Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...F...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 19 février 2014 par laquelle la directrice pédagogique de l'institut universitaire de technologie (IUT) de Saint-Denis de l'université Paris XIII l'a informée que son cours de droit du travail n'avait pas à figurer au programme du semestre 3 de la formation initiale du DUT " techniques de commercialisation ", ainsi que la décision du 9 octobre 2014 par laquelle le président de l'université Paris XIII l'a informée qu'elle devait rattraper, pendant l'année universitaire 2014-2015, les 24,5 heures équivalent travaux dirigés (HETD) d'enseignement qu'elle n'avait pas effectuées l'année précédente, et, d'autre part, de condamner l'IUT de Saint-Denis à lui payer les heures complémentaires résultant de l'annulation des décisions attaquées, à hauteur de 32,5 heures, soit la somme de 1 329,57 euros.
Par un jugement n°1411433 du 18 mai 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés respectivement le 13 juillet 2016, le 4 décembre 2017, le 11 janvier 2018 et le 8 mars 2018, MmeF..., représentée par Me Cattan-Derhy, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler ces décisions et de condamner l'IUT de Saint-Denis à lui payer les heures complémentaires, soit la somme de 1 329,57 euros ;
3° de condamner solidairement l'université Paris XIII et l'IUT à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi ;
4° de mettre à la charge de l'IUT et de l'université Paris XIII la somme de 4 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les deux décisions contestées font grief ;
- la décision du 19 février 2014 a été prise par une autorité incompétente dès lors que les statuts de l'IUT applicables ne prévoient pas l'existence des directeurs pédagogiques ; seul le chef du département était compétent en vertu de l'article 14 des statuts de 1991 ; à supposer que la décision ait été prise par le conseil de département, elle était illégale ;
- cette décision, qui relevait bien de la répartition des fonctions d'enseignement, a été prise en méconnaissance de l'article L. 952-4 du code de l'éducation et de l'article 7 du décret du 6 juin 1984 ;
- le cours du droit du travail qu'elle dispense fait partie du tronc commun du DUT " techniques de commercialisation " ; c'est donc à tort que le tribunal administratif a estimé que ce cours n'avait pas à être dispensé ;
- la décision en litige, qui a pour objectif de favoriser une enseignante membre du comité de pilotage, est entachée de détournement de pouvoir ; elle est intervenue pour des raisons politiques dans le cadre d'un conflit qui ne la concernait pas ;
- la décision du 9 octobre 2014 a également été prise par une autorité compétente ; elle a été prise par le président de l'université et non le directeur de l'IUT compétent en vertu de l'article 10 des statuts ;
- elle est illégale en ce qu'elle est fondée sur la décision du 19 février 2014, elle-même illégale, et sur un service prévisionnel prétendument irrégulier alors qu'il a été validé par le directeur de l'IUT ;
- la décision du 9 octobre 2014 a été prise au constat d'un sous-service qui est le fait de l'IUT, qui a supprimé son cours de droit du travail et ne lui a pas proposé de cours de remplacement alors que d'autres enseignants étaient en sur-service ;
- cette décision est entachée de détournement de pouvoir ;
- elle a réalisé, au cours de l'année 2014/2015, 32,5 heures dont elle doit être rémunérée à hauteur de 1 329,57 euros ;
- la faute de l'université à ne pas lui avoir proposé de cours de remplacement justifie que lui soit versée une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice subi ; l'université a avoué avoir commis cette faute dans ses propres écritures.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;
- l'arrêté du 3 août 2005 relatif au diplôme universitaire de technologie dans l'Espace européen de l'enseignement supérieur ;
- l'arrêté du 15 mai 2013 relatif à l'organisation des études conduisant au diplôme universitaire de technologie de certaines spécialités ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Cabon,
- les conclusions de Mme Bonfils, rapporteur public,
- les observations de MeB..., substituant Me Cattan-Derhy, pour MmeF..., et celles de MeA..., substituant MeC..., pour l'université Paris XIII.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courriel du 19 février 2014, MmeE..., directrice pédagogique, a informé MmeF..., maître de conférences à l'université Paris XIII, affectée à l'institut universitaire de technologie (IUT) de Saint-Denis, que son cours de droit du travail n'avait pas à figurer au programme du semestre 3 de la formation initiale du DUT " techniques de commercialisation ". Par ailleurs, par un courrier du 9 octobre 2014, le président de l'université Paris XIII a indiqué à Mme F...que, se trouvant en situation de sous-service au titre de l'année universitaire 2013-2014 pour un total de 24,5 heures équivalent travaux dirigés (HETD), elle devait rattraper ces heures d'enseignement sur l'année universitaire 2014/2015 et qu'en l'absence de rattrapage, il serait procédé à une retenue sur sa rémunération et à la suppression de sa prime d'enseignement et de recherche et lui a précisé en outre que la section disciplinaire compétente serait saisie si cette situation de sous-service se reproduisait au cours de l'année 2014-2015. Mme F...fait appel du jugement du 18 mai 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux courriers ainsi qu'à la condamnation de l'IUT de Saint-Denis à lui payer 32,5 heures complémentaires qu'elle estime avoir effectuées au cours de l'année universitaire 2014/2015, soit la somme de 1 329,57 euros. Elle demande en outre à la Cour de condamner solidairement l'université Paris XIII et l'IUT à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de la suppression de ses heures de cours de droit du travail.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le courriel du 19 Février 2014 :
2. En premier lieu, Mme F...soutient que le courriel du 19 février 2014 émane d'une autorité incompétente, les directeurs pédagogiques nommés par le directeur de l'IUT de Saint-Denis n'étant prévus ni par une disposition législative ou réglementaire, ni par les statuts particuliers de l'IUT.
