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10/07/2025 | FRANCE | N°25VE00142

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, Pôle etrangers, 10 juillet 2025, 25VE00142


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B..., C... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 4 mars 2024 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.



Par un jugement n° 2404717 du 18 décembre 2024, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 18 janvier 2025, M. A..., représenté par Me Boudjellal, demande à la cour :



1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B..., C... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 4 mars 2024 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2404717 du 18 décembre 2024, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2025, M. A..., représenté par Me Boudjellal, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, durant cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il omet de mentionner la note en délibéré produite le 27 septembre 2024 ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé en ce que le préfet du Val-d'Oise n'a pas précisé les motifs justifiant le refus de titre de séjour au titre de son activité salariée ; cette insuffisance de motivation révèle un défaut d'examen de sa situation personnelle ainsi qu'une erreur de droit ;

- il est entaché d'une erreur de fait, son père et son frère étant décédés ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 6 alinéa 5 de l'accord franco-algérien ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2025, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête de M. A....

Le préfet fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dorion a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 17 octobre 1987, entré en France selon ses déclarations le 17 juin 2017, a présenté le 18 septembre 2020 une demande de titre de séjour en se prévalant de sa qualité de conjoint d'une ressortissante française. Le tribunal administratif d'Amiens a, par un jugement du 29 novembre 2022, annulé l'arrêté du 26 octobre 2020 par lequel la préfète de l'Oise a rejeté sa demande et enjoint au préfet compétent de réexaminer sa situation. Dans le cadre du réexamen de sa situation, M. A... s'est également prévalu de sa vie privée et familiale. Par l'arrêté contesté du 4 mars 2024, le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 18 décembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 731-3 du code de justice administrative : " À l'issue de l'audience, toute partie à l'instance peut adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré. " En vertu de l'avant-dernier alinéa de l'article R. 741-2 du même code, relatif aux mentions obligatoires de la décision juridictionnelle, celle-ci doit faire " mention (...) de la production d'une note en délibéré ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il est régulièrement saisi, à l'issue de l'audience, d'une note en délibéré émanant de l'une des parties, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant de rendre sa décision, ainsi que de la viser, sans toutefois l'analyser dès lors qu'il n'est pas amené à rouvrir l'instruction.

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'audience publique qui s'est tenue le 24 septembre 2024, M. A... a adressé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise une note en délibéré accompagnée de trois pièces, enregistrée le 30 septembre 2024, avant que ne soit mis à disposition des parties le jugement attaqué. Ce jugement ne fait pas mention de cette production et est entaché, pour ce motif, d'irrégularité. Par suite, M. A... est fondé à en demander l'annulation.

4. Il y a lieu pour la cour de statuer, par la voie de l'évocation, sur les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal et devant la cour.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

5. En premier lieu, en vertu des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police administrative doivent être motivées et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

6. L'arrêté contesté vise l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise les éléments de fait propres à la situation de M. A..., ainsi que les motifs pour lesquels le préfet du Val-d'Oise a estimé ne pas devoir lui délivrer un titre de séjour, y compris en application de son pouvoir général de régularisation. Si M. A... fait valoir que cet arrêté ne mentionne pas son activité salariée, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de la fiche de renseignements qu'il a remise à l'administration le 7 février 2024, qu'il se serait prévalu de cette qualité à quelque moment que ce soit de la procédure d'instruction de sa demande. Par suite, les moyens d'insuffisance de motivation, de défaut d'examen sérieux de la demande et d'erreur de droit au regard de la qualité de salarié de M. A..., dont serait entaché l'arrêté contesté, ne peuvent qu'être écartés.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) ; 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ".

8. M. A... se prévaut de l'ancienneté de son séjour en France, de la présence de plusieurs membres de sa famille, dont certains ont la nationalité française, ainsi que de son insertion professionnelle et sociale. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il est entré en France et s'y est maintenu de manière irrégulière. Divorcé de son épouse ressortissante française depuis le 18 octobre 2022, il est célibataire sans charge de famille sur le territoire français et n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans. Il ne justifie d'une activité salariée que de mai à novembre 2022. L'immatriculation de son entreprise au registre du commerce et des sociétés et l'achat d'un appartement sont, en tout état de cause, postérieurs à l'arrêté contesté et, par suite, sans incidence sur sa légalité, qui s'apprécie à la date à laquelle il a été pris. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, le préfet du Val-d'Oise n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.

9. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise aurait pris les mêmes décisions si M. A... avait porté à sa connaissance que son père et son frère sont décédés. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

10. En dernier lieu, dans les circonstances de fait rappelées aux points précédents, en refusant de délivrer au requérant un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, le préfet du Val-d'Oise n'a pas entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et familiale de M. A....

11. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. A... devant le tribunal et le surplus de ses conclusions d'appel doivent être rejetés, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2404717 du 18 décembre 2024 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande de M. A... et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... A... et au ministre d'État, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Dorion, présidente,

Mme Bruno-Salel, présidente-assesseure,

M. Ablard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juillet 2025.

La présidente-assesseure,

C. Bruno-SalelLa présidente-rapporteure,

O. DorionLa greffière,

C. Yarde

La République mande et ordonne au ministre d'État, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 25VE00142 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : Pôle etrangers
Numéro d'arrêt : 25VE00142
Date de la décision : 10/07/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. de MIGUEL
Avocat(s) : BOUDJELLAL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-10;25ve00142 ?
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