La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2024 | FRANCE | N°22VE00778

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 07 mars 2024, 22VE00778


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société PI-3A a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Bourg-la-Reine sur sa demande de lui délivrer un permis pour la démolition de deux maisons individuelles et la construction d'un bâtiment d'habitation collectif ainsi que l'arrêté du 17 février 2020 par lequel il a expressément rejeté sa demande, d'enjoindre au maire de Bourg-la-Reine de lui délivrer un certificat de permis

de construire tacite ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer le permis de construire sol...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société PI-3A a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Bourg-la-Reine sur sa demande de lui délivrer un permis pour la démolition de deux maisons individuelles et la construction d'un bâtiment d'habitation collectif ainsi que l'arrêté du 17 février 2020 par lequel il a expressément rejeté sa demande, d'enjoindre au maire de Bourg-la-Reine de lui délivrer un certificat de permis de construire tacite ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer le permis de construire sollicité ou, à titre encore subsidiaire, de réinstruire sa demande sous astreinte et de mettre à la charge de la commune de Bourg-la-Reine une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2004896 du 1er février 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 17 février 2020 du maire de la commune de Bourg-la-Reine et a enjoint au maire de la commune de Bourg-la-Reine de délivrer à la société PI-3A un certificat de permis de construire tacite dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement les 5 avril 2022 et 28 août 2023, la commune de Bourg-la-Reine, représentée par Me Ghaye, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 1er février 2022 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société SAS PI-3A devant ce tribunal tendant à l'annulation de la décision de rejet tacite de la demande de permis de construire du 22 janvier 2020 et de la demande explicite de rejet de cette demande du 17 février 2020 ;

3°) de mettre à la charge de la société SAS PI-3A une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la cour est compétente pour juger la présente requête ;

- les premiers juges n'ont pas visé l'intégralité des écritures présentées en première instance ;

- ils ont omis de répondre à l'argumentation selon laquelle la présentation initiale de la demande de permis de construire, le 20 septembre 2019, emportait par elle-même une division foncière justifiant les conditions d'intervention de cette division soit au titre d'un lotissement, soit au titre d'un permis de construire valant division ;

- ils n'ont pas davantage répondu à la référence claire effectuée par la commune à la nomenclature des pièces établies par la pétitionnaire, composant le dossier initial de demande ; nomenclature qui mentionnait un " plan de division de la parcelle T n° 93 " ;

- ils ont omis de statuer sur le moyen en défense tiré de ce que la SAS PI-3A avait formé une nouvelle demande à la date du 20 janvier 2020 alors que cette société soutenait qu'elle avait seulement soulevé une modification de l'assiette foncière, prenant en compte initialement la parcelle cadastrée T n° 93 à hauteur d'une superficie de 403 m², alors qu'elle avait ensuite précisé que le projet comprenait la totalité de la surface de ladite parcelle à hauteur de 2 090 m² ;

- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs en validant tout d'abord son raisonnement de la nécessité de l'obtention par la pétitionnaire d'une autorisation de lotir préalablement au dépôt de la demande de permis de construire, pour ensuite écarter cet argument au motif que ladite pétitionnaire avait ultérieurement modifié l'assiette foncière de son projet ;

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de la localisation du terrain d'assiette du projet dans le périmètre imposant le contrôle de l'Architecte des Bâtiments de France, cette circonstance étant incompatible avec le bénéfice d'un permis de construire tacite ;

- ce jugement est entaché d'erreur de droit en considérant que le maire aurait nécessairement été conduit à porter une appréciation sur les faits et, en particulier, sur l'existence ou non d'une division de propriété en jouissance de la parcelle T0093 antérieurement à la délivrance du permis de construire et n'était, dans ces conditions, pas en situation de compétence liée ;

- la demande de permis de construire est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- à titre subsidiaire, le maire était en situation de compétence liée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 juillet 2023 et le 31 janvier 2024, la société SAS PI-3A, représentée par la SELARL Etche Avocats, conclut à titre principal, au rejet de la requête comme présentée devant une juridiction incompétente pour en connaître, à titre subsidiaire, au rejet de la requête comme mal fondée et à titre subsidiaire à l'annulation de la décision de la commune du 22 janvier 2020 portant rejet du permis de construire, demande d'enjoindre au maire de lui délivrer le permis de construire sollicité et, en tout état de cause, de mettre à la charge de la commune de Bourg-la-Reine la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la cour n'est pas compétente pour juger la requête, dès lors que le jugement attaqué doit être regardé comme rendu en premier et dernier ressort et ne peut donc faire l'objet que d'un pourvoi en cassation ;

- la requête d'appel est irrecevable en ce que la commune ne s'est pas conformée aux règles de notifications conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pilven,

- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,

- et les observations de Me Radoszycki, pour la commune de Bourg-la-Reine.

