| France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 février 1977, 75-91125

REJET DU POURVOI FORME PAR X... (OU Y...) (EMILE) CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE REIMS, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, EN DATE DU 20 MARS 1975, QUI L'A CONDAMNE POUR HOMICIDE INVOLONTAIRE A 300 FRANCS D'AMENDE AVEC SURSIS ET A DES REPARATIONS CIVILES.
LA COUR, VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION PAR FAUSSE APPLICATION DE L'ARTICLE 319 DU CODE PENAL, ENSEMBLE VIOLATION DES ARTICLES 459 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, AINSI QUE DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 ;
DEFAUT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS, ERREUR DE QUALIFICATION, INSUFFISANCE ET DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE DU DELIT D'HOMICIDE INVOLONTAIRE SUR LA PERSONNE DE JEAN-PIERRE Z...ET A MIS A SA CHARGE LES DEUX TIERS DE LA RESPONSABILITE DE SA MORT, SOLIDAIREMENT AVEC L'AUTEUR DE L'ACCIDENT, A...;
AUX MOTIFS QUE LES PREMIERS JUGES ONT EGALEMENT RETENU A L'EGARD DE X... SA RESPONSABILITE DANS LE DECES DE JEAN-PIERRE Z..., SA MALADRESSE ET SON INATTENTION FAUTIVES ;
PUISQU'IL A RECONNU QU'AVANT D'ALLER CHERCHER SON AMBULANCE, QU'IL AVAIT LAISSEE PRES DU CORPS DE LA DAME B..., IL ETAIT VENU PRES DE Z..., LUI AVAIT TATE LE POULS ET S'ETAIT RENDU COMPTE QU'IL N'ETAIT PAS MORT ;
QUE, DANS CES CONDITIONS, X... EST MAL VENU A REJETER SUR CEUX QUI L'AVAIENT GUIDE LA RESPONSABILITE RESULTANT DU FAIT QUE, PAR DEUX FOIS, SON VEHICULE EST PASSE SUR LES JAMBES DE Z...;
ALORS, D'UNE PART, QUE LES MOTIFS AVANCES PAR L'ARRET ATTAQUE POUR RETENIR LA CULPABILITE DU DEMANDEUR DU CHEF D'HOMICIDE INVOLONTAIRE SONT DENUES DE PERTINENCE ET NE REPONDENT PAS AUX CHEFS PEREMPTOIRES DES CONCLUSIONS DE LA DEFENSE ;
QU'AUCUNE INATTENTION NE PEUT ETRE MISE A LA CHARGE DU DEMANDEUR, QUI S'EST TROUVE SUR UNE ROUTE SANS ECLAIRAGE PUBLIC, DANS L'OBSCURITE TOTALE, AU MILIEU D'UNE FOULE DENSE QUI SE PRESSAIT AUTOUR DES ACCIDENTES, AVEC DES VOITURES STATIONNEES UN PEU PARTOUT ;
QUE LES CONCLUSIONS PRECISAIENT QU'IL NE VOYAIT PLUS LE BLESSE, NE DEVAIT ACCROCHER NI UNE VOITURE, NI QUELQU'UN DANS LA FOULE QUI LUI CACHAIT TOUT POINT DE REPERE ET QU'IL ETAIT BIEN OBLIGE DE SE FIER POUR SE DIRIGER AUX SIGNES QUE LUI FAISAIENT LES ASSISTANTS ;
QUE CE N'ETAIT PAS PARCE QU'IL AVAIT CONSTATE QUE Z...N'ETAIT PAS MORT QU'IL NE POUVAIT PAS SOUTENIR QUE LA RESPONSABILITE DE SA MANOEUVRE MALHEUREUSE INCOMBAIT A CEUX QUI L'AVAIENT GUIDE, COMME L'AFFIRME L'ARRET ATTAQUE, DE FACON INCOMPREHENSIBLE ;
