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31/01/2024 | FRANCE | N°22VE00765

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 31 janvier 2024, 22VE00765


Vu les procédures suivantes :



Procédure contentieuse antérieure :



La société en nom collectif Klécar France a demandé au tribunal administratif d'Orléans, par trois requêtes distinctes :

- d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Chartres du 23 mai 2019 approuvant la modification du dossier de création de la ZAC Plateau Nord-Est et excluant le centre commercial de la Madeleine du périmètre de la ZAC ;

- de condamner solidairement la commune de Chartres et la SPL Chartres Aménagement à

l'indemniser du manque à gagner causé par l'illégalité de la décision de préemption n°14/84 en dat...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif Klécar France a demandé au tribunal administratif d'Orléans, par trois requêtes distinctes :

- d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Chartres du 23 mai 2019 approuvant la modification du dossier de création de la ZAC Plateau Nord-Est et excluant le centre commercial de la Madeleine du périmètre de la ZAC ;

- de condamner solidairement la commune de Chartres et la SPL Chartres Aménagement à l'indemniser du manque à gagner causé par l'illégalité de la décision de préemption n°14/84 en date du 4 mars 2014 ;

- de condamner l'Etat à l'indemniser de son préjudice du fait de l'inconstitutionnalité et de l'inconventionnalité de l'article L. 213-4 du code de l'urbanisme et de l'avis fautif donné par le service France Domaine sur la valeur des biens préemptés.

Par trois jugements n° 1902684, 1901513, 1901978 du 7 décembre 2021, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I- Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 22VE00765, les 1er avril 2022, 4 mai et 9 juin 2023, la société Klécar France, représentée par Me Rosenfeld, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1902684 ;

2°) d'annuler la délibération du 23 mai 2019 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chartres la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'information dispensée aux conseillers municipaux était insuffisante, en méconnaissance de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ;

- le dossier de création modifié était insuffisant au regard des exigences de l'article R. 311-2 du code de l'urbanisme, de même que l'étude d'impact ;

- la délibération est entachée de détournement de pouvoir, ayant été adoptée dans le seul but de faire obstacle à son droit de délaissement ;

- la délibération est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la délibération est entachée d'une inexactitude matérielle des faits dès lors qu'il était acquis à la date de cette délibération que le projet Altarea ne se ferait pas.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2023, la commune de Chartres, représentée par Me Barata, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) d'écarter les propos tenus par la société Klécar relatifs à l'instruction pénale ou, à défaut, de solliciter la communication de l'intégralité du dossier de l'instruction et de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure pénale ;

3°) de mettre à la charge de la société appelante la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par la société appelante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 23 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 décembre 2023.

II- Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 22VE00835, les 4 avril 2022, 4 mai, 9 juin, 15 septembre, 16 octobre, 17 novembre et 6 décembre 2023, ainsi qu'un mémoire enregistré le 17 décembre 2023 qu'il n'a pas été jugé utile de communiquer, la société Klécar France, représentée par Me Rosenfeld, avocat, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1901513 ;

2°) à titre principal, de condamner solidairement la commune de Chartres et la SPL Chartres Aménagement à acquérir l'immeuble préempté au prix de 26 920 116 euros diminué des frais (soit les émoluments des notaires, la taxe de publicité foncière et la contribution de sécurité immobilière), sous astreinte de 50 000 euros par jour de retard à compter de l'expiration du sixième mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir :

3°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement la commune de Chartres et la SPL Chartres Aménagement à lui verser une somme, avec intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2018 et capitalisation des intérêts échus à chaque anniversaire de cette même date, égale à la différence entre le prix mentionné au 2°) et :

- soit le prix auquel la ville acquerra l'actif si la procédure de délaissement engagée aboutit,

- soit, si cette procédure n'aboutit pas, la valeur au 30 juin 2023 de 19 362 887 euros, soit 7 557 229 euros, sauf à parfaire en fonction de l'évolution de la valeur de l'immeuble, somme à laquelle il y a lieu d'ajouter 10 000 000 euros au titre de sa perte de chance de voir la valeur des lots se maintenir causée par l'incertitude urbanistique et commerciale ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Chartres et de la SPL Chartres Aménagement la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le jugement ne répond pas aux moyens tirés du détournement de pouvoir, de l'absence de projet et de l'absence d'opération d'aménagement ;

- le jugement ne répond pas à la demande de réparation en nature ;

- la commune et la SPL ont commis une faute dès lors que la décision de préemption était illégale ; la SPL n'était pas compétente ratione temporis à la date de la décision de préemption ; à cette date, il n'existait par ailleurs ni ZAD, ni ZAC incluant la Madeleine dans leur périmètre mais uniquement une convention concédant à la SPL la réalisation d'une " opération d'aménagement " sans existence juridique ; il n'existait par ailleurs pas de projet à la date de la préemption, ce qui est corroboré par l'avenant du 29 juin 2015 à la convention d'aménagement retirant à l'aménageur les logements sociaux censés être construits à la place du centre de la Madeleine au motif que le financement ne pourrait être réuni que dix ans plus tard ; la délibération du 28 janvier 2010 s'en tenait à de " grandes hypothèses d'aménagement " auxquelles rien ne permettait de prêter un commencement de réalité ; le projet ne répondait pas à l'intérêt général dès lors qu'il avait pour objet de mettre fin aux activités économiques du centre de la Madeleine pour favoriser l'ouverture du nouveau centre commercial l'Iliade ; l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme a donc été méconnu en même temps que le principe de la liberté du commerce et de l'industrie et celui de la liberté d'entreprendre ; la décision de préemption fait par ailleurs état de motifs fallacieux (désenclavement du quartier de la Madeleine), insuffisants (rectification de tracés routiers) qui ne pouvaient balancer les coûts colossaux du projet, à commencer par le rachat de l'hypermarché Carrefour et les indemnités à verser à son exploitant pour le transfert de son fonds de commerce (20 millions d'euros selon Carrefour, alors que la ville est particulièrement endettée) ; l'opération envisagée impliquait en outre l'éviction des commerçants prenant à bail à la Madeleine et était de nature à provoquer des pertes d'emploi ; la sous-évaluation caricaturale du bien préempté et plus généralement l'ignorance des intimées des autres coûts permettent de conclure qu'aucun intérêt général ne s'attachait à la préemption ; enfin, la décision est entachée de détournement de pouvoir, la préemption ayant été prononcée aux fins de manipuler les prix ; la SPL s'est bornée à exécuter les instructions de la ville, sans aucune intention d'acquérir ; le ministère public près le tribunal correctionnel de Nanterre a d'ailleurs requis l'ouverture d'une instruction préparatoire du chef d'abus d'autorité ;

