CASSATION PARTIELLE SUR LE POURVOI FORME PAR LE FONDS DE GARANTIE AUTOMOBILE, CONTRE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL D'ORLEANS (CHAMBRE DES APPELS CORRECTIONNELS), EN DATE DU 25 FEVRIER 1974, QUI A MIS HORS DE CAUSE LA SOCIETE ANONYME ALBAGNAC ET FLORANGE COMME CIVILEMENT RESPONSABLE DE SON PREPOSE X... (CHRISTIAN), DECLARE COUPABLE D'HOMICIDE ET DE BLESSURES INVOLONTAIRES AVEC LA CIRCONSTANCE QU'IL CONDUISAIT UN VEHICULE A MOTEUR SOUS L'EMPIRE D'UN ETAT ALCOOLIQUE, ET CONDAMNE A DES REPARATIONS CIVILES. LA COUR, VU LES MEMOIRES PRODUITS TANT EN DEMANDE QU'EN DEFENSE ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 1384, ALINEA 5 DU CODE CIVIL ET 2 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
ENSEMBLE VIOLATION DES ARTICLES 459, 593 DU MEME CODE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810 ;
DEFAUT DE REPONSE AUX CONCLUSIONS, INSUFFISANCE ET DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A MIS HORS DE CAUSE LA SOCIETE ALBAGNAC ET FLORANGE, CITEE COMME CIVILEMENT RESPONSABLE DE SON PREPOSE X..., SANS MODIFIER LES INDEMNITES ALLOUEES, NI LE PARTAGE DE RESPONSABILITE INSTAURE PAR LE TRIBUNAL ;
AUX MOTIFS "QU'EN UTILISANT, DANS LA NUIT DU SAMEDI 12 FEVRIER AU DIMANCHE 13 FEVRIER ET, DONC, EN DEHORS DE SES HEURES DE SERVICE, LE VEHICULE DE SON EMPLOYEUR POUR TRANSPORTER CINQ DE SES CAMARADES ET EFFECTUER EN LEUR COMPAGNIE UNE RANDONNEE DE PLUS DE DEUX CENTS KILOMETRES, ALORS QU'UNE NOTE DE SERVICE DE LA SOCIETE ALBAGNAC ET FLORANGE, EN DATE DU 22 NOVEMBRE 1971, INTERDISAIT EXPRESSEMENT AUX CHAUFFEURS DE CETTE ENTREPRISE TOUT EMPLOI DES VEHICULES MIS A LEUR DISPOSITION POUR DES USAGES PERSONNELS, CHRISTIAN X... A MANIFESTEMENT COMMIS UN ABUS DE FONCTION, CARACTERISANT UNE FAUTE LOURDE A L'EGARD DE SON EMPLOYEUR ;
QUE, DANS CES CONDITIONS, CE DERNIER NE PEUT ETRE TENU POUR CIVILEMENT RESPONSABLE D'UN ACTE DOMMAGEABLE AYANT TROUVE SA CAUSE DANS UN ABUS DE FONCTIONS ;
ALORS, D'UNE PART, QUE LA RESPONSABILITE CIVILE DU COMMETTANT PEUT, SELON LA JURISPRUDENCE CONSTANTE DE LA CHAMBRE CRIMINELLE, ETRE RETENUE, MEME AU CAS D'ABUS DE FONCTIONS, SI L'ACTE DOMMAGEABLE N'EST PAS INDEPENDANT DU RAPPORT DE PREPOSITION UNISSANT LE PREVENU A SON EMPLOYEUR ;
QU'EN L'ESPECE, IL EST INCONTESTABLE QUE CHRISTIAN X..., QUI ETAIT AUTORISE PAR LA SOCIETE A UTILISER LE VEHICULE POUR SE RENDRE A SON TRAVAIL ET EN REVENIR, AVAIT MEME LA FACULTE DE LE GARER A SON DOMICILE PERSONNEL, AINSI QUE LE SOULIGNE LE DEMANDEUR DANS SES CONCLUSIONS ET QU'IL A TROUVE DANS SES FONCTIONS LA POSSIBILITE DE COMMETTRE L'ACTE DOMMAGEABLE ;
QUE CELUI-CI NE PEUT, DONC, ETRE DETACHE DU RAPPORT DE PREPOSITION LE LIANT A LA SOCIETE ALBAGNAC ET FLORANGE ;
