SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU, SELON LES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE, QUE, PAR ACTE SOUS SEINGS PRIVES DU 25 JANVIER 1924, PIERRE DE Y... A DECLARE CEDER A SON EPOUSE SEPAREE DE BIENS, "EN PAIEMENT D'UNE SOMME DE 56 000 FRANCS" QU'IL LUI DEVAIT, 400 ACTIONS D'APPORT DE LA SOCIETE ANONYME D'EXPLOITATION AGRICOLE FLORALE ET IMMOBILIERE (SAFI);
QUE PIERRE DE Y... EST DECEDE LE 26 MARS 1944, ET SA VEUVE LE 26 JUILLET 1960, LAISSANT 3 ENFANTS, CHARLES, SIMONE, EPOUSE DE LA MOTTE-DE-MONTGAUBERT, ET RENEE, EPOUSE BROUCHOVEN DE BERGEYCK;
QUE L'ADMINISTRATEUR PROVISOIRE DE LA SUCCESSION DE PIERRE DE Y..., AINSI QUE CHARLES DE Y... ET DAME DE Z..., INVOQUANT LE CARACTERE FICTIF DE L'ACTE DU 25 JANVIER 1944, DEMANDERENT QUE LES 400 ACTIONS CEDEES EN VERTU DE CET ACTE FUSSENT RESTITUEES A LA SUCCESSION DE PIERRE DE Y... PAR LA SUCCESSION DE SON EPOUSE CONTRE REGLEMENT DES CREANCES QU'ELLES GARANTISSAIENT;
QUE L'ARRET ATTAQUE A FAIT DROIT A CETTE PRETENTION;
ATTENDU QU'IL EST D'ABORD FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL D'AVOIR ECARTE LA PRESCRIPTION DE L'ACTION EN DECLARATION DE SIMULATION COMME AYANT ETE SUSPENDUE ENTRE EPOUX JUSQU'A LA DATE DU DECES DU MARI, ALORS QUE, SELON LE MOYEN, LE BENEFICE DE LA SUSPENSION, PERSONNEL AUX EPOUX, NE SAURAIT ETRE INVOQUE PAR LEURS HERITIERS;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A DECIDE A BON DROIT QUE L'ACTION INTENTEE PAR L'ADMINISTRATEUR DE LA SUCCESSION ET LES HERITIERS DE PIERRE DE Y... EST CELLE QUI EXISTAIT DANS LE PATRIMOINE DU DEFUNT ET DOIT ETRE SOUMISE A LA MEME PRESCRIPTION ET AUX MEMES CAUSES DE SUSPENSION;
QUE LA SUSPENSION ENTRE EPOUX DE CETTE PRESCRIPTION JUSQU'AU 26 MARS 1944 PEUT DONC ETRE OPPOSEE AUX HERITIERS DE DAME DE Y..., COMME ELLE AURAIT PU L'ETRE A CELLE-CI;
QUE LE MOYEN EST SANS FONDEMENT;
SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR REFUSE DE FAIRE APPLICATION DE LA PRESCRIPTION DECENNALE PREVUE PAR L'ARTICLE 1304 DU CODE CIVIL, DANS SA REDACTION ANTERIEURE A LA LOI DU 3 JANVIER 1968, APPLICABLE EN LA CAUSE, ALORS QUE, SELON LE MOYEN, LA DECLARATION DE SIMULATION DEVAIT ABOUTIR A UNE ANNULATION, POUR ABSENCE DE CAUSE, DE TOUS LES ACTES ACCOMPLIS EN EXECUTION DE LA CESSION LITIGIEUSE ET QUE CETTE ANNULATION NE POUVAIT ETRE DEMANDEE QUE DANS LE DELAI DE DIX ANS;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL A RELEVE A BON DROIT QUE L'ACTION EXERCEE, QUI TENDAIT A FAIRE RECONNAITRE LE CARACTERE FICTIF DE L'ACTE OSTENSIBLE DU 25 JANVIER 1924 ET A DEMONTRER QUE LA LETTRE DE DAME DE Y... DU 6 FEVRIER 1924 REFLETAIT LA VOLONTE REELLE DES PARTIES, ETAIT UNE ACTION EN DECLARATION DE SIMULATION;
