Vu le mémoire produit ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, pris de la violation des articles 502, 562 bis, 1568 et 1791 du code général des impôts, ensemble violation des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut, insuffisance et contradiction de motifs, défaut de réponse aux conclusions, manque de base légale ;
En ce que l'arrêt attaqué a renvoyé X... Ignace des fins de la poursuite fiscale ;
Aux motifs qu'il n'était pas établi que le débit exploité par ce prévenu constituât un établissement distinct de celui exploité par son frère ; qu'aucune modification n'avait été apportée par les intéressés tant à la disposition des locaux qu'au mode d'exploitation adopté par le précédent propriétaire ; que l'administration ne leur avait jamais reproché ce mode d'exploitation avant d'exercer les présentes poursuites ;
Alors que, d'une part, ayant constaté que chacune des deux salles dont la dénomination n'était pas la même avait sa propre entrée, l'accès au " Casanova " et au " Nasa " se faisant, au demeurant, à partir de voies publiques différentes ; que la communication intérieure entre les deux salles était précaire (un verrou de sécurité étant placé sur la porte de l'escalier les reliant) ; qu'un droit d'entrée était exigé des clients du " Nasa " ; que les personnes fréquentant les deux salles différaient par l'âge et l'origine raciale ; que la comptabilité et la gestion du " Nasa " d'une part et du " Casanova " d'autre part, étaient distinctes, tous éléments caractéristiques de l'autonomie de chacun d'eux, les juges du fond, qui se sont bornés à relever que les tarifs étaient identiques et qu'une seule déclaration de résultat était souscrite auprès de l'administration, n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations ;
Et alors, d'autre part, que la circonstance selon laquelle les frères X... s'étaient abstenus de modifier la disposition des locaux et le mode d'exploitation adopté par le précédent propriétaire n'était pas de nature à décharger le prévenu de la responsabilité qu'il encourait pour avoir personnellement exploité un débit de quatrième catégorie sans déclaration préalable ni paiement des droits, pas plus, d'ailleurs, que le fait que l'administration aurait toléré cette situation depuis plusieurs années ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, s'il appartient aux juges du fond de décider souverainement du point de savoir si deux débits de boissons installés dans un même immeuble constituent un débit unique ou deux établissements, c'est seulement à la condition que les motifs de leur décision ne soient entachés ni d'insuffisance ni de contradiction, ni d'erreur de droit ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal, base des poursuites, auquel se réfère l'arrêt attaqué, que les frères X... ont acquis en 1967 un débit de boissons muni d'une licence de 4e catégorie à l'enseigne " Le Casanova ", qui comprenait un rez-de-chaussée à usage de café dancing et une cave aménagée pour le même usage ; que si les deux salles pouvaient communiquer par une porte intérieure, celle-ci était munie d'un verrou de sécurité ; qu'elles avaient chacune un accès distinct et que l'une d'elle a reçu une nouvelle dénomination " La Nasa " ; que, tout en n'ayant donné lieu qu'à une seule déclaration fiscale des revenus commerciaux, les prévenus étant associés de fait, la gestion des deux débits a été séparée, l'une étant assurée par X... Ignace et l'autre par son frère Blaise ; qu'il a été exigé un droit d'entrée seulement pour l'un des débits et que ces établissements ont été fréquentés par une clientèle d'un genre différent ;
Attendu que, pour relaxer les frères X... prévenus d'infractions fiscales d'ouverture d'un débit de boissons sans déclaration et sans paiement des droits, la Cour d'appel énonce que le changement à l'intérieur de la dénomination d'une des salles et l'existence d'une comptabilité et d'une gestion séparées, qui n'ont donné lieu qu'à une seule déclaration fiscale, ne suffisent pas à caractériser un dédoublement du fonds, que, malgré la perception d'un droit d'entrée à l'une des salles seulement, le tarif des consommations était identique ; que la clientèle, bien que de nature différente, pouvait librement accéder à l'une ou l'autre salle ; qu'il n'a été procédé à aucune transformation de l'aménagement intérieur et, que, dès lors, il n'y a pas eu ouverture illicite d'un deuxième débit de boissons ;
Mais attendu que l'arrêt n'a pu, sans se contredire ou sans mieux s'expliquer, constater, d'une part, que l'enseigne, l'accès et le droit d'entrée desdites salles étaient distincts, que leur gestion était séparée et que leur clientèle était d'un genre différent et considérer, d'autre part, qu'elles ne constituaient qu'un seul débit de boissons ; Qu'ainsi, en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
Casse et annule l'arrêt de la Cour d'appel de Douai, en date du 14 novembre 1979, mais seulement dans celles de ses dispositions qui ont débouté la direction générale des impôts de son action contre X... Ignace et X... Blaise, toutes autres dispositions étant expressément maintenues en l'absence d'un pourvoi du ministère public et, pour être statué conformément à la loi dans les limites de la cassation prononcée, Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel d'Amiens, à ce désignée par délibération spéciale prise en Chambre du conseil.