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03/10/2023 | FRANCE | N°22VE00389

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 03 octobre 2023, 22VE00389


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2019 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré impropre à l'habitation le lot n° 231 situé dans le bâtiment n° 3 de la Résidence du parc de Saint-Cloud, au 1 rue Marnes, à Ville d'Avray, et les a mis en demeure, en leur qualité de propriétaires, de faire cesser l'habitation de ce local, ainsi que la décision implicite du ministre chargé des solidarités et de la santé reje

tant leur recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1911305 du 14 janvier 2022, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2019 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré impropre à l'habitation le lot n° 231 situé dans le bâtiment n° 3 de la Résidence du parc de Saint-Cloud, au 1 rue Marnes, à Ville d'Avray, et les a mis en demeure, en leur qualité de propriétaires, de faire cesser l'habitation de ce local, ainsi que la décision implicite du ministre chargé des solidarités et de la santé rejetant leur recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1911305 du 14 janvier 2022, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 22 février 2022, le 7 juillet 2022, le 18 octobre 2022, les 3 et 6 juillet 2023, M. et Mme A..., représentés par Me Creusat, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 janvier 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 janvier 2019 du préfet des Hauts-de-Seine ainsi que la décision implicite du ministre chargé des solidarités et de la santé ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté est entaché d'incompétence du signataire ;

- les manquements reprochés au logement ne sont pas fondés ;

- la qualification du bien dans les documents de la copropriété est sans incidence sur son habitabilité ;

- un système de ventilation a été installé ;

- un local de 2,44 m de hauteur sous plafond enterré de 80 cm par rapport au sol ne constitue pas un sous-sol ;

- il est suffisamment éclairé.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 juin 2023, le ministre de la santé et de la prévention conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- Mme D... avait reçu délégation de signature, non conditionnée à l'empêchement ou l'absence du secrétaire général ou directeur de cabinet ;

- le caractère impropre à l'habitation relève d'une appréciation globale des caractéristiques du local ;

- la qualification du local de lingerie dans le règlement de copropriété est un indice parmi d'autres ;

- l'efficacité du système de ventilation n'est pas établie, notamment du fait que le local est partiellement enterré ;

- le rapport de visite attestait de la présence de moisissure et d'humidité et d'un éclairement naturel insuffisant.

Par ordonnance du 6 juillet 2023 la clôture de l'instruction a été fixée au 3 août 2023 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- l'arrêté du 22 mai 1980 modifié portant règlement sanitaire départemental des Hauts-de-Seine ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Gars,

- les conclusions de Mme Viseur-Ferré, rapporteur public,

- et les observations de Me Jeannot, subsituant Me Creusat, pour M. et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... sont propriétaires d'un lot n°231, situé au premier sous-sol du bâtiment n°3 de la résidence du parc de Saint-Cloud, au 1 rue de Marnes à Ville d'Avray. Au regard des conclusions du rapport de visite établi le 21 novembre 2018 par un agent de l'agence régionale de santé (ARS) d'Ile-de-France, à l'issue d'une procédure contradictoire, le préfet des Hauts-de-Seine a, par un arrêté du 15 janvier 2019, déclaré impropre à l'habitation le local et mis en demeure leur propriétaire de faire cesser l'habitation de ce local dans le délai d'un mois suivant la notification de cet arrêté. Les époux A... ont présenté auprès du ministre de la santé un recours hiérarchique tendant au retrait de cet arrêté, demeuré sans réponse. Ils relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté et du refus implicite du ministre.

2. Aux termes de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors applicable au litige : " Les caves, sous-sols, combles, pièces dépourvues d'ouverture sur l'extérieur et autres locaux par nature impropres à l'habitation ne peuvent être mis à disposition aux fins d'habitation, à titre gratuit ou onéreux. Le représentant de l'État dans le département met en demeure la personne qui a mis les locaux à disposition de faire cesser cette situation dans un délai qu'il fixe. Il peut prescrire, le cas échéant, toutes mesures nécessaires pour empêcher l'accès ou l'usage des locaux aux fins d'habitation, au fur et à mesure de leur évacuation. (...) Ces mesures peuvent faire l'objet d'une exécution d'office ". Le recours dont dispose le propriétaire ou le locataire d'un immeuble contre la décision par laquelle l'autorité préfectorale déclare le logement impropre à l'habitation, en application de ces dispositions, est un recours de plein contentieux. Il appartient par suite au juge saisi d'un tel recours de se prononcer sur le caractère impropre de l'habitation des locaux en cause d'après l'ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l'une et l'autre parties à la date de sa décision.