Considérant ce qui suit :

1. Le 20 septembre 2019, la société PI-3A a déposé une demande de permis pour la démolition de deux maisons individuelles et la construction d'un bâtiment d'habitation collective situé au 4 bis-6bis avenue Galois au sein de la commune de Bourg-la-Reine. Par un courrier du 17 octobre 2019, le maire de Bourg-la-Reine lui a demandé de compléter son dossier et lui a indiqué qu'à défaut de production des pièces manquantes dans un délai de trois mois à compter de la réception de son courrier, un refus tacite de permis de construire interviendrait. La société a déposé des pièces complémentaires le 17 janvier 2020. Par un courrier du 17 février 2020, le maire lui a indiqué que trois pièces étant toujours manquantes, un refus tacite de permis de construire était intervenu. La commune de Bourg-la-Reine demande l'annulation du jugement n° 2004896 du 1er février 2022 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 17 février 2020 du maire de la commune de Bourg-la-Reine et lui a enjoint de délivrer à la société PI-3A un certificat de permis de construire tacite dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement.

Sur la compétence de la cour administrative d'appel de Versailles :

2. En vertu des dispositions de l'article R. 811-1-1 du code de justice administrative, les tribunaux administratifs statuent en premier et dernier ressort sur les recours introduits entre le 1er décembre 2013 et le 31 décembre 2022, dirigés contre " les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d'habitation ou contre les permis d'aménager un lotissement lorsque le bâtiment ou le lotissement est implanté en tout ou partie sur le territoire d'une des communes mentionnées à l'article 232 du code général des impôts et son décret d'application, à l'exception des permis afférents aux opérations d'urbanisme et d'aménagement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 mentionnées au 5o de l'article R. 311-2 ".

3. Ces dispositions, qui ont pour objectif, dans les zones où la tension entre l'offre et la demande de logements est particulièrement vive, de réduire le délai de traitement des recours pouvant retarder la réalisation d'opérations de construction de logements, dérogent aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative qui prévoient que " toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance " et doivent donc s'interpréter strictement. Elles ne s'appliquent pas aux jugements statuant sur des recours formés contre des refus d'autorisation.

4. La demande formée par la société SAS PI-3A devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise tendait à l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Bourg-la-Reine sur sa demande de lui délivrer un permis de démolition et de construction, d'autre part, de l'arrêté du 17 février 2020 par lequel il a également expressément rejeté sa demande. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le jugement ayant statué sur cette demande n'a pas été rendu en dernier ressort, sans qu'ait d'incidence la circonstance que le tribunal administratif ait jugé que l'arrêté attaqué avait eu pour effet de procéder au retrait du permis de construire accordé tacitement le 20 décembre 2019. Par suite, la requête de la commune de Bourg-la-Reine présente le caractère d'un appel.

Sur la recevabilité de la requête :

5. Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code (...) ".

6. Si les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'imposent pas, à peine d'irrecevabilité, au requérant qui interjette appel contre un jugement annulant un refus de délivrer un permis de construire de notifier sa requête au pétitionnaire, il en va autrement si, à l'issue du jugement, le droit du pétitionnaire à obtenir une autorisation de construire a été reconnu. Il en est ainsi dès lors que les premiers juges ont constaté l'existence d'un permis de construire tacite et ont annulé, pour ce motif, la décision portant refus d'accorder ce permis.

7. Ainsi que cela résulte de ce qui a été dit au point 4, le tribunal a constaté l'existence d'un permis de construire au bénéfice de la société PI-3A. Dès lors, le recours de la commune de Bourg-la-Reine devait être notifié à la société, ainsi que le soutient celle-ci. Il ressort des pièces du dossier que la commune requérante justifie de l'accomplissement de la formalité prévue à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, en produisant une lettre du 8 avril 2022 accompagnée de la copie de la requête déposée devant la cour, dont l'accusé de réception mentionne que celui-ci a été distribué le 12 avril 2022, soit dans le délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours enregistré le 5 avril 2022 au greffe de la cour. Par suite, la société PI-3A n'est pas fondée à opposer l'irrecevabilité de la requête présentée par la commune sur ce fondement.