3. Toutefois, d'une part, le directeur de l'IUT pouvait, en tant que chef des services placés sous son autorité, prendre les mesures nécessaires à leur bon fonctionnement. Il a donc compétemment pu procéder à la nomination de cinq directeurs pédagogiques ayant notamment pour mission de s'assurer du respect des procédures pédagogiques et administratives et de consigner tout dysfonctionnement au sein du département, dès lors que ces prérogatives n'étaient pas contraires aux dispositions législatives et réglementaires fixant les conditions d'organisation et de fonctionnement de l'IUT, y compris celles définissant les attributions des différents organes de l'institut. Ainsi, MmeE..., directrice pédagogique, était, en tout état de cause, compétente pour informer Mme F...de ce que le cours du droit de travail qu'elle dispensait ne figurait pas au programme de la formation au titre de laquelle elle intervenait et de ce que, en conséquence, cette erreur devait être corrigée.
4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 28 mars 2014, le directeur de l'IUT a indiqué que la direction de l'IUT " soucieuse de la bonne gestion de chacune des formations dispensées au sein du département et ayant été interpellée par Mme E... sur ce sujet prend totalement à son compte la responsabilité de cette décision de suspendre cette matière au sein de cette formation. ". Il ressort ainsi des termes de ce courrier que la décision de suspendre le cours de droit du travail assuré par Mme F...a été prise par le directeur de l'IUT. Dès lors qu'en vertu des dispositions de l'article L. 713-9 du code de l'éducation, le directeur de l'IUT a " autorité sur l'ensemble des personnels ", il était compétent pour prendre la décision contestée alors même que le chef de département est responsable, en vertu de l'article 14 des statuts de l'IUT, de l'organisation des études et de la pédagogie, et " participe à la gestion des personnels ". Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de suspension de cours en litige aurait été prise par une autorité incompétente doit être écarté.
5. En deuxième lieu, Mme F...soutient que la décision de suspendre le cours qu'elle assurait a été prise en méconnaissance tant de l'article L. 952-4 du code de l'éducation aux termes duquel : " La répartition des fonctions d'enseignement et des activités de recherche au sein d'un même établissement fait l'objet d'une révision périodique. Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs ont compétence exclusive pour effectuer cette répartition. ", que de l'article 7 du décret du 6 juin 1984 aux termes duquel : " III .- Dans le respect des principes généraux de répartition des services définis par le conseil d'administration en formation restreinte ou par l'organe en tenant lieu, le président ou le directeur de l'établissement arrête les décisions individuelles d'attribution de services des enseignants-chercheurs dans l'intérêt du service, après avis motivé, du directeur de l'unité de recherche de rattachement et du directeur de la composante formulé après consultation du conseil de la composante, réuni en formation restreinte aux enseignants. ".
6. Toutefois, la décision de suspendre le cours dispensé par Mme F...au motif qu'il ne figurait pas au programme de la formation pour laquelle la requérante intervenait n'a ni pour objet ni pour effet de procéder à la répartition des enseignements au sein de l'IUT, ou de répartir les services entre enseignants-chercheurs au sein de l'établissement. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 952-4 du code de l'éducation ou de l'article 7 du décret du 6 juin 1984 ne peut qu'être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 9 de l'arrêté du 3 août 2005 relatif au diplôme universitaire de technologie dans l'espace européen de l'enseignement supérieur : " (...) Pour chacune des spécialités du diplôme universitaire de technologie, les programmes, qui comprennent notamment les objectifs de la formation, les unités d'enseignement et les modules, les coefficients, les horaires, les modalités pédagogiques et les modalités de contrôle des connaissances et des aptitudes, sont fixés par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur, après avis de la commission pédagogique nationale concernée. ". L'arrêté du 10 août 2005 relatif à l'organisation des études conduisant au diplôme universitaire de technologie de certaines spécialités renvoie, s'agissant de l'organisation du diplôme universitaire technologique " techniques de commercialisation ", au programme pédagogique national correspondant qui lui est annexé.