- la commune et la SPL ont manqué à leur obligation de prudence : en engageant une procédure de préemption dont elles ne pouvaient ignorer qu'elle aurait nécessairement le double résultat de délier Carmila de son engagement, tout en état inapte à aboutir, notamment en l'état de l'endettement de la ville, les intimées ont fait preuve d'une légèreté fautive ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu que la société était l'artisan de son propre préjudice au motif que la renonciation du titulaire à la préemption lui ouvrait pendant trois ans le droit de vendre au prix de la déclaration d'intention d'aliéner dès lors que le comportement des intimées a de facto rendu l'immeuble invendable ; après avoir renoncé à la préemption, la ville s'est en effet obstinée dans le projet Altarea et, y compris après l'avis négatif de la CNAC en avril 2016, a continué à faire savoir que le projet serait poursuivi et que les commerçants quitteraient tous le centre commercial de la Madeleine ; par ailleurs, une fois l'aménageur Altarea parti, la ville s'est employée à maintenir l'incertitude puisqu'elle a réduit le périmètre de la ZAC au prétexte de la réalisation d'un nouveau mail de la Madeleine qui remplacerait hors ZAC le centre actuel ; ainsi, depuis la préemption, l'avenir du centre de la Madeleine a toujours été obéré par des projets successifs promus par la ville, ce qui interdisait toute recherche d'acquéreur ;

- la responsabilité des intimées peut également être engagée au titre de la responsabilité sans faute ; la société a en effet subi un préjudice grave et spécial, excédant les aléas ou sujétions que doivent normalement supporter des vendeurs de terrains situés en zone urbaine ; neuf ans après que les intimées eurent rendu l'immeuble incessible, la société demeure durablement propriétaire de lots rendus de facto invendables par les défenderesses et exposés à une dévalorisation supplémentaire que les intimées s'emploient d'ailleurs à creuser ;

- à titre de réparation, la société sollicite une réparation en nature par acquisition de l'immeuble ; subsidiairement, une réparation par équivalent pourra être fixée.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 14 septembre et 16 novembre 2023, la commune de Chartres et la SPL Chartres Aménagement, représentées par Me Barata, avocat, demandent à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) d'écarter les propos tenus par la société Klécar relatifs à l'instruction pénale ou, à défaut, de solliciter la communication de l'intégralité du dossier de l'instruction et de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure pénale ;

3°) de mettre à la charge de la société appelante la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- la requête d'appel est tardive ;

- la requête est irrecevable dès lors que la société s'est désistée de son recours en excès de pouvoir contre la décision de préemption ;

- les moyens soulevés par la société appelante ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction est intervenue trois jours francs avant l'audience.

III- Par une requête et des mémoires, enregistrés sous le n° 22VE00836, les 4 avril 2022, 9 juin, 16 octobre et 16 novembre 2023, la société Klécar France, représentée par Me Rosenfeld, avocat, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de surseoir à statuer sur la réparation dans l'attente d'une décision définitive :

- soit de la cour administrative d'appel sur la réduction du périmètre de la ZAC si la demande d'annulation de la société est rejetée (n° 22VE00765),

- soit de la juridiction de l'expropriation sur le délaissement notifié par la société à la commune de Chartres (n° 18/000035),

- soit, en l'absence d'acquisition sur délaissement, de la décision définitive à intervenir sur la demande de réparation en nature formée par la société contre la SPL Chartres Aménagement et la commune de Chartres (n° 22VE00835) ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser, avec intérêts au taux légal à compter du 26 décembre 2018 et capitalisation des intérêts échus à chaque anniversaire de cette même date, la somme de 26 920 116 euros diminuée des frais (soit les émoluments des notaires, la taxe de publicité foncière et la contribution de sécurité immobilière), ou à tout le moins une somme égale à la différence entre (i) le prix de délaissement ou d'acquisition en exécution de la décision ordonnant réparation en nature ou, en l'absence d'acquisition par la ville sur délaissement ou par la SPL Chartes Aménagement ou la ville en exécution d'une condamnation à réparer le préjudice en nature dans l'instance n° 22VE00835, la valeur de l'immeuble à la date la plus proche du jugement et (ii) le prix convenu en 2014 entre Klécar et Carmila, outre la perte nette de produits financiers subie par Klécar de 2014 au paiement du prix de délaissement, selon la valeur estimée par un expert désigné par la cour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la responsabilité pour faute de l'Etat est engagée en raison de l'inconstitutionnalité des articles L. 213-4 et L. 213-7 du code de l'urbanisme, faisant l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité distincte ;

- la responsabilité pour faute de l'Etat est engagée en raison de l'inconventionnalité des articles L. 213-4 et L. 213-7 du code de l'urbanisme au regard de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la responsabilité pour faute de l'Etat est encore engagée en raison de l'avis de France Domaine dont l'évaluation du bien objet de la décision de préemption est grossièrement erronée.

Par un mémoire enregistré le 9 juin 2023, la société Klecar France SNC demande à la cour, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à la condamnation de l'Etat de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garanti par la Constitution des articles L. 213-4 et L. 213-7 du code de l'urbanisme.

Par une ordonnance n° 22VE00836 du 26 juillet 2023, le président de la 6ème chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par la société appelante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 23 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 décembre 2023.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florent,

- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,

- et les observations de Me Rosenfeld pour la société Klécar, de Me Barata, pour la commune de Chartres et la SPL Chartres Aménagement, en présence du directeur de cabinet du maire de la commune, l'Etat n'étant ni présent ni représenté.

