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16/12/1975 | FRANCE | N°74-92059

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 décembre 1975, 74-92059


CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI FORME PAR V, PARTIE CIVILE, CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PAU, CHAMBRE DES APPELS CORRECTIONNELS, DU 5 JUIN 1974, QUI, DANS UNE POURSUITE POUR DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS DES PARTICULIERS ET APRES AVOIR RELAXE LES PREVENUS, A DEBOUTE LA PARTIE CIVILE DE SA DEMANDE. LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;

SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 29, 32, 35 BIS, 55 ET 56 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QU

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CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI FORME PAR V, PARTIE CIVILE, CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PAU, CHAMBRE DES APPELS CORRECTIONNELS, DU 5 JUIN 1974, QUI, DANS UNE POURSUITE POUR DIFFAMATION PUBLIQUE ENVERS DES PARTICULIERS ET APRES AVOIR RELAXE LES PREVENUS, A DEBOUTE LA PARTIE CIVILE DE SA DEMANDE. LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;

SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 29, 32, 35 BIS, 55 ET 56 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A RELAXE LES PREVENUS DES FINS DE LA POURSUITE ET DEBOUTE LA PARTIE CIVILE DE SES DEMANDES, AUX MOTIFS QU'EN CE QUI CONCERNE LE PREMIER GROUPE DE PROPOS INCRIMINES, RELATIFS A LA "PUBLICITE MENSONGERE" ET LA "MALHONNETETE INTELLECTUELLE", ILS NE CONTIENNENT PAS D'IMPUTATION D'UN FAIT PRECIS CARACTERISANT LA DIFFAMATION;

QU'EN EFFET, IL EST RARE QU'UN TRACT PUBLICITAIRE DE CE GENRE SOIT EXEMPT DE QUELQUE INEXACTITUDE SUSCEPTIBLE D'ETRE QUALIFIEE AVEC SEVERITE, QU'EN CE QUI CONCERNE LE DEUXIEME GROUPE DE PROPOS, LE RAPPROCHEMENT DES TERMES " ON VOUS VOLE" ET D'UNE ALLUSION AUX "VALETS POLITIQUES" QUI DEPOSSEDERAIENT LES OSSOLOIS DE LEURS PROPRIETES COMMUNALES PEUT S'INTERPRETER A LA LETTRE COMME LA REVELATION D'UNE CONFISCATION FRAUDULEUSE PERPETREE PAR DES PERSONNES SANS SCRUPULES DESIGNEES AVEC UNE RELATIVE PRECISION MAIS QUE CE TYPE D'OUTRANCE EST ACTUELLEMENT HABITUEL DANS LA POLEMIQUE, QUE NUL NE POUVAIT DONC, A LA LECTURE DU FACTEUR INCRIMINE, VOIR AUTRE CHOSE QU'UN PROPOS INJURIEUX ;

"ALORS QUE LA DIFFAMATION EST CONSTITUEE PAR L'IMPUTATION OU L'ALLEGATION D'UN FAIT DETERMINE DE NATURE A PORTER ATTEINTE A L'HONNEUR OU A LA CONSIDERATION QUE LA MAUVAISE FOI EST TOUJOURS PRESUMEE ET NE SAURAIT ETRE ECARTEE DES LORS QU'ON NE SE TROUVE PAS EN PRESENCE D'UNE CRITIQUE OBJECTIVE, QUE, D'AUTRE PART, LA VERITE DES IMPUTATIONS DIFFAMATOIRES NE PEUT ETRE PROUVEE QUE CONFORMEMENT AUX ARTICLES 55 ET 56 DE LA LOI DE 1881 ;

"ALORS, SUR LE PREMIER GROUPE DE PROPOS INCRIMINES, QUE L'IMPUTATION D'AVOIR PUBLIE UNE PLAQUETTE CONTENANT UNE PUBLICITE MENSONGERE ET CELLE D'AVOIR FAIT MONTRE D'UNE MALHONNETETE, AU MOINS INTELLECTUELLE, DANS LA FACON DE S'ETRE SERVI SANS PUDEUR DE L'IDEE DE PROTECTION DE LA NATURE, PORTENT SUR DES FAITS BIEN DETERMINES, CONTRAIRES A LA PROBITE, VOIRE PENALEMENT SANCTIONNES, QUE LA COUR L'A D'AILLEURS IMPLICITEMENT ADMIS EN INVOQUANT LA VERITE PARTIELLE SUPPOSEE DES IMPUTATIONS MAIS QU'AUCUN FAIT JUSTIFICATIF NE SAURAIT ETRE LEGALEMENT DEDUIT DE LA VERITE SUPPOSEE, SANS D'AILLEURS AUCUNE PRECISION, DE CERTAINES DES IMPUTATIONS DIFFAMATOIRES, LA PREUVE N'EN AYANT PAS ETE APPORTEE CONFORMEMENT A LA LOI ;

