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30/01/2025 | FRANCE | N°22VE01502

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 3ème chambre, 30 janvier 2025, 22VE01502


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SAS Ixcore a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008.



Par un jugement n°1507597 du 30 avril 2018, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour avant cassa

tion :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juin et le 10 décembre 2018, la SAS Ixcore, repr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS Ixcore a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2008.

Par un jugement n°1507597 du 30 avril 2018, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour avant cassation :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juin et le 10 décembre 2018, la SAS Ixcore, représentée par Me Jambon et Me Godet, a demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice 2008 ;

3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à la charge de l'État la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutenait que :

- sur les abandons de créance, la situation nette réelle des deux sociétés Ixair et H2X, qui ont bénéficié des abandons de créance à caractère financier litigieux, est restée négative après ces abandons ; elle l'établit par l'expertise de la banque Athéma et celle de M. B... A... ; ces abandons étaient donc ainsi déductibles de son résultat et n'ont pas revalorisé la participation qu'elle détient dans ses filiales ; subsidiairement, les abandons de créance litigieux peuvent être qualifiés d'abandons à caractère commercial en application de l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 7 février 2018 n° 398676, dès lors qu'elle fournissait des prestations de services internes d'intérêt commun à l'ensemble de ses filiales, qu'elle s'immisçait ainsi dans la gestion de ses filiales et que par suite, elle entretenait avec ces dernières des relations commerciales ;

- sur la sous-facturation des prestations de services fournies à ses filiales, la méthode forfaitaire utilisée par l'administration pour valoriser les prestations de services facturées aux filiales était imprécise et le résultat auquel elle a abouti, selon lequel les prestations de services étaient sous-facturées, n'est pas juste ; le taux moyen utilisé n'est pas discuté mais son utilisation comme clé de répartition appliquée à l'ensemble des salariés aboutit à un résultat forfaitaire qui n'est pas fidèle à la réalité ; la coïncidence entre le montant des frais directs facturés en 2005 et celui des mêmes frais estimé par l'administration en utilisant sa méthode est un hasard ; subsidiairement, s'il y avait bien sous-facturation, celle-ci constituerait une subvention au sens des dispositions de l'article 46 quater-0 ZG de l'annexe III au code général des impôts dans le cadre de l'intégration fiscale, le périmètre du groupe d'intégration fiscale étant justifié par la production des formulaires adéquats.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics a conclu au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés n'étaient pas fondés.

Par un arrêt n°18VE02221 du 6 octobre 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa demande.

Par une décision n° 447084 du 21 juin 2022, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour, où elle a été enregistrée sous le n°22VE01502.

Procédure devant la cour après cassation :

Par un mémoire enregistré le 8 septembre 2022, la SAS Ixcore, représentée par Me Godet et Me Jambon, maintient ses conclusions précédentes présentées devant la cour.

Elle soulève les mêmes moyens et maintient ses précédentes écritures devant la cour. Elle ajoute que, s'agissant de la société Ixair, la cession en 2009 d'une flotte d'hélicoptères lui ayant permis de lui rembourser six millions d'euros ne peut établir que sa situation nette était positive trois ans avant, lors de l'abandon de créance.

Par un mémoire enregistré le 26 août 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête et s'en remet à ses précédentes écritures devant la cour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Liogier,

- les conclusions de M. Illouz, rapporteur public,

- et les observations de Me Godet, représentant la SAS Ixcore.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Ixcore, tête d'intégration fiscale, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité portant sur les exercices clos en 2008 et 2009, qui a été étendue aux exercices antérieurs dans la limite des déficits reportés. A l'issue de ce contrôle, l'administration lui a notifié des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés à raison, d'une part, d'abandons de créances à caractère financier consentis à ses filiales Ixair et H2X et, d'autre part, de la minoration de rémunération pour des prestations rendues aux filiales de son groupe. Par un arrêt n° 18VE02221 du 6 octobre 2020, la cour a rejeté l'appel formé par la SAS Ixcore contre le jugement du 30 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Versailles avait rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire mise à sa charge au titre de l'exercice clos en 2008, résultant de ces rehaussements. Par une décision du 21 juin 2022, le Conseil d'État statuant au contentieux a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour.

