Et d'abord sur la recevabilité de l'intervention formée devant la Cour de Cassation par l'Association nationale des Avocats :
Attendu qu'une partie, n'ayant pas figuré dans l'instance qui donne lieu au pourvoi, est recevable à intervenir devant la Cour de Cassation à la condition de justifier de circonstances exceptionnelles et de son intérêt ;
Attendu que l'Association, que ses statuts autorisent à "ester en justice pour y défendre les intérêts généraux de la profession lorsqu'ils seront lésés" est fondée à intervenir dans un litige relatif à un contrat de défense en justice dont les clauses retirent aux souscripteurs le libre choix de leurs avocats ; Que son intervention est donc recevable ;
Et statuant sur le pourvoi :
Sur le premier moyen :
Attendu que, contrairement à la prétention du pourvoi, la mention des qualités selon laquelle "la Cour, après avoir entendu aux audiences publiques des 25 mars, 22 avril et 13 mai 1953, en la lecture de son rapport écrit, M. le conseiller X..., chargé de suivre la procédure en leurs conclusions et plaidoiries Mes Y..., etc.", établit que la présentation du rapport a précédé les plaidoiries, conformément aux prescriptions de l'article 82 du Code de procédure civile ; que le moyen ne saurait donc être retenu ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il est fait grief à la Cour d'appel d'avoir accueilli en la cause l'intervention de l'Ordre des avocats à la Cour de Paris, alors que l'activité des sociétés de défense en justice et les contrats d'abonnement conclus par elles ne sont pas de nature à porter atteinte aux droits, prérogatives et privilèges des membres du Barreau et que, dès lors, le Conseil de l'Ordre n'était pas recevable à intervenir pour faire valoir la prétendue nullité de ces contrats ;
Mais attendu que les clauses auxquelles la Cour s'est référée à la Société seule l'organisation de la défense de ses adhérents en matière civile et pénale et la direction exclusive des procès ; qu'elle en a déduit qu'il était ainsi contrevenu "aux règles traditionnelles du libre choix et de l'indépendance des avocats" ; qu'ainsi, abstraction faite d'un motif critiqué par le pourvoi, mais surabondant, pris de ce que les sociétés de défense ne manqueront pas, dans l'avenir, d'avoir des avocats à leur solde, elle a justement décidé que l'intervention du Conseil de l'Ordre était recevable ; que le moyen n'est donc pas fondé ;
Sur le troisième moyen pris en ses deux branches :
Attendu que, selon le pourvoi, l'arrêt infirmatif attaqué aurait, à tort, prononcé la nullité des contrats litigieux qu'elle a considérés, en ce qui concerne la défense en justice, comme des contrats d'assurance, alors, d'une part, que les éléments constitutifs d'un tel contrat ne sont pas réunis en l'espèce, et d'autre part, que la nullité des clauses de défense en justice ne saurait affecter la convention entière ;
Mais attendu tout d'abord que la Cour a relevé, en la cause, l'existence d'un risque, constitué par le payement des frais d'avocat et d'avoué, événement futur et incertain et indépendant de la volonté des parties, risque que ne supprime pas la clause d'arbitrage, et dont la réalité n'est d'ailleurs pas entièrement méconnue par le pourvoi ; qu'elle a reconnu également l'existence du payement d'une "somme fixe et forfaitaire qui présente bien le caractère d'une prime" et d'une prestation d'assurance, représentée par "le remboursement des honoraires d'avocat et d'avoué" qui "constitue bien un dédommagement, et par suite une indemnité" ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu considérer sans dénaturation ni contradiction, que les dispositions susvisées constituaient une convention d'assurance et en prononcer la nullité pour inobservation des prescriptions du décret-loi du 14 juin 1938 ;
Attendu enfin que par une interprétation souveraine des contrats litigieux et de la commune intention des parties, les juges du second degré ont considéré que les autres clauses relatives à des prestations de services, n'étaient "que l'accessoire de la convention principale de défense aux procès qui est le but du contrat" ; que c'est donc à bon droit qu'ils les ont déclarées "atteintes par la nullité générale de la convention" qu'ainsi, le troisième moyen n'est pas mieux fondé que les deux premiers ;
D'où il suit que l'arrêt attaqué, qui est motivé, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 10 juin 1953 par la Cour d'appel de Paris.