3. Par ailleurs, le règlement sanitaire départemental des Hauts-de-Seine en son article 27-2 prévoit que " Les pièces affectées à l'habitation doivent présenter les caractéristiques suivantes : (...) b) L'éclairement naturel au centre des pièces principales doit être suffisant pour permettre, par temps clair, l'exercice des activités normales de l'habitation, sans recourir à un éclairage artificiel. (...) ". Aux termes de l'article 33 de ce même règlement : " (...) Les causes d'humidité doivent être recherchées ; il doit y être remédié dans les moindres délais. (...) ". L'article 40-1 de ce règlement dispose que : " Les pièces principales (...) doivent être munies d'ouvertures donnant à l'air libre et présentant une section ouvrante présentant une aération satisfaisante/ (...) b) pièce de service ne possédant pas d'ouvrant donnant sur l'extérieur ; ces pièces doivent être munies d'une amenée d'air frais, soit par gaine spécifique, soit par l'intermédiaire d'une pièce possédant une prise d'air sur l'extérieur. / L'évacuation de l'air vicié doit s'effectuer en partie haute, soit par gaine verticale, soit par gaine horizontale à extraction mécanique conforme à la réglementation en vigueur. / Lorsque ces pièces sont ventilées par un dispositif commun à l'ensemble du logement, ce dispositif doit être réalisé conformément à la réglementation en vigueur ". Aux termes de l'article 40-2 de ce même règlement : " La surface d'éclairement naturel devra correspondre au 1/6 de la surface au sol de la pièce ". Enfin, l'article 45 de ce règlement prévoit que " Les salles d'eau et les cabinets d'aisance sont ventilés dans les conditions fixées à l'article 40. / Les murs, plafonds (...) doivent être maintenus en bon état d'entretien et de propreté. / (...) ". La méconnaissance d'une disposition du règlement sanitaire départemental n'est pas de nature, à elle seule, à rendre un local impropre à l'habitation. En revanche, il est loisible au juge, saisi d'un recours de plein contentieux tendant à contester la légalité d'un arrêté déclarant un local impropre à l'habitation sur le fondement des dispositions de l'article L. 1331-22 du code de la santé publique, alors en vigueur, pour déterminer à la date à laquelle il statue si ce local présente un tel caractère, de prendre en compte tous éléments de fait, y compris ceux susceptibles de constituer des non-conformités aux règles d'habitabilité édictées par le règlement sanitaire départemental.

4. Pour prendre l'arrêté contesté le préfet des Hauts-de-Seine s'est fondé sur la qualification de lingerie donnée au local dans le règlement de copropriété, sur l'absence de système de ventilation adapté, sur l'enfouissement du local sur une hauteur de 80 cm soit 33% de la hauteur sous plafond et sur l'insuffisance de l'éclairement et de luminosité. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment du constat d'huissier effectué le 19 juin 2022, que le local d'une superficie de 16 m² possède dans sa pièce principale une fenêtre sur l'extérieur, une kitchenette, une installation électrique dont la conformité aux normes n'est pas contestée, une ventilation mécaniquement contrôlée installée au bénéfice de l'ensemble du local y compris de la salle de douche, le tout en bon état de propreté grâce à des travaux de rénovation. Le local enterré de 80 cm pour une hauteur sous plafond de 2,40 m ne constitue pas un sous-sol et ne rend pas le bien impropre à l'habitation, ni la qualification de lingerie du local figurant dans le règlement de copropriété Enfin, si le taux d'éclairement du local, mesuré par le rapport entre la surface de la baie et la surface au sol, n'est que de d'1/7ème, il résulte toutefois de l'instruction et notamment des photographies produites de la pièce principale sans éclairage artificiel qu'elle présente une clarté suffisante en raison d'une vue sans obstacle sur l'extérieur, la haie présente lors de la visite de l'agent de l'ARS le 15 novembre 2019 et obstruant partiellement la luminosité ayant été enlevée. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des caractéristiques du local et des travaux effectués, l'arrêté du 15 novembre 2019 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré impropre à l'habitation le lot n° 231 situé dans le bâtiment n° 3 de la Résidence du parc de Saint-Cloud, au 1 rue de Marnes, à Ville d'Avray, et a mis en demeure M. et Mme A... de faire cesser l'habitation de ce local est entaché d'illégalité et doit, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué, être annulé, ainsi que la décision implicite du ministre chargé des solidarités et de la santé rejetant le recours hiérarchique des requérants.

5. Il résulte de ce qui précède, que M. et Mme A... sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande. Il y a lieu, par suite, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à verser à M. et Mme A... au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 15 novembre 2019 du préfet des Hauts-de-Seine est annulé, ainsi que la décision implicite du ministre chargé des solidarités et de la santé rejetant le recours hiérarchique de M. et Mme A....

Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et Mme B... A..., au ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, au préfet des Hauts de Seine et au ministre de la santé et de la prévention.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Le Gars, présidente assesseure,

Mme Pham, première conseillère,

Mme Florent, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2023.

L'assesseure la plus ancienne,

C. PHAMLa présidente-rapporteure,

A-C. LE GARS

La greffière,

S. de SOUSA

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

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N° 22VE00389


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22VE00389
Date de la décision : 03/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine LE GARS
Rapporteur public ?: Mme VISEUR-FERRÉ
Avocat(s) : SCP RAHOLA CREUSAT LEFEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-10-03;22ve00389 ?
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