QUE LA NOTE DE SERVICE DU 22 NOVEMBRE 1971 NE FIGURE PAS AU DOSSIER PENAL, CE QUI REND IMPOSSIBLE LE CONTROLE DE LA COUR DE CASSATION SUR LA LEGALITE DE LA DECISION RENDUE, SEULE L'INTERDICTION INVOQUEE AYANT RENDU POSSIBLE LA MISE HORS DE CAUSE DU COMMETTANT ;
QU'AU SURPLUS, UNE TELLE INTERDICTION EST LA REGLE IMPLICITE DANS TOUTE ENTREPRISE;
ET QUE, POUR AVOIR REFUSE DE RETENIR LA RESPONSABILITE CIVILE DE LA SOCIETE, L'ARRET ATTAQUE NE SAURAIT ECHAPPER A LA CASSATION, POUR ERREUR DE QUALIFICATION DES FAITS" ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE LE COMMETTANT EST CIVILEMENT RESPONSABLE DU DOMMAGE CAUSE PAR SON PREPOSE ;
SOIT QUE L'ACTE DOMMAGEABLE AIT ETE COMMIS PAR CE DERNIER DANS LES FONCTIONS AUXQUELLES IL ETAIT EMPLOYE, SOIT QUE CET ACTE SE RATTACHE AU LIEN DE PREPOSITION QUI UNIT LE PREPOSE A SON EMPLOYEUR ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE ET DU JUGEMENT QU'IL A CONFIRME EN SES DISPOSITIONS CIVILES QUE LA SOCIETE ALBAGNAC ET FLORANGE A MIS UNE CAMIONNETTE A LA DISPOSITION DE X... CHRISTIAN, CHAUFFEUR-LIVREUR A SON SERVICE, POUR EXERCER SES FONCTIONS, SE RENDRE A SON TRAVAIL ET EN REVENIR ;
QUE CE PREPOSE A UTILISE CE VEHICULE, LA NUIT, POUR FAIRE UNE PROMENADE AVEC CINQ DE SES CAMARADES ET QUE, SOUS L'EMPIRE D'UN ETAT ALCOOLIQUE, IL A MANQUE UN VIRAGE DANS UNE LOCALITE ET A DEFONCE LA DEVANTURE D'UN RESTAURANT ;
QU'AU COURS DE CET ACCIDENT, L'UN DE SES PASSAGERS A ETE TUE ET LES QUATRE AUTRES BLESSES ;
ATTENDU QUE POUR DECIDER QUE LA SOCIETE ANONYME ALBAGNAC ET FLORANGE N'ETAIT PAS CIVILEMENT RESPONSABLE DE SON PREPOSE, LA COUR D'APPEL A ENONCE QUE X... AVAIT FAIT DE LA CAMIONNETTE CONFIEE PAR SON EMPLOYEUR UN USAGE ABUSIF A DES FINS PERSONNELLES ET COMMIS UNE FAUTE EN TRANSGRESSANT LES DISPOSITIONS IMPERATIVES D'UNE NOTE DE SERVICE DE LADITE SOCIETE, EN DATE DU 22 NOVEMBRE 1971, SUIVANT LAQUELLE IL ETAIT EXPRESSEMENT INTERDIT AUX CHAUFFEURS DE L'ENTREPRISE TOUT EMPLOI A DES FINS PERSONNELLES DES VEHICULES MIS A LEUR DISPOSITION ;
MAIS ATTENDU QU'IL RESULTE DES CONSTATATIONS MEMES DE L'ARRET ATTAQUE QUE L'ACTE DOMMAGEABLE SE RATTACHAIT DIRECTEMENT AUX FONCTIONS EXERCEES PAR SON AUTEUR ET QUE CELUI-CI A TROUVE DANS L'EMPLOI QU'IL OCCUPAIT AU SERVICE DE SON COMMETTANT L'OCCASION ET LES MOYENS DE SA FAUTE ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE ACCUEILLI ;
PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL D'ORLEANS EN DATE DU 25 FEVRIER 1974, MAIS EN SES SEULES DISPOSITIONS METTANT HORS DE CAUSE LA SOCIETE ANONYME ALBAGNAC ET FLORANGE ET DECLARANT LEDIT ARRET OPPOSABLE AU FONDS DE GARANTIE AUTOMOBILE, LES AUTRES DISPOSITIONS ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES, ET, POUR ETRE STATUE A NOUVEAU, CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE : RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE BOURGES