8. Il ressort du programme pédagogique national du DUT " techniques de commercialisation " dans sa version applicable au semestre au cours duquel intervenait Mme F... que le troisième semestre de cette formation comporte trois parcours et que seul le parcours intitulé " insertion DUT " comporte un enseignement du droit du travail. Dès lors qu'il est constant que Mme F...n'intervenait pas sur ce parcours, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'enseignement du droit du travail figurait au programme de la formation pour laquelle elle dispensait son cours. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaîtrait les dispositions réglementaires relatives au contenu du programme du DUT " techniques de commercialisation " ne peut être qu'écarté.
9. Enfin, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'un détournement de pouvoir ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la décision du 9 octobre 2014 :
10. Aux termes de l'article L. 951-3 du code de l'éducation : " Le ministre chargé de l'enseignement supérieur peut déléguer par arrêté aux présidents des universités et aux présidents ou directeurs des autres établissements publics d'enseignement supérieur, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, tout ou partie de ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des personnels titulaires, stagiaires et non titulaires de l'Etat qui relèvent de son autorité, dans la limite des emplois inscrits dans la loi de finances et attribués à l'établissement. / Les compétences ainsi déléguées s'exercent au nom de l'Etat et leur exercice est soumis au contrôle financier. ". En application de ces dispositions, le ministre chargé de l'enseignement supérieur a, par un arrêté du 10 février 2012 portant délégation de pouvoirs en matière de recrutement et de gestion de certains personnels enseignants des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche, notamment délégué aux présidents des universités ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des carrières des enseignants-chercheurs et des maîtres de conférences.
11. En premier lieu, si, ainsi que le soutient MmeF..., le directeur de l'IUT a autorité sur les personnels qui y travaillent tant en vertu de l'article L. 713-9 du code de l'éducation que de l'article 4 des statuts de l'IUT de Saint-Denis, il ressort des textes cités au point 10 que le président de l'université Paris XIII était compétent pour prendre toute décision relative au recrutement ou à la gestion des carrières des maîtres de conférence affectés à l'IUT de Saint-Denis. Ainsi, dès lors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne réservait au directeur de l'IUT la compétence pour intervenir en matière de constat et de sanction des éventuels sous-services des enseignants du DUT " techniques de commercialisation ", le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision du 9 octobre 2014 ne peut être qu'écarté.
12. En deuxième lieu, si Mme F...soutient que le sous-service constaté par la décision du 9 octobre 2014 résulte de la décision de suspendre le cours du droit de travail qu'elle dispensait et que, par suite, la décision du 9 octobre 2014 est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision du 9 octobre 2014, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 9 que, cette dernière décision n'étant pas illégale, ce moyen ne peut qu'être écarté.
13. Enfin, il est constant que la requérante se trouvait au titre de l'année universitaire 2013-2014, en situation de sous-service pour un total de 24,5 HETD. Si Mme F...soutient que ce sous-service résulte de la décision de suspendre le cours de droit de travail qu'elle dispensait et de l'absence d'attribution, par l'université Paris XIII, d'heures de cours de nature à compenser cette suppression, elle n'établit par aucun élément que la situation de sous-service qui lui a été reprochée au terme de l'année 2013-2014 résulterait effectivement de la suppression de ce cours, dont elle ne précise d'ailleurs pas la quotité horaire. Par suite, l'autorité compétente était fondée à prendre la décision attaquée.
Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le président de l'université Paris XIII était fondé à demander à Mme F...d'effectuer les heures manquantes sur l'année universitaire 2014/2015 compte tenu du sous-service constaté au cours de l'année universitaire 2013/2014. Par suite, les conclusions présentées par la requérante tendant à ce que l'IUT de Saint-Denis soit condamné à lui verser le montant des heures supplémentaires qui lui seraient dues du fait de l'illégalité des décisions attaquées ne peuvent qu'être rejetées.
15. En second lieu, si Mme F...soutient que l'IUT aurait commis une faute en ne lui proposant pas de cours de remplacement et demande la condamnation solidaire de l'université Paris XIII et de l'IUT à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice matériel et moral qu'elle aurait subi, ces conclusions sont irrecevables faute de demande préalable et, de surcroît, nouvelles en appel. Elles doivent, par suite, être rejetées.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Sur les conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en tout état de cause, obstacle à ce que l'université Paris XIII et l'IUT de Saint-Denis, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, versent à Mme F...une somme quelconque au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F...une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par l'université Paris XIII, au même titre.
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme F...est rejetée.
Article 2 : Mme F...versera à l'université Paris XIII la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de l'université Paris XIII tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
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N° 16VE02205