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22/01/1982 | FRANCE | N°79-94914

France | France, Cour de cassation, Assemblee pleniere, 22 janvier 1982, 79-94914


M. X... s'est pourvu en cassation contre un arrêt de la Cour d'appel d'Orléans en date du 12 décembre 1977 qui l'avait condamné à des peines d'amende ainsi qu'à des réparations civiles pour infractions à la législation du travail. Cet arrêt a été cassé le 10 janvier 1979 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation. La cause et les parties ont été renvoyées devant la Cour d'appel de Versailles qui, par arrêt en date du 26 novembre 1979, procédant dans la même affaire et entre les mêmes parties procédant en la même qualité, a statué dans le même sens que la Cour d'

appel d'Orléans et s'est fondée, en droit, sur des motifs qui sont en co...

M. X... s'est pourvu en cassation contre un arrêt de la Cour d'appel d'Orléans en date du 12 décembre 1977 qui l'avait condamné à des peines d'amende ainsi qu'à des réparations civiles pour infractions à la législation du travail. Cet arrêt a été cassé le 10 janvier 1979 par la Chambre criminelle de la Cour de cassation. La cause et les parties ont été renvoyées devant la Cour d'appel de Versailles qui, par arrêt en date du 26 novembre 1979, procédant dans la même affaire et entre les mêmes parties procédant en la même qualité, a statué dans le même sens que la Cour d'appel d'Orléans et s'est fondée, en droit, sur des motifs qui sont en contradiction avec la doctrine de l'arrêt de cassation. Un pourvoi en cassation ayant été formé contre l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles, l'attaquant par le même moyen que celui ayant provoqué la cassation de l'arrêt de la Cour d'appel d'Orléans, M. le Premier Président a, par ordonnance du 6 mai 1981, renvoyé la cause et les parties devant l'Assemblée plénière.

Le demandeur invoque, devant l'Assemblée plénière, le moyen unique de cassation suivant :

"Violation de l'article R. 260-2 du Code du travail, en ce que l'arrêt attaqué, après avoir déclaré le président-directeur général d'une société, poursuivi pour avoir fait travailler des salariés au cours de 14 dimanches, coupable d'infractions, commises sans état de récidive, à l'article L. 221-5 du Code du travail, lui a infligé, en répression, 95 amendes de 1000 francs chacune, au motif que chaque infraction devait être réprimée par autant d'amendes qu'il y avait eu d'emplois irréguliers de salariés, qu'il y ait ou non récidive, alors qu'en prévoyant seulement en cas de récidive le cumul pur et simple des peines contraventionnelles et, en tout autre cas, le prononcé d'un nombre d'amendes égal au nombre des travailleurs intéressés, l'article R. 260-2 a institué en la matière un système de répression spécial qui déroge au droit commun et selon lequel, s'il n'y a pas récidive, le nombre d'amendes prononcé, en cas de concours d'infractions, ne peut excéder le nombre de travailleurs intéressés ; qu'en prononçant autant d'amendes qu'il y avait d'emplois irréguliers de salariés et non de salariés intéressés, la Cour d'appel a violé le texte susvisé".

Ce moyen a été formulé dans un mémoire déposé au secrétariat-greffe de la Cour de cassation par Me Blanc, avocat de M. X.... Des mémoires en défense ont été produits par la société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de la Chambre syndicale patronale de l'Ameublement d'Orléans et du Loiret et par Me Jean-Guillaume Nicolas, avocat du syndicat des services du commerce C.F.D.T.. Des mémoires en réplique et en duplique ont été déposés par Me Blanc et par la société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et Liard.

Sur quoi, la Cour, statuant en Assemblée plénière, Sur le rapport de M. le Conseiller doyen Ledoux, les observations de Me Blanc, avocat de X..., de la société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat de la Chambre syndicale patronale de l'ameublement d'Orléans et du Loiret, de Me Jean-Guillaume Nicolas, avocat de l'union des syndicats des personnels du commerce et de la distribution et des services C.G.T., du syndicat des services du commerce C.F.D.T. et du syndicat du Commerce F.O., et les conclusions de M. le Premier Avocat général Cabannes, et après en avoir délibéré en la chambre du Conseil,

Sur la recevabilité de l'intervention de la Chambre syndicale patronale de l'Ameublement d'Orléans et du Loiret :

Attendu que ladite Chambre s'était constituée partie civile contre X... du chef d'infraction à l'article L. 221-5 du Code du travail ; que l'arrêt attaqué a déclaré son action irrecevable ; qu'elle ne s'est pas pourvue contre cette décision ; Qu'il s'ensuit que la Chambre syndicale patronale de l'Ameublement d'Orléans et du Loiret n'étant pas partie à l'instance en cassation, son intervention doit, dès lors, être déclarée irrecevable ; Déclare son intervention irrecevable ;

Vu les mémoires produits, Sur le moyen unique de cassation :

