Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 31 mars 2021 par lequel le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2102727 du 17 septembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 mars 2022, M. A..., représenté par Me Magbondo, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier, dès lors, d'une part, que les premiers juges ont commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation familiale, ainsi qu'une erreur de droit et, d'autre part, qu'ils n'ont pas statué sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2022, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 février 2022, qui n'a pas été régulièrement notifiée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Ablard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant guinéen né le 26 octobre 2002 à Kindia, est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2018 selon ses déclarations. Il a été interpellé par les services de police de Sainte-Geneviève-des-Bois le 30 mars 2021 pour des faits de vol à l'étalage et placé en garde à vue le même jour. Par un arrêté du 31 mars 2021, le préfet de l'Essonne l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans. M. A... relève appel du jugement du 17 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, si le requérant soutient que les premiers juges ont commis une erreur manifeste d'appréciation et une erreur de droit, ces moyens, qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal administratif, ne sont pas de nature à entacher ce jugement d'irrégularité.
3. En second lieu, M. A... soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. Toutefois, il ressort du point 8 du jugement attaqué que ces conclusions ont été explicitement rejetées, les premiers juges ayant précisé qu'elles n'étaient assorties d'aucun moyen. A cet égard, il ressort de la demande de première instance que M. A... s'est borné à indiquer, sans autre précision, que c'est " à tort " que le préfet de l'Essonne a considéré que son comportement constituait une menace pour l'ordre public. Par suite, ce moyen doit être écarté.
Au fond :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
5. M. A..., qui soutient que les stipulations précitées ont été méconnues, se borne à faire valoir, comme en première instance, qu'il est dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Toutefois, entré irrégulièrement en France en 2018, l'intéressé ne justifie pas d'une ancienneté de séjour suffisante sur le territoire national. En outre, M. A..., célibataire et sans enfant, n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans. Enfin, l'intéressé ne justifie d'aucune insertion particulière au sein de la société française, notamment d'un point de vue professionnel. Par suite, et alors que M. A... ne conteste pas l'affirmation du préfet de l'Essonne selon laquelle il a été interpellé à deux reprises en 2018 et 2021 pour des faits de vol à l'étalage, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté, ainsi que, à le supposer soulevé, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de l'Essonne.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
7. Si M. A... soutient qu'il serait exposé à des mauvais traitements en cas de retour dans son pays d'origine, il n'assortit pas ce moyen des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Au demeurant, et comme l'ont relevé les premiers juges, il est constant qu'il n'a présenté aucune demande d'asile depuis son entrée sur le territoire national. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance ces stipulations précitées doit être écarté.
8. En dernier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III (...) sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".
9. Ainsi qu'il a été dit au point 5 du présent arrêt, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré irrégulièrement en France au cours de l'année 2018, qu'il ne justifie d'aucune insertion particulière au sein de la société française et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans. Par ailleurs, il a fait l'objet d'un signalement pour des faits de vol à l'étalage le 26 septembre 2018 et a été interpellé pour des faits identiques le 30 mars 2021. Dès lors, son comportement peut être regardé comme étant de nature à constituer une menace pour l'ordre public. Ainsi, au regard de l'ensemble de ces éléments, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2024, à laquelle siégeaient :
M. Brotons, président de chambre,
M. Ablard, premier conseiller,
Mme Pham, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 mars 2024.
Le rapporteur,
T. ABLARD
Le président,
S. BROTONS
La greffière,
S. de SOUSA
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 22VE00638