Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile Immobilière (SCI) SL Saclay Lab, la société anonyme (SA) Finamur et la société anonyme (SA) Nord Europe Lease ont demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler les arrêtés n° 2016/SP2/BAIE/038 du 22 septembre 2016 et n° 2017/SP2/BAIE/011 du 21 février 2017 par lesquels le préfet de l'Essonne a déclaré cessibles au profit de l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay les parcelles cadastrées section H nos 99 et 347, nécessaires à la réalisation du projet d'aménagement de la ZAC du quartier de l'Ecole Polytechnique, et d'autre part, d'annuler l'arrêté n° 2017/SP2/BCIIT/145 du 4 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Essonne a déclaré cessible au profit de cet établissement la parcelle cadastrée section H n° 384, nécessaire à la réalisation du même projet, parcelles situées sur la commune de Palaiseau.
Par un jugement nos 1704736-1704730-1708996 du 8 novembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté n° 2016/SP2/BAIE/038 du 22 septembre 2016, les articles 2 et 3 de l'arrêté n° 2017/SP2/BAIE/011 du 21 février 2017 et l'arrêté n° 2017/SP2/BCIIT/145 du 4 septembre 2017.
Par un arrêt nos 19VE04281-19VE04282-20VE00076 du 29 septembre 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les appels formés par l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay contre ce jugement en tant qu'il s'est prononcé sur la légalité des articles 2 et 3 de l'arrêté de cessibilité du 21 février 2017 et de l'arrêté de cessibilité du 4 septembre 2017.
Par une décision n° 458930 du 25 janvier 2023, le Conseil d'Etat a, sur le pourvoi de l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay, annulé cet arrêt en tant qu'il s'est prononcé sur la légalité des articles 2 et 3 de l'arrêté de cessibilité du 21 février 2017 et de l'arrêté de cessibilité du 4 septembre 2017 et a renvoyé l'affaire dans cette mesure à la cour.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 23 décembre 2019, sous le n° 19VE04281, l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay, représenté par Me Bineteau, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule les articles 2 et 3 de l'arrêté préfectoral du 21 février 2017 ;
2°) de rejeter la demande de la SCI SL Saclay Lab, de la SA Finamur et de la SA Nord Europe Lease dirigée contre les articles 2 et 3 de cet arrêté préfectoral ;
3°) de mettre à la charge solidaire de ces sociétés la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé, d'une part, en tant qu'il se borne à affirmer pour rejeter la fin de non-recevoir que l'arrêté du 21 février 2017 est divisible, d'autre part, en ce qu'il ne fait pas référence à la seconde ordonnance d'expropriation et s'est abstenu d'expliquer les raisons pour lesquelles il estimait que le transfert de propriété desdites parcelles résultait uniquement de la première ordonnance et non de la seconde ;
- la demande d'annulation partielle de première instance qui était dirigée contre un acte indivisible était irrecevable ;
- aucun texte ni aucun principe ne s'opposent à ce que l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay sollicite, au terme d'une première enquête parcellaire, la déclaration de cessibilité de deux parcelles et, au terme d'une seconde enquête parcellaire, la déclaration de cessibilité d'une troisième parcelle ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que des circonstances nouvelles justifiaient la réalisation d'une nouvelle enquête parcellaire portant sur les trois parcelles concernées ;
- c'est également à tort que les premiers juges ont estimé que l'arrêté préfectoral du 21 février 2017, compte tenu de l'enquête parcellaire en cours portant sur la parcelle H 346, ne pouvait légalement se borner à déclarer cessibles les parcelles H 99 et H 347, dès lors que c'est à la date du 21 février 2017 que doit être appréciée la légalité de cet arrêté ;
- les autres moyens soulevés en première instance par les sociétés demanderesses étaient infondés.
II. Par une requête enregistrée le 23 décembre 2019, sous le n° 19VE04282, l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay représenté par Me Bineteau, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule l'arrêté préfectoral du 4 septembre 2017 ;
2°) de rejeter la demande de la SCI SL Saclay Lab, de la SA Finamur et de la SA Nord Europe Lease dirigée contre l'arrêté préfectoral du 4 septembre 2017 ;
3°) de mettre à la charge solidaire de ces sociétés la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne fait pas référence à la seconde ordonnance d'expropriation et s'est abstenu d'expliquer les raisons pour lesquelles il estimait que le transfert de propriété desdites parcelles résultait uniquement de la première ordonnance et non de la seconde ;
- aucun texte ni aucun principe ne s'opposait à ce que l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay sollicite, au terme d'une première enquête parcellaire, la déclaration de cessibilité de deux parcelles et, au terme d'une seconde enquête parcellaire, la déclaration de cessibilité d'une troisième parcelle ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que des circonstances nouvelles justifiaient la réalisation d'une nouvelle enquête parcellaire portant sur les trois parcelles concernées ;
- les autres moyens soulevés en première instance par les sociétés demanderesses étaient infondés.