QUE CE MOTIF SANS FONDEMENT NE REPOND PAS AU CHEF ESSENTIEL DE DEFENSE DU DEMANDEUR, RELATIF A L'IMPOSSIBILITE OU IL SE TROUVAIT DE VOIR LA VICTIME ET A L'OBLIGATION POUR LUI DE SUIVRE LES CONSEILS QUI LUI ETAIENT DONNES ET L'ONT ETE MALADROITEMENT ;
QU'EN OUTRE, LES MEMES CONCLUSIONS SOULIGNAIENT QUE LES GENDARMES, APPELES EN MEME TEMPS QUE LUI ET VENANT, COMME LUI, DE VOUZIERS, NE SONT ARRIVES QU'AU MOMENT OU L'AMBULANCE REPARTAIT POUR L'HOPITAL AVEC Z..., ALORS QUE LEUR PRESENCE AURAIT ETE INDISPENSABLE POUR ORGANISER UN SERVICE D'ORDRE ;
QU'IL EST PROFONDEMENT INJUSTE, DANS CES CONDITIONS, DE CONDAMNER LE DEMANDEUR, QUI S'EST TROUVE SEUL POUR SE DIRIGER, AVEC L'ASSISTANCE DE LA FOULE ET DONT LA SEULE FAUTE EST D'AVOIR ETE TROP DILIGENT, LA RAPIDITE DU SECOURS ETANT, CEPENDANT, VITALE POUR LE BLESSE ;
QUE LE DEFAUT DE REPONSE AUX ARGUMENTS PEREMPTOIRES DU DEMANDEUR EN FAVEUR DE SON IRRESPONSABILITE NE PEUVENT MANQUER D'ENTRAINER LA CASSATION DE L'ARRET ATTAQUE, CONFORMEMENT A LA JURISPRUDENCE CONSTANTE DE LA COUR SUPREME ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE LE RAPPORT D'AUTOPSIE N'A PAS ETABLI LE LIEN DE CAUSALITE ENTRE LE DECES DE Z...ET LES BLESSURES CAUSEES PAR LE DEMANDEUR ;
QU'IL SE BORNE A AFFIRMER, DE FACON CONTRADICTOIRE, TOUT D'ABORD QUE SES CHANCES DE SUCCES DEJA COMPROMISES ETAIENT, DE CE FAIT, PRATIQUEMENT REDUITES A ZERO, POUR CONCLURE QUE CES MEMES CHANCES DE SURVIE ONT ETE TRES REDUITES PAR CES NOUVELLES BLESSURES ;
QU'EN PRESENCE D'UNE TELLE CONTRADICTION IL ETAIT INDISPENSABLE QUE LE RAPPORT D'AUTOPSIE, COMME L'ARRET ATTAQUE, PRECISE LES RAISONS POUR LESQUELLES DE SIMPLES FRACTURES FERMEES DES MEMBRES INFERIEURS ETAIENT LA CAUSE DU DECES DU BLESSE, DEJA DANS LE COMA, APRES TRAUMATISME CRANIEN ET ABONDANTE PERTE DE SANG ;
QUE, FAUTE DE S'ETRE EXPLIQUE SUR LA RELATION DE CAUSE A EFFET ENTRE LES BLESSURES QUI PEUVENT ETRE IMPUTEES AU DEMANDEUR ET LA MORT DE Z..., L'ARRET ATTAQUE EST ENTACHE D'UNE INSUFFISANCE DE MOTIFS MANIFESTE ET LA CASSATION EST INEVITABLE ;
QU'EN TOUT ETAT DE CAUSE, IL N'Y A PAS DE COMMUNE MESURE ENTRE L'EFFET PROVOQUE PAR LA MANOEUVRE MALHEUREUSE DU DEMANDEUR ET CELUI RESULTANT DE LA FAUTE D'UN CONDUCTEUR EN ETAT D'IVRESSE, CIRCULANT, AU SURPLUS, A UNE VITESSE EXAGEREE ;
QUE, MEME SI L'ON ADMETTAIT, POUR LES BESOINS DE LA DISCUSSION, QU'UNE PART INFIME DE RESPONSABILITE PUISSE ETRE MISE A LA CHARGE DU DEMANDEUR, IL EST DE TOUTE EVIDENCE QUE LA CAUSE DETERMINANTE DU DECES DE Z...EST LE SEVERE TRAUMATISME CRANIEN SUBI, AINSI QUE L'HEMORRAGIE QUI A SUIVI LE CHOC AVEC LA FIAT DE A...;