QU'IL EN RESULTE QUE CETTE ACTION ETAIT SOUMISE A LA PRESCRIPTION TRENTENAIRE A COMPTER DU JOUR DE L'ACTE ARGUE DE SIMULATION, ET NON A LA PRESCRIPTION DECENNALE PREVUE PAR L'ARTICLE 1304 DU CODE CIVIL, QUI NE CONCERNE QUE LES ACTIONS EN NULLITE RELATIVE;
QUE LE MOYEN N'EST DONC PAS MIEUX FONDE QUE LE PRECEDENT;
SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR ACCUEILLI, AU FOND, L'ACTION EN DECLARATION DE SIMULATION, ALORS QUE, D'UNE PART, DES LORS QUE LE MARI ETAIT, LE 25 JANVIER 1924, DEBITEUR DE SA FEMME, LA COUR D'APPEL N'AURAIT PU REMETTRE EN CAUSE L'EFFET EXTINCTIF DE LA DATION EN PAIEMENT CONSTATEE PAR L'ACTE PASSE A CETTE DATE, EN SE FONDANT SUR DES ACTES POSTERIEURS, ALORS QUE, D'AUTRE PART, LA COUR D'APPEL N'AURAIT PAS REPONDU AUX CONCLUSIONS PAR LESQUELLES LES EPOUX X... DE BERGEYCK FAISAIENT VALOIR QUE LES PRETENDUES CONTRE-LETTRES ETAIENT ELLES-MEMES FICTIVES, N'AVAIENT PAS DATE CERTAINE ET CONSTITUAIENT UNE DONATION DEGUISEE ENTRE EPOUX, ET ALORS QUE, ENFIN, EN QUALIFIANT SUCCESSIVEMENT DE DEPOT, PUIS DE GAGE LES OPERATIONS CORRESPONDANT AUX CONTRE-LETTRES, LES JUGES DU SECOND DEGRE N'AURAIENT PAS MIS LA COUR DE CASSATION EN MESURE D'EXERCER SON CONTROLE SUR LA NATURE DE L'ACTE REEL;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, QUI A ESTIME SOUVERAINEMENT ET SANS SE CONTREDIRE QU'IL N'AVAIT "A AUCUN MOMENT ETE DANS L'INTENTION DES EPOUX DE TRANSFERER A DAME DE Y... LA PROPRIETE DES ACTIONS LITIGIEUSES QU'ELLE A DETENUES D'ABORD A TITRE DE DEPOT, PUIS A TITRE DE GAGE", A PU, POUR APPRECIER L'INTENTION DES PARTIES AU MOMENT DE L'ACTE, TENIR COMPTE DE DOCUMENTS POSTERIEURS;
QUE, EN ENONCANT QUE LES CONTRE-LETTRES POUVAIENT FAIRE FOI DE LEUR DATE ENTRE LES PARTIES MEME EN DEHORS DES CONDITIONS DE L'ARTICLE 1328 DU CODE CIVIL ET QU'EN 1905 PIERRE DE Y... ETAIT EN MESURE DE PAYER LA PROPRIETE APPORTEE ENSUITE A LA SOCIETE, CE QUI EXCLUAIT L'IDEE DE DONATION DEGUISEE, LA COUR D'APPEL A REPONDU AUX CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE, SANS QUE LE CHOIX ENTRE LA QUALIFICATION DE DEPOT ET CELLE DE GAGE PUT AVOIR UN INTERET POUR LA SOLUTION DU LITIGE;
QUE LE TROISIEME MOYEN NE SAURAIT DONC ETRE MIEUX ACCUEILLI QUE LES DEUX PREMIERS;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 15 NOVEMBRE 1973 PAR LA COUR D'APPEL DE REIMS.