Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2022 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;
Par un jugement n° 2214676 du 9 décembre 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 janvier 2023, M. A... C... B..., représenté par Me Nassima Kacemi-Belabes, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai d'une semaine suivant la notification du jugement ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que son avocat renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
M. B... soutient que :
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est insuffisamment motivée dès lors qu'elle n'évoque pas ses liens personnels et familiaux en France, ni sa présence habituelle et longue dans ce pays, ni l'insertion dont il a fait preuve ainsi que ses perspectives professionnelles ; elle est aussi entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa demande ;
- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu dès lors qu'il n'a aucun lien avec ses enfants résidant au Sénégal et qu'une partie importante de sa famille réside en France ;
- cette décision est, pour les mêmes motifs, entachée d'erreur d'appréciation et de droit ;
S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ;
- cette décision n'est pas suffisamment motivée, est illégale par voie d'exception et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- enfin la décision portant refus de délai de départ volontaire est insuffisamment motivée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2023, le préfet du Val-d'Oise conclut au rejet de la requête et s'en remet à ses écritures de première instance.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 avril 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pilven,
- les conclusions de Mme Villette, rapporteure publique,
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant sénégalais né le 18 novembre 1981, est entré en France le 3 mai 2017 muni d'un visa de tourisme. Par un arrêté du 24 octobre 2022, dont M. B... demande l'annulation, le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.
2. Par un jugement du 9 décembre 2022, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2022.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). " Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. (...). ". Selon l'article L. 613-2 de ce code : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 et les décisions d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. ".
4. L'arrêté contesté vise les dispositions du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. M. B... soutient que le préfet a insuffisamment motivé son arrêté en omettant de prendre en compte ses attaches familiales existant en France, la circonstance qu'il réside de manière habituelle et ancienne sur le territoire français et ses efforts pour s'insérer. Toutefois, le préfet n'était pas tenu de faire état de l'ensemble des circonstances de fait relatives à la situation de l'intéressé dans son arrêté. En retenant que quatre enfants du requérant résident avec leurs mères dans leur pays d'origine, qu'il est entré sur le territoire français le 3 mai 2017, qu'il s'est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité et qu'il s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement en date du 9 décembre 2019, le préfet a apporté suffisamment d'éléments de faits de nature à motiver sa décision. Par ailleurs, l'arrêté contesté vise les dispositions de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise les raisons pour lesquelles il existe un risque que M. B... se soustraie à son éloignement. Enfin, il précise que l'intéressé, de nationalité sénégalaise, n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, cet arrêté expose de manière suffisante les considérations de droit et de fait sur lesquels reposent la décision portant obligation de quitter le territoire français, et n'est pas, pour les mêmes motifs, entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa demande.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".
6. Si M. B... fait valoir qu'il possède de nombreuses attaches familiales en France, notamment un frère, des cousins, un oncle, et qu'il a fait des efforts en vue de son insertion en prenant des cours de français, il n'en demeure pas moins qu'il a vécu au Sénégal jusqu'à l'âge de 37 ans et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales à l'étranger, où résident ses quatre enfants avec leurs mères. S'il soutient ne plus avoir aucun lien avec eux et leur envoyer régulièrement de l'argent, il ne l'établit pas. Dans ces conditions, le préfet du Val-d'Oise n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels les décisions contestées ont été prise. Dans ces conditions, le préfet du Val-d'Oise n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
7. La décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an mentionne dans ses visas l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle indique que M. B... a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, précise que l'intéressé, entré en France le 3 mai 2017 selon ses déclarations, ne justifie d'aucune circonstance humanitaire particulière, n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, qu'il existe un risque qu'il se soustraie à la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français et qu'il ne présente pas les garanties de représentation suffisantes, ayant indiqué qu'il ne se conformerait pas à l'obligation de quitter le territoire français. Dès lors, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fondent. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit être écarté.
8. Par ailleurs, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 6, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés. En l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour serait illégal, par voie d'exception, doit aussi être écarté.
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision portant absence de délai de départ.
9. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7 la décision portant absence de délai de départ est suffisamment motivée.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
M.Albertini, président,
M. Pilven, président assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2023.
Le rapporteur,
J-E. PILVENLe président,
P-L. ALBERTINILa greffière,
F. PETIT-GALLAND
La République mande et ordonne à le ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 23VE00033002