III. Par une requête sommaire enregistrée le 8 janvier 2020, sous le n° 20VE00076, et un mémoire ampliatif enregistré le 19 mars 2020, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1704736-1704730-1708996 du 8 novembre 2019 en tant qu'il s'est prononcé sur la légalité des articles 2 et 3 de l'arrêté de cessibilité du 21 février 2017 et de l'arrêté de cessibilité du 4 septembre 2017 ;
2°) de rejeter les demandes de la SCI SL Saclay Lab, de la SA Finamur et de la SA Nord Europe Lease dirigées contre les articles 2 et 3 de l'arrêté de cessibilité du 21 février 2017 et de l'arrêté de cessibilité du 4 septembre 2017.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé, d'une part, en ce qu'il n'indique pas les motifs de droit pour lesquels il considère que la réalisation d'une nouvelle enquête parcellaire portant sur l'ensemble des parcelles était nécessaire, d'autre part, en ce qu'il ne tient pas compte de la seconde ordonnance d'expropriation, enfin, en ce qu'il omet d'indiquer en quoi l'irrégularité aurait une influence sur le sens des décisions prises ;
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le principe d'unicité résultant des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de l'expropriation n'a pas été respecté ;
- la conformité de l'expropriation avec l'opération autorisée par la déclaration d'utilité publique peut également être atteinte en présence de plusieurs arrêtés de cessibilité en s'assurant que les parcelles concernées sont comprises dans le périmètre de l'opération défini par la déclaration d'utilité publique ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que des circonstances nouvelles justifiaient la réalisation d'une nouvelle enquête parcellaire portant sur les trois parcelles concernées ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que les vices de procédure retenus avaient exercé une influence sur le sens des décisions attaquées ;
- les autres moyens de première instance seront écartés pour les motifs développés dans les écritures du préfet de l'Essonne devant le tribunal administratif.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Villette,
- et les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces des dossiers soumis au juge du fond que le préfet de l'Essonne a, par un arrêté du 24 mars 2014, déclaré d'utilité publique au profit de l'établissement public d'aménagement de Paris-Saclay (EPAPS) le projet d'aménagement de la ZAC du quartier de l'école Polytechnique sur le territoire des communes de Palaiseau, Orsay et Saclay. Par un arrêté du 22 septembre 2016, le préfet de l'Essonne a déclaré immédiatement cessibles sur le territoire de la commune de Palaiseau la parcelle cadastrée H n° 99 ainsi qu'une partie de la parcelle cadastrée H n° 101, la partie expropriée de cette parcelle devant devenir la parcelle H n° 347 et sa partie non expropriée la parcelle H n° 346. Par un arrêté du 21 février 2017, le préfet de l'Essonne a abrogé l'arrêté du 22 septembre 2016 et a, à nouveau, déclaré cessibles la totalité de la parcelle H n° 99 et une partie de la parcelle H n° 101. Par un arrêté du 4 septembre 2017, le préfet de l'Essonne a déclaré immédiatement cessible la parcelle H n° 348 issue d'une partie de la parcelle H n° 346. Le tribunal administratif de Versailles, saisi par les sociétés SA Finamur et SA Nord Europe Lease, crédit-bailleurs des parcelles expropriées, ainsi que la SCI SL Saclay Lab, crédit-preneur de ces parcelles, a, par un jugement du 8 novembre 2019, annulé l'arrêté de cessibilité du 22 septembre 2016, les articles 2 et 3 de l'arrêté de cessibilité du 21 février 2017 et l'arrêté de cessibilité du 4 septembre 2017. Par un arrêt du 29 septembre 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les appels formés par l'EPAPS et la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales contre ce jugement en tant qu'il s'est prononcé sur la légalité des articles 2 et 3 de l'arrêté de cessibilité du 21 février 2017 et de l'arrêté de cessibilité du 4 septembre 2017. Par une décision du 25 janvier 2013, le Conseil d'Etat a, sur le pourvoi de l'EPAPS, annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour.