Des notes en délibéré, enregistrées le 8 janvier 2024, ont été présentées pour la société Klécar dans les instances n° 22VE00835 et n° 22VE00836.

Considérant ce qui suit :

1. La société Klécar France est propriétaire depuis 2001 de vingt locaux commerciaux situés dans le centre commercial de la Madeleine à Chartres où se situe également un hypermarché appartenant à la société Carrefour. Le 24 janvier 2014, la société Klécar a conclu une promesse de vente de ces vingt locaux avec la société Covicar 23, devenue Carmila, pour un montant de 26 920 116 euros, sous la condition suspensive de la purge du droit de préemption urbain. Cette vente s'inscrivait dans une cession plus globale par la société anonyme Klépierre, actionnaire majoritaire de la société Klécar, de 127 galeries commerciales situées en France, en Italie et en Espagne à la société foncière Covicar 23, elle-même contrôlée notamment par la société Carrefour. Le 26 mars 2014, au vu de la déclaration d'intention d'aliéner, la société publique locale (SPL) Chartres Aménagement a exercé, sur délégation spéciale du maire de la commune de Chartres, le droit de préemption urbain, au prix suggéré par l'avis de France Domaine de 5 382 000 euros. Cette décision de préemption était motivée par la réalisation de l'opération d'aménagement du " Plateau Nord-Est " dont le périmètre, incluant le centre commercial de la Madeleine, avait été défini par délibération du conseil municipal de Chartres du 28 janvier 2010 et devait correspondre au périmètre de la zone d'aménagement concerté du " Plateau Nord-Est " (ZAC du PNE) créée quelques mois plus tard par délibération du 20 juin 2014, prévoyant notamment le transfert du centre commercial de la Madeleine, jugé vieillissant, au nord de l'avenue Jean Mermoz où était envisagée la création d'un nouveau complexe commercial dont la réalisation avait été confiée à la société Altarea, ainsi que le remplacement du centre de la Madeleine par des logements.

2. Compte tenu du refus de la société Klécar France de conclure la vente au prix proposé par l'administration, inférieur de 80 % au prix convenu avec la société Covicar 23, la SPL Chartres Aménagement a saisi le juge de l'expropriation le 10 juin 2014 aux fins de fixer le prix du bien. Avant que l'expert désigné par le juge judiciaire ne rende toutefois ses conclusions, la SPL Chartres Aménagement a notifié à la société Klécar le 8 février 2016 sa renonciation à la préemption. Le 24 juillet 2017, la société Klécar a alors invité la commune de Chartres à acquérir ses biens en usant de son droit de délaissement, ainsi que le permettent les articles L. 311-2 et L. 230-1 du code de l'urbanisme pour les terrains situés dans une ZAC. En l'absence d'accord amiable intervenu dans le délai d'un an, la société Klécar a saisi le juge de l'expropriation le 6 août 2018 afin qu'il prononce le transfert de propriété et fixe le prix de vente. En parallèle, la commune de Chartres a décidé, par délibération du 31 mai 2018, de lancer une procédure de modification du périmètre de la ZAC pour en exclure le centre commercial de la Madeleine, modification entérinée par une délibération du 23 mai 2019. La société Klécar a alors demandé au juge de l'expropriation de surseoir à statuer dans l'attente du jugement définitif rendu par la juridiction administrative sur la légalité de cette dernière délibération. Par la requête n° 22VE00765, la société Klécar relève appel du jugement n° 1902684 du 7 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté son recours pour excès de pouvoir dirigé contre la délibération du 23 mai 2019 excluant le centre commercial du périmètre de la ZAC du PNE.

3. Estimant par ailleurs que la décision de préemption était illégale et de nature à empêcher, dans le contexte de l'espèce, la vente future de ses locaux commerciaux, la société Klécar a sollicité du tribunal administratif d'Orléans la condamnation de la commune de Chartres et de la SPL Chartes Aménagement à l'indemniser de son manque à gagner. Elle a en parallèle sollicité de ce même tribunal la condamnation de l'Etat pour faute en raison de l'avis du service France Domaine et de l'inconventionnalité ainsi que l'inconstitutionnalité des dispositions du code de l'urbanisme régissant le droit de préemption. Par les requêtes n° 22VE00835 et 22VE00836, la société Klécar relève appel des jugements n° 1901513 et 1901978 du 7 décembre 2021 par lesquels le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes indemnitaires en considérant que la société n'établissait pas la réalité de son préjudice.

4. Il y a lieu de joindre ces trois requêtes, qui concernent la situation des mêmes biens et ont fait l'objet d'une instruction commune, afin d'y statuer par un seul arrêt.

A titre liminaire, sur la demande de la commune d'écarter les pièces de l'instruction pénale produites au dossier par la société Klécar ou, à défaut, d'ordonner la production de l'intégralité du dossier d'instruction :

5. La commune de Chartres et la SPL Chartres Aménagement soutiennent que la cour ne pourra tenir compte des nombreux procès-verbaux rédigés au cours de la procédure pénale engagée contre le maire de Chartres pour abus d'autorité dans le cadre de la préemption litigieuse et produits par la société Klécar dès lors que leur divulgation viole le secret de l'instruction garanti par l'article 11 et l'article 114 du code de procédure pénale et qu'est méconnu le principe d'égalité des armes dans l'instance dans la mesure où la commune n'a pas accès à la procédure pénale et que la production en cause ne comporte pas l'intégralité des pièces du dossier d'instruction.

