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25/06/2024 | FRANCE | N°21VE02917

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 6ème chambre, 25 juin 2024, 21VE02917


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Draveil du 26 juin 2019 en tant qu'elle approuve la révision du plan local d'urbanisme de la commune et la décision implicite de rejet de son recours gracieux tendant à l'annulation de cette délibération.



Par une ordonnance n° 2000046 rendue le 2 septembre 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif

de Versailles a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Draveil du 26 juin 2019 en tant qu'elle approuve la révision du plan local d'urbanisme de la commune et la décision implicite de rejet de son recours gracieux tendant à l'annulation de cette délibération.

Par une ordonnance n° 2000046 rendue le 2 septembre 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 octobre 2021, M. B..., représenté par Me Vos, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération du 26 juin 2019 et la décision implicite de rejet du recours gracieux tendant à l'annulation de cette délibération ;

3°) de condamner la commune de Draveil au paiement d'une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

- le premier juge a considéré à tort que la requête était tardive ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

- les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables n'ont fait l'objet d'aucun débat de la part des conseillers municipaux, en méconnaissance de l'article L. 153-12 du code de l'urbanisme ;

- le projet d'aménagement et de développement durables ne contient aucun objectif chiffré, en méconnaissance de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme ;

- le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation en classant la parcelle litigeuse n° 231 en tant qu'espace naturel ;

- les orientations d'aménagement et de programmation méconnaissent l'article R. 151-8 du code de l'urbanisme ;

- le règlement de la zone AUH du plan local d'urbanisme est contraire à l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 décembre 2022, la commune de Draveil, représentée par Me Mokhtar, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la demande de première instance était tardive ;

- les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Albertini,

- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,

- et les observations de Me Mokhtar, pour la commune de Draveil.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 26 juin 2019, le conseil municipal de la commune de Draveil a approuvé la révision du plan local d'urbanisme. Par un recours gracieux du 2 septembre 2019, M. B... a demandé au maire de la commune de retirer cette délibération. Cette demande n'a fait l'objet d'aucune réponse, donnant ainsi lieu à une décision implicite de rejet. M. B... relève appel de l'ordonnance du 2 octobre 2021 par laquelle le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 421-l du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée (...) ". Aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. (...) ". Aux termes de l'article R. 153-20 du code de l'urbanisme : " Font l'objet des mesures de publicité et d'information prévues à l'article R. 153-21 : (...) 2" La délibération qui approuve, révise, modifie ou abroge un plan local d'urbanisme ". Aux termes de l'article R. 153- 21 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " Tout acte mentionné à l'article R. I53-20 est affiché pendant un mois au siège de l'établissement public de coopération intercommunale compétent et dans les mairies des communes membres concernées, ou en mairie. Mention de cet affichage est insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département. (...) L'arrêté ou la délibération produit ses effets juridiques dès l'exécution de l'ensemble des formalités prévues au premier alinéa, la date à prendre en compte pour l'affichage étant celle du premier jour où il est effectué ". Il résulte de ces dispositions que le délai de recours contentieux à l'encontre de la délibération qu'elle vise court à compter de la plus tardive des deux dates correspondantes, l'une au premier jour d'une période d'affichage de ladite délibération en mairie d'une durée d'un mois, l'autre à la mention de cet affichage dans un journal diffusé dans le département.

3. Par une mesure d'instruction en date du 10 mars 2022, qui n'a fait l'objet d'aucune réponse de la part de la commune, la cour a demandé à la commune de Draveil d'apporter, dans un délai de 15 jours, les justificatifs de la mention de l'affichage en mairie de la délibération du 26 juin 2019 dans un ou plusieurs journaux diffusés dans le département. Ainsi, dès lors que la commune n'apporte pas la preuve de l'affichage en mairie de la délibération litigieuse ni la mention de cet affichage dans un journal diffusé dans le département, le délai de recours contentieux n'avait pas commencé à courir, de telle sorte que le recours gracieux exercé par M. B... reçu le 6 septembre 2019 ne pouvait être considéré comme tardif. En outre, ce recours gracieux a fait l'objet d'un accusé de réception de la part de la commune en date du 12 septembre 2019 indiquant qu'en l'absence de réponse de sa part dans un délai de deux mois, l'intéressé pourrait saisir le tribunal administratif de Versailles. Dès lors, la décision implicite de rejet de son recours gracieux étant née le 6 novembre 2019, M. B... pouvait engager un recours contentieux jusqu'au 7 janvier 2020. La demande de première instance ayant été enregistrée le 6 janvier 2020 par le greffe du tribunal administratif de Versailles, cette dernière n'était donc pas tardive. Par suite, c'est à tort que le premier juge a rejeté la demande de M. B... comme étant irrecevable. Il y a donc lieu de statuer par la voie de l'évocation sur l'ensemble des conclusions présentées par M. B... en première instance.

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 153-12 du code de l'urbanisme : " Un débat a lieu au sein de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale et des conseils municipaux ou du conseil municipal sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables mentionné à l'article L. 151-5, au plus tard deux mois avant l'examen du projet de plan local d'urbanisme. Lorsque le plan local d'urbanisme est élaboré par un établissement public de coopération intercommunale, le débat prévu au premier alinéa du présent article au sein des conseils municipaux des communes membres est réputé tenu s'il n'a pas eu lieu au plus tard deux mois avant l'examen du projet de plan local d'urbanisme ". Il résulte de ces dispositions que les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) doivent faire l'objet d'une inscription à l'ordre du jour d'une séance du conseil municipal se tenant au moins deux mois avant l'examen du projet de plan local d'urbanisme et que les membres du conseil municipal doivent être mis à même de discuter utilement, à cette occasion, des orientations générales envisagées.

