Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Saran Ambulance a demandé au tribunal administratif d'Orléans la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1903801 du 26 août 2022, le tribunal administratif d'Orléans a constaté un non-lieu à hauteur de la somme de 2 541 euros dégrevée en cours d'instance et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 octobre 2022 et le 3 janvier 2024, la SARL Saran Ambulances, représentée par Me Obadia, demande à la cour :
1°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;
2°) de réformer le jugement attaqué en ce qu'il aura de contraire à la décharge prononcée ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 5 000 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en s'abstenant de vérifier que le véhicule immatriculé AM-154-GH était titulaire d'une AMS au moment de sa cession, le tribunal administratif d'Orléans a commis une dénaturation des faits et une erreur de droit ;
- la procédure d'imposition est irrégulière, faute de débat oral et contradictoire ;
- dans sa lecture de la réglementation sanitaire, l'administration fiscale commet une erreur de droit et une dénaturation des faits qui la conduisent à caractériser des actes anormaux de gestion inexistants ;
- les listes de l'ARS, sur lesquelles l'administration fiscale s'est appuyée pour retracer les cessions et les acquisitions d'autorisations de mise en service, en comparant deux listes dressées à des dates différentes, ne sont pas probantes en ce qui concerne de telles transactions alors qu'elles fondent des rehaussements résultant de prétendus actes anormaux de gestion ;
- le véhicule immatriculé CB-211-WW a été vendu et comptabilisé en produit exceptionnel pour 5 000 euros ; il est mis à disposition de la société Ambulance Sud Loire qui en deviendra propriétaire au terme de l'achat à tempérament auquel elle s'est engagée au prix de 45 000 euros (véhicule et AMS) ; parallèlement il a été prévu que la SARL Ambulances des Deux Lions garantisse et ne reverse à la SARL Saran Ambulance que le prix de 30 000 euros, qui doit être retenu comme valeur de l'AMS cédée lors du débouclage de l'opération ;
- les véhicules immatriculés BV-319-WB et CC-882-YN ont été loués ; le véhicule BV-319-WB a été loué à la société Sud Loire Ambulance, sans AMS, le contrat précisant que la société Sud Loire Ambulance rattacherait à ce véhicule une AMS issue de son propre parc, le véhicule immatriculé VW-374-SD ; par ailleurs, après le retour du véhicule dans son parc, il a été loué à la société Ambulances Saint-Patrick à compter du 13 juin 2016 ; le véhicule CC-882-YN a fait l'objet d'une location à la société Ambulances Medicina, et le véhicule reste sa propriété ; aucune cession d'AMS ne peut être constatée à raison de la location du véhicule ; par ailleurs, l'AMS de ce véhicule a été attribuée au véhicule CC-034-PQ, de telle sorte que le véhicule CC-882-YN a été loué sans AMS ;
- l'opération portant sur le véhicule immatriculé 3704 ZJ 45 est considérée par l'administration fiscale comme étant relative à la cession du véhicule de type VSL muni de son AMS pour une valeur totale de 50 000 euros, la SARL Ambulances des Deux Lions ayant été regardée comme n'ayant pas restitué ce prix de cession de 50 000 euros ; dans les faits, la SARL Ambulances des Deux Lions a permis de déplacer une AMS d'une zone sur-couverte dans laquelle l'ARS était susceptible de retirer à tout moment une ou plusieurs AMS lui appartenant ; La SARL Ambulances des Deux Lions lui a apporté une garantie à hauteur de 30 000 euros, qui correspond à l'AMS du véhicule immatriculé 3704 ZJ 45 et cette société confie à la société Ambulance SD Secours le véhicule muni de l'AMS contre le paiement de mensualités, la propriété n'étant transférée qu'au terme de la dernière mensualité du crédit ;
- s'agissant du VSL 7358-ZL-45, la SARL Ambulances des Deux Lions a mis en place une opération de financement du même type, en prévoyant le transfert de propriété à l'échéance du remboursement de la dernière mensualité et s'est engagée, au même terme, à lui garantir la valeur de l'AMS finalement fixée à 30 000 euros ; le débouclage de l'opération est intervenu au cours de l'exercice clos en 2018 et c'est ce prix qui doit être retenu comme valeur de l'AMS ;