"ALORS, SUR LE DEUXIEME GROUPE DE PROPOS, QUE LA COUR N'A PU SANS CONTRADICTION, APRES AVOIR RECONNU QU'ILS CONTIENNENT L'IMPUTATION D'UN FAIT DETERMINE DE NATURE A PORTER ATTEINTE A L'HONNEUR OU A LA CONSIDERATION, DECLARER QU'ILS ETAIENT SEULEMENT INJURIEUX PAR DES CONSIDERATIONS INOPERANTES TIREES DES USAGES DE LA POLEMIQUE, DU BUT POURSUIVI ET DE L'OPINION DES LECTEURS, L'OUTRANCE RECONNUE DES PROPOS ETANT AU SURPLUS EXCLUSIVE DE TOUTE BONNE FOI" ;

VU LESDITS ARTICLES ;

ATTENDU QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 29 DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881 TOUTE ALLEGATION OU IMPUTATION D'UN FAIT QUI PORTE ATTEINTE A L'HONNEUR OU A LA CONSIDERATION DE LA PERSONNE A LAQUELLE CE FAIT EST IMPUTE EST UNE DIFFAMATION ;

ATTENDU QUE LA CITATION DELIVREE A LA REQUETE DE V "AGISSANT EN SA QUALITE DE PRESIDENT-DIRECTEUR DE LA SOCIETE A SA DONT L'OBJET ETAIT LA CREATION D'UNE STATION DE SPORT D'HIVER DANS LES PYRENEES, REPROCHAIT A L, C, H, V ET B, LA DISTRIBUTION D'UN LIBELLE QUI, APRES AVOIR IMPUTE AU REQUERANT LA PUBLICATION D'UNE REVUE " QUI SENT LA PUBLICITE MENSONGERE A PLEIN NEZ", EN AJOUTANT QUE CELUI-CI AVAIT "SANS AUCUNE PUDEUR" FAIT REFERENCE A LA PROTECTION DE LA NATURE, AU POINT QUE SE POSAIT UNE QUESTION DE "MALHONNETETE AU MOINS INTELLECTUELLE", INVITAIT LES LECTEURS A DENONCER CETTE "PUBLICITE SCANDALEUSE ET MENSONGERE" ET QUI D'AUTRE PART CONTENAIT LE PASSAGE SUIVANT, DIRIGE CONTRE LA SOCIETE A ET SES DIRIGEANTS ;

"ON VOUS TROMPE, ON VOUS VOLE;

DITES NON AUX PROMOTEURS ET A LEURS VALETS POLITIQUES QUI VOUS DEPOSSEDENT DE VOS PROPRIETES COMMUNALES, RECLAMEZ POUR OSSAU LES MILLIARDS QUE L'ETAT VEUT DONNER A UN PROMOTEUR PRIVE POUR LES ENGLOUTIR A SOUSSOUEOU";

ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A RELAXE LES PREVENUS ET DEBOUTE LA PARTIE CIVILE DE SA DEMANDE, AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE LES PREMIERES DE CES ATTAQUES NE CONTENAIENT L'IMPUTATION D'AUCUN FAIT PRECIS POUVANT CARACTERISER UNE DIFFAMATION ET QU'A SUPPOSER MEME QUE LA PUBLICITE FAITE PAR LA SOCIETE A AIT ETE ENTACHEE DE QUELQUE INEXACTITUDE, LES TERMES INCRIMINES N'EXCEDAIENT PAS LES LIMITES ADMISES EN MATIERE DE POLEMIQUE, ET QUE, D'AUTRE PART, SI LE DERNIER DES PASSAGES CI-DESSUS TRANSCRITS POUVAIT "S'INTERPRETER A LA LETTRE COMME LA REVELATION D'UNE CONFISCATION FRAUDULEUSE PERPETREE PAR DES PERSONNES SANS SCRUPULES DESIGNEES AVEC UNE RELATIVE PRECISION", L'OUTRANCE DES EXPRESSIONS UTILISEES S'EXPLIQUAIT PAR LA PASSION AVEC LAQUELLE LES PREVENUS S'ETAIENT ENGAGES DANS UNE "QUERELLE DESINTERESSEE" A SEULE FIN D'ASSURER LA "PROTECTION DES MILIEUX NATURELS", ET QU'AINSI "NUL NE POUVAIT VOIR" DANS LEDIT PASSAGE, "AUTRE CHOSE QU'UN PROPOS INJURIEUX" QUE LA JURIDICTION CORRECTIONNELLE, LIEE PAR LA QUALIFICATION DE DIFFAMATION, SEULE RELEVEE DANS LA CITATION, N'AVAIT PAS LE POUVOIR DE REPRIMER;