Sur la régularité du jugement :
2. L'établissement public d'aménagement Paris-Saclay et la ministre soutiennent que le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne l'annulation des articles 2 et 3 de l'arrêté du 21 février 2017.
3. En premier lieu, en indiquant que l'article 1er de l'arrêté du 21 février 2017, abrogeant l'arrêté de cessibilité du 22 septembre 2016, d'une part, et les articles 2 et 3 du même arrêté prononçant la cessibilité des parcelles cadastrées section H numéros 99 et 347 d'autre part, étaient divisibles, les premiers juges ont suffisamment motivé le rejet de la fin de non-recevoir soulevée par l'EPAPS à l'encontre des conclusions dirigées contre les articles 2 et 3 de cet arrêté.
4. En deuxième lieu, si le jugement attaqué ne fait pas référence à la seconde ordonnance du juge judiciaire de l'expropriation du 10 avril 2017, cette seule circonstance n'est pas de nature à entacher le jugement d'une insuffisance de motivation. Si les requérants contestent le raisonnement des premiers juges qui ont ainsi considéré que, nonobstant la circonstance que la première ordonnance d'expropriation du 3 octobre 2016 n'ait pas été notifiée et qu'elle puisse être le cas échéant entachée d'irrégularités, elle avait, en vertu de l'article L. 222-2 du code de l'expropriation, transféré, à elle seule, à l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay la propriété des parcelles qu'elle désignait, cette contestation a trait au bien-fondé du jugement et ne saurait l'entacher d'irrégularité.
5. En troisième lieu, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement en indiquant au point 8 de leur jugement qu'il résultait des dispositions des articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de l'expropriation, que le préfet devait, à l'issue de l'enquête parcellaire, prendre un seul arrêté de cessibilité, mentionnant la liste de toutes les parcelles figurant au plan parcellaire pour lesquelles l'administration entend poursuivre la procédure d'expropriation et faire figurer dans un même arrêté de cessibilité l'ensemble des parcelles appartenant à un même propriétaire. Ils ont également suffisamment motivé leur jugement en indiquant que le respect de cette procédure, de nature à permettre de vérifier la conformité de l'expropriation avec l'opération autorisée par la déclaration d'utilité publique, présentait un caractère substantiel et, au point 10, qu'une nouvelle enquête parcellaire avait été mise en œuvre après l'ordonnance d'expropriation afin que le périmètre à exproprier soit étendu, ce qui constituait une circonstance nouvelle justifiant la réalisation d'une nouvelle enquête parcellaire.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :
6. L'arrêté par lequel un préfet abroge une déclaration de cessibilité irrégulière et déclare à nouveau la cessibilité des mêmes parcelles ne forme pas un ensemble indivisible, dès lors que si cette abrogation constitue un préalable à une nouvelle décision de cessibilité, le prononcé de cette cessibilité au sein du même arrêté n'est en revanche pas nécessaire à une telle abrogation. Par suite, les demanderesses de première instance étaient recevables à solliciter uniquement l'annulation partielle de l'arrêté n° 2017/SP2/BAIE/011 du 21 février 2017 par lequel le préfet de l'Essonne a déclaré cessibles au profit de l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay les parcelles cadastrées section H nos 99 et 347 nécessaires à la réalisation du projet d'aménagement de la ZAC du quartier de l'Ecole Polytechnique et situées sur la commune de Palaiseau. Dès lors, l'EPAPS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance des demanderesses en ce sens.
En ce qui concerne les moyens d'annulation retenus par les premiers juges :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'autorité compétente déclare cessibles les parcelles ou les droits réels immobiliers dont l'expropriation est nécessaire à la réalisation de l'opération d'utilité publique. Elle en établit la liste, si celle-ci ne résulte pas de la déclaration d'utilité publique ". Ni cette disposition ni aucune autre disposition législative ou règlementaire n'impose que l'ensemble des immeubles à exproprier pour la réalisation d'un projet déclaré d'utilité publique fasse l'objet d'un unique arrêté de cessibilité. Des arrêtés de cessibilité peuvent dès lors être pris successivement si l'expropriation de nouvelles parcelles se révèle nécessaire pour la réalisation de l'opération déclarée d'utilité publique. La circonstance que des parcelles faisant l'objet de ces arrêtés successifs appartiennent à un même propriétaire est à cet égard sans incidence.
8. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler les articles 2 et 3 de l'arrêté du 21 février 2017 et l'arrêté du 4 septembre 2017, le tribunal administratif de Versailles a relevé que les dispositions de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique doivent s'entendre comme imposant à l'autorité administrative de faire figurer dans un même arrêté de cessibilité l'ensemble des parcelles appartenant à un même propriétaire, dont l'expropriation est poursuivie, et en a déduit, d'une part, que l'arrêté du 21 février 2013 ne pouvait se borner à déclarer cessibles les parcelles identifiées lors d'une première enquête parcellaire et, d'autre part, que l'extension du périmètre à exproprier à une parcelle qui n'était pas incluse dans l'enquête parcellaire initiale concernant d'autres parcelles appartenant au même propriétaire aurait justifié qu'il soit procédé à une nouvelle enquête parcellaire portant sur l'ensemble des parcelles de ce propriétaire et non à une enquête parcellaire et un arrêté de cessibilité portant uniquement sur la nouvelle parcelle.
9. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 131-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Les règles relatives à la recherche des propriétaires et des titulaires de droits réels concernés par l'expropriation sont fixées par décret ".
10. D'autre part, aux termes de l'article L. 220-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'ordonnance d'expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés ". Il résulte de ces dispositions que le transfert de propriété des terrains faisant l'objet de la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique intervient, à défaut d'accord amiable antérieur, à la date de l'ordonnance rendue par le juge de l'expropriation. La circonstance que cette ordonnance n'ait pas été notifiée, si elle interdit l'envoi en possession au bénéfice de l'expropriant, est sans influence sur le transfert de propriété qui a été prononcé du seul fait de l'intervention de l'ordonnance et à la date de celle-ci. Aux termes de l'article L. 223-2 du même code : " Sans préjudice de l'article L. 223-1, en cas d'annulation par une décision définitive du juge administratif de la déclaration d'utilité publique ou de l'arrêté de cessibilité, tout exproprié peut faire constater par le juge que l'ordonnance portant transfert de propriété est dépourvue de base légale et demander son annulation. /Après avoir constaté l'absence de base légale de l'ordonnance portant transfert de propriété, le juge statue sur les conséquences de son annulation. ".
11. En l'espèce, par un premier arrêté du 22 septembre 2016, le préfet de l'Essonne a déclaré cessibles les parcelles H 99 et H 347. L'expropriation de ces terrains a été prononcée au profit de l'EPAPS par une ordonnance du 3 octobre 2016. Néanmoins, en raison de l'illégalité affectant ce premier arrêté, susceptible de priver de base légale l'ordonnance du 3 octobre 2016 en cas de recours des propriétaires, le préfet de l'Essonne a rapporté ce premier arrêté et a de nouveau déclaré cessibles les parcelles H 99 et H 347 par un arrêté du 21 février 2017. Nonobstant le transfert de propriété intervenu du seul fait de l'ordonnance du 3 octobre 2016, cet arrêté, qui se fondait sur le même plan parcellaire que l'arrêté du 22 septembre 2016 et duquel ne ressortait aucune confusion sur l'identification des parcelles concernées et sur leurs anciens propriétaires dont les droits devaient être garantis dans cette nouvelle procédure d'expropriation, n'avait pas à être précédé d'une nouvelle enquête parcellaire. Dès lors, l'EPAPS et la ministre chargée des collectivités territoriales sont fondés à soutenir que, dans les circonstances particulières de l'espèce, l'intervention de cette ordonnance ne constituait pas une circonstance nouvelle justifiant la réalisation d'une telle enquête.
12. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'existence d'une unique unité foncière et sur l'existence de circonstances nouvelles pour annuler les articles 2 et 3 de l'arrêté du 21 février 2017 et l'arrêté du 4 septembre 2017
13. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SA Finamur, la SA Nord Europe Lease et la SCI SL Saclay Lab devant le tribunal administratif de Versailles.
En ce qui concerne l'arrêté du 21 février 2017 :
14. En premier lieu, par un arrêté du 12 janvier 2017, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 13 janvier 2017, Mme A..., sous-préfète de Palaiseau, avait reçu délégation du préfet de l'Essonne aux fins de signer l'arrêté contesté. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de cet arrêté doit être écarté.
15. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 131-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " A l'expiration du délai fixé par l'arrêté prévu à l'article R. 131-4, les registres d'enquête sont clos et signés par le maire et transmis dans les vingt-quatre heures, avec le dossier d'enquête, au commissaire enquêteur ou au président de la commission d'enquête. / Le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête donne son avis sur l'emprise des ouvrages projetés, dans le délai prévu par le même arrêté, et dresse le procès-verbal de l'opération après avoir entendu toutes les personnes susceptibles de l'éclairer. Pour cette audition, le président peut déléguer l'un des membres de la commission. ". Lorsque, pour la réalisation d'une opération d'aménagement ou d'urbanisme, il est nécessaire, notamment dans un but de maîtrise foncière, de procéder à l'acquisition d'immeubles avant que les caractéristiques principales des travaux ou des ouvrages et leur localisation aient pu être établies, l'avis du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête désigné dans le cadre de l'enquête parcellaire doit porter non pas sur l'emprise des ouvrages projetés mais sur le périmètre des acquisitions d'immeubles nécessaires à la réalisation du projet d'aménagement ou d'urbanisme en vue duquel l'expropriation a été demandée.
16. En l'espèce, il ressort du rapport du commissaire enquêteur que l'expropriation des parcelles identifiées par l'arrêté du 21 février 2017 était motivée par la création de la ZAC du quartier de l'Ecole Polytechnique, projet préalablement déclaré d'utilité publique et dont les caractéristiques étaient connues lors de la réalisation de l'enquête notamment l'emplacement des voiries et des équipements projetés et la nature des mesures écologiques compensatoires envisagées. Dès lors, les demandeurs n'étaient pas fondés à soutenir que le commissaire enquêteur aurait dû se prononcer sur le périmètre des acquisitions d'immeubles nécessaires à la réalisation du projet de la ZAC du quartier de l'Ecole Polytechnique et non sur l'emprise des ouvrages projetés sur les parcelles identifiées.
17. En troisième lieu, il résulte des dispositions combinées des articles R. 132-2 et R. 132-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, d'une part, et de l'article 7 du décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, d'autre part, que lorsqu'un arrêté de cessibilité déclare cessibles des parties de parcelles, ce qui implique de modifier les limites des terrains concernés, un document d'arpentage doit être préalablement réalisé afin que l'arrêté de cessibilité désigne les parcelles concernées conformément à leur numérotation issue de ce document. Le défaut d'accomplissement de cette obligation, qui constitue alors une garantie pour les propriétaires concernés par la procédure d'expropriation, entache d'irrégularité l'arrêté de cessibilité.
18. Contrairement à ce que soutenaient les sociétés demanderesses, un document d'arpentage identifiant, au sein de la parcelle H 101, les surfaces à exproprier et ayant vocation à devenir la parcelle H 347 a été établi le 26 juillet 2016. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées manque en fait.
19. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'autorité compétente déclare cessibles les parcelles ou les droits réels immobiliers dont l'expropriation est nécessaire à la réalisation de l'opération d'utilité publique. Elle en établit la liste, si celle-ci ne résulte pas de la déclaration d'utilité publique ". Aux termes de l'article R. 132-2 du même code : " Les propriétés déclarées cessibles sont désignées conformément aux prescriptions de l'article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière. L'identité des propriétaires est précisée conformément aux prescriptions du premier alinéa de l'article 5 ou du premier alinéa de l'article 6 de ce décret, sans préjudice des cas exceptionnels mentionnés à l'article 82 du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 pris pour l'application du décret du 4 janvier 1955 ".
20. En l'espèce, il est constant que l'arrêté en litige mentionne les sociétés SA Finamur, SA Nord Europe Lease, crédit bailleurs et SCI SL Saclay Lab, crédit preneur, en qualité de propriétaire des parcelles déclarées cessibles alors même que depuis l'ordonnance non contestée du 3 octobre 2016, l'EPAPS était devenu propriétaire de ces parcelles. Néanmoins, dans les circonstances particulières dans lesquelles est intervenu cet arrêté et dès lors que ces mentions avaient pour objet et pour effet de garantir les droits de ces sociétés dans la procédure d'expropriation sans qu'il en résulte une quelconque confusion sur la nature et la consistance des parcelles concernées, cette erreur doit être regardée comme étant restée sans incidence sur la légalité de la décision en litige.