6. Toutefois si, selon l'article 11 du code de procédure pénale, toute personne qui concourt à la procédure de l'instruction est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines de l'article 378 du code pénal, tel n'est pas le cas de la partie civile. En outre, en l'absence de disposition le prévoyant expressément, l'article 11 du code de procédure pénale ne peut faire obstacle au pouvoir et au devoir qu'a le juge administratif de joindre au dossier, sur production spontanée d'une partie, des éléments d'information recueillis dans le cadre d'une procédure pénale et de statuer au vu de ces pièces après en avoir ordonné la communication pour en permettre la discussion contradictoire. La société Klécar justifie par ailleurs de l'autorisation du ministère public pour produire les procès-verbaux litigieux dans le cadre de la présente instance. Enfin, dès lors que les procès-verbaux en cause ont été soumis au contradictoire, la commune de Chartres n'est pas fondée à soutenir que cette production, bien que ne comportant pas l'intégralité des pièces de la procédure, viole le principe d'égalité des armes. Par suite, les conclusions tendant à ce que ces pièces soient écartées des débats doivent être rejetées, de même que celles, subsidiaires, tendant à ce que la cour ordonne la production de l'intégralité du dossier d'instruction. Il n'y a pas lieu par ailleurs d'attendre l'issue de la procédure pénale, dont la qualification juridique ne liera pas le juge administratif, pour statuer sur le présent litige. La demande de sursis à statuer de la commune doit par suite être rejetée.

Sur la requête n° 22VE00765 tendant à l'annulation de la délibération du 23 mai 2019 emportant modification du périmètre de la ZAC PNE :

7. En premier lieu, ainsi que le fait valoir la société Klécar, il ressort tant de la chronologie des faits que des différentes pièces versées au dossier, que la modification du périmètre de la ZAC, décidée quelques mois après que la société Klécar eut mis la commune en demeure d'acquérir ses biens, avait pour objectif de faire obstacle au droit de délaissement de la société Klécar dont le prix, qui devait être fixé par le juge de l'expropriation selon la méthode de la valorisation par capitalisation du revenu, allait être selon toute vraisemblance réévalué de dix millions voire quinze millions au-dessus de l'estimation, réalisée par les services de France Domaine selon la méthode par comparaison, ayant justifié initialement la décision de préemption de la ville.

8. En deuxième lieu, la commune de Chartres fait valoir que sans remettre en cause les objectifs initiaux de la ZAC du PNE, elle avait engagé, en 2018, une réflexion renouvelée sur l'aménagement du secteur, l'urbanisme résidentiel et commercial du quartier de la Madeleine étant jugé trop concentré en matière d'habitat social, obsolète et peu lisible, entrainant au quotidien de nombreux dysfonctionnements et des conflictualités en matière notamment de stationnement et de circulation des poids lourds, que ce constat l'a contrainte à engager une réflexion plus globale et intégrée sur un projet de renouvellement urbain à l'échelle de l'ensemble du quartier de la Madeleine, dont seul le centre commercial était inclus dans le périmètre de la ZAC, et qu'elle a engagé une étude de rénovation urbaine qui correspond à une nouvelle orientation de la stratégie d'aménagement et se concrétisera, à terme, par une opération de renouvellement urbain dans ce quartier, étude inscrite dans l'avenant de la Convention de l'Opération de Revitalisation du Territoire (ORT) liée au dispositif " Action Cœur de Ville " (ACV) pour lequel la commune a été retenue par l'Etat en 2018. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date de la délibération du 31 mai 2018, arrêtant le principe d'une modification du périmètre de la ZAC, la commune de Chartres n'avait réalisé aucune étude sur cette nouvelle opération d'aménagement et que le dossier de création de la ZAC modifiée, qui ne comprenait pas davantage d'études d'impact de la modification envisagée, était particulièrement lapidaire sur les motifs justifiant la modification de périmètre et ses implications, ce qu'avait d'ailleurs souligné l'avis de l'autorité environnementale.

9. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de transfert du centre commercial de la Madeleine dans le nouveau complexe commercial prévu au nord de l'avenue Jean Mermoz avait été abandonné à cette date, les déclarations du maire et les études ultérieures menées dans le cadre du dispositif " Action Cœur de Ville " (ACV) ayant toujours principalement cet objet. Or la commune de Chartres n'explique à aucun moment de façon précise comment elle entendait procéder à ce transfert de commerces en excluant le centre commercial de la Madeleine de la ZAC du PNE, ni en quoi cette modification du périmètre était de nature à simplifier la réalisation de ce transfert ou de l'opération d'aménagement dans son ensemble. En outre, force est de constater qu'aucune des études menées ou appels à projet réalisés postérieurement aux délibérations litigieuses ne s'intéressent à la restructuration de l'ensemble du quartier de la Madeleine.

10. En quatrième lieu, lors de ses auditions, le maire de Chartres a fait également valoir que cette modification avait été décidée en raison de l'abandon par la société Altarea du projet de création du complexe commercial à la suite de l'avis défavorable de la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) et de la reconfiguration du projet qui n'était plus susceptible d'engendrer des recettes de l'ordre de 50 millions d'euros pour la collectivité mais de deux ou trois millions seulement. Ces déclarations ne sont toutefois pas corroborées par les pièces du dossier. La société Altarea n'a en effet abandonné le projet qu'en mai 2019, soit un an après le lancement de la modification du périmètre et trois ans après la décision de la CNAC. La commune ne verse par ailleurs aucun élément de nature à confirmer les allégations sur les recettes attendues du projet modifié.

11. En dernier lieu, si la modification du périmètre fondée sur l'impossibilité pour la commune d'assurer le financement de l'opération, notamment en raison du décalage entre les sources de financement et la mise en œuvre du droit de délaissement par les propriétaires du secteur, aurait pu légalement intervenir, d'une part, un tel motif n'a jamais été avancé pour justifier la décision du conseil municipal lors de la délibération du 31 mai 2018 ou même celle du 23 mai 2019, d'autre part, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le projet d'aménagement n'avait pas été modifié.

12. Dans ces conditions, la société Klécar est fondée à soutenir que la modification du périmètre de la ZAC a été décidée dans le seul but de faire obstacle à son droit de délaissement et est entachée d'un détournement de pouvoir.

13. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la société Klécar est fondée à demander l'annulation du jugement n° 1902684 du 7 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 23 mai 2019.

14. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Chartres la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Klécar et non compris dans les dépens sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rejeter les conclusions présentées au même titre par la commune.