Sur les abandons de créance :

2. En vertu des dispositions du 2 de l'article 38 du code général des impôts, rendues applicables en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code, le bénéfice net imposable est égal à la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice. Jusqu'à l'entrée en vigueur du 13 de l'article 39 du code général des impôts, créé par l'article 17 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, l'aide financière consentie dans son intérêt par une société à une filiale, alors même qu'elle n'entretiendrait avec celle-ci aucune relation commerciale, est susceptible d'être déduite de ses résultats imposables. Sauf preuve contraire, l'aide financière est réputée augmenter la valeur de la participation de la société dans le capital de la filiale lorsqu'elle a pour effet de rendre l'actif net comptable de celle-ci positif. Il appartient à la société qui entend déduire l'aide financière consentie d'apporter tous éléments de nature à justifier que la valeur de sa participation dans le capital de sa filiale n'a pas augmenté malgré cette aide.

3. Il résulte de l'instruction que la SAS Ixcore a consenti, le 15 septembre 2006, l'abandon de la créance, d'un montant de 6 000 000 euros, qu'elle détenait sur sa filiale, la société Ixair. Elle a également consenti, le 5 avril et le 30 novembre 2007, l'abandon de deux créances, de montants respectifs de 2 000 000 euros et de 7 000 000 euros, qu'elle détenait sur sa filiale, la société H2X. A l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, l'administration, ayant constaté que les situations nettes comptables des filiales Ixair et H2X étaient redevenues positives en conséquence des abandons de créances consentis, a réintégré dans les résultats de la SAS Ixcore et imposé au titre de l'année 2008 les sommes correspondant à la part non-déductible de ces abandons de créance.

4. A titre principal, pour contester la réintégration dans son résultat imposable d'une quote-part de chacun des abandons de créances litigieux, la société requérante se prévaut de la circonstance que la situation nette réelle de ces deux filiales serait demeurée négative malgré ces abandons de créances. Au soutien de ses dires, elle se prévaut d'une étude et d'un rapport, réalisés à sa demande, respectivement par une banque d'affaires et un expert-comptable, indiquant, l'un comme l'autre, que la valeur de ces deux sociétés était restée nulle postérieurement aux abandons de créance.

5. S'agissant de la société Ixair, celle-ci exerçait, à la date de l'abandon de créances litigieux, une activité de transport aérien d'affaires à la demande et des activités complémentaires de gestion de flotte, de respect des normes, d'audit des avions avant acquisition, d'aide à la gestion partagée d'un avion, de surveillance incendie ou secours par hélicoptère. Pour cette activité, elle disposait d'un actif immobilisé important, dont une flotte de dix hélicoptères, d'un montant de 14 357 000 euros au 31 décembre 2006. La société se prévaut, d'une part, de l'étude du cabinet Anthema qui indique que la situation nette réelle de sa filiale était négative, à hauteur de - 12 470 000 euros, après imputation de l'abandon de créances. Toutefois, il résulte de l'instruction que la méthode retenue, qui se fonde essentiellement sur l'excédent brut d'exploitation et les dettes financières de la société Ixair, ne prend en compte ni le résultat exceptionnel, dont fait partie l'abandon de créance, ni l'actif immobilisé, qui représente pourtant plus de 90 % de son actif, alors que la société exerce une activité nécessitant des actifs d'un montant élevé, ni ne donne aucune précision sur les acquisitions et fusions menées par la société peu avant l'abandon alors qu'elles ont vraisemblablement influencé de façon significative certains postes du compte de résultat. D'autre part, la société se prévaut de l'évaluation d'un expert-comptable retenant que la valeur de de sa filiale serait nulle ou négative, se fondant sur deux méthodes. Or, la première méthode, dite des " flux futurs ", repose essentiellement sur l'excédent brut d'exploitation et s'expose ainsi aux mêmes critiques que celles décrites précédemment, à savoir une insuffisante prise en compte de l'actif immobilisé, des restructurations menées et du résultat exceptionnel. En outre, bien que la méthode soit fondée sur les résultats des trois années précédant l'abandon et les trois années suivantes, l'expertise n'explique pas les raisons pour lesquelles l'année 2007 n'a pas été prise en compte dans les calculs ni les raisons pour lesquelles la méthode partait du postulat que la filiale n'avait aucune chance, au 31 décembre 2006, de dégager des résultats positifs à l'avenir. Concernant la seconde méthode, dite liquidative, la valeur de la société, évaluée à près de - 1,8 millions d'euros, repose sur la prise en compte de passifs qui ne devraient pas être retenus pour valoriser une société en cours d'activité, tels que les 2,2 millions de frais de licenciement du personnel, ou les 1,1 millions de pertes sur les titres de participation, dont l'achat remontait en partie à quelques mois avant l'abandon de créance, sans qu'aucune précision ne soit donnée sur ces acquisitions. Ainsi, aucune des évaluations proposées par la société, qui sont peu détaillées, n'aboutit à une évaluation réaliste de la valeur de la société Ixair et n'est de nature à remettre en cause la valeur nette comptable retenue par l'administration déterminée à partir de la liasse fiscale de la société Ixair.

