Sur le premier moyen :
Attendu que sur demande de Maurice X... et de Marcelle X..., épouse Y..., nés d'un premier mariage de dame Z..., en liquidation et partage de la succession de leur mère et sur demande de Z..., second mari de celle-ci, en délivrance des legs de quatre immeubles dont elle l'avait gratifié, l'arrêt attaqué, infirmant le jugement en ce qu'il avait limité le droit d'attribution de Z... à un seul immeuble, a dit qu'il pouvait retenir en nature et en totalité l'objet de la libéralité, sauf à récompenser les consorts X... au cas où cette libéralité excèderait le quart des biens successoraux, et avant dire droit, a donné à l'expert déjà commis mission de fixer la valeur des immeubles au jour de l'ouverture de la succession ;
Attendu que vainement Maurice X... et sa soeur soutiennent d'abord que la Cour d'appel n'aurait pu, pour attribuer ainsi à Z..., époux survivant de leur mère, la totalité des immeubles à lui légués, le considérer comme un successible au sens de l'article 866 du Code civil, alinéa 1er, alors qu'il se trouvait en concours avec eux, enfants ligitimes issus d'une première union ; qu'en effet, contrairement à leur prétention, le conjoint n'a pas seulement la qualité de successible lorsque, soit à défaut de tout parent au degré successible, ou d'enfants naturels, soit lorsque le défunt ne laisse comme héritiers que des parents au degré, successible dans l'une des deux lignes, paternelle ou maternelle, il vient à la succession, par application de l'article 767, en pleine propriété ; qu'aucun texte ne permet de lui contester cette qualité lorsqu'il se trouve en concours avec des héritiers réservataires et que la loi ne lui accorde sur la succession qu'un droit d'usufruit ; qu'il peut donc, non seulement se prévaloir des dispositions de l'alinéa deux de l'article 866 du Code civil, mais aussi, comme tout successible, de celles de l'alinéa premier ; qu'ainsi le premier moyen doit être rejeté ;
Mais, sur le second moyen :
Vu l'article 866 du Code civil ;
Attendu que ce texte, qui permet au successible bénéficiaire d'un "don ou legs d'un immeuble" fait sans obligation de rapport en nature et excédant la quotité disponible, de retenir en totalité l'objet de la libéralité, sauf récompense aux cohéritiers, constitue une disposition dérogeant, dans le but d'éviter le morcellement des propriétés au principe qui demeure de l'attribution de la réserve en nature et doit, en conséquence, être interprété restrictivement ; qu'il en résulte que le successible bénéficiaire d'un legs excédentaire portant non pas sur un immeuble, mais sur plusieurs immeubles ne formant pas un ensemble indivisible ne peut retenir l'objet de toute la libéralité ;
Attendu que l'arrêt attaqué a dit que Z... peut retenir en nature et en totalité les quatre immeubles à lui légués par son épouse sauf à indemniser les consorts X... en argent ou autrement, dans le cas où cette libéralité excèderait le quart des biens successoraux ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, sans avoir constaté que les biens litigieux constituent un ensemble immobilier indivisible et sans justifier l'exception légale au principe ci-dessus rappelé, la Cour n'a pas donné de base légale à sa décision,
Par ces motifs :
Casse et annule, mais seulement dans les limites du second moyen l'arrêt rendu entre les parties par la Cour d'appel de Paris le 17 mai 1952 et les renvoie devant la Cour d'appel d'Amiens.