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16/11/2023 | FRANCE | N°22VE02860

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 16 novembre 2023, 22VE02860


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel le président de la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne a prononcé à son encontre la sanction de révocation, sanction disciplinaire du 4ème groupe, alors qu'il était adjoint technique pour la collectivité.

Par un jugement n° 2102887 en date du 27 octobre 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête, enregistrée le 22 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Annoot, avocate, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel le président de la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne a prononcé à son encontre la sanction de révocation, sanction disciplinaire du 4ème groupe, alors qu'il était adjoint technique pour la collectivité.

Par un jugement n° 2102887 en date du 27 octobre 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Annoot, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) de mettre à la charge de la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure irrégulière en ce que le tribunal administratif n'a pas enregistré et pris connaissance du mémoire en triplique produit le 23 mai 2022 et n'a par suite pas pu apprécier l'opportunité de le communiquer ou de faire droit à la demande d'instruction qu'il contenait ;

- la sanction litigieuse a été prononcée sur le fondement d'un avis émis par un conseil de discipline qui s'est tenu au terme d'une procédure irrégulière en ce que son droit d'y être entendu n'a pas été respecté ;

- l'autorité ayant arrêté la sanction litigieuse a procédé à une matérialisation inexacte des faits qui lui sont reprochés ;

- la sanction attaquée est disproportionnée eu égard aux faits reprochés.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 octobre 2023, la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne, représentée par Me Rainaud, avocat, conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement entrepris et à la mise à la charge de M. A... de la somme de 2 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Un mémoire non communiqué a été présenté pour M. A... le 15 octobre 2023 à 21 heures 46.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi du 26 janvier 1984 ;

- le décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Albertini,

- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,

- et les observations de Me Annoot, pour M. A..., et de Me Halle, pour la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., adjoint technique territorial employé en tant qu'agent du service de collecte des ordures ménagères de la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne occupait les fonctions de chauffeur-ripeur, jusqu'à ce qu'il fasse l'objet d'une sanction de révocation, prononcée par un arrêté du président de la communauté de communes en date du 21 juin 2021. M. A... relève appel du jugement du 27 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. L'intéressé doit disposer d'un délai suffisant pour prendre connaissance de ce dossier et organiser sa défense. Les pièces du dossier et les documents annexés doivent être numérotés (...) ". Aux termes de l'article 6 de ce même décret : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de la réunion de ce conseil, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Il peut, devant le conseil de discipline, présenter des observations écrites ou orales, citer des témoins et se faire assister par un ou plusieurs défenseurs de son choix (...) ". Aux termes enfin de l'article 8 dudit décret : " Le report de l'affaire peut être demandé par le fonctionnaire poursuivi ou par l'autorité territoriale : il est décidé à la majorité des membres présents. Le fonctionnaire et l'autorité territoriale ne peuvent demander qu'un seul report ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été informé de l'engagement à son encontre d'une procédure de révocation par un courrier en date du 26 février 2021 mentionnant son droit à la communication de son dossier individuel, qu'il a consulté le 13 avril 2021, de l'existence d'un mémoire en défense établi à son encontre répertoriant les faits qui lui étaient reprochés, dont il a pris connaissance le 17 mars 2021, ainsi que son droit d'être assisté par les conseillers de son choix dans le cadre de cette procédure. Si l'intéressé a été informé par un courrier en date du 30 avril 2021, notifié le 3 mai 2021, de la tenue le 31 mai 2021 de la séance du conseil de discipline de la fonction publique territoriale destinée à se prononcer sur la procédure enclenchée à son encontre, il est constant que seul son conseil s'est présenté à cette séance pour indiquer que M. A..., cas contact d'une personne atteinte du virus du Covid-19, ne pouvait être présent, et en demander par conséquent le report. Celui-ci n'ayant pas été accordé, le conseil de M. A..., arguant en outre n'avoir reçu qu'un mandat d'assistance et non de représentation pour défendre les intérêts de son client, a quitté la séance, qui s'est ainsi poursuivie. Par un arrêté du 21 juin 2016, le président de cette communauté de communes a ensuite prononcé sa révocation en raison d'un comportement conflictuel avec ses collègues et irrespectueux à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques.