6. S'agissant de la société H2X, son activité consistait en un chantier naval basé à la Ciotat, créé en 1991, spécialisé dans la production de produits sur mesure en matériau composite et dans la rénovation de navires. Cette société disposait d'un bureau d'études et d'une infrastructure portuaire. Il résulte de l'instruction qu'au début de l'année 2007, la société HA2X a acquis deux sociétés qu'elle a absorbées et qu'elle a obtenu au cours de l'année 2007 une commande significative pour un navire. Comme pour la société Ixair, la société requérante se prévaut d'une étude du cabinet Anthema qui évalue la filiale à -5,118 millions d'euros. Toutefois, comme il a été dit précédemment, cette méthode ne tient compte ni du résultat exceptionnel, ni de l'actif immobilisé de la société, alors que celui-ci constituait nécessairement, eu égard à l'activité de cette filiale, une part prépondérante de sa valeur et que cet actif a d'ailleurs plus que doublé en 2007, ni des restructurations importantes menées dans l'année. La société requérante se prévaut également de l'évaluation de l'expert-comptable comptable retenant que la valeur de sa filiale serait négative ou nulle. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, la méthode des flux futurs ne prend pas suffisamment en compte l'actif immobilisé, les restructurations menées en 2007, et le résultat exceptionnel alors, au surplus, qu'il résulte de l'instruction qu'au 31 décembre 2007, la filiale était peu endettée, au regard de l'excédent brut d'exploitation qu'elle générait, et venait de conclure une commande significative. En outre, pour les mêmes motifs qu'exposés au point précédent, l'évaluation issue de la méthode liquidative, d'un montant de -13 millions d'euros, prend en compte des passifs qui ne devraient pas être retenus pour valoriser une société en cours d'activité et qui ne font l'objet d'aucune explication, dont près de 900 000 euros pour des pertes sur les titres de participation acquis pourtant au début de l'année 2007, 5 millions d'euros de pertes sur le chantier venant d'être conclu quelques mois auparavant et 4,6 millions d'euros de frais de licenciement des personnels.

7. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, les évaluations produites par la société ne sont pas suffisantes pour remettre en cause la valeur nette comptable retenue par l'administration, qui tient compte des dettes des filiales, déterminée à partir des liasses fiscales des sociétés Ixair et H2X. Par suite, la société requérante n'établissant pas que la situation nette réelle de ses filiales restait négative après les abandons de créances consentis, elle n'est pas fondée à demander la décharge de l'imposition litigieuse pour ce motif.

8. A titre subsidiaire, la requérante soutient que les abandons de créance litigieux peuvent être qualifiés d'abandons à caractère commercial dès lors qu'elle fournit en tant que holding d'un groupe intégré des prestations de services internes d'intérêt commun à l'ensemble de ses filiales dans la gestion desquelles, par suite, elle s'immisce et avec lesquelles elle entretient des relations commerciales. Toutefois, il résulte de l'instruction que la société requérante, société de capital-développement, se décrit elle-même comme une holding animatrice de son groupe qui assure la gestion, le contrôle et l'animation de son groupe. Son actif est principalement constitué d'immobilisations financières et ses revenus proviennent majoritairement des dividendes et autres produits financiers qu'elle perçoit de ses filiales. A l'inverse, les prestations intragroupes, consistant en de l'assistance en matière juridique, budgétaire, financière, fiscale et comptable, en de la location de bureaux, en de l'aide en matière de ressources humaines, sont minoritaires dans ses revenus. Il ressort également de son courrier du 4 mai 2011 adressé à l'administration que la masse salariale affectée au secteur financier est prépondérante par rapport à celle consacrée aux prestations refacturées aux filiales. Il s'ensuit que le caractère financier des abandons de créance litigieux, qui ressort des termes mêmes des conventions d'abandons de créance indiquant que la SAS Ixcore a décidé de " restaurer la situation économique et financière " de ses filiales, est prépondérant sur d'éventuelles motivations commerciales. Ainsi, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans les résultats de la SAS Ixcore et imposé au titre de l'exercice clos en 2008 les sommes correspondant à la part non déductible des abandons de créances consentis à ses filiales.