- en prétendant que le prix de cession ne lui a pas été reversé, l'administration ignore l'essentiel des clauses de l'opération ;
- cette opération s'est en fin de compte débouclée en septembre 2016, date à laquelle la SARL Ambulances des Deux Lions lui a versé le prix de 30 000 euros ;
- compte tenu des erreurs d'analyse juridique et d'appréciation des faits, aucun acte anormal de gestion ne peut être retenu, faute pour l'administration d'établir un déséquilibre dans les relations économiques entre les cocontractants ou l'existence d'un avantage accordé par une société à une autre ;
- la charge de la preuve de la réalité des cessions d'actifs qui fonde l'analyse de l'administration fiscale pèse sur l'administration fiscale ;
- les prix arrêtés avec la SARL Ambulances des Deux Lions pour les autorisations de mise en service, de 30 000 euros ou 55 000 euros selon la nature de l'autorisation, s'expliquent par le risque de retrait de l'AMS par l'ARS ;
- si l'imposition des cessions devait intervenir sur la période vérifiée, elle devrait être limitée à la valeur des seules AMS qui ont finalement fait l'objet d'une cession (hors commission), soit 30 000 euros par AMS ;
- en l'absence de fait générateur de l'éventuelle plus-value à intervenir, il ne peut y avoir d'imposition correspondante ;
- faute pour l'administration fiscale de citer les termes de comparaison sur lesquels elle se fonde, et faute d'inclure dans la rémunération de la SARL Ambulances des Deux Lions les prestations administratives et financières réalisées, les prix de cession estimés par l'administration fiscale sont erronés ;
- s'agissant de l'exonération prévue par les dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts, elle respecte la règlementation selon laquelle un ambulancier doit être présent au siège pour effectuer la régulation des appels téléphoniques et assister les patients ; de plus elle disposait d'un petit atelier dans lequel un salarié s'occupait de réparer et entretenir les véhicules de transport sanitaire ; dans ces conditions, M. C... F... exerçait ses fonctions de manière permanente au siège social et satisfaisait aux obligations posées par l'article 44 octies A du code général des impôts de même que M. D... B..., qui était chargé de l'entretien et des réparations, dont le contrat initial de deux ans s'est poursuivi en contrat à durée indéterminée ;
- si l'administration fait valoir qu'elle avait deux autres adresses, ces établissements ont fait l'objet d'une radiation à la fin de l'année 2012 ;
- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées, dès lors qu'il n'y a pas de manquement aux obligations fiscales ni acte anormal de gestion.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des autres moyens de la requête n'est fondé.
Par ordonnance du 28 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 10 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Tar,
- les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public,
- et les observations de Me Boisseau, substituant Me Obadia, représentant la SARL Saran Ambulance.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Saran Ambulance, dont le président est M. E... A..., a pour objet le transport sanitaire et l'activité de taxi et véhicule de petite remise, ainsi que toutes opérations compatibles avec cet objet, s'y rapportant et contribuant à sa réalisation. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015. A l'issue du contrôle, l'administration fiscale a considéré que cette société avait cédé, au cours de l'exercice clos en 2013, les autorisations de mise en service (AMS) de trois véhicules sanitaires légers (VSL) et de deux ambulances, tout en renonçant à percevoir le produit de la vente. L'administration fiscale a donc réintégré au bénéfice imposable de cette société les montants correspondant à son évaluation de la valeur vénale des AMS. L'administration fiscale a également remis en cause l'application à cette société du régime de faveur prévu par les dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts. La SARL Saran Ambulance relève appel du jugement du 26 août 2022 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a constaté un non-lieu à statuer et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes, mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015.