Sur la régularité du jugement :

8. En premier lieu, contrairement à ce que soutient la commune requérante, après avoir visé les mémoires produits par la commune de Bourg-la-Reine et les conclusions présentées par celle-ci, les premiers juges ont précisé l'intégralité des moyens soulevés en défense par la commune, tirés notamment de l'irrecevabilité de la requête en ce qu'elle est dirigée contre une décision purement confirmative qui ne fait pas grief, de ce que le moyen tiré du défaut de contradictoire est inopérant car elle était en situation de compétence liée, de ce qu'elle pouvait également fonder sa décision sur la méconnaissance par le projet des dispositions de l'article UA 2.2.2 du règlement du plan local d'urbanisme et enfin de ce que les autres moyens soulevés par la sociétés PI-3A ne sont pas fondés. Dans ces conditions, faute pour la commune requérante d'apporter davantage de précisions sur les prétendues omissions dans le visa de ses écritures par les premiers juges, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, si la commune de Bourg-la-Reine fait grief aux premiers juges de ne pas avoir répondu à son argumentation tenant tout d'abord à ce que la présentation initiale de la demande de permis de construire déposée par la société PI-3A du 20 septembre 2019 emportait par elle-même une division foncière de la parcelle cadastrée section T0093, et qu'ainsi il revenait au pétitionnaire de justifier de cette division, il ressort toutefois de la lecture du jugement attaqué que les premiers juges ont expressément répondu à ce moyen aux points 9 et 10 du jugement en indiquant que si le projet initialement présenté par la société PI-3A présentait des ambigüités laissant penser à une division foncière, les pièces du dossier déposées le 17 janvier 2020 par la société PI-3A précisent que la parcelle T0093 n'avait pas fait l'objet d'une division en propriété, ce que confirme le plan cadastral, que le projet portait sur l'intégralité de cette parcelle et que la mention d'une servitude de cours communes a été supprimée. Par ailleurs, les premiers juges ont également analysé son argumentation tirée de la localisation du terrain d'assiette du projet dans le périmètre imposant le contrôle de l'Architecte des Bâtiments de France au point 4 du jugement attaqué. Par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer dans toutes ses branches doit être écarté.

10. En troisième lieu, la commune de Bourg-la-Reine fait valoir que le jugement attaqué serait entaché d'une contradiction de motifs aux points 9 et 10, dès lors que les premiers juges, d'une part, ont estimé que le maire de Bourg-la-Reine était fondé à demander à la société PI-3A qu'elle sollicite une autorisation de lotir tout en retenant, d'autre part, qu'il avait commis une erreur d'appréciation et une erreur de droit en estimant que la production d'une autorisation de lotir restait nécessaire. Toutefois, il résulte du point 10 du jugement que les premiers juges ont pris en considération le fait que les pièces apportées par la société PI-3A le 20 janvier 2020 démontraient que la parcelle T0093 n'avait pas fait l'objet d'une division en propriété, ce que confirme le plan cadastral, et que son projet portait sur l'intégralité de cette parcelle. Par suite, et en tout état de cause, le moyen doit également être écarté, une contradiction de motifs n'étant pas de nature à entacher d'irrégularité un jugement mais uniquement à remettre en cause son bien-fondé.

11. Enfin, si la commune requérante soutient que le tribunal administratif a commis une erreur de droit, ce moyen se rapporte au bien-fondé du jugement attaqué et est sans incidence sur sa régularité. Il doit, par suite, être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

12. Aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, issu de l'article 37 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ". En vertu de ces dispositions il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un permis de construire en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance. Dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens. Il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.

13. Aux termes de l'article L. 424-2 du code de l'urbanisme : " Le permis est tacitement accordé si aucune décision n'est notifiée au demandeur à l'issue du délai d'instruction (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 423-22 de ce même code : " (...) le dossier est réputé complet si l'autorité compétente n'a pas, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier en mairie, notifié au demandeur (...) la liste des pièces manquantes dans les conditions prévues par les articles R. 423-38 et R. 423-41 ". Aux termes de l'article R. 423-23 du même code : " Le délai d'instruction de droit commun est de : (...) / c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d'aménager ". Aux termes de l'article R. 423-38 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la décision attaquée : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou, dans le cas prévu par l'article R. 423-48, un échange électronique, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ". Aux termes de l'article R. 423-39 du même code : " L'envoi prévu à l'article R. 423-38 précise : / a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; / b) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l'objet d'une décision tacite de rejet en cas de demande de permis (...) ". Aux termes de l'article R. 423-42 de ce code : " Lorsque le délai d'instruction de droit commun est modifié en application des articles R. 423-24 à R. 423-33, l'autorité compétente indique au demandeur ou à l'auteur de la déclaration, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie : / a) Le nouveau délai et, le cas échéant, son nouveau point de départ (...) ". Enfin aux termes de l'article R. 423-67 du même code : " Par exception aux dispositions de l'article R. * 423-59, le délai à l'issue duquel l'architecte des Bâtiments de France est réputé avoir donné son accord ou, dans les cas mentionnés à l'article L. 632-2-1 du code du patrimoine, émis son avis favorable est de deux mois lorsque le projet soumis à permis est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques (...) ".