21. En cinquième lieu, il ressort de ce qui a été dit aux points 7 à 11 du présent arrêt que le moyen tiré de la nécessité de mener une nouvelle enquête parcellaire préalablement à l'adoption de l'arrêté en litige en raison de l'intervention de l'ordonnance du 3 octobre 2016 ou de l'ouverture d'une nouvelle enquête parcellaire sur d'autres parcelles appartenant aux sociétés demanderesses le 13 janvier 2017 et dont l'expropriation s'était ultérieurement révélée nécessaire pour la conduite du projet de l'EPAPS doit être écarté. Par ailleurs, la seule circonstance qu'une seconde enquête parcellaire ait été initiée sur la parcelle H 99 au profit de la société du Grand Paris n'obligeait pas le préfet de l'Essonne à faire procéder à une nouvelle enquête parcellaire avant d'adopter l'arrêté du 21 février 2017 dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le transfert à l'EPAPS de la totalité de cette parcelle ait été remis en cause avant l'adoption de cette décision. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis du commissaire enquêteur comporterait des incohérences sur la consistance des parcelles à exproprier et l'emprise des bâtiments projetés de nature à avoir eu une influence sur le sens de la décision attaquée ou à avoir privé les requérants d'une garantie. Ainsi, si ce rapport évoque la gare de tramway implantée au sein de la ZAC du quartier de l'Ecole Polytechnique, il n'en ressort en effet pas de confusion sur les projets conjoints de l'EPAPS et de la société du Grand Paris et leurs assiettes.
22. Il résulte de tout ce qui précède que l'EPAPS et le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé les articles 2 et 3 de l'arrêté du 21 février 2017.
En ce qui concerne l'arrêté du 4 septembre 2017 :
23. En premier lieu, les sociétés demanderesses ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions des 5ème et 6ème alinéas de l'article R. 11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, aujourd'hui codifiées aux articles R. 112-14 et R. 112-15 du même code, qui concernent les enquêtes préalables aux déclarations d'utilité publique. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que l'avis d'enquête parcellaire a été affiché sur les panneaux d'affichage de la mairie de Palaiseau et dans un journal conformément aux dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
24. En deuxième lieu, il ressort de ce qui a été dit aux points 7 à 8 du présent arrêt que préfet pouvait, sans méconnaître les articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, déclarer cessible la parcelle H 346, dont l'expropriation s'était révélée ultérieurement nécessaire, par un arrêté distinct.
25. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport du commissaire enquêteur que les caractéristiques du projet fondant l'expropriation en litige (création d'une voie) étaient connues à la date de l'enquête parcellaire. Dès lors, les sociétés demanderesses ne sont pas fondées à soutenir que le commissaire enquêteur ne pouvait de prononcer, conformément à l'article R. 131-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, sur l'emprise des ouvrages projetés.
26. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutiennent les sociétés demanderesses, un document d'arpentage a été réalisée en vue de la délimitation de la surface expropriée le 25 avril 2017.
27. En cinquième lieu, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que l'arrêté en litige aurait dû être précédé d'une étude d'impact ou que le commissaire enquêteur chargé de l'enquête parcellaire aurait dû émettre un avis sur le parti pris d'urbanisme fondant la ZAC du quartier de l'Ecole Polytechnique ou le bien-fondé des équipements projetés sur les parcelles en litige. Au surplus, les sociétés demanderesses n'allèguent pas l'absence d'un tel bien-fondé.
28. Il résulte de tout ce qui précède que l'EPAPS et le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 4 septembre 2017.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
29. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'EPAPS présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement nos 1704736, 1704730, 1708996 du 8 novembre 2019 du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il a annulé les articles 2 et 3 de l'arrêté de cessibilité du 21 février 2017 et l'arrêté de cessibilité du 4 septembre 2017.
Article 2 : Les demandes présentées par la SCI SL Saclay Lab, la société Finamur et la société Nord Europe Lease devant le tribunal administratif de Versailles sous les nos 1704730 et 1708996 sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de l'EPAPS présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à la SCI SL Saclay Lab, à la société Finamur et à la société Nord Europe Lease.
Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.
Délibéré après l'audience du 8 juin 2023, à laquelle siégeaient :
M. Albertini, président de chambre,
M. Mauny, président assesseur,
Mme Villette, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2023.
La rapporteure,
A. VILLETTELe président,
P.-L. ALBERTINILa greffière,
S. DIABOUGA
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 23VE00179