Sur la régularité du jugement :
2. La SARL Saran Ambulance soutient que le tribunal administratif d'Orléans a commis une dénaturation des faits et une erreur de droit en refusant de vérifier que les véhicules évoqués par l'administration, notamment le véhicule immatriculé AM-154-GH, étaient titulaires d'une autorisation de mise en service au moment de leur cession. Toutefois, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la régularité de la procédure d'imposition, le bien-fondé des impositions et les pénalités dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. La SARL Saran Ambulance ne peut donc utilement se prévaloir d'erreurs de droit ou de dénaturation des faits qu'auraient commises les premiers juges pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Dans le cas où la vérification de comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que celui-ci se serait refusé à un tel débat. Il résulte de l'instruction que la vérification a été effectuée dans les locaux de la SARL Saran Ambulance. Cette société n'apporte aucun élément susceptible d'établir que le vérificateur, au cours de ses interventions sur place, se serait refusé à tout débat, s'agissant notamment du schéma des relations entre cette société et la SARL Ambulances des Deux Lions et plus généralement entre les sociétés du groupe A.... La seule circonstance que le vérificateur n'ait pas admis la présentation faite par la SARL Saran Ambulance de ses relations avec la société Ambulance des Deux Lions et les autres sociétés du groupe ne suffit pas à caractériser une absence de débat oral et contradictoire.
Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :
4. En vertu des dispositions de l'article 38 du code général des impôts, le bénéfice imposable est celui qui provient des opérations de toute nature faite par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Les renonciations à recettes et abandons de créances consentis par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt. S'il appartient à l'administration fiscale d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que les avantages octroyés par une entreprise à un tiers constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties. Dans l'hypothèse où l'entreprise s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite à l'administration d'apporter la preuve que cet avantage est, contrairement à ce que soutient l'entreprise, dépourvu de contrepartie, qu'il a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
S'agissant de l'autorisation de mise en service du véhicule sanitaire léger immatriculé 3704 ZJ 45 :
5. Il n'est pas contesté que la SARL Saran Ambulance a cédé le 1er août 2013 à la société Ambulances SD secours un VSL Citroën C4 immatriculé 3704 ZJ 45. Par ailleurs, l'administration fiscale a constaté l'existence d'un " protocole de prêt " signé le 30 juillet 2013 entre la SARL Ambulances SD secours et la SARL Ambulances des Deux Lions, par lequel cette dernière a accordé à la SARL Ambulances SD secours un prêt d'un montant de 160 000 euros destiné à financer une opération portant notamment sur l'acquisition d'un " VSL Citroën C4 immatriculé 3704 ZJ 45 avec son autorisation de mise en circulation en cours de validité appartenant à la société SARAN AMBULANCE (...) pour un montant de cinquante mille euros ". La SARL Saran Ambulance, si elle conteste l'interprétation faite par l'administration fiscale de ce " protocole de prêt ", n'en conteste ni l'authenticité ni les termes. Dans ces conditions, l'administration fiscale pouvait déduire de cette cession de véhicule et des termes de ce " protocole de prêt " qu'une transaction de vente portant sur une AMS censée accompagner ce VSL était intervenue concomitamment à la vente du véhicule le 31 août 2013.
6. La SARL Saran Ambulance soutient que le transfert de l'AMS à la société Ambulances SD secours ne constitue pas une vente, dès lors que cette AMS était susceptible d'être retirée à défaut d'exploitation, tandis que la valeur de cette AMS à son actif était garantie par la SARL Ambulances des Deux Lions jusqu'au " débouclage " de l'opération au cours duquel la propriété de l'AMS devait être transférée à la société Ambulances SD secours, la SARL Ambulances des Deux Lions devant alors lui verser le prix convenu. Toutefois, le schéma ainsi décrit ne correspond pas aux termes du protocole conclu entre la SARL Ambulances SD secours et la SARL Ambulances des Deux Lions dont la société requérante ne peut, pour en remettre en cause la portée, invoquer la rédaction la rédaction maladroite, qui stipule le montant du prêt, le taux d'intérêt ainsi que les modalités de remboursement, ne comporte pas de clause suspensive de transfert de propriété jusqu'au paiement et aux termes duquel " le règlement par chèque ou virement sera effectué par le prêteur directement au profit du vendeur (...) pour le compte de l'emprunteur ", ce protocole ne faisant par ailleurs aucune référence à la rémunération de prestations administratives ou financières. Enfin, la convention générale de garantie des éléments incorporels de transports sanitaires et une convention particulière produites uniquement au stade de l'interlocution départementale ne sont pas de nature à remettre en cause les éléments ci-dessus rappelés. La SARL Saran Ambulance ayant renoncé à percevoir jusqu'au " débouclage " le moindre paiement en contrepartie de la mise à disposition, entière et intégrale, de son AMS, l'administration fiscale a pu à bon droit considérer qu'elle s'était privée du produit de cette vente sans que cela soit justifié par son intérêt.
