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24/05/2023 | FRANCE | N°21VE02284

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 24 mai 2023, 21VE02284


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 27 novembre 2018 le reclassant au sein du groupe de fonctions n° 2 des agents contractuels de l'établissement public du Château, du musée et du domaine national de Versailles, ensemble la décision du 22 mars 2019 rejetant son recours gracieux contre cette première décision.

Par un jugement n° 1903979 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé ces décisions.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2021, l'Etablissement public du châte...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 27 novembre 2018 le reclassant au sein du groupe de fonctions n° 2 des agents contractuels de l'établissement public du Château, du musée et du domaine national de Versailles, ensemble la décision du 22 mars 2019 rejetant son recours gracieux contre cette première décision.

Par un jugement n° 1903979 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé ces décisions.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2021, l'Etablissement public du château, du musée et du domaine de Versailles, représenté par la SELARL Centaure avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Versailles ;

3°) de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles soutient que :

- la décision du 27 novembre 2018, qui constitue une mesure de régularisation du contrat de M. B..., illégal, ne saurait être regardée comme le retrait d'une décision créatrice de droit opéré plus de quatre mois après son édiction ;

- M. B... ne peut se prévaloir des dispositions illégales de son contrat ;

- la décision du 27 novembre 2018 est conforme au cadre de gestion des agents contractuels de l'établissement, adopté par la délibération du conseil d'administration du 22 novembre 2018.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2022, M. A... B..., représenté par Me Boukheloua, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles ne sont pas fondés.

Par ordonnance du président de la 6ème chambre du 30 janvier 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 14 février 2023 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire en défense présenté pour l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles a été enregistré le 15 mars 2023.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce qu'en reclassant M. B... dans le groupe de fonctions n° 2 du cadre d'emploi des agents contractuels de l'Etablissement public du château, du musée et du domaine de Versailles, ce dernier a méconnu le champ d'application du 2° de l'article 4 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, dans sa rédaction alors applicable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Villette,

- les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique,

- et les observations de Me Magnaval pour l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles et de Me Boukheloua, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M B... a été recruté par l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles (EPV) entre le 1er septembre 2002 et le 1er septembre 2008 en vertu de plusieurs contrats à durée déterminée. Le 1er septembre 2008, il a été recruté par cet établissement en contrat à durée indéterminée sur le fondement du 2° de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984. Depuis le 1er septembre 2016, il y exerce les fonctions de gestionnaire au sein de l'Agence comptable de l'établissement. Par une délibération du 22 novembre 2018, le conseil d'administration de l'EPV a adopté un nouveau cadre de gestion des agents contractuels de cet établissement, classant les emplois en groupes de fonctions et déterminant des règles de rémunération et d'avancement propres à chaque groupe. Par une décision du 27 novembre 2018, M. B... a été reclassé dans le groupe de fonctions n° 2 défini par ce cadre de gestion. Il a formé un recours gracieux contre cette décision, expressément rejeté le 22 mars 2019. L'EPV relève appel du jugement du 14 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé les décisions des 27 novembre 2018 et 22 mars 2019.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984, dans sa rédaction applicable au litige : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : (...) 2°) Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'Etat à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient ".

3. Sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée au profit de celui-ci le droit d'être recruté et de se prévaloir des stipulations de celui-ci ne méconnaissant aucune disposition légale ou réglementaire. Lorsque le contrat est entaché d'une irrégularité, notamment parce qu'il méconnaît une disposition législative ou réglementaire applicable à la catégorie d'agents dont relève l'agent contractuel en cause, l'administration est tenue de proposer à celui-ci une régularisation de son contrat afin que son exécution puisse se poursuive régulièrement. Si le contrat ne peut être régularisé, il appartient à l'administration, dans la limite des droits résultant du contrat initial, de proposer à l'agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande, tout autre emploi, afin de régulariser sa situation. Si l'intéressé refuse la régularisation de son contrat ou si la régularisation de sa situation, dans les conditions précisées ci-dessus, est impossible, l'administration est tenue de le licencier. Lorsqu'elle n'implique la modification d'aucun de ses éléments substantiels, l'administration procède à la régularisation du contrat de l'agent, sans être tenue d'obtenir son accord.

4. En l'espèce, M. B... a été recruté par l'EPV sur le fondement des dispositions du 2° de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 précité alors même que cet établissement n'avait jamais eu l'intention de lui confier un emploi du niveau de la catégorie A de la fonction publique et qu'il est constant que, depuis lors, les fonctions exercées par M. B... n'ont jamais relevé d'un tel emploi. Ce contrat était donc entaché d'une irrégularité qu'il appartenait à l'établissement de régulariser en proposant à l'agent un emploi équivalent, ou, si l'intéressé le demandait, tout autre emploi, permettant son emploi sur l'un des fondements prévus par la loi du 11 janvier 1984. A défaut, il revenait à l'EPV de licencier M. B....

5. Il résulte de ce qui précède que la décision du 27 novembre 2018, qui se borne à reclasser M. B... dans un emploi du groupe de fonctions n° 2 du cadre de gestion des agents contractuels de l'EPV, correspondant aux emplois du niveau de la catégorie B de la fonction publique, ne saurait être regardée comme une mesure de régularisation du contrat de ce dernier.

6. Pour autant, il résulte de l'irrégularité mentionnée au point 4 du présent arrêt que M. B... ne pouvait, sur le fondement du contrat du 1er septembre 2008, se prévaloir d'un droit à occuper un emploi du niveau de la catégorie A. Par suite, la décision du 27 novembre 2018, qui ne modifie défavorablement aucun autre élément du contrat de travail de M. B..., ne constitue pas le retrait d'une décision créatrice de droit. Dès lors, l'EPV est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a jugé que cette décision était illégale faute d'avoir été prise dans les quatre mois suivant la conclusion du contrat du 1er septembre 2008.

7. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens pouvant fonder la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Versailles.

8. En procédant, par la décision contestée du 27 novembre 2018, au reclassement de M. B... dans le groupe de fonctions n° 2 du cadre de gestion des agents contractuels de l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles, correspondant à des emplois du niveau de la catégorie B, alors que les dispositions du 2° de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 ne permettaient pas, dans leur rédaction applicable en l'espèce, d'employer un agent contractuel pour exercer de telles fonctions, l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles a méconnu le champ d'application de ces dispositions.

9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens présentés par M. B..., l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 27 novembre 2018 procédant au reclassement de M. B... et la décision du 22 mars 2022 portant rejet de son recours gracieux.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles demande à ce titre. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cet établissement le versement de la somme que M. B... demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 18 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président assesseur,

Mme Villette, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2023.

La rapporteure,

A. VILLETTELe président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE02284


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02284
Date de la décision : 24/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Différentes catégories d'actes - Actes administratifs - classification - Actes individuels ou collectifs - Actes créateurs de droits.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: Mme Anne VILLETTE
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : SELARL CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-05-24;21ve02284 ?
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