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27/06/2023 | FRANCE | N°22VE01844

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 27 juin 2023, 22VE01844


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 2 août 2021 par lequel la préfète d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de sa reconduite et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2103293 du 18 juillet 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Pr

océdure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 juillet 2022, M. E......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 2 août 2021 par lequel la préfète d'Indre-et-Loire a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de sa reconduite et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2103293 du 18 juillet 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 juillet 2022, M. E..., représenté par Me Rouillé-Mirza, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète d'Indre-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision ne prend pas en compte l'intérêt supérieur de son enfant mineur en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination et celle portant interdiction de retour sur le territoire français doivent être annulées par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

La requête a été communiquée à la préfète d'Indre-et-Loire, qui n'a pas produit de mémoire.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, Mme Bobko, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Pham a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... E..., ressortissant arménien né le 12 avril 1979, entré irrégulièrement en France le 24 octobre 2014, a présenté une demande d'asile rejetée par le directeur général de l'Office français des réfugiés et apatrides le 13 avril 2015, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 4 décembre 2015. Marié le 15 juin 2014 à une compatriote mère de deux filles dont l'une gravement handicapée, il a été bénéficié d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sur injonction du tribunal, de 2016 à 2021. Il a sollicité, le 22 mars 2021, le renouvellement de son titre de séjour. Après avoir constaté que l'intéressé avait fait l'objet de condamnations pénales, la préfète d'Indre-et-Loire a, par arrêté du 2 août 2021, prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé l'Arménie, ou tout pays dans lequel il serait légalement admissible, comme pays de destination de cette mesure d'éloignement et a assorti ces décisions d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par le jugement attaqué du 18 juillet 2022, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de M. E... tendant à l'annulation de cet arrêté. Celui-ci relève appel de ce jugement.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Si le requérant soutient qu'il vit avec une compatriote, Mme F... veuve C..., qu'il a épousée en 2014, que celle-ci a deux filles, pour lesquelles il a procédé à une reconnaissance de paternité en 2014 dont l'une, Lilit, souffre d'une pathologie grave et invalidante ayant justifié la délivrance de titres de séjour au requérant en sa qualité d'accompagnant, et que sa fille, A..., née le 8 novembre 2016, est atteinte de troubles du spectre de l'autisme et scolarisée en France dans une classe adaptée, il n'établit pas que l'état de santé de ses deux filles nécessite sa présence en France à leurs côtés. En effet, les certificats médicaux qu'il produit concernant la situation de Lilit datent de 2015. Or, il n'est pas établi qu'à la date de l'arrêté attaqué, la présence du requérant aux côtés de Lilit était encore indispensable, alors que celle-ci était âgée de 20 ans. Le requérant ne précise d'ailleurs pas la situation au regard du séjour de cet enfant majeur. En ce qui concerne sa fille A..., le requérant a produit un certificat du docteur D... du 27 septembre 2021 insuffisamment circonstancié et établi pour les besoins de la cause. Par ailleurs, M. E... n'établit ni n'allègue que le titre de séjour de Mme F... veuve C..., délivré en 2019 et expirant le 20 septembre 2021, aurait été renouvelé et ne démontre donc pas l'impossibilité pour lui de reconstituer sa cellule familiale en Arménie, pays dont le couple et les enfants possèdent la nationalité.

4. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que M. E... ne justifie pas d'une situation professionnelle stable, ayant été seulement engagé quelques heures par mois en qualité d'ouvrier agricole de juin à octobre 2019, ainsi qu'en avril, mai et juillet 2021. Il est hébergé avec sa famille dans un foyer depuis 2014. Il a en outre été condamné à une amende pour vol à deux reprises en mars 2017 et mai 2019, à une amende pour transport sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D le 9 septembre 2019 et, le 23 avril 2019, à un an et six mois d'emprisonnement dont six mois avec sursis assorti d'une mise à l'épreuve pendant trois ans pour violences aggravées par deux circonstances suivie d'une incapacité n'excédant pas huit jours et usurpation de plaque d'immatriculation. Enfin, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans et où résident deux enfants issus d'une précédente union, dont un enfant mineur. Dans ces conditions, au regard des conditions de séjour et de la situation familiale de M. E..., des condamnations dont il a été l'objet, et de la possibilité pour lui de reconstituer sa cellule familiale en Arménie, la préfète d'Indre-et-Loire n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ni entaché sa décision d'obligation de quitter le territoire français d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Compte tenu de la possibilité de poursuivre la vie familiale hors de France, le préfet n'a pas méconnu l'intérêt supérieur, garanti par l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, de l'enfant mineur A... E....

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination et de celle portant interdiction de retour sur le territoire français :

6. Si M. E... soutient que la décision fixant le pays de destination et celle portant interdiction de retour sur le territoire français prises à son encontre doivent être annulées par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, il résulte de ce qui précède que ce moyen doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Dorion, présidente,

M. Tar, premier conseiller,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023.

La rapporteure,

C. PHAM La présidente,

O. DORION

La greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 22VE01844


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22VE01844
Date de la décision : 27/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: Mme Christine PHAM
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : SELARL EQUATION AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-06-27;22ve01844 ?
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