MAIS ATTENDU QUE S'IL EST VRAI QUE LES ECRITS OU LES PROPOS MOTIVANT DES POURSUITES POUR INJURE OU DIFFAMATION DOIVENT ETRE INTERPRETES SANS LES DETACHER DE LEUR CONTEXTE ET QUE, PAR SUITE, UNE CERTAINE OUTRANCE DANS L'EXPRESSION DE LA PENSEE PUISSE ETRE PARFOIS ADMISE, LA CIRCONSTANCE QUE LE LIBELLE INCRIMINE AIT ETE REDIGE ET DISTRIBUE A L'OCCASION D'UNE POLEMIQUE EMPREINTE DE PASSION, NE SAURAIT CEPENDANT JUSTIFIER LES APPRECIATIONS DE LA COUR D'APPEL, DANS LA PRESENTE ESPECE;

QUE L'IMPUTATION DIRIGEE CONTRE UNE PERSONNE D'AVOIR PUBLIE UN ECRIT CONTENANT UNE PUBLICITE MENSONGERE EST DIFFAMATOIRE, ALORS MEME QUE LE CARACTERE MENSONGER DE CETTE PUBLICITE N'EST PAS AUTREMENT PRECISE;

QUE LE FAIT AINSI IMPUTE CONSTITUE UN DELIT AU REGARD DE LA LOI PENALE ET PORTE, DES LORS, ATTEINTE, PAR LUI-MEME, A L'HONNEUR ET A LA CONSIDERATION DE LA PERSONNE VISEE;

QUE D'AILLEURS LA DIFFAMATION EST LEGALEMENT PUNISSABLE MEME LORSQU'ELLE EST FAITE SOUS FORME DUBITATIVE;

QUE, D'AUTRE PART, LE PASSAGE QUI REPRESENTE LA SOCIETE A ET SES DIRIGEANTS COMME "TROMPANT, VOLANT ET DEPOSSEDANT" AVEC L'AIDE DE "LEURS VALETS POLITIQUES" LES PROPRIETAIRES DE CERTAINS BIENS, RENFERME, LUI AUSSI, DES ALLEGATIONS ENTRANT DANS LES PREVISIONS DE L'ARTICLE 29, ALINEA 1ER, DE LA LOI DU 29 JUILLET 1881;

QU'AINSI L'ARRET ATTAQUE, DONT LES MOTIFS SONT D'AILLEURS ENTACHES DE CONTRADICTION, A MECONNU LES DISPOSITIONS DE CE TEXTE;

QUE DES LORS, LA CASSATION EST ENCOURUE ;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, MAIS SEULEMENT SUR LES INTERETS CIVILS, L'ARRET SUSVISE DE LA COUR D'APPEL DE PAU DU 5 JUIN 1974, ET, POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE : RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE TOULOUSE


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 74-92059
Date de la décision : 16/12/1975
Sens de l'arrêt : Cassation partielle cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESSE - Diffamation - Atteinte à l'honneur ou à la considération d'une personne - Imputation d'avoir publié un écrit contenant une publicité mensongère.

L'imputation dirigée contre une personne d'avoir publié un écrit contenant une publicité mensongère est diffamatoire, alors même que le caractère mensonger de cette publicité n'est pas autrement précisé.


Références :

LOI du 29 juillet 1881

Décision attaquée : Cour d'appel Pau (Chambre des appels correctionnels), 05 juin 1974

(1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1960-06-10 Bulletin Criminel 1960 N. 313 p. 636 (CASSATION) ET LES ARRETS CITES


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 déc. 1975, pourvoi n°74-92059, Bull. crim. N. 284 P. 749
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle N. 284 P. 749

Composition du Tribunal
Président : M. Chapar CAFF
Avocat général : M. Boucheron
Rapporteur ?: M. Mongin
Avocat(s) : Demandeur M. Boré

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1975:74.92059
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