5. M. B... soutient que la délibération litigieuse a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables n'ont fait l'objet d'aucune discussion de la part des conseillers municipaux. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de la délibération n° 18 04 049 du 12 avril 2018 que le maire de la commune de Draveil a inscrit à l'ordre du jour un débat sur les orientations du projet d'aménagement et de développement durables, au cours duquel sont intervenus M. D... et Mme A..., afin d'avoir des précisions sur ce que contient le projet d'aménagement et de développement durables. Ce débat a donc eu lieu conformément aux dispositions précitées, dès lors qu'il s'est tenu plus de deux mois avant la révision du plan local d'urbanisme, approuvée le 26 juin 2019. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 153-12 du code de l'urbanisme doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme dans sa version applicable au litige, le projet d'aménagement et de développement durables " fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain (...) ".

7. Si M. B... fait valoir que le projet d'aménagement et de développement durables ne contient aucun objectif chiffré, le projet en cause comporte toutefois en page 3 la phrase suivante : " au regard des dispositions du code de l'urbanisme l'objectif chiffré de la consommation d'espace sera donc de zéro mètre carré ". Dès lors, cette mention correspond bien à un objectif chiffré de consommation d'espace, conformément à ce qui est prévu à l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen doit être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 151-8 du code de l'urbanisme dans sa version applicable au litige : " Les orientations d'aménagement et de programmation des secteurs de zones urbaines ou de zones à urbaniser mentionnées au deuxième alinéa du R. 151-20 dont les conditions d'aménagement et d'équipement ne sont pas définies par des dispositions réglementaires garantissent la cohérence des projets d'aménagement et de construction avec le projet d'aménagement et de développement durables. Elles portent au moins sur : 1° La qualité de l'insertion architecturale, urbaine et paysagère 2° La mixité fonctionnelle et sociale ; 3° La qualité environnementale et la prévention des risques ; 4° Les besoins en matière de stationnement ; 5° La desserte par les transports en commun ; 6° La desserte des terrains par les voies et réseaux. Ces orientations d'aménagement et de programmation comportent un schéma d'aménagement qui précise les principales caractéristiques d'organisation spatiale du secteur ".

9. Il ressort des pièces du dossier que les secteurs classés en zone AUH ont été définis dans le règlement du plan local d'urbanisme de la manière suivante : " Zones intégrées dans le tissu urbain destinées à accueillir des logements individuels dans le cadre d'une opération d'ensemble. Les secteurs classés en AUH correspondent à des cœurs d'îlots et à des fonds de parcelles qui ne sont pas aujourd'hui suffisamment équipés et desservis et dont l'urbanisation n'est possible d'une part que par la réalisation des accès et voies de desserte et, d'autre part, que par une réorganisation foncière ". Dès lors, les orientations d'aménagement et de programmation concernant les secteurs de la commune à urbaniser n'étaient pas obligatoires dans la mesure où ces secteurs ont été définis par des dispositions réglementaires. En outre, et en tout état de cause, le simple fait que les orientations d'aménagement et de programmation poursuivraient également d'autres objectifs que ceux mentionnés par les dispositions citées au point 8 ne les rend pas illégales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 151-8 du code de l'urbanisme doit être écarté.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone. ".

11. Il ressort des pièces du dossier que le règlement de la zone AUH vise " des cœurs d'îlots et des fonds de parcelle qui ne sont pas aujourd'hui suffisamment équipés et desservis et dont l'urbanisation n'est possible d'une part que par la réalisation des accès et voie de desserte et, d'autre part, que par une réorganisation foncière ". Dès lors, contrairement à ce qu'il soutient, M. B... ne peut se prévaloir de la méconnaissance de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme puisque la zone AUH, d'après sa définition par le règlement du plan local d'urbanisme, n'est pas suffisamment équipée et desservie par les réseaux, ce qui renvoie donc à l'alinéa 3 dudit article. La création de ces zones est conforme aux dispositions précitées dès lors que la révision du plan local d'urbanisme a précisément pour objectifs de fixer des orientations d'aménagement et de programmation de la zone en l'absence de caractère suffisant à ce stade des voies d'accès, c'est donc pour cette raison que la commune de Draveil a procédé à la révision du plan local d'urbanisme approuvée par la délibération en litige afin d'ouvrir à l'urbanisation la zone AUH. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme doit être écarté.

12. En dernier lieu, si M. B... soutient que la condition à l'ouverture à l'urbanisation relative à une préalable réorganisation foncière n'est pas intelligible, ce moyen doit être également écarté dès lors qu'il ressort clairement des documents du PADD que le projet d'aménagement de la commune suppose une modification cadastrale au moyen d'acquisition de fonds de parcelle, par la commune ou par un tiers, pour l'implantation des voies et des nouveaux logements.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. B... présentée devant le tribunal administratif de Versailles et tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune de Draveil du 26 juin 2019 en tant qu'elle approuve la révision du plan local d'urbanisme de la commune et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux tendant à l'annulation de cette délibération doit être rejetée.

Sur les frais relatifs à l'instance d'appel :

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme totale de 1 500 euros à verser à la commune de Draveil. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune la somme demandée par M. B....

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 2 septembre 2021 du tribunal administratif de Versailles est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Versailles et le surplus de ses conclusions devant la cour sont rejetés.

Article 3 : M. B... versera la somme de 1 500 euros à la commune de Draveil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune de Draveil.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Pilven, président assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2024.

Le président-assesseur,

J.-E. PILVENLe président-rapporteur,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne à la préfète de l'Essonne en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 21VE02917 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02917
Date de la décision : 25/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU). - Légalité des plans. - Modification et révision des plans.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : D4 AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-25;21ve02917 ?
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