Sur le premier moyen, pris de la violation des articles L 521-1 du Code du travail, 7 de la loi du 20 avril 1810, 455 du Code de procédure civile, défaut de motifs, manque de base légale ; Attendu que des arrêts de travail inopinés de deux heures chacun ont été pratiqués les 6, 7, 11, 12, 17 et 18 mai 1976 à des heures variables par les ouvriers d'un atelier d'enduction organique de la société des Laminoirs à froid de Thionville ; qu'à chaque fois, sauf le 7 mai, la direction a reporté la reprise du travail au poste suivant ; que Baecher, Britner, Rodriguez, Zimmer, Antoniol et Klorek, ouvriers de cet atelier, ont été déboutés par le Conseil des prud"hommes de leurs demandes en payement des salaires ainsi perdus ;
Attendu qu'ils font grief au jugement attaqué d'avoir décidé que, selon les tribunaux, l'employeur peut toujours imposer la reprise du travail au poste suivant l'arrêt du travail inopiné de ses salariés, s'il est dans l'impossibilité de fournir un travail normal aux grévistes dès la fin de leur mouvement de protestation, alors que toute décision doit se suffire à elle-même et contenir des motifs propres à le justifier, et que la seule référence à la jurisprudence des tribunaux ne saurait répondre à cette condition ;
Mais attendu que le Conseil des prud"hommes ne s'est pas borné à se référer à la jurisprudence à laquelle il déclarait se rallier, mais en a indiqué le fondement ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;
Sur le second moyen, pris de la violation des articles 1134, 1184, 1315, 1341 du Code civil, L 521-1 du Code du travail, 7 de la loi du 20 avril 1810, 455 du Code de procédure civile, dénaturation des documents de la cause, renversement de la charge de la preuve, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ; Attendu qu'il est encore reproché aux juges du fond d'avoir décidé que la décision par l'employeur de reporter la reprise du travail au poste suivant ne constituait pas en l'espèce une atteinte au droit de grève des salariés, au seul motif que ceux-ci ne contestaient pas qu'à la fin de chaque arrêt de travail il n'était pas possible d'assumer la reprise immédiate d'un travail effectif de production, alors que, d'une part, la charge de la preuve de l'impossibilité de fournir du travail aux salariés pèse sur l'employeur, et qu'en relevant que les salariés ne contestaient pas l'impossibilité d'assumer la reprise du travail à la fin de chaque arrêt de travail pour justifier la mesure de lock-out prise par l'employeur, le tribunal a renversé la charge de la preuve, alors, d'autre part, que dans des conclusions laissées sans réponse, les salariés soutenaient que seule la force majeure était de nature à libérer l'employeur de son obligation de fournir du travail, et qu'en s'attachant uniquement à l'impossibilité de la reprise immédiate de la production sans caractériser la force majeure, le tribunal n'a pas légalement justifié sa décision, et alors enfin que le tribunal n'a pu sans se contredire et sans dénaturer les conclusions des salariés, faire état de ce qu'ils ne contestaient pas qu'à la fin de chaque arrêt de travail il n'était pas possible d'assumer la reprise d'un travail effectif ;
Mais attendu que les juges du fond, qui n'étaient pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, n'ont ni dénaturé les conclusions, ni renversé la charge de la preuve en relevant que les salariés ne contestaient pas l'impossibilité d'une reprise effective du travail avant la remise en service de la ligne à enduction ; qu'en constatant par une appréciation de fait, que la production et le travail ne pouvaient être repris dans des conditions normales avant la fin du poste, ils ont répondu aux conclusions dont ils étaient saisis et ont légalement justifié leur décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi formé contre le jugement rendu le 10 janvier 1977 par le Conseil de Prud"hommes de Thionville ;