Vu l'article R. 260-2 du Code du travail, ensemble l'article R. 262-1 dudit code, Attendu qu'il résulte de l'article R. 260-2 alinéa 1er du Code du travail qu'en cas de poursuite unique embrassant plusieurs infractions aux dispositions relatives au repos hebdomadaire, visées par l'article R. 262-1 du même code, l'amende est appliquée autant de fois qu'il y a de personnes employées dans des conditions contraires aux prescriptions légales ; qu'aux termes du second alinéa du même texte, en cas de pluralité de contraventions entraînant les peines de la récidive, l'amende est appliquée autant de fois qu'il a été relevé de nouvelles infractions ;

Attendu qu'en prévoyant, en cas de récidive seulement, le cumul des peines contraventionnelles et, en tout autre cas, le prononcé d'un nombre d'amendes égal au nombre des personnes employées, ces dispositions ont institué, en la matière, un système de répression spécial qui déroge au droit commun et selon lequel, s'il n'y a pas récidive, le nombre d'amendes prononcées, en cas de pluralité d'infractions, ne peut excéder le nombre des personnes irrégulièrement employées ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement dont il adopte les motifs non contraires que X..., directeur général d'une entreprise commerciale, était notamment poursuivi pour avoir fait travailler des salariés au cours de 14 dimanches successifs, contrevenant ainsi, chaque fois, aux prescriptions de l'article L. 221-5 du Code du travail ; que ces infractions n'ont pas été commises en état de récidive ; que, pour chacun des dimanches considérés, les juges du fond ont relevé le nombre, allant de 5 à 12, des salariés intéressés, ainsi que l'identité de chacun d'eux ; qu'il découle de ces constatations que certains des mêmes salariés ont été irrégulièrement employés à plusieurs reprises et que, par suite, leur nombre global était nécessairement inférieur à 95, résultat de l'addition des relevés partiels établis à l'occasion de chaque infraction ;

Attendu que, pour condamner en cet état le prévenu à 95 peines d'amendes, tout en admettant que ce nombre était supérieur au nombre total des salariés ayant été en fait irrégulièrement employés, la Cour d'appel énonce que l'article R. 260-2 alinéa 1 du Code du travail ne déroge pas expressément au principe du cumul des peines contraventionnelles en cas de cumul d'infractions et qu'il faut comprendre ce texte comme ayant voulu appliquer à chaque faute pénale distincte une sanction distincte consistant en autant d'amendes qu'il y a de salariés intéressés ; Attendu cependant qu'en prononçant ainsi des peines dont le nombre excède celui qui est fixé en la matière par un texte spécial, la Cour d'appel a violé les dispositions susvisées ainsi que le principe de l'application restrictive de la loi pénale ;

Par ces motifs :

Casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Versailles le 26 novembre 1979 dans ses seules dispositions ayant condamné le demandeur à 95 amendes pour les infractions à l'article L. 221-5 du Code du travail commises hors l'état de récidive et dans celles de ses dispositions ayant alloué des réparations civiles à l'Union des Syndicats des Personnels du Commerce et de la Distribution et des Services (C.G.T.), du Syndicat des Services du Commerce (C.F.D.T.) et du Syndicat du Commerce (F.O.), toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Poitiers, à ce désignée par délibération spéciale prise en la Chambre du conseil ;


Synthèse
Formation : Assemblee pleniere
Numéro d'arrêt : 79-94914
Date de la décision : 22/01/1982
Sens de l'arrêt : Cassation partielle cassation

Analyses

TRAVAIL - Repos hebdomadaire - Infractions - Concours d'infractions - Peines - Amendes - Cumul - Limites - Nombre de personnes irrégulièrement employées.

En prévoyant, en cas de récidive seulement, le cumul des peines contraventionnelles et, en tout autre cas, le prononcé d'amendes égal au nombre de personnes employées, les dispositions de l'article R260-2 du Code du travail ont institué en matière d'infractions à la réglementation sur le repos hebdomadaire, un système de répression spéciale qui déroge au droit commun et selon lequel, s'il n'y a pas récidive, le nombre d'amendes prononcées, en cas de pluralités d'infractions, ne peut excéder le nombre des personnes irrégulièrement employées (1).


Références :

Code du travail R260-2

Décision attaquée : Cour d'appel Versailles (Chambre correctionnelle 7), 26 novembre 1979

(1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1978-12-04 Bulletin Criminel 1978 N. 341 p. 893 (CASSATION). (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1978-12-04 Bulletin Criminel 1978 N. 343 p. 899 (REJET). (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1979-01-10 Bulletin Criminel 1979 N. 19 p. 56 (CASSATION). (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1979-10-15 Bulletin Criminel 1979 N. 280 p. 759 (CASSATION). (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1981-01-07 Bulletin Criminel 1981 N. 6 p. 19 (CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI)


Publications
Proposition de citation : Cass. Ass. Plén., 22 jan. 1982, pourvoi n°79-94914, Bull. civ. Criminel Cour de Cassation Assemblée plénière N. 25
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Criminel Cour de Cassation Assemblée plénière N. 25

Composition du Tribunal
Président : P.Pdt M. Schmelck
Avocat général : P.Av.Gén. M. Cabannes
Rapporteur ?: Rpr M. Ledoux
Avocat(s) : Av. Demandeur : M. Blanc

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1982:79.94914
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