La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/07/2025 | FRANCE | N°25VE01658

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, Juge des référés, 10 juillet 2025, 25VE01658


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2024 par lequel la préfète de l'Essonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination.



Par un jugement n° 2411427 du 28 avril 2025, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 28 mai 2025, M. B..., représenté par Me Leblanc, demande au juge des référés de la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2024 par lequel la préfète de l'Essonne a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination.

Par un jugement n° 2411427 du 28 avril 2025, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mai 2025, M. B..., représenté par Me Leblanc, demande au juge des référés de la cour :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du 29 novembre 2024 par laquelle la préfète de l'Essonne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination ;

2°) d'enjoindre à la préfète de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour;

3°) et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors qu'il s'agit d'une décision portant refus de renouvellement de titre de séjour, cas dans lequel l'urgence est présumée, et que cette décision fait obstacle à la poursuite de son activité professionnelle ;

- sont de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse, les moyens tirés de ce que :

* cette décision méconnait les dispositions de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il est marié à une ressortissante française avec laquelle il justifie d'une communauté de vie de plus de quatre années ;

* la préfète a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en estimant que leur communauté de vie a été rompue ;

* cette décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il est marié à une ressortissante française avec laquelle il justifie d'une communauté de vie de plus de quatre années et qu'il justifie d'une forte intégration professionnelle ;

* elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée à la préfète de l'Essonne le 27 juin 2025, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 mai 2025, sous le n° 25VE01638, par laquelle M. B... demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Versailles n° 2411427 du 28 avril 2025, ainsi que l'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Essonne du 29 novembre 2024.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la cour a désigné M. A..., premier vice-président et président de la 2ème chambre, pour statuer en qualité de juge des référés.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique du 3 juillet 2025 à 11h30.

Au cours de cette audience et en présence de Mme Szymanski, greffière, ont été entendus :

- le rapport de M. A...,

- les observations de Me Leblanc, pour M. B..., ainsi que de l'intéressé qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens.

La préfète de l'Essonne n'était ni présente, ni représentée.

La clôture de l'instruction est intervenue à l'issue de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant ivoirien, né le 1er avril 1982 à Marcory (Côte d'Ivoire), est entré en France le 10 avril 2021, muni d'un visa de long-séjour en qualité de conjoint de français valable du 11 mars 2021 au 11 mars 2022. Il a obtenu plusieurs récépissés qui lui ont permis de séjourner et de travailler régulièrement sur le territoire français. Il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour le 5 avril 2022. Par une décision du 29 novembre 2024, la préfète de l'Essonne a rejeté cette demande. M. B... demande au juge des référés, statuant par application des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision préfectorale du 29 novembre 2024.

Sur les conclusions à fin de suspension :

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) ". Aux termes de l'article L. 522-1 du même code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique. (...) ". Enfin, aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article R. 522-1 du même code : " La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit (...) justifier de l'urgence de l'affaire ".

En ce qui concerne la condition tenant à l'urgence :

3. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension de l'exécution d'une décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate sur la situation concrète de l'intéressé. Cette condition d'urgence est en principe constatée dans le cas d'un refus de renouvellement du titre de séjour, comme d'ailleurs d'un retrait de celui-ci. Dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse.

4. En l'espèce, la décision contestée du 29 novembre 2024 refuse à M. B... le renouvellement du visa de long-séjour valant titre de séjour portant la mention " conjoint de français ", dont il était titulaire jusqu'au 11 mars 2022. En outre, le requérant, qui a été mis en possession de plusieurs autorisations provisoires de séjour valables du 5 avril 2022 au 27 février 2025, sous le couvert desquelles il était autorisé à travailler, fait valoir sans être contesté qu'il se trouve désormais dans l'incapacité d'exercer une activité professionnelle depuis l'expiration de sa dernière autorisation provisoire de séjour, alors qu'il occupait un emploi en qualité d'agent de maintenance depuis le mois d'avril 2024. Dans ces conditions, et alors que la préfète de l'Essonne, qui n'a pas produit de mémoire en défense et n'était ni présente ni représentée à l'audience, ne fait état d'aucune circonstance particulière de nature à faire échec à cette présomption, la condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.

En ce qui concerne les moyens de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée :

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. ". Aux termes de l'article 215 du code civil : " Les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie ".

6. Il résulte de l'instruction que M. B... a épousé, le 16 janvier 2021, en Côte d'Ivoire, une ressortissante de nationalité française, comme en atteste l'acte de mariage transcrit dans les registres de l'état civil français figurant au dossier. Aucune procédure de divorce ou de séparation n'a été engagée. Le requérant a par ailleurs versé au dossier plusieurs pièces attestant de l'existence d'une communauté de vie effective entre les époux, qui étaient tous les deux présents à l'audience de référé, telles que des photographies, ses bulletins de salaire, des factures d'eau, d'électricité et des avis d'imposition, lesquels font tous état d'une domiciliation du couple à la même adresse, dans la commune de Sainte-Geneviève-des-Bois. En outre, le requérant a produit diverses attestations en ce sens, rédigées par des voisins ainsi que par le maire de sa commune. Dans ces conditions, en l'état de l'instruction, le moyen tiré de ce que la préfète de l'Essonne aurait entaché sa décision portant refus de renouvellement du titre de séjour sollicité par M. B... d'une erreur d'appréciation en estimant que la communauté de vie entre l'intéressé et son épouse a été rompue, est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de cette décision.

7. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 29 novembre 2024 par lequel la préfète de l'Essonne a refusé le renouvellement du titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sollicité par M. B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête d'appel enregistrée sous le n° 25VE01638.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

8. La suspension de la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour à M. B... implique seulement que la préfète de l'Essonne délivre à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour, valable jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur la requête n° 25VE01638, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente ordonnance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais qu'il a exposés à l'occasion du présent litige et non compris dans les dépens.

O R D O N N E :

Article 1er : L'exécution de l'arrêté du 29 novembre 2024 pris par la préfète de l'Essonne à l'encontre de M. B... est suspendue jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur sa légalité.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète de l'Essonne de délivrer à M. B... une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, valable jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête au fond n° 25VE01638, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente ordonnance.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à la préfète de l'Essonne.

Fait à Versailles, le 10 juillet 2025

Le juge des référés,

B. A...

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

N° 25VE01658 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 25VE01658
Date de la décision : 10/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Avocat(s) : LEBLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-10;25ve01658 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award