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30/03/2023 | FRANCE | N°21VE03326

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 30 mars 2023, 21VE03326


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... J..., M. K... F..., Mme G... F..., Mme P... C..., M. B... N..., M. L... I..., Mme Q... I..., M. H... R... et Mme M... R..., ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin a délivré un permis de construire vingt-et-une maisons individuelles sur un terrain situé 16 rue Neuve à la société Concept Promotion et de mettre à la charge de la commune la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1

du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2004621 du 7 octobr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... J..., M. K... F..., Mme G... F..., Mme P... C..., M. B... N..., M. L... I..., Mme Q... I..., M. H... R... et Mme M... R..., ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2020 par lequel le maire de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin a délivré un permis de construire vingt-et-une maisons individuelles sur un terrain situé 16 rue Neuve à la société Concept Promotion et de mettre à la charge de la commune la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2004621 du 7 octobre 2021 le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 27 octobre 2020 et mis à la charge de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée sous le n° 21VE03326, le 10 décembre 2021, et un mémoire enregistré le 30 janvier 2023, la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin, représentée par Me Tissier-Lotz, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par M. J... et autres devant le tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de mettre à leur charge solidaire la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de l'atteinte au boisement constituant l'élément de paysage à protéger n° 8 était opérant et fondé ;

- les moyens invoqués en première instance par M. J... et autres sont infondés ;

- les nouveaux moyens invoqués en appel sont également infondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 décembre 2022 et un mémoire enregistré le 20 février 2023, M. J..., M. et Mme F..., A... C..., M. N..., Mme I... et M. et Mme R..., représentés par Me Massaguer, demandent à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 octobre 2020 délivrant un permis de construire à la société Concept Promotion ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le moyen d'annulation retenu par les premiers juges est opérant et fondé ;

- l'arrêté du 27 octobre 2020 est illégal pour les autres motifs exposés en première instance ;

- en outre, cet arrêté est entaché d'un vice de procédure, faute pour le dossier de demande de préciser que le projet était soumis à une déclaration au titre de la loi sur loi ;

- par ailleurs, le dossier de demande ne décrit pas fidèlement l'état initial du terrain ainsi que les modalités d'insertion du projet dans l'environnement ;

- ce dossier est dépourvu d'étude d'impact ou de décision de l'autorité environnementale l'en dispensant ;

- l'attestation de prise en compte du plan de prévention des risques d'inondation qu'il comprend n'est pas conforme aux dispositions du f) de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ;

- ce dossier ne comporte pas le tableau prévu par les dispositions de l'article R. 431-16-1 du code de l'urbanisme ;

- le défaut d'obtention préalable d'une autorisation de défrichement en application des dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme entache l'arrêté attaqué d'illégalité ;

- l'arrêté du 27 octobre 2020 méconnaît les dispositions de l'article U 2 du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît les dispositions du plan de prévention des risques d'inondation, dès lors qu'il n'est pas établi que le dernier niveau habitable soit accessible de l'extérieur et que l'emprise au sol des constructions excède le seuil de 20 % de la surface totale du terrain.

II - Par une requête enregistrée sous le n° 21VE03349, le 11 décembre 2021 et un mémoire enregistré le 21 février 2023 la société Concept Promotion, représentée par Me Annoot, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2004261 du 7 octobre 2021 le tribunal administratif d'Orléans ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par M. J... et autres devant le tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de mettre à la charge de M. J... et autres la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, dès lors qu'il ne répond pas à l'argument selon lequel les plantations envisagées étaient réalisables ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de l'atteinte au boisement constituant l'élément de paysage à protéger n° 8 était opérant et fondé ;

- les moyens invoqués en première instance par M. J... et autres sont infondés pour les mêmes motifs que ceux exposés en première instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 décembre 2022 et un mémoire enregistré le 20 février 2023, M. J..., M. et Mme F..., A... C..., M. N..., Mme I... et M. et Mme R..., représentés par Me Massaguer, demandent à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 octobre 2020 délivrant un permis de construire à la société Concept Promotion ;