14. La commune conteste la naissance d'une décision tacite de permis de construire en soutenant que le projet se situe dans une zone nécessitant l'avis de l'architecte des bâtiments de France et qu'en l'absence d'un tel avis, une telle décision tacite n'a pu intervenir. Toutefois, le délai d'instruction de trois mois, prévu par les dispositions de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme, ne peut être modifié, soit dans l'hypothèse d'une demande de pièces complémentaires prévues par l'article R. 423-22 du code de l'urbanisme, soit dans l'hypothèse d'une prolongation prévue par les dispositions de l'article R. 423-42 du même code, que si l'autorité compétente en a informé le demandeur dans le délai d'un mois à compter du dépôt de sa demande.

15. Or, il ressort des pièces du dossier que la demande formée par la commune, par son courrier du 17 octobre 2019, tendant à la production de pièces complémentaires et informant d'un rallongement du délai en raison de la consultation de l'architecte des bâtiments de France pour un projet situé aux abords d'un monument historique, n'a été notifiée à la société PI-3A que le 21 octobre 2019, soit postérieurement au terme du délai d'un mois après le dépôt de la demande de cette société, fait le 20 septembre 2019, de sorte que cette notification était tardive. Par ailleurs, si la commune soutient que la société requérante avait été informée par message électronique de cette notification avant le 21 octobre 2019, elle ne le justifie pas. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a retenu que la société PI-3A était titulaire d'un permis de construire tacite le 20 décembre 2019, la circonstance que cette demande aurait dû être soumise à l'architecte des bâtiments de France étant sans incidence sur la naissance de cette décision et sur sa légalité.

16. Si la commune soutient aussi qu'elle aurait été en situation de compétence liée pour retirer le permis de construire ainsi accordé tacitement en raison de l'absence de consultation de l'architecte des bâtiments de France, aucune disposition légale ou aucun principe général ne lui fait une telle obligation.

17. Au demeurant, si la commune de Bourg-la-Reine persiste à faire valoir qu'il revenait à la société PI-3A de produire une autorisation de lotir sur la parcelle T0093 dès lors que la demande de permis de construire déposée par la société PI-3A faisait état d'un projet d'une surface de 698 m² étendu sur les parcelles cadastrées T0078 et T0080 et une partie de la parcelle T0093 et que le plan de masse du projet matérialisait également la limite du terrain d'assiette du projet au sein de la parcelle T0093, il est toutefois constant que, par les pièces et les précisions apportées le 20 janvier 2020 par la société PI-3A, la parcelle T0093 n'avait pas fait l'objet d'une division foncière et que le projet portait sur l'intégralité de cette parcelle, de sorte que le maire de la commune ne pouvait considérer comme nécessaire la production d'une telle autorisation.

18. En outre, la commune soutient en appel que les modifications et précisions apportées le 20 janvier 2020 par la société PI-3A, ayant eu pour effet d'intégrer l'intégralité de la parcelle T0093 d'une surface totale de 2 090 m², portant la superficie de l'assiette du projet de 692 m² à 2 395 m², auraient eu pour effet d'entraîner une modification substantielle du projet initial, de sorte qu'elle était saisie d'une nouvelle demande de permis de construire. Toutefois, les éléments complémentaires produits par la société n'ont pas entraîné de modification substantielle du projet mais de simples précisions sur les limites de l'unité foncière et les travaux projetés sont inchangés. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir qu'une modification substantielle du projet initial serait intervenue.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Bourg-la-Reine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision du 17 février 2020.

20. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par la commune de Bourg-la-Reine tendant à l'annulation du jugement n° 2004896 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 1er février 2022.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

21. Il y a lieu, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, d'enjoindre au maire de la commune de Bourg-la-Reine de délivrer à la société PI-3A un certificat de permis de construire tacite dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sans l'assortir d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société PI-3A, qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de la présente instance, la somme demandée par la commune requérante, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

23. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bourg-la-Reine une somme de 1 500 euros à verser à la société PI-3A au titre de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Bourg-la-Reine est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Bourg-la-Reine de délivrer à la société PI-3A un certificat de permis de construire tacite dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Bourg-la-Reine versera une somme de 1 500 euros à la société PI-3A en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bourg-la-Reine et à la société PI-3A.

Délibéré après l'audience du 8 février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Pilven, président-assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mars 2024.

Le rapporteur,

J.-E. PILVENLe président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au préfet des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 22VE00778 2


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award