Sur le premier moyen :
Vu l'article 1832 du Code civil ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, le contrat de société exige, comme conditions essentielles de sa formation, l'intention des parties de s'associer, des apports réciproques faits en vue de la constitution d'un fonds social, et la participation de chacun des associés aux bénéfices et aux pertes de l'entreprise ;
Attendu que l'arrêt attaqué constate "que de janvier 1919 jusqu'au jour du décès de X..., celui-ci et la dame Y... ont vécu en état de concubinage, et que la dame Y... a toujours passé pour l'épouse légitime de X... ; que ladite dame Y... a assuré seule la direction de l'Hôtel de la Boule-d'Or, traitant avec les fournisseurs, recevant la clientèle, dirigeant le personnel, établissant les menus des repas, alors que X..., qui se montrait parfois discourtois, voire grossier à l'égard de certains clients, vivait dans l'oisiveté et s'adonnait à la boisson ; qu'enfin la même dame Y... a aidé financièrement X... lorsque celui-ci a acheté l'Hôtel de la Boule-d'Or" ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations, la Cour d'appel a déclaré que, du mois de janvier 1919 et jusqu'au 2 juin 1943, il a existé entre X... et la dame Y... une société universelle de gains régie par la disposition de l'article 1838 du Code Civil et qu'en conséquence elle a décidé que ladite dame Y... a droit à la moitié de la valeur du fonds de commerce, de l'immeuble de la Boule-d'Or et des bénéfices réalisés au cours de cette société ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans relever de circonstances de fait d'où résulte l'intention qu'auraient eue les parties de mettre en commun tous les produits de leur activité et de participer aux bénéfices et aux pertes provenant du fonds social ainsi constitué, et alors que la seule cohabitation, même prolongée de personnes non mariées qui ont vécu en époux et se sont fait passer pour tels au regard du public, ne saurait donner naissance entre elles à une société, l'arrêt attaqué n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin d'examiner les deuxième et troisième moyens ;
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu entre les parties par la Cour d'Appel d'Angers le 10 avril 1946, et les renvoie devant la Cour d'Appel de Rennes.