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15/12/2022 | FRANCE | N°20VE03159

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 15 décembre 2022, 20VE03159


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... E... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2010, ainsi que la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. E... au titre des mêmes années, tous assortis du versement des intérêts légaux.

Par un jugement n° 1802332 du 12 octobre 2020, le tribunal administratif d'Orléans, après avoir déchargé M. E..

. du rappel de taxe sur la valeur ajoutée relatif à la facture du 28 mai 2010 concernant M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... E... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2010, ainsi que la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. E... au titre des mêmes années, tous assortis du versement des intérêts légaux.

Par un jugement n° 1802332 du 12 octobre 2020, le tribunal administratif d'Orléans, après avoir déchargé M. E... du rappel de taxe sur la valeur ajoutée relatif à la facture du 28 mai 2010 concernant M. B... d'un montant de 3 903,50 euros TTC, a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 8 décembre 2020, 23 mars et 11 mai 2021, M. et Mme E..., représentés par Me Bourdin, avocat, doivent être regardés comme demandant à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à leur charge au titre des exercices clos de 2003 à 2010, ainsi que la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée restant à la charge de M. E... au titre des mêmes années ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à leur charge au titre des exercices clos de 2003 à 2010, ainsi que la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. E... au titre des mêmes années, en retenant, d'une part, un taux de charge déductible des bénéfices industriels et commerciaux d'au minimum 57,95 % de 2003 à 2006 et de 56,23 % de 2007 à 2010 et d'en tirer les conséquences en matière de taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, en écartant les salaires déclarés à tort de 2003 à 2007 ;

4°) de condamner l'Etat au versement des intérêts légaux à compter de la date de paiement des impositions contestées ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les opérations de contrôle se sont déroulées du 12 juin 2012 au 15 novembre 2012, soit pendant cinq mois et trois jours, délai supérieur à celui de trois mois prescrit par l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ; la dérogation prévue au 4ème alinéa du II de l'article L. 52, qui concerne les comptabilités affectées de graves irrégularités, n'était pas applicable au cas de M. E... qui n'a présenté aucune comptabilité, ainsi qu'il ressort du texte, des travaux parlementaires et de la modification ultérieure apportée au texte par l'article 50 de la loi

n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 qui étend cette dérogation aux activités occultes ; aucune dérogation ne peut être accordée sur le fondement du 2ème alinéa du II de l'article L. 52 dès lors qu'aucun compte bancaire mixte n'a été examiné ; c'est donc à tort que les premiers juges ont considéré que la vérification de comptabilité pouvait dépasser trois mois ;

- en demandant auprès de leur établissement bancaire la production des relevés bancaires de l'ensemble de leurs comptes, y compris privés, pour les années 2003 à 2007, et en les examinant, le service a mené un examen de leur situation fiscale personnelle sans en avoir suivi la procédure ni respecté les garanties qui s'y attachent ; c'est donc à tort que les premiers juges ont considéré qu'aucun examen de situation fiscale personnelle n'avait été mené de 2003 à 2007 ;

- le délai spécial de reprise de dix ans, prévu au 3ème alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales n'était pas applicable dès lors que le service avait connaissance de son activité indépendante dès l'année 2006 ; le service, qui pouvait agir dans le délai normal de reprise, ne pouvait donc s'en prévaloir et ne pouvait donc envisager des rehaussements sur les années 2003 à 2007 ; c'est donc à tort et en méconnaissance de la jurisprudence n° 29949 du Conseil d'Etat que les premiers juges ont estimé que le délai de reprise s'étendait à dix ans ;

- M. E... a déclaré à tort ses revenus dans la catégorie des traitements et salaires ; pour 2009 et 2010, le service a admis l'absence de salaires et la déduction des sommes ainsi déclarées des rectifications envisagées ; la situation est similaire de 2003 à 2007, ses comptes bancaires permettant de confirmer que M. E... n'a perçu aucun salaire sur la période ; en refusant de déduire les sommes déclarées à tort en traitements et salaires de 2003 à 2007, les premiers juges ont mal apprécié les preuves apportées ;

- en 2007, un crédit de 425,02 euros n'est pas taxable puisqu'il correspond à une indemnisation d'assurance d'ordre privé ; cette somme doit être retraitée de la base taxable des bénéfices industriels et commerciaux et de la taxe sur la valeur ajoutée ; c'est à tort que les premiers juges ont admis que des crédits qui ne sont pas rattachables à l'activité professionnelle de M. E... pouvaient être taxés ;

- le taux de charges de 51 % a été retenu par comparaison à six entreprises, dont il n'a jamais obtenu les comptes, malgré sa demande ; les fiches de chantier qu'il a remises au service prouvent que le taux réel est supérieur, de l'ordre de 71,33 % en moyenne ; le taux de charges retenu pour les micro-entreprises est de 71 % pour les prestataires et de 52 % pour les activités d'achat-revente ; pour les activités mixtes du bâtiment, la doctrine prévoit que le taux de 71 % s'applique à la vente de matériaux et celui de 52 % à la main d'œuvre ; en l'espèce, selon un centre de gestion agréé de la région