Sur les requêtes n° 22VE00835 et n° 22VE00836 tendant à l'engagement de la responsabilité de la commune de Chartres et de la SPL Chartres Aménagement ainsi qu'à celle de l'Etat :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par les intimées dans le cadre de la requête n° 22VE00835 :

15. D'une part, il résulte de l'instruction que la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Versailles le lundi 4 avril 2022, a été introduite dans le délai de deux mois francs suivant la notification, le 2 février 2022, du jugement à la société Klécar. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête d'appel doit être écartée.

16. D'autre part, la circonstance que la société Klécar s'est désistée en première instance de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision de préemption est sans incidence sur la recevabilité de sa requête tendant à la condamnation de la commune à l'indemniser du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison de l'illégalité de cette décision, cette requête indemnitaire n'ayant pas le même objet que le recours en excès de pouvoir. Le désistement dont le tribunal a donné acte constitue par ailleurs un simple désistement d'instance. Par suite, la commune de Chartes et la SPL Chartres Aménagement ne sont pas davantage fondées à soutenir que la présente requête serait irrecevable ou aurait perdu son objet du fait du désistement de la société Klécar en excès de pouvoir.

En ce qui concerne la régularité du jugement n° 1901513 :

17. La société Klécar fait grief au jugement de ne pas avoir répondu aux moyens tirés du détournement de pouvoir, de l'absence de projet et de l'absence d'opération d'aménagement, de même qu'à sa demande de réparation en nature. Dans le cadre d'un litige indemnitaire, les premiers juges pouvaient toutefois se borner à relever, sans entacher leur jugement d'une omission à statuer, que la société n'établissait pas la réalité de son préjudice pour rejeter sa demande de condamnation, l'examen de l'existence notamment d'une faute et d'un lien de causalité devenant dans ces circonstances superfétatoires.

18. Par ailleurs, en mentionnant que " le préjudice financier dont [la société Klécar] demande réparation n'est pas établi dès lors qu'ainsi qu'il est opposé en défense, d'une part, elle a disposé de trois ans pour vendre son bien à compter de la date à laquelle il y a eu renonciation à la préemption, d'autre part, elle n'établit ni que la vente de ce bien est devenue impossible ni que ce bien a perdu de sa valeur, quand bien même il y a eu modification du périmètre de la ZAC ", les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'une insuffisance de motivation.

19. Par suite, la société Klécar n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier.

En ce qui concerne le bien-fondé des jugements attaqués :

S'agissant de l'engagement de la responsabilité de la commune de Chartres et de la SPL Chartres Aménagement du fait l'illégalité de la décision de préemption et de leur imprudence fautive :

20. Aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa version en vigueur à la date de la décision de préemption : " Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. (...) ". Aux termes de l'article L. 300-1 du même code : " Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en œuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. / L'aménagement, au sens du présent livre, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations. ".

21. Les collectivités titulaires du droit de préemption urbain peuvent légalement exercer ce droit, d'une part, si elles justifient, à la date à laquelle elles l'exercent, de la réalité d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement répondant aux objets mentionnés à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n'auraient pas été définies à cette date, et, d'autre part, si elles font apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.

22. Il résulte également de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme que la mise en œuvre du droit de préemption urbain doit, eu égard notamment aux caractéristiques du bien faisant l'objet de l'opération ou au coût prévisible de cette dernière, répondre tant aux finalités mentionnées à l'article L. 300-1 du même code qu'à un intérêt général suffisant. Si le montant auquel le titulaire du droit de préemption se propose d'acquérir un bien préempté peut constituer l'un des éléments permettant d'apprécier si la préemption répond à de telles finalités ou à un intérêt général suffisant, le caractère insuffisant ou excessif du prix de ce bien au regard du marché est, par lui-même, sans incidence sur la légalité de la préemption.

23. En premier lieu, si les décisions individuelles par lesquelles un concessionnaire d'une opération d'aménagement exerce, en application des dispositions de l'article L. 213-3 du code de l'urbanisme, le droit de préemption au nom d'une commune, ne peuvent être compétemment prises par celui-ci avant l'entrée en vigueur de l'acte réglementaire lui déléguant l'exercice du droit de préemption, il résulte de l'instruction que la décision du maire de Chartres du 4 mars 2014, subdéléguant le droit de préemption de la commune à la SPL Chartres Aménagement, a été publiée et transmise à la préfecture le 4 mars 2014 et également affichée entre le 4 et le 7 mars 2014, selon les mentions portées sur la décision elle-même et les certificats produits au dossier, lesquels font foi jusqu'à preuve du contraire, conformément aux articles L. 2131-1 et L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales. Si la société Klécar fait valoir que ces certificats sont dénués de force probante dès lors que le certificat de publication a été produit un an après les faits, pour les besoins contentieux, et que le certificat d'affichage du maire n'est pas daté, ces circonstances ne sont pas de nature à remettre en cause ces déclarations certifiées, de même que le fait que la copie de la reliure du recueil des actes administratifs communiquée à la société comporte la mention en page de garde " recueil des actes administratifs février-avril 2014 " et ne permette pas de savoir à quelle date chacune des décisions qu'elle y rassemble y a été placée. Enfin, la présomption d'affichage ou de publication en présence d'un certificat administratif n'est pas contraire aux droits de la défense garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la preuve contraire n'étant pas impossible compte tenu de l'existence notamment d'une procédure de faux en écriture publique. Par ailleurs, les dispositions des articles L. 2121-24 et R. 2121-10 du code général des collectivités territoriales invoquées par la société Klécar ne concernent que le " dispositif des délibérations du conseil municipal prises en matière d'interventions économiques " ainsi que les arrêtés du maire au titre de ses attributions exercées au nom de l'Etat et ne sont donc pas applicables à la décision en cause. Enfin, la circonstance que la décision litigieuse n'aurait pas été inscrite dans le registre des délibérations conformément aux dispositions de l'article R. 2122-7-1 du code général des collectivités territoriales ne fait pas obstacle à son caractère exécutoire, lequel n'est conditionné qu'au respect des formalités prévues aux articles L. 2131-1 et L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales.

24. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, il ressort des pièces du dossier que la décision de préemption du 26 mars 2014 des locaux commerciaux de la société Klécar était motivée par la réalisation de l'opération d'aménagement du " Plateau Nord-Est " prévoyant notamment la création d'un programme de logements, d'espaces et d'équipements publics et commerciaux, ainsi que le renouvellement du quartier de la Madeleine, dont le périmètre, incluant ce centre commercial, avait été défini par délibération du conseil municipal de Chartres du 28 janvier 2010. Contrairement à ce que soutient la société appelante, la circonstance que la zone d'aménagement concerté (ZAC) " Plateau Nord-Est ", alors à l'étude, n'était pas encore créée à la date de la décision litigieuse, celle-ci n'ayant pu être actée que trois mois plus tard par délibération du 20 juin 2014, n'est pas de nature à remettre en cause la réalité du projet d'aménagement à la date à laquelle la SPL Chartres Aménagement a exercé son droit de préemption. Il résulte au demeurant de l'instruction que le groupe Klépierre avait candidaté le 31 janvier 2012, par l'intermédiaire de sa filiale Ségécé, à l'appel à public de la commune de Chartres aux fins de désigner l'opérateur en charge de la création du nouveau centre commercial souhaité par la commune au sein de la ZAC du PNE et avait ainsi connaissance du projet d'aménagement voulu par la ville.

25. En troisième lieu, la décision de préemption litigieuse n'avait pas pour objet de mettre fin à l'activité économique menée au sein du centre commercial de la Madeleine mais de permettre son transfert au nord de l'avenue Jean Mermoz, dans le cadre du projet de réaménagement de la zone défini par la délibération du 28 janvier 2010 puis par la ZAC du PNE, afin de remplacer le centre commercial de la Madeleine, jugé vieillissant, par de nouveaux logements. L'objectif ainsi poursuivi, répondant aux finalités de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, ne portait par conséquent atteinte ni au principe de la liberté d'entreprendre, ni au principe de la liberté du commerce et de l'industrie et ne devait pas davantage conduire à des pertes d'emploi.

26. En quatrième lieu, si la société Klécar fait valoir que la faisabilité du projet n'était pas rapportée dès lors que le centre commercial existant était un ensemble immobilier organisé selon le principe de la division en volume, dans lequel toute modification de destination ou toute démolition suppose l'accord des autres parties à la division volumétrique, il résulte de l'instruction que la commune de Chartres et la SPL étaient également en pourparlers à cette même date avec la société Carrefour, propriétaire de l'hypermarché et des parkings attenants du centre commercial, en vue de permettre leur transfert au nord de l'avenue Jean Mermoz et que les parties sont parvenues par la suite à un accord de principe sur ce transfert.

27. En cinquième lieu, s'il résulte de l'instruction que le prix de la décision de préemption, inférieur de 80 % au prix de vente conclu avec la société Covicar 23 et fixé par une entreprise cotée tenue de publier ses comptes consolidés conformément aux normes comptables internationales, était manifestement sous-évalué, cette circonstance est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision de préemption ainsi qu'il a été dit au point 22 et ne révèle pas par ailleurs l'absence d'intérêt général du projet, pas plus que les déclarations publiques du maire de Chartres, au demeurant largement antérieures à la décision de préemption litigieuse, selon lesquelles cette opération d'aménagement commercial devait permettre de réduire la dette importante de la ville, l'intérêt financier n'étant pas le seul poursuivi par la commune.

28. En sixième lieu, la société Klécar soutient que l'objectif de la préemption n'était pas d'acquérir les biens en cause en vue d'y construire des logements mais de délier la société Covicar 23 de ses engagements de telle sorte que l'hypermarché pût être réimplanté dans le futur centre commercial souhaité par la ville à des conditions financières avantageuses. Sur ce point, s'il résulte de l'instruction qu'à la date de la décision de préemption, la commune et la SPL bénéficiaient de deux évaluations des services des domaines en date des 28 juin 2012 et 28 mars 2014 fixant à 5,3 millions d'euros la valeur des locaux commerciaux de la société Klécar, il résulte des procès-verbaux d'audition des différents intervenants à l'opération entendus dans le cadre de la procédure pénale qu'à la date de la décision de préemption, ces derniers se doutaient que cette évaluation, faite selon la méthode par comparaison qui n'est pas celle couramment utilisée pour la vente de ce type de biens et correspondant seulement à 1/5ème du prix convenu dans la promesse de vente signée par la société Covicar 23, était très certainement sous-évaluée, même si le prix négocié dans le cadre d'une promesse de vente plus globale de 127 locaux commerciaux, sans tenir compte du projet de réaménagement engagé par la commune, était également sans doute pour sa part surestimé. Il résulte par ailleurs des déclarations du maire, dans le cadre de ces auditions, qu'en parallèle de cette décision de préemption, la commune de Chartres et la SPL ont négocié avec la société Carrefour le transfert de l'hypermarché au prix de 14 millions d'euros, correspondant à l'évaluation du service des domaines, et qu'à compter du moment où un accord de principe sur ce prix avait été acté avec la société Carrefour, la SPL Chartres Aménagement a renoncé à la préemption avant que l'expert judiciaire ne fixe la valeur vénale des biens de la société Klécarqu'elle savait sous-estimée, afin d'éviter que le prix fixé par l'expertise ne fasse " référence " selon le terme employé à plusieurs reprises lors des auditions, et contraindre la société à céder à bas prix ses locaux à la société Carrefour avant de les vendre à la commune ou à la SPL aux mêmes conditions, le transfert du centre semblant alors en effet inéluctable compte tenu de l'accord trouvé avec la société Carrefour sur le prix de transfert et dès lors que le centre commercial perdrait sa raison d'être et donc sa valeur en l'absence de l'hypermarché de l'enseigne. Dans ces conditions, la société Klécar est fondée à soutenir que la décision de préemption n'avait pas pour objet d'acquérir le bien mais de rompre la promesse de vente qu'elle avait conclue avec la société Covicar 23, de manière à pouvoir acquérir ultérieurement le bien à moindre coût et de façon générale, à tirer vers le bas les prix de toutes les acquisitions à venir dans cette zone. Par suite, cette décision de préemption, entachée pour ce motif de détournement de pouvoir, est de nature à engager tout à la fois la responsabilité de la SPL Chartres Aménagement, en sa qualité de concessionnaire délégataire du droit de préemption ne pouvant être regardée comme ayant agi uniquement au nom et pour le compte de la collectivité concédante, et celle de la commune de Chartres dès lors que l'implication du maire de la commune, décisionnaire final ayant pris l'initiative de déléguer le droit de préemption pour ce seul bien, a été décisive dans l'adoption de cette décision de préemption, comme dans la décision de renonciation ultérieure.