7. L'administration fiscale, pour estimer la valeur vénale de l'AMS dont il s'agit, pouvait à bon droit reprendre le prix mentionné dans le protocole de prêt du 30 juillet 2013, à savoir 45 000 euros et réintégrer cette somme au bénéfice imposable de la SARL Saran Ambulance au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2013. La seule circonstance que cette AMS pouvait, jusqu'au débouclage de l'opération, faire l'objet d'un retrait par l'ARS ne saurait à elle seule justifier que ce prix soit réduit à 30 000 euros, même à supposer que ce prix représente celui facturé en définitive à la société Ambulances SD secours, alors notamment qu'aucune évaluation du risque de retrait n'est proposée par la SARL Saran Ambulance. Par ailleurs, la circonstance que la SARL Saran Ambulance ait indirectement bénéficié des prestations payées par la société Ambulances SD secours à la SARL Ambulances des Deux Lions ne peut, à elle seule, justifier une réduction de la valeur vénale de l'AMS au paiement de laquelle la SARL Saran Ambulance a renoncé.
S'agissant des autorisations de mise en service du véhicule sanitaire léger immatriculé CB 211 WW et de l'ambulance immatriculée BV 319 WB :
8. Il résulte de l'instruction que, par deux actes de cession du 2 décembre 2013, la SARL Saran Ambulance a cédé à la SARL Sud Loire ambulances, d'une part, l'AMS rattachée à une ambulance Renault Trafic immatriculée BV 319 WB, d'autre part un VSL Citroën C4 immatriculé CB 211 WW avec son AMS. Selon le protocole de prêt conclu le même jour entre la SARL Sud Loire ambulances et la SARL Ambulances des Deux Lions, qui, tout comme le protocole évoqué au point 5 ci-dessus, n'est contesté ni dans son authenticité ni dans ses termes, le prix de l'AMS précédemment rattachée à l'ambulance BV 319 WB était de 70 000 euros et le prix du VSL immatriculé CB 211 WW était de 45 000 euros. Dans ces conditions, l'administration fiscale établit l'existence de transactions de vente de ces deux AMS intervenues entre la SARL Saran Ambulance et la SARL Sud Loire ambulances.
9. La SARL Saran Ambulance soutient que le transfert de l'AMS à la SARL Sud Loire ne constitue pas une vente, dès lors que cette AMS était susceptible d'être retirée à défaut d'exploitation, tandis que la valeur de cette AMS à son actif était garantie par la SARL Ambulances des Deux Lions jusqu'au " débouclage " de l'opération au cours duquel la propriété de l'AMS devait être transférée à la SARL Sud Loire Ambulances, la SARL Ambulances des Deux Lions devant alors lui verser le prix convenu. Toutefois, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, l'administration fiscale a pu à bon droit considérer que la SAS Saran Ambulance s'était privée du produit de ces ventes sans que cela soit justifié par son intérêt.
