Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 122-12 du Code du travail ; Attendu que, selon ce texte, s'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ;
Attendu que, le 6 janvier 1975, la société L'Entreprise ferroviaire, qui cessait d'être adjudicataire le 1er mars suivant du marché de nettoyage de certains matériels de la SNCF, a informé Derraddji, qu'elle employait à cette tâche, qu'il aurait à se présenter à cette date au nouvel adjudicataire, la société L'Alsacienne ;
Attendu que, pour condamner L'Entreprise ferroviaire à payer à l'intéressé une indemnité compensatrice de préavis et à lui remettre un certificat de travail conforme, le jugement attaqué énonce que L'Entreprise ferroviaire et L'Alsacienne sont deux sociétés bien distinctes n'ayant aucune relation juridique, ni activité commune, que les débats n'avaient pas apporté la preuve que les travaux mis en adjudication étaient une concession contraignant le nouvel adjudicataire à continuer les contrats de travail en cours et que la société L'Alsacienne n'avait aucune obligation de reprendre Derradji ;
Attendu, cependant, que l'article L. 122-12 du Code du travail, destiné à assurer aux salariés la stabilité de leur emploi, doit recevoir application dans tous les cas où la même entreprise continue à fonctionner sous une directive nouvelle, peu important qu'il n'y ait entre les exploitants successifs ni lien de droit, ni activité commune, et que la forme juridique de l'exploitation soit diffférente ; d'où il suit que, en statuant comme il l'a fait, sans rechercher d'ailleurs si Derradji n'était pas, en fait, passé au service de la société L'Alsacienne à compter du 1er mars 1975, le Conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans les limites du moyen, le jugement rendu entre les parties le 3 juillet 1975 par le Conseil de prud'hommes de Mantes-la-Jolie ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties au même et semblable état où elles étaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le Conseil de prud'hommes d'Evreux.