3°) de mettre à la charge de la société Concept Promotion la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le moyen tiré de l'irrégularité du jugement est infondé ;

- le moyen d'annulation retenu par les premiers juges est opérant et fondé ;

- l'arrêté du 27 octobre 2020 est illégal pour les autres motifs exposés en première instance ;

- en outre, cet arrêté est entaché d'un vice de procédure, faute pour le dossier de demande de préciser que le projet était soumis à une déclaration au titre de la loi sur loi ; par ailleurs, le dossier de demande ne décrit pas fidèlement l'état initial du terrain ainsi que les modalités d'insertion du projet dans l'environnement ;

- ce dossier est dépourvu d'étude d'impact ou de décision de l'autorité environnementale l'en dispensant ;

- l'attestation de prise en compte du plan de prévention des risques d'inondation qu'il comprend n'est pas conforme aux dispositions du f) de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme ;

- ce dossier ne comporte pas le tableau prévu par les dispositions de l'article R. 431-16-1 du code de l'urbanisme ;

- le défaut d'obtention préalable d'une autorisation de défrichement en application des dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme entache l'arrêté attaqué d'illégalité ;

- l'arrêté du 27 octobre 2020 méconnaît les dispositions de l'article U 2 du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît les dispositions du plan de prévention des risques inondation, dès lors qu'il n'est pas établi que le dernier niveau habitable soit accessible de l'extérieur et que l'emprise au sol des constructions excède le seuil de 20 % de la surface totale du terrain.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme O...,

- les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique,

- et les observations de Me Tissier-Lotz, représentant la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin, de Me Annoot, représentant la société Concept Promotion et de Me Ziemendorf substituant Me Massaguer, représentant M. J... et autres.

Des notes en délibéré, présentées pour M. J... et autres, ont été enregistrées les 10 et 14 mars 2023.

Des notes en délibéré, présentées pour la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin ont été enregistrée les 10 et 13 mars 2023.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a déposé le 30 janvier 2020 une déclaration préalable portant sur la coupe, l'abattage et la replantation d'arbres sur un terrain situé 16 rue Neuve à Saint-Pryvé-Saint-Mesmin. Par un arrêté du 20 février 2020, le maire de cette commune ne s'est pas opposé à cette déclaration préalable, sous réserve, en particulier, que les arbres replantés soient si possible d'une espèce comparable en hauteur et en port. Par un arrêté du 27 octobre 2020, le maire de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin a ensuite délivré à la société Concept Promotion un permis de construire vingt-et-une maisons individuelles sur ce terrain. Par un jugement du 7 octobre 2021, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 27 octobre 2020 à la demande de M. J... et d'autres voisins de la parcelle concernée. Par la requête n° 21VE03326, la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin demande l'annulation de ce jugement. Par la requête n° 21VE03349, la société Concept Promotion formule la même demande.

2. Les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement. Elles présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par le même arrêt.

Sur la régularité du jugement :

3. Eu égard au moyen d'annulation retenu par les premiers juges, tiré de l'atteinte portée au boisement constituant l'élément de paysage à protéger n° 8 par le projet de construction de la société Concept Promotion, faute pour ce projet de prévoir la plantation d'arbres ayant vocation à reconstituer une partie du boisement protégé en tant qu'élément remarquable, le jugement n'avait pas à se prononcer sur l'argument, avancé par la société, selon lequel les plantations envisagées étaient réalisables. La société n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Le plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin applicable à la date de l'arrêté attaqué a identifié les boisements aux alentours de la rue Neuve comme un élément de paysage, doté du numéro 8, à protéger au sens des dispositions du 7° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, lesquelles, dans leur version en vigueur à la date d'approbation de ce plan, disposent que le règlement du plan peut " identifier et localiser les éléments de paysage (...) à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique ou écologique et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur protection ". Si l'article 3-2 des dispositions générales du règlement du PLU de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin prévoit que le plan de zonage peut identifier, en application des dispositions précitées du code de l'urbanisme, des éléments de paysage dont la destruction est interdite, le règlement n'a pas prescrit une telle interdiction pour les éléments qu'il a identifiés et en particulier pas pour l'élément n° 8. Néanmoins, d'une part, les dispositions du h) de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme, dans leur version en vigueur à la date de l'approbation du PLU de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin subordonnaient la réalisation " de travaux ayant pour effet de modifier ou de supprimer un élément que le plan local d'urbanisme (...) a identifié, en application du 7° de l'article [L. 123-1], comme présentant un intérêt (...) paysager " au dépôt d'une déclaration préalable. D'autre part, les dispositions de l'article U 13 du PLU, applicables tant aux espaces boisés classés qu'aux espaces paysagers identifiés en application du 7° de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, prévoyaient que " les arbres existants doivent être préservés au maximum. Le projet doit respecter les plus beaux sujets ".