10. L'administration fiscale, pour estimer les valeurs vénales des AMS dont il s'agit, pouvait à bon droit reprendre les prix mentionnés dans le protocole de prêt du 2 décembre 2013, à savoir 70 000 euros pour l'ambulance et 45 000 euros pour le VSL et réintégrer ces sommes au bénéfice imposable de la SARL Saran Ambulance au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2013. La seule circonstance que ces AMS pouvaient, jusqu'au débouclage de l'opération, faire l'objet d'un retrait par l'AMS ne saurait à elle seule justifier que ces prix soient réduits à 55 000 euros et 30 000 euros respectivement, même à supposer que le prix de 30 000 euros représente celui reversé en définitive à la SARL Saran Ambulance, alors notamment qu'aucune évaluation du risque de retrait n'est proposée par la SARL Saran Ambulance. Par ailleurs, la circonstance que la SARL Saran Ambulance ait indirectement bénéficié des prestations payées par la SARL Sud Loire ambulances à la SARL Ambulances des Deux Lions ne peut, à elle seule, justifier une réduction de la valeur vénale des AMS au paiement de laquelle la SARL Saran Ambulance a renoncé.
S'agissant des autorisations de mise en service du véhicule sanitaire léger immatriculé 7358 ZL 45 et de l'ambulance immatriculée CC 882 YN :
11. Il résulte de l'instruction qu'aux termes d'un protocole de prêt du 19 février 2013 entre la SARL Ambulances des Deux Lions et la SARL Ambulances Médicina dont ni l'authenticité ni les termes ne sont contestés par la SARL Saran Ambulance, que la SARL Saran Ambulance a cédé à la SARL Ambulances Médécina, d'une part, l'AMS de l'ambulance Mercedes Sprinter immatriculée CC 882 YN pour un montant de 65 000 euros, d'autre part, un VSL Citroën C4 immatriculé 7358 ZL 45 avec son AMS pour un montant de 50 000 euros. Dans ces conditions, l'administration fiscale établit l'existence de transactions de vente de ces deux AMS intervenues entre la SARL Saran Ambulance et la SARL Ambulances Médicina.
12. La SARL Saran Ambulance soutient que le transfert des AMS à la SARL Ambulances Médicina ne constitue pas une vente, dès lors que cette AMS était susceptible d'être retirée à défaut d'exploitation, tandis que la valeur de cette AMS à son actif était garantie par la SARL Ambulances des Deux Lions jusqu'au " débouclage " de l'opération au cours duquel la propriété de l'AMS devait être transférée à la SARL Ambulances Médicina, la SARL Ambulances des Deux Lions devant alors lui verser le prix convenu. Toutefois, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, l'administration fiscale a pu à bon droit considérer que la SAS Saran Ambulance s'était privée du produit de ces ventes sans que cela soit justifié par son intérêt.
13. L'administration fiscale, pour estimer les valeurs vénales des AMS dont il s'agit, pouvait à bon droit reprendre les prix mentionnés dans le protocole de prêt du 19 février 2013, à savoir 65 000 euros pour l'ambulance et 50 000 euros pour le VSL et réintégrer ces sommes au bénéfice imposable de la SARL Saran Ambulance au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2013. La seule circonstance que ces AMS pouvaient, jusqu'au débouclage de l'opération, faire l'objet d'un retrait par l'AMS ne saurait à elle seule justifier que ces prix soient réduits à 55 000 euros et 30 000 euros respectivement, même à supposer que le prix de 30 000 euros représente celui facturé en définitive à la SARL Ambulances Médicina, alors notamment qu'aucune évaluation du risque de retrait n'est proposée par la SARL Saran Ambulance. Par ailleurs, la circonstance que la SARL Saran Ambulance ait indirectement bénéficié des prestations payées par la SARL Ambulances Médicina à la SARL Ambulances des Deux Lions ne peut, à elle seule, justifier une réduction de la valeur vénale des AMS au paiement desquelles laquelle la SARL Saran Ambulance a renoncé.
En ce qui concerne le bénéfice du régime de faveur prévu à l'article 44 octies A du code général des impôts :
14. La SARL Saran Ambulance, qui a transféré le 19 décembre 2012 son siège social 4 rue Henri Desforges à Orléans, dans une zone franche urbaine, s'est prévalue au titre de l'exercice 2013 du régime de faveur prévu à l'article 44 octies A du code général des impôts, qui, dans sa rédaction alors en vigueur, s'appliquait aux contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créaient des activités dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. L'administration a remis en cause le bénéfice de ce régime en faisant valoir que la société requérante, dont il n'est pas contesté qu'elle exerce une activité non sédentaire, ne remplissait aucune des conditions alternatives prévues par le dernier alinéa du I de l'article 44 octies A, aux termes duquel, dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines ".
