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09/02/2023 | FRANCE | N°21VE01124

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 09 février 2023, 21VE01124


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la commune du Vésinet à lui verser la somme de 18 000 euros en réparation des préjudices causés par l'illégalité de la décision de non-renouvellement de son engagement en qualité de technicien, assortie des intérêts à taux légal à compter du 1er août 2018 et de mettre à la charge de la commune du Vésinet la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n

° 1808434 du 8 février 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner la commune du Vésinet à lui verser la somme de 18 000 euros en réparation des préjudices causés par l'illégalité de la décision de non-renouvellement de son engagement en qualité de technicien, assortie des intérêts à taux légal à compter du 1er août 2018 et de mettre à la charge de la commune du Vésinet la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1808434 du 8 février 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 avril 2021, M. B..., représenté Me Bousquet, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune du Vésinet à lui verser la somme de 18 000 euros au titre des préjudices qu'il estime avoir subis en raison de l'illégalité de la décision de non-renouvellement de son contrat, assortie des intérêts à taux légal à compter du 1er août 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Vésinet la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- le tribunal administratif devait attendre de connaître le sens de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles saisie après cassation par le Conseil d'Etat ; il convenait de faire application du jugement rendu par le tribunal annulant la décision de non renouvellement après l'annulation du premier arrêt de la cour par le Conseil d'Etat ;

- la responsabilité de la commune pouvait être recherchée car l'annulation par le Conseil d'Etat de l'arrêt de la cour n'impliquait pas que la sanction de non-renouvellement était justifiée ; sa manière de servir était satisfaisante et le non-respect des règles de cumul d'activités, de façon limitée, ne justifiait pas un non renouvellement ; c'est à tort que les premiers n'ont pas considéré que la décision portant refus de renouvellement de son contrat n'était pas illégale ;

- la cour a retenu l'illégalité de la décision de non-renouvellement de son contrat et cette décision est donc fautive et de nature à engager la responsabilité de la commune du Vésinet ;

- il a subi des préjudices évalués à une somme totale de 18 000 euros résultant d'un préjudice financier constitué d'une perte de traitement estimé à 2 300 euros par mois et de la perte de son logement de fonction, l'obligeant à se reloger et payer un loyer de 1 183 euros par mois, d'un préjudice de moral en terme de réputation et d'un préjudice de carrière.

Un mémoire en défense présenté pour la commune du Vésinet par Me Lafay, avocat, a été enregistré le 16 janvier 2023, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté par la commune du Vésinet avec un contrat à durée déterminée à compter du 16 novembre 2009, en qualité de technicien territorial. Par un courrier du 24 septembre 2014, le maire de la commune l'a informé que son contrat ne serait pas renouvelé au-delà de son terme, prévu le 15 novembre 2014. Par un jugement du 9 février 2016, le tribunal administratif de Versailles a annulé cette décision. Par un arrêt du 28 juin 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a annulé le jugement et la décision du maire du Vésinet du 24 septembre 2014. Par une décision du 19 décembre 2019, le Conseil d'Etat a annulé les articles 2 à 4 de cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour. Par un nouvel arrêt du 18 février 2021, la cour a annulé la décision du maire du Vésinet du 24 septembre 2014. Par ailleurs, M. B... a demandé le 30 juillet 2018 à la commune du Vésinet l'indemnisation des préjudices subis du fait de la décision illégale du 24 septembre 2014. Après le rejet implicite de sa demande, il a saisi le 1er décembre 2018 le tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à l'indemnisation de ses préjudices. M. B... relève appel du jugement du 8 février 2021 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. M. B... ne peut pas utilement soutenir que le tribunal administratif de Versailles aurait dû sursoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la cour rendu le 18 février 2021, après renvoi par le Conseil d'Etat dans sa décision du 19 décembre 2019, dès lors qu'il ne se trouvait pas dans une situation dans laquelle il aurait été tenu d'y procéder en vertu du code de justice administrative.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, si M. B... soutient que le tribunal ne pouvait pas se borner à constater l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 28 juin 2018 pour rejeter sa demande indemnitaire et se devait de constater l'annulation de la décision du 24 septembre 2014 par le jugement du tribunal administratif de Versailles du 9 février 2016 pour statuer sur sa demande, il ressort toutefois de la demande adressée par le requérant au tribunal administratif qu'il a lui-même fondé sa demande indemnitaire sur l'intervention de cet arrêt, sans faire aucun développement sur la ou les fautes qui entacheraient la décision du 24 septembre 2014. Au surplus, il résulte de l'arrêt de la cour du 28 juin 2018 qu'elle a prononcé l'annulation dudit jugement dans son article 1er, lequel n'a pas été annulé par le Conseil d'Etat le 19 décembre 2019.

4. En second lieu, d'une part, en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public contractuel irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure de non renouvellement de son contrat pour motif disciplinaire illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour apprécier à ce titre l'existence d'un lien de causalité entre les préjudices subis par l'agent et l'illégalité commise par l'administration, le juge peut rechercher si, compte tenu des fautes commises par l'agent et de la nature de l'illégalité entachant la mesure prise pour un motif disciplinaire, la même mesure aurait pu être légalement prise par l'administration.

5. D'autre part, un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son contrat ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses clauses si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent. Dès lors qu'elles sont de nature à caractériser un intérêt du service justifiant le non renouvellement du contrat, la circonstance que des considérations relatives à la personne de l'agent soient par ailleurs susceptibles de justifier une sanction disciplinaire ne fait pas obstacle, par elle-même, à ce qu'une décision de non renouvellement du contrat soit légalement prise, pourvu que l'intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations.

6. Il résulte de l'instruction que le non-renouvellement du contrat de M. B... était fondé notamment sur l'exploitation d'une activité de traiteur à domicile dans le logement qui a été mis à sa disposition et que ces faits, qui ne sont pas dépourvus de liens avec le service, sont également susceptibles de justifier une sanction disciplinaire. Il en résulte également que M. B... n'a pas été mis à même de faire valoir ses observations avant l'intervention de la décision de non-renouvellement de son contrat et que c'est pour ce motif que la cour a annulé la décision du maire du Vésinet dans l'article 1er de son arrêt du 18 février 2021. Toutefois, quand bien-même M. B... avait reçu un avis favorable au renouvellement de son contrat, la découverte de l'exercice par l'intéressé d'une activité commerciale dans le logement concédé par la commune, dont la réalité n'est pas contestée, méconnaissant les règles sur le cumul d'activité et l'occupation des logements de fonction, pouvait justifier le non-renouvellement du contrat de M. B..., les réglementations y afférentes n'étant pas dépourvues de lien avec le service. Il suit de là que, nonobstant l'illégalité externe entachant la décision du 24 septembre 2014, la même mesure aurait pu être légalement prise par l'administration. Il n'y a donc pas de lien de causalité entre l'illégalité résultant de l'impossibilité pour M. B... de faire valoir ses observations et les préjudices dont il se prévaut.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices résultant de la décision du 24 septembre 2014 refusant le renouvellement de son contrat.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. B... sur leur fondement soit mise à la charge de la commune du Vésinet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune du Vésinet.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président assesseur,

Mme Villette, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2023.

Le rapporteur,

O. A...Le président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au préfet des Yvelines en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 21VE01124 002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01124
Date de la décision : 09/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : LAFAY

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-02-09;21ve01124 ?
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