5. En l'espèce, l'arrêté du 27 octobre 2020 délivrant à la société Concept Promotion un permis de construire vingt-et-une maisons individuelles sur le terrain situé 16 rue Neuve à Saint-Pryvé-Saint-Mesmin, soit dans le périmètre de l'élément de paysage n° 8 identifié à l'annexe 6 du plan local d'urbanisme de cette commune en application des dispositions du 7° de l'article L 123-1-5 du code de l'urbanisme, fait référence à l'arrêté du 20 février 2020 par lequel le maire de cette commune ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par le propriétaire des parcelles portant sur l'abattage de l'ensemble des arbres situés sur le terrain et la replantation du même nombre d'arbres, sous réserve que les arbres replantés soient si possible d'une espèce comparable en hauteur et en port. Cet arrêté du 27 octobre 2020 précise que le projet de construction prévoit de replanter des arbres conformément à cette déclaration préalable.

6. Or, alors que l'ensemble des dispositions citées au point 4 fixent un objectif général de préservation des arbres composant le boisement présent sur le terrain objet de la demande de permis de construire, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de construction, qui reprend certes la prévision de replantation d'un nombre équivalent d'arbres à ceux dont l'abattage a été déclaré au préalable, soit compatible avec un développement durable des arbres dont la plantation est prévue. A cet égard, M. J... et autres produisent une étude réalisée le 26 février 2021 par un ingénieur paysagiste, qui indique que " la densité des surfaces imperméabilisées et la proximité des maisons, des massifs drainants, des terrasses, des parkings vis-à-vis de l'implantation des arbres est bien trop faible pour permettre aux arbres de type chêne de se développer de manière correcte au niveau du port et de l'envergure du houppier ". Dans la mesure où il n'est ainsi pas démontré que la replantation prévue par le projet de construction permette d'aboutir à la création d'un boisement comparable à celui qui préexistait au projet, la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin et la société Concept Promotion ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 27 octobre 2020 au motif qu'il portait une atteinte excessive au boisement constituant l'élément de paysage à protéger n° 8.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de la société Concept Promotion et de la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin la somme totale de 2 000 euros à verser à M. J... et autres au titre des frais d'instance. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. J... et autres la somme que la société Concept Promotion et la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin demandent au titre des frais d'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 21VE03326 présentée par la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin est rejetée.

Article 2 : La requête n° 21VE03349 présentée par la société Concept Promotion est rejetée.

Article 3 : La société Concept Promotion et la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin verseront solidairement la somme totale de 2 000 euros à M. J... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. J... et autres est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin, à la société Concept Promotion et à M. E... J..., premier dénommé, pour l'ensemble des défendeurs.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président,

M. Mauny, président assesseur,

Mme Troalen, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2023.

La rapporteure,

E. O...Le président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

F. PETIT-GALLAND

La République mande et ordonne à la préfète du Loiret en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N°s 21VE03326-21VE03349002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE03326
Date de la décision : 30/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Légalité interne du permis de construire. - Légalité au regard de la réglementation locale.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: Mme Elise TROALEN
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : ANNOOT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-03-30;21ve03326 ?
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