Sur la facturation des prestations aux filiales :

9. Il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, que le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Le fait pour une entreprise de sous-facturer les prestations de service fournies à un tiers, ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt. Cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces avantages est une filiale, hormis le cas où la situation des deux sociétés serait telle que la société mère puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une filiale en difficulté. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que les avantages consentis par une entreprise à un tiers constituent un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties. Dans l'hypothèse où l'entreprise apporte une telle justification, il incombe ensuite à l'administration, si elle s'y croit fondée, d'apporter la preuve de ce que cette contrepartie est dépourvue d'intérêt pour l'entreprise ou que sa rémunération est excessive.

10. Il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les résultats imposables de la SAS Ixcore les sommes, qu'elle a regardées comme constitutives de minorations de recettes, correspondant à la différence entre les prix effectivement facturés aux filiales et ceux résultant du calcul qu'elle a effectué à partir des tableaux transmis par la société requérante, à concurrence de 78 057 euros en 2005, 251 663 euros en 2006 et 751 679 euros en 2007.

11. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la SAS Ixcore a conclu avec ses filiales une convention d'assistance et de prestations de services valable à compter de l'exercice clos en 2008. Ce document fixe de manière très précise les conditions dans lesquelles est déterminé le prix des prestations facturées aux filiales. Toutefois, s'agissant des exercices antérieurs, il résulte de l'instruction que, la société requérante n'ayant pas mis en place une telle convention, la détermination du prix des prestations réalisées au profit des filiales ne résultait pas de l'application d'une méthode fixe et l'administration a ainsi constaté que, de 2005 à 2007, le montant des prestations facturées aux filiales était inférieur aux coûts salariaux des personnels affectés à ces prestations. Afin de déterminer le montant des prestations qui auraient dû être facturées à leur prix de revient, l'administration a totalisé les coûts salariaux et de déplacement comptabilisés par la société requérante puis a appliqué à ce total la clé de répartition entre la masse salariale affectée à l'activité de prestation de services et la totalité de la masse salariale fournie et a obtenu ainsi les coûts salariaux et de déplacement consacrés par la requérante à l'activité de prestations de services à ses filiales. En se bornant à faire valoir que la clé de répartition globale utilisée par l'administration ne reflétait pas la réalité de son activité, alors qu'elle avait fourni le taux d'affectation de chaque salarié à ce secteur, la société ne conteste ni que les prestations ont été facturées en-deçà de leur prix de revient, ni qu'elle n'en a retiré aucune contrepartie. Dans ces conditions, l'administration est réputée apporter la preuve qui lui incombe, de ce que la SAS Ixcore n'a, en l'espèce, en facturant à ses filiales des prestations à un tarif inférieur à leur prix de revient, pas agi dans son propre intérêt et que les opérations ainsi effectuées ne procédaient pas d'une gestion normale.

12. En second lieu, si la société fait valoir qu'en utilisant la clé de répartition globale du secteur " prestations ", plutôt que le taux d'affectation de chaque salarié à ce secteur, l'administration a mal estimé ses recettes, il résulte de l'instruction que cette clé de répartition résulte des tableaux qu'elle a elle-même élaborés et remis à l'administration. En outre, la société n'apporte aucun calcul ni aucune donnée chiffrée sur les charges salariales et les frais de déplacement par salarié, informations pourtant nécessaires pour calculer la minoration de recettes en fonction d'un taux d'affectation par salarié, et non avec le taux global utilisé par l'administration, dont elle se prévaut. Par suite, la société n'est pas fondée à soutenir que la minoration de recette est surestimée.