29. La société Klécar soutient également que la SPL et la commune auraient fait preuve d'une légèreté blâmable en préemptant pour un montant qu'elles savaient manifestement erroné. Dans la mesure toutefois où la commune bénéficiait de deux avis concordants du service des domaines et ne disposait que de très peu de temps pour décider d'exercer son droit de préemption, ne lui laissant pas l'opportunité de consulter un tiers pour solliciter une tierce évaluation, la décision de préempter au prix des domaines, bien que ne liant pas la commune et la SPL, ne saurait caractériser une imprudence telle qu'elle justifie d'engager la responsabilité, pour ce motif, de la collectivité et de son concessionnaire.

30. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande subsidiaire formée par la société Klecar sur le fondement de la responsabilité sans faute, la société appelante est fondée à engager la responsabilité solidaire de la commune de Chartres et de la SPL Chartres Aménagement en raison de l'illégalité de la décision de préemption du 26 mars 2014.

S'agissant de la responsabilité de l'Etat du fait de l'inconstitutionnalité et de l'inconventionnalité des articles L. 213-4 et L. 213-7 du code de l'urbanisme :

31. D'une part, la société Klécar n'est pas fondée à engager la responsabilité de l'Etat sur le fondement de l'inconstitutionnalité de la loi, sa demande de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité des articles L. 213-4 et L. 213-7 du code de l'urbanisme ayant été rejetée par ordonnance de la cour du 26 juillet 2023 comme dépourvue de caractère sérieux.

32. D'autre part, aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. ".

33. La société Klecar France SNC soutient que les articles L. 213-4 et L. 213-7 du code de l'urbanisme, en tant qu'ils permettent au titulaire du droit de préemption d'acquérir un bien à un prix différent de celui conclu entre le vendeur et son cocontractant lors d'une promesse de vente ou arrêté par le déclarant et au titulaire du droit de préemption de renoncer à l'exercice de ce droit méconnaissent le droit au respect de ses biens, garanti par les stipulations précitées.

34. En premier lieu, eu égard à la faculté dont dispose le propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption de renoncer à la mutation à tout moment de la procédure, prévue à l'article L. 213-7 du code de l'urbanisme, les dispositions en litige n'emportent aucune privation du droit de propriété.

35. En second lieu, le droit de préemption institué par le titre Ier du livre II du code de l'urbanisme ne peut être exercé que pour satisfaire l'un des motifs d'intérêt général mentionnés à l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, relatifs à l'aménagement du territoire. Le propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption n'est pas nécessairement privé de la possibilité de déterminer le prix de son bien dès lors que celui-ci peut faire l'objet d'un accord amiable entre les parties. Si à défaut d'un tel accord, le prix est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation, son intervention a pour objet de déterminer un prix juste pour les deux parties, fondé sur les mutations amiables de biens comparables et permettant, y compris en l'absence de fraude, de ne pas faire subir au titulaire du droit de préemption les éléments du prix convenu couvrant d'éventuels avantages que pouvaient tirer de la vente le propriétaire cédant ou l'acquéreur envisagé. Le propriétaire du bien est ainsi en mesure de faire fixer par le juge la valeur de ce bien, au jour du jugement, en produisant aux débats des termes de comparaison pertinents. Il n'est par ailleurs jamais tenu d'accepter le prix fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation et peut, à tout moment de la procédure, renoncer à la mutation. Enfin, dans le cas où l'exercice du droit de préemption ou la renonciation à ce droit aurait causé un préjudice au propriétaire cédant, celui-ci peut en demander la réparation devant le juge administratif, sur le fondement de la faute ou de la responsabilité sans faute de l'administration selon les cas et, le cas échéant, sur la base du prix prévu dans une promesse de vente antérieure. Dès lors, les limites apportées au droit de propriété par les articles L. 213-4 et L. 213-7 sont justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi et ne sont pas contraires aux stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la responsabilité de l'Etat en raison de la faute commise par les services de France Domaine dans l'estimation des biens :

36. Il résulte de l'instruction que l'avis de France Domaine daté du 28 mars 2014 évaluant à 5,3 millions d'euros les biens de la société Klécar et sur la base duquel le maire de Chartres a décidé d'exercer le droit de préemption urbain, était fondé uniquement sur une évaluation par comparaison qui, selon les conclusions du commissaire du gouvernement, confirmées par plusieurs avis d'experts produits au dossier par la société appelante, n'était pas pertinente s'agissant de biens intégrés dans un centre commercial, dont le marché est très segmenté, lesquels sont en principe évalués par application de la méthode de la valorisation par capitalisation du revenu. Ces mêmes biens ont d'ailleurs été évalués en 2018 par les services fiscaux à un montant de 15,3 millions d'euros, soit près de trois fois le prix évalué par France Domaine en 2012 et 2014, différence qui ne saurait s'expliquer par la seule date d'évaluation. Au surplus, les biens ayant servi de termes de comparaison n'étaient généralement pas appropriés, ne se situant pas pour la plupart dans des galeries commerciales. Par suite, en s'abstenant d'évaluer les biens de la société Klécar selon la méthode de la valorisation par capitalisation du revenu ou, du moins, en s'abstenant de croiser l'évaluation réalisée selon la méthode par comparaison avec celle de la valorisation par capitalisation du revenu, les services de France Domaine ont commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat.