QU'EN CONSEQUENCE, EN CONDAMNANT LE DEMANDEUR DANS LA MEME PROPORTION QUE CE DERNIER, DU CHEF D'HOMICIDE INVOLONTAIRE, LA COUR A COMMIS UNE ERREUR DE QUALIFICATION QUI, S'AJOUTANT AU DEFAUT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS CI-DESSUS DENONCE ET A L'INSUFFISANCE DE MOTIFS ENTACHANT SA DECISION, NE PEUT QU'ETRE REDRESSEE PAR LA CHAMBRE CRIMINELLE, QUI CASSERA L'ARRET ATTAQUE ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE AINSI QUE DU JUGEMENT AUQUEL IL SE REFERE POUR L'EXPOSE DES FAITS, QUE FRANCIS A..., CIRCULANT EN AUTOMOBILE, DE NUIT, A HEURTE PLUSIEURS PIETONS QUI MARCHAIENT SUR LE BORD DE LA CHAUSSEE ;
QUE L'UN DE CEUX-CI A ETE TUE, UN AUTRE, JEAN-PIERRE Z..., GRIEVEMENT BLESSE ;
QU'EMILE X..., ARRIVE QUELQUES INSTANTS PLUS TARD AVEC SON AMBULANCE, A CHERCHE A S'APPROCHER LE PLUS PRES POSSIBLE DU BLESSE QUI ETAIT ENCORE EN VIE AFIN DE LE MONTER DANS SON VEHICULE ;
QU'EN EXECUTANT CETTE MANOEUVRE IL EST PASSE DEUX FOIS AVEC LES ROUES DE LA VOITURE SUR LES JAMBES DU BLESSE ;
QUE CELUI-CI, TRANSPORTE A L'HOPITAL, Y EST DECEDE ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER X... COUPABLE D'HOMICIDE INVOLONTAIRE, TANDIS QUE A...ETAIT DE SON COTE RECONNU COUPABLE DU MEME DELIT COMMIS, EN OUTRE, EN ETAT D'IMPREGNATION ALCOOLIQUE, ET POUR DIRE LES DEUX PREVENUS SOLIDAIREMENT RESPONSABLES, DANS LA PROPORTION DES DEUX TIERS, DU DECES DE LA VICTIME A LA CHARGE DE LAQUELLE A ETE LAISSE UN TIERS DE RESPONSABILITE, LA COUR D'APPEL, EN DES MOTIFS PROPRES ET PAR CEUX DES PREMIERS JUGES QU'ELLE ADOPTE, RETIENT QUE SI X... A ETE GENE PAR L'OBSCURITE AINSI QUE PAR LA FOULE QUI SE MOUVAIT AUTOUR DES VICTIMES EN VOULANT LE GUIDER, IL A CEPENDANT COMMIS AU COURS DE SA MANOEUVRE UNE MALADRESSE ;
QUE CETTE MALADRESSE A EU POUR EFFET, PRECISENT LES JUGES, D'AGGRAVER L'ETAT DU BLESSE ET QU'ELLE A AINSI CONTRIBUE A PROVOQUER SON DECES ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS QUI FONT APPARAITRE UN LIEN DE CAUSALITE ENTRE LA FAUTE DU PREVENU ET LA MORT DE LA VICTIME, LA COUR D'APPEL A JUSTIFIE SA DECISION NON SEULEMENT SUR LA CULPABILITE MAIS AUSSI SUR L'ETENDUE DE LA RESPONSABILITE CIVILE DU DEMANDEUR ;
QU'EN EFFET, DANS SES RAPPORTS AVEC LA PARTIE CIVILE, L'AUTEUR D'UN DELIT, MEME S'IL N'EN EST PAS L'AUTEUR UNIQUE, EST TENU, EN VERTU DE L'ARTICLE 55 DU CODE PENAL, DE REPARER L'INTEGRALITE DU PREJUDICE QUI EN RESULTE, SOUS LA SEULE RESERVE DE LA PART DE RESPONSABILITE POUVANT INCOMBER A LA VICTIME ;
QUE LE MOYEN DOIT DES LORS ETRE ECARTE ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.