La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2024 | FRANCE | N°24VE00551

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 6ème chambre, 11 juillet 2024, 24VE00551


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2022 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un jugement n° 2215221 du 31 janvier 2024, le tribunal administrati

f de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête.



Procédure devant la cour :



Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 9 novembre 2022 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2215221 du 31 janvier 2024, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 février et 19 mars 2024, M. A..., représenté par Me Bories, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 9 novembre 2022 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 233-1, L. 234-1, L. 235-1 et L. 251-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

-elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 avril 2024, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Albertini,

- et les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant portugais né le 8 septembre 1968, déclare être entré en France en 1974. Le 8 novembre 2022, il a été interpellé pour des faits de conduite d'un véhicule ayant fait usage de stupéfiants et sous l'empire d'un état alcoolique. Par un arrêté du 9 novembre 2022, le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 31 janvier 2024 par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. En vertu de l'article L. 5 du code de justice administrative, l'instruction des affaires est contradictoire. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, alors que la date de clôture de l'instruction avait été fixée par une ordonnance du président de la formation de jugement au 6 novembre 2023 à midi, un premier mémoire en défense a été produit par le préfet des Hauts-de-Seine le 3 novembre 2023 et a été communiqué au conseil de M. A... le 6 novembre 2023 par un courrier qui lui a été mis à disposition à 10h43 au moyen de l'application Télérecours et dont il a été accusé réception le 10 novembre à 10h15. La mention, contenue dans ce courrier, invitant le requérant à produire, le cas échéant, un mémoire en réplique " dans les meilleurs délais ", n'a pas eu pour effet de reporter la date de clôture de l'instruction. Le requérant est, dès lors, fondé à soutenir que, eu égard au délai extrêmement bref dont il a disposé pour présenter ses observations en réplique au premier mémoire en défense du préfet, le caractère contradictoire de l'instruction a été méconnu et à demander l'annulation du jugement attaqué.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

5. Aux termes de l'article L. 234-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les citoyens de l'Union européenne (...) qui ont résidé de manière légale et ininterrompue en France pendant les cinq années précédentes acquièrent un droit au séjour permanent sur l'ensemble du territoire français. (...) ". Aux termes de l'article L. 251-2 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 251-1 les citoyens de l'Union européenne (...) qui bénéficient du droit au séjour permanent prévu par l'article L. 234-1 ".

6. Il ressort des pièces du dossier et notamment du relevé de carrière de l'assurance retraite du 15 mars 2024, que M. A... a séjourné continument en France depuis 1986, totalise 124 trimestres cotisés, et travaille de manière continue depuis 2000. Ainsi, la condition de résidence légale et ininterrompue en France pendant cinq ans posée à l'article L. 234-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est remplie et M. A... bénéficie d'un droit au séjour permanent. Par suite, le droit au séjour permanent de M. A... fait obstacle à ce que soit prononcé à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens, que M. A... est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 9 novembre 2022 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Sur les frais relatifs à l'instance :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 2215221 du 31 janvier 2024 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 9 novembre 2022 du préfet des Hauts-de-Seine est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt est notifié à M. B... A..., au préfet des Hauts-de-Seine et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Pilven, président-assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024.

Le président-assesseur,

J.-E. PILVENLe président-rapporteur,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

F. PETIT-GALLAND

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 24VE00551


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24VE00551
Date de la décision : 11/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : BORIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-11;24ve00551 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award