13. A titre subsidiaire, aux termes du premier alinéa de l'article 223 B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux exercices clos entre 2005 et 2007 : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 217 bis ". Aux termes du sixième alinéa du même article 223 B, dans sa rédaction applicable aux exercices clos en 2005 : " L'abandon de créance ou la subvention directe ou indirecte consenti entre des sociétés du groupe n'est pas pris en compte pour la détermination du résultat d'ensemble. La société mère est tenue de joindre à la déclaration du résultat d'ensemble de chaque exercice un état des abandons de créances ou subventions consentis à compter du 1er janvier 1992. Un décret fixe le contenu de ces obligations déclaratives ". Le même alinéa, dans sa rédaction applicable aux exercices clos en 2006 et 2007, dispose en outre que " le montant de l'abandon de créance non retenu pour la détermination du résultat d'ensemble ne peut excéder la valeur d'inscription de la créance à l'actif du bilan de la société qui consent l'abandon ". Aux termes de l'article 1763 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Entraîne l'application d'une amende égale à 5 % des sommes omises le défaut de production ou le caractère inexact ou incomplet des documents suivants : (...) / c. Etat des abandons de créances et subventions prévu au sixième alinéa de l'article 223 B ; (...) ". Aux termes de l'article 46 quater-0 ZG de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable au litige : " La subvention indirecte mentionnée au sixième alinéa de l'article 223 B et au premier alinéa de l'article 223 R du code général des impôts s'entend (...) de la prestation de services sans contrepartie ou pour un prix inférieur à leur prix de revient (...) ".

14. L'option pour le régime dit de " l'intégration fiscale " ne dispense pas chacune des sociétés du groupe fiscalement intégré de déterminer son résultat dans les conditions de droit commun, ainsi que le prévoit le premier alinéa de l'article 223 B du code général des impôts, sous la seule réserve des dérogations expressément autorisées par les dispositions propres à ce régime d'exception. Aucune de ces dispositions n'autorise une société membre du groupe à déclarer selon des règles différentes des règles de droit commun un abandon de créance ou une subvention qu'elle a consentie ou dont elle a bénéficié. La neutralisation d'un tel abandon de créance ou d'une subvention consentie entre sociétés du même groupe est effectuée, conformément aux dispositions du sixième alinéa de ce même article 223 B, pour la détermination du résultat d'ensemble, après l'établissement des résultats individuels des sociétés membres du groupe. Cette même disposition prescrit de joindre à la déclaration du résultat d'ensemble un état des abandons de créances ou subventions consenties entre sociétés du groupe. Cette obligation déclarative a pour objet de permettre à l'administration fiscale de suivre les mouvements financiers à l'intérieur du groupe, quand bien même ces mouvements seraient sans incidence tant sur le résultat des sociétés du groupe déterminé dans les conditions de droit commun que sur le résultat d'ensemble du groupe. Si la méconnaissance de cette obligation déclarative expose en principe à l'amende prévue au c du I de l'article 1763 du code général des impôts, en revanche, elle ne fait pas obstacle, par elle-même, à la neutralisation des abandons de créance ou des subventions consentis entre sociétés du même groupe.

15. La société requérante fait valoir que les minorations de recettes constatées par l'administration seraient, en tout état de cause, des subventions intragroupes qui ne donneraient lieu à aucune cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés, mais seulement à l'amende de 5% prévue par l'article 1763 du code général des impôts. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'à défaut de répartition des charges salariales par filiale, l'administration a procédé à ce rehaussement de façon globale. Or, la société ne produit la liste des sociétés faisant partie de son intégration fiscale que pour les années 2006 et 2007. En outre, il résulte de l'instruction que de 2005 à 2007, des prestations ont été facturées par la SAS Ixcore à une cinquantaine de sociétés différentes alors que l'intégration ne compte qu'entre six et neuf sociétés sur la période litigieuse. En l'absence de tout élément supplémentaire permettant de quantifier la part des recettes non facturées aux filiales faisant partie de l'intégration fiscale, c'est à bon droit que l'administration a refusé de considérer l'ensemble des minorations de recettes comme des subventions intragroupes au sens de l'article 223 B précité et de les neutraliser dans le résultat fiscal d'ensemble.

16. Il résulte de ce qui précède que la SAS Ixcore n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Enfin, en l'absence de dépens dans la présente instance, les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à leur paiement ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Ixcore est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Ixcore et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Massias, présidente,

M. de Miguel, premier conseiller,

Mme Liogier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.

La rapporteure,

C. LiogierLa présidente,

N. Massias

La greffière,

T. TollimLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 22VE01502 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE01502
Date de la décision : 30/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Relations entre sociétés d'un même groupe.


Composition du Tribunal
Président : Mme MASSIAS
Rapporteur ?: Mme Claire LIOGIER
Rapporteur public ?: M. ILLOUZ
Avocat(s) : GODET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-30;22ve01502 ?
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