTANCE SUR L'ACTION CIVILE ACCESSOIREMENT A L'ACTION PUBLIQUE, LE PREMIER JUGE NE PEUT, APRES INFIRMATION DE SA DECISION, ETRE A NOUVEAU SAISI DE CE CHEF ET SE TROUVER AINSI EXPOSE A SE METTRE EN OPPOSITION AVEC LE JUGEMENT RENDU PAR LUI ;
ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE, TOUT EN DECLARANT REFORMER LE JUGEMENT DU TRIBUNAL D'INSTANCE, S'EST BORNE A DECIDER QUE LA RESPONSABILITE DE L'ACCIDENT DEVAIT ETRE PARTAGEE PAR MOITIE ENTRE Y... ET X... ET A OMIS DE SE PRONONCER SUR LA REPARATION DU DOMMAGE SUBI ;
QU'EN RENVOYANT AINSI IMPLICITEMENT LES PARTIES DEVANT LE TRIBUNAL, ALORS QU'IL LUI APPARTENAIT SOIT DE STATUER ELLE-MEME SUR CETTE PARTIE DU LITIGE, SOIT DE S'EN RESERVER LA CONNAISSANCE ULTERIEURE EN ORDONNANT TOUTE MESURE D'INSTRUCTION UTILE, LA COUR D'APPEL A MECONNU LE PRINCIPE CI-DESSUS RAPPELE ;
D'OU IL SUIT QUE LA CASSATION EST ENCOURUE ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE L'ARRET SUSVISE DE LA COUR D'APPEL DE METZ, EN DATE DU 12 MARS 1982, MAIS SEULEMENT EN CE QU'ELLE A IMPLICITEMENT RENVOYE L'AFFAIRE AUX PREMIERS JUGES POUR STATUER SUR LE MONTANT DES REPARATIONS CIVILES, ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE NANCY, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN CHAMBRE DU CONSEIL.