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18/06/2024 | FRANCE | N°22VE01183

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 4ème chambre, 18 juin 2024, 22VE01183


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 3 avril 2020 par laquelle le président du conseil départemental du Val-d'Oise a prononcé le retrait de son agrément en qualité d'assistante maternelle.

Par un jugement n° 2007828 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette décision et mis à la charge du département du Val-d'Oise la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du c

ode de justice administrative.

Procédure devant la cour :



Par une requête,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 3 avril 2020 par laquelle le président du conseil départemental du Val-d'Oise a prononcé le retrait de son agrément en qualité d'assistante maternelle.

Par un jugement n° 2007828 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette décision et mis à la charge du département du Val-d'Oise la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 mai 2022, le département du Val-d'Oise, représenté par Me Cazin, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.

Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation ;

- ils ont omis de prendre en compte un nombre important d'éléments fondant les reproches adressés à Mme B... et justifiant le retrait de son agrément ;

- les manquements reprochés, analysés et appréciés dans leur ensemble, justifiaient une mesure de retrait ;

- c'est à bon droit qu'il a considéré que Mme B... ne proposait pas un accueil garantissant la sécurité et le bien-être des enfants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2022, Mme A... B..., représentée par Me Buisson, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du département du Val-d'Oise la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le département du Val-d'Oise ne sont pas fondés.

Par ordonnance du président de la 4ème chambre du 29 avril 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 17 mai 2024 à 12h00, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le décret n° 2012-364 du 15 mars 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ablard,

- les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteure publique,

- les observations de Me Benmerad pour le département du Val-d'Oise, et celles de Me Paternel pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., titulaire d'un agrément en qualité d'assistante maternelle depuis le 7 août 2013, renouvelé pour une durée de cinq ans le 7 août 2018, a été recrutée par les parents de l'enfant Alyssa née le 4 août 2017 afin d'assurer sa garde à compter du 3 décembre 2018. Le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Pontoise a ouvert une enquête pour " violences sans ou avec ITT inférieure ou égale à 8 jours " à l'encontre de Mme B..., à la suite d'une plainte déposée par les parents de cette enfant le 10 décembre 2019. Par une décision du 23 décembre 2019, la présidente du conseil départemental du Val-d'Oise a suspendu l'agrément de Mme B... pour une durée de quatre mois. Par une décision du 3 avril 2020, la même autorité a retiré l'agrément de Mme B... en application de l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles, au motif qu'elle ne garantissait pas à son domicile la santé, la sécurité et l'épanouissement des enfants qui lui étaient confiés. Le département du Val-d'Oise relève appel du jugement du 18 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette décision du 3 avril 2020.

2. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles, dans sa version alors en vigueur : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel (...) est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. (...) L'agrément est accordé (...) si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs (...) accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) ". L'article L. 421-6 du même code, dans sa version alors en vigueur, dispose : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. En cas d'urgence, le président du conseil départemental peut suspendre l'agrément. Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié. Toute décision de retrait de l'agrément, de suspension de l'agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies. À cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause ou risque de l'être.

4. Il ressort des pièces du dossier que pour considérer que Mme B... ne proposait plus un accueil garantissant la sécurité et le bien-être des enfants qui lui étaient confiés et procéder pour ce motif au retrait de son agrément, le département du Val-d'Oise s'est fondé sur les circonstances qu'une enquête judiciaire visant l'intéressée était toujours en cours, que celle-ci rencontrait des difficultés relationnelles avec des parents employeurs, que son positionnement professionnel ainsi que ses pratiques éducatives étaient inadaptés, et qu'elle se remettait difficilement en question. A cet égard, la circonstance que les parents de l'enfant Alyssa, après avoir constaté la présence d'hématomes sur les mollets de leur fille et un changement de comportement inexpliqué depuis plusieurs mois, ont déposé plainte contre l'intéressée le 10 décembre 2019 et procédé à son licenciement le 21 décembre suivant, permettait raisonnablement de penser que cette enfant pouvait être victime de comportements de nature à compromettre sa santé et sa sécurité. Si, comme le fait valoir Mme B..., cette plainte a fait l'objet d'un classement sans suite le 18 janvier 2021, au motif que " les faits ou les circonstances des faits de la procédure n'ont pu être clairement établis par l'enquête ", cette circonstance est en tout état de cause postérieure à la décision attaquée du 3 avril 2020. A cet égard, si Mme B... soutient que le retrait litigieux de son agrément est intervenu prématurément, sans attendre le résultat de l'enquête judiciaire, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu'à l'occasion d'une visite au domicile de Mme B... effectuée le 11 décembre 2019, le centre de protection maternelle et infantile (PMI) a constaté une interaction très insuffisante de celle-ci avec les enfants qui lui étaient confiés et une inadaptation de l'aménagement de son espace d'éveil aux besoins de ces enfants. En outre, l'intéressée a admis avoir employé, en présence des enfants, des termes grossiers à l'égard de ses animaux de compagnie, avoir laissé la télévision allumée pendant plusieurs heures, et avoir eu de longues conversations téléphoniques, se désintéressant ainsi des enfants qui lui étaient confiés. Enfin, si Mme B..., qui verse au dossier plusieurs attestations établies par des parents lui ayant confié leurs enfants, faisant état de ses compétences professionnelles et de ses qualités humaines, fait valoir que les faits qui lui sont reprochés sont isolés, aucun comportement fautif n'ayant été relevé depuis qu'elle exerce les fonctions d'assistante maternelle, ces éléments ne sont pas de nature à atténuer la gravité des faits reprochés, dont la matérialité est établie. Dans ces conditions, et alors que la réalité des difficultés relationnelles rencontrées par Mme B... avec les parents de l'enfant Alyssa est établie par les pièces du dossier, et notamment son incapacité à répondre aux inquiétudes exprimées par ceux-ci, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le département du Val-d'Oise a procédé au retrait de l'agrément de l'intéressée pour les motifs exposés ci-dessus.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement, que le département du Val-d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé sa décision de retrait d'agrément du 3 avril 2020.

Sur les dépens :

6. Aucun dépens n'ayant été exposé dans la présente instance, les conclusions du département du Val-d'Oise tendant au remboursement des dépens sont sans objet et doivent, par suite, être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département du Val-d'Oise, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... le versement au département du Val-d'Oise d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2007828 du 18 mars 2022 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Mme B... versera au département du Val-d'Oise la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête du département du Val-d'Oise est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au département du Val-d'Oise et à Mme A... B....

Délibéré après l'audience du 4 juin 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Le Gars, présidente,

M. Ablard, premier conseiller,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juin 2024.

Le rapporteur,

T. ABLARD

La présidente,

A-C. LE GARS

La greffière,

V. MALAGOLI

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 22VE01183 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE01183
Date de la décision : 18/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-035-02 Procédure. - Procédures instituées par la loi du 30 juin 2000. - Référé suspension (art. L. 521-1 du code de justice administrative).


Composition du Tribunal
Président : Mme LE GARS
Rapporteur ?: M. Thierry ABLARD
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : SELARL PAUL BUISSON

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-18;22ve01183 ?
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