La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/11/2023 | FRANCE | N°22VE00845

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 07 novembre 2023, 22VE00845


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2021 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation p

rovisoire de séjour à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 150...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2021 par lequel le préfet du Val-d'Oise l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2116118 du 11 mars 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 13 avril, 14 septembre et 3 novembre 2022, M. A... B..., représenté par Me de Broissia, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 14 décembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil, Me de Broissia, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir le bénéfice de l'aide juridictionnelle, en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation au regard des exigences posées par les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2023, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête.

Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- et les observations de Me de Broissia, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant pakistanais né le 22 novembre 1997 à Gujrat (Pakistan), est entré de manière irrégulière sur le territoire français le 12 juillet 2019, selon ses déclarations. Le 2 août 2019, M. B... a sollicité l'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), lequel a rejeté cette demande par une décision du 3 décembre 2020, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 31 mai 2021. Sa demande de réexamen ayant été rejetée par une décision de l'OFPRA du 14 décembre 2021, le préfet du Val-d'Oise a, par un arrêté du même jour, obligé M. B... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel l'intéressé est susceptible d'être éloigné d'office. M. B... relève appel du jugement du 11 mars 2022 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Selon l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué qu'il vise les textes dont il fait application, en particulier les articles L. 611-1 4° et L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et qu'il énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde, notamment la date d'entrée de M. B... sur le territoire français le 12 juillet 2019, le rejet de la demande d'asile par une décision de l'OFPRA du 13 décembre 2020, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 31 mai 2021, ou encore le fait que l'intéressé est célibataire, qu'il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, ni y être exposé à des peines ou à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise doit être écarté en tant qu'il manque en fait.

4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté en litige, rappelés au point précédent, ni d'aucun autre élément du dossier, que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation personnelle et familiale de M. B.... Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressé doit également être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

6. M. B... produit pour la première fois en appel des pièces visant à justifier des risques qu'il encourt en cas d'éloignement vers son pays d'origine. Toutefois, s'il produit une tribune publiée sur le site de l'association " Ensemble contre la peine de mort " (EPCM) du mois de mai 2019, dans lequel le Pakistan est mentionné parmi douze pays du monde où l'homosexualité est passible de la peine de mort, ainsi qu'un article du magazine " Têtu " du 17 mai 2022 qui réitère cette information, ces éléments sont insuffisants pour établir les risques personnellement encourus par le requérant en cas de retour dans son pays d'origine. Si l'intéressé soutient qu'une " fatwa " a été prise à son encontre par l'imam de son village en raison de son homosexualité, il n'apporte aucun élément susceptible d'étayer cette allégation alors que la demande d'asile qu'il a présentée pour les mêmes motifs a été définitivement rejetée par les autorités françaises de l'asile, et qu'il ressort des pièces du dossier qu'avant même de quitter son pays en décembre 2018, l'intéressé avait présenté auprès du consulat d'Espagne au Pakistan une demande de visa qui a été rejetée dès le mois de novembre 2017. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, et dès lors que M. B... ne conteste pas ne pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-deux ans, et que l'intéressé ne justifie d'aucune insertion particulière sur le territoire français, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté en litige sur sa situation personnelle ne peut également qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 14 décembre 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Brotons, président de chambre,

Mme Pham, première conseillère,

Mme Bonfils, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.

La rapporteure,

M.-G. BONFILS

Le président,

S. BROTONS

La greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE00845


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE00845
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : SELARL CONCORDE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-11-07;22ve00845 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award