4. M. A... soutient que la sanction contestée a été prise au terme d'une procédure irrégulière méconnaissant le principe du contradictoire en ce qu'il aurait été privé de son droit d'être entendu lors de la séance du conseil de discipline appelé a formuler un avis sur la sanction. Il ressort des pieces du dossier qu'il a demandé un report de la séance prévue le 31 mai 2021 en raison de son signalement comme " cas contact " le 29 mai 2021, soit 48 heures auparavant, et à une date à laquelle cette situation impliquait un isolement de sa part. M. A... sera d'ailleurs testé positif le 31 mai 2021, en milieu de journée. Ce report a été refusé par le conseil de discipline par 9 voix contre 4.

5. Il ressort des dispositions citées au point 2 que le report du conseil de discipline n'est pas de droit sur simple demande. En revanche, eu égard au droit dont dispose le fonctionnaire de se présenter en personne devant cette instance pour présenter des observations orales, il doit être fait droit à une demande qui ne repose pas sur un motif dilatoire ou imputable à l'agent poursuivi. Pour s'opposer au report, le conseil de discipline a relevé que M. A... était informé depuis plus de deux mois de la procédure disciplinaire engagée contre lui, qu'il avait consulté son dossier en avril 2021 et avait effectivement reçu sa convocation au conseil de discipline début mai. Il aurait ainsi eu le temps de préparer sa défense et son conseil était d'ailleurs présent le jour de la séance. Toutefois, la date à prendre en compte n'est pas la date à laquelle M. A... a pu consulter son dossier, mais celle à laquelle il a été informé de son signalement en tant que " cas contact ", dès lors que l'agent poursuivi dispose du droit de présenter des observations orales ou écrites devant le conseil de discipline. A cet égard, un agent qui s'est préparé pour des observations orales et qui apprend moins de 48 heures avant la reunion qu'il ne pourra être présent physiquement ne dispose alors que d'un délai inuffisant pour rédiger ses observations écrites s'il n'avait pas prévu de le faire. En l'espèce, le signalement a été fait un samedi, alors que le conseil de discipline se tenait dès le lundi suivant à 10 heures. Par ailleurs, demander au conseil de M. A... de présenter des observations écrites en un temps aussi restreint aurait également été excessivement contraignant. En outre et surtout, en présence d'un motif non dilatoire à l'époque des faits et non imputable à l'agent, il n'appartenait pas au conseil de discipline de contraindre l'agent quant à la possibilité de se présenter en personne devant lui.

6. Le conseil de discipline a également relevé, pour refuser le report de sa séance, qu'aucune attestation de l'assurance-maladie quant à l'obligation d'isolement de M. A... n'avait été produite devant lui. Toutefois, l'appelant indique qu'il n'a été informé de sa qualité de "cas contact" que par télephone et qu'il ne disposait pas non plus d'un compte Ameli auquel il aurait eu accès, mais il a produit au dossier une attestation de la Caisse nationale d'assurance-maladie du 31 mai 2021, dont on ignore la date de notification, et par un courrier du 3 juin 2021, son avocate a fait parvenir ce document et le certificat de test positif de M. A... à la communauté de communes. Celle-ci ne pouvait dans ces conditions que constater à la date de l'arrêté en litige l'absence de motif dilatoire de la demande de report du conseil de discipline ainsi qu'un motif imposant son absence, fondant la demande de report de M. A... et par suite le caractère irrégulier de la séance du 31 mai 2021, ce qui rendait nécessaire une nouvelle séance du conseil de discipline pour régulariser ce vice avant l'édiction de la sanction.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Orléans et de l'arrêté en litige du 21 juin 2021.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme sollicitée par la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne la somme de 1 500 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2102887 en date du 27 octobre 2022 du tribunal administratif d'Orléans et l'arrêté du 21 juin 2021 par lequel le président de la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne a prononcé à l'encontre de M. A... la sanction de révocation sont annulés.

Article 2 : La communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne versera à M. A... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la communauté de communes de la Cléry, du Betz et de l'Ouanne.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Pilven, président assesseur,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2023.

Le président-assesseur,

J.-E. PILVENLe président-rapporteur,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne à la préfète du Loiret en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 22VE02860 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE02860
Date de la décision : 16/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline. - Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme VILLETTE
Avocat(s) : ANNOOT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-11-16;22ve02860 ?
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