S'agissant du partage de responsabilité :

37. D'une part, contrairement à ce que soutient la société Klécar, il ne résulte pas de l'instruction que le dommage dont se prévaut la société trouve sa cause dans plusieurs fautes qui, commises par des personnes différentes ayant agi de façon indépendante, portaient chacune en elle normalement ce dommage. La faute des services des domaines n'aurait pu en effet, sans l'intervention de la commune et de la SPL, engendrer quelque préjudice que ce soit. Il résulte toutefois de l'instruction, notamment des déclarations du maire lors de son audition dans le cadre de l'instruction pénale, que la décision de préemption n'aurait jamais eu lieu, du moins dans ces conditions, si la commune de Chartres n'avait pas bénéficié d'un avis de France Domaine fixant le prix des locaux commerciaux litigieux à 1/5ème de la valeur convenue dans le cadre de la promesse de vente conclue avec la société Covicar 23. Dans ces conditions et sans qu'y fasse obstacle la circonstance que cet avis ne liait pas le titulaire du droit de préemption, l'Etat d'une part et la SPL Chartes Aménagement et la commune de Chartres d'autre part doivent être regardés comme responsables à hauteur de 50 % chacun du préjudice subi par la société Klécar.

S'agissant du préjudice :

Quant à la réalité du préjudice :

38. Il est constant qu'en application de l'article L. 213-8 du code de l'urbanisme, le propriétaire peut réaliser librement la vente de son bien au prix indiqué dans sa déclaration, révisé durant trois ans, lorsque le titulaire du droit de préemption a renoncé, comme en l'espèce, à l'exercice de son droit avant fixation judiciaire du prix. Il résulte toutefois de l'instruction qu'en l'espèce, la vente souhaitée par la société Klécar, d'abord contrariée par la décision de préemption, n'a pu être opérée dans le délai de trois ans suivant la renonciation à préempter de la SPL en date du 8 février 2016, d'une part, en raison de ce que la commune a fait obstacle en mars 2018 au droit de délaissement de la société en soustrayant illégalement le bien du périmètre de la ZAC, d'autre part, en raison du projet de création d'un nouveau centre commercial au nord de l'avenue Jean Mermoz porté par la commune de Chartres et ayant vocation à remplacer le centre commercial de la Madeleine ainsi que de la publicité importante qui en a été faite dans la presse.

39. En effet, s'il résulte de l'instruction que le maire de Chartres avait déjà annoncé ce projet antérieurement à la décision de préemption du 26 mars 2014 et qu'un appel à candidature avait été opéré en 2011 pour désigner l'opérateur du projet, auquel avait d'ailleurs participé une filiale du groupe Klepierre, sa réalisation à dix ans laissait encore le temps de valoriser le bien et d'en tirer des revenus conséquents. Par ailleurs, la publicité de ce projet s'est trouvée très largement renforcée postérieurement à la décision de préemption en raison de sa traduction juridique par la création de la ZAC du PNE en 20 juin 2014 et des avis contraires émis par la CDAC puis par la CNAC sur ledit projet puis de son rattachement au dispositif " Action Cœur de Ville " porté par l'Etat. Il résulte à cet égard des procès-verbaux d'audition que la société Covicar 23 n'a pas souhaité reprendre la vente en raison précisément des projets de la municipalité et de leur incertitude. En outre, la vente prévue avec la société Covicar 23 en 2014 ne portait pas que sur les seuls locaux commerciaux de la Madeleine mais s'inscrivait, ainsi qu'il a été dit précédemment, dans le cadre d'une vente plus globale de 127 locaux commerciaux implantés dans plusieurs pays d'Europe, permettant une valorisation qu'une vente simple n'aurait sans doute pas permise. Ainsi, alors que les locaux de la Madeleine étaient voués à disparaître compte tenu du projet de la ville, dont la probabilité devenait d'autant plus tangible qu'il disposait désormais de l'appui de l'Etat, la société Klécar justifie suffisamment de l'impossibilité dans laquelle elle s'est trouvée de vendre jusqu'au présent arrêt les locaux commerciaux de la Madeleine postérieurement à la renonciation par la SPL à l'exercice de son droit de préemption. Enfin, la préemption a nécessairement privé la société Klecar de la possibilité de bénéficier immédiatement du produit de la vente, qui était certaine en l'absence de préemption.

Quant à l'évaluation du préjudice :

40. La société Klécar demande à titre principal à la cour de condamner la commune à acquérir le bien au prix de 26 920 116 euros. Dès lors, toutefois, que la délibération modifiant le périmètre de la ZAC pour en exclure le centre commercial de la Madeleine a été annulée par le présent arrêt et implique que le juge de l'expropriation, compétent en la matière, prononce le transfert de propriété et fixe le prix des immeubles en cause, la demande de la société Klécar, qui excède en tout état de cause le montant du préjudice subi, ne saurait être accueillie.

41. Il en est de même, pour les mêmes motifs, de la demande principale de la société tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 26 920 116 euros.

42. La société demande à titre subsidiaire la condamnation de la SPL et de l'Etat au prix correspondant à la différence entre les 26,9 millions d'euros prévus dans la promesse de vente et le prix fixé par le juge de l'expropriation dans le cadre de la procédure de délaissement. L'évaluation du préjudice de la société Klécar dépendant de l'évaluation du prix des immeubles qui sera fixée par le juge de l'expropriation, il y a lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du juge judiciaire.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1902684 du 7 décembre 2021 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.

Article 2 : La délibération du conseil municipal de Chartres du 23 mai 2019 approuvant la modification du dossier de création de la ZAC Plateau Nord Est est annulée.

Article 3 : La commune de Chartres versera à la société Klécar la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en remboursement des frais exposés par la société dans le cadre de la requête n° 22VE00765.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Chartres présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans le cadre de la requête n° 22VE00765 sont rejetées.

Article 5 : Il est sursis à statuer sur les requêtes n° 22VE00835 et 22VE00836 de la société Klécar jusqu'à la décision du juge de l'expropriation sur le droit de délaissement de la société Klécar.

Article 6 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la société Klécar France, à la commune de Chartres, à la société publique locale Chartres Aménagement et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 21 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Pilven, président assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2024.

La rapporteure,

J. FLORENTLe président,

P-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

1

2

N° 22VE00765, 22VE00835, 22VE00836


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