15. Il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir bénéficier du régime d'exonération qu'elles instituent, une entreprise doit exercer une activité dans une zone franche urbaine et y disposer des moyens d'exploitation nécessaires à cette activité. Dans le cas où cette activité présente un caractère non sédentaire et que, bien qu'implantée en zone franche urbaine, elle est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'entreprise ou le professionnel peut néanmoins prétendre à l'exonération s'il emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés, en zone franche urbaine, à l'activité, ou s'il réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans la zone franche urbaine. La SARL Saran Ambulance, qui ne conteste pas qu'au cours de l'année 2013 elle n'a pas réalisé au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans des zones franches urbaines, fait en revanche valoir qu'elle employait deux salariés sédentaires à temps plein exerçant leurs fonctions à son siège social.
16. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable remplit les conditions légales d'une exonération.
17. La SARL Saran Ambulance produit le contrat de travail par lequel elle a recruté M. D... B... en qualité d'aide ouvrier carrossier / aide mécanicien du 22 mars 2010 au 21 mars 2012, ainsi qu'une lettre du 2 novembre 2012 par laquelle elle a indiqué à l'intéressé, dont le contrat avait été tacitement reconduit, que son " lieu de rattachement sera à compter du 19 décembre 2012 situé au siège social de [la] société 4 rue Henri Desforges 45000 ORLEANS ". La société requérante produit également une déclaration d'accident de travail mentionnant un accident subi par M. B... le 27 avril 2015 au 4 rue Henri Desforges à Orléans, ainsi que des photographies de l'atelier dont elle dispose à cette adresse. Toutefois, les photographies produites ne montrent pas les matériels et équipements nécessaires à l'exercice des fonctions de carrossier ou de mécanicien. Dans ces conditions, compte tenu des éléments produits, il ne résulte pas de l'instruction que M. B... exerçait, au cours des années litigieuses, ses fonctions à temps plein au 4 rue Henri Desforges à Orléans.
18. La SARL Saran Ambulance invoque la réglementation qui impose la présence permanente au siège social d'un salarié sédentaire ayant la qualification d'ambulancier pour assurer la régulation des appels téléphoniques. Elle produit, par ailleurs, les bulletins de paie de M. C... F..., ambulancier du 2ème degré, portant l'attribution d'une majoration du 3ème degré qui peut correspondre à des tâches de régulation. Toutefois, elle ne produit aucun élément établissant que M. F... effectuerait ses tâches de régulation au 4 rue Henri Desforges. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que M. F... exerçait, au cours des années litigieuses, ses fonctions à temps plein au 4 rue Henri Desforges.
19. Dans ces conditions, la situation de la SARL Saran Ambulance ne peut être regardée comme remplissant les conditions de l'exonération prévue par l'article 44 octies A du code général des impôts.
Sur les pénalités :
20. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
21. Pour appliquer la majoration pour manquement délibéré aux rehaussements portant sur les renonciations à recettes, l'administration a relevé que le gérant de la SARL Saran Ambulance, qui avait par ailleurs signé en qualité de gérant de la SARL Ambulances des Deux Lions les protocoles de prêt, ne pouvait ignorer qu'en s'abstenant de comptabiliser le produit de la cession des autorisations de mise en service il privait la société requérante du produit de cette cession. L'administration s'est également fondée sur l'importance et le caractère répété des omissions constatées. Ces éléments suffisent à établir l'intention délibérée de la SARL Saran Ambulance d'éluder l'impôt.
22. Il résulte de ce qui précède que la SARL Saran Ambulance n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus de sa demande. Sa requête aux fins de décharge doit par suite être rejetée, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Saran Ambulance est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Saran Ambulance et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Massias, présidente de la cour,
Mme Le Gars, présidente assesseure,
M. Tar, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2025.
Le rapporteur,
G. TarLa présidente,
N. Massias
La greffière,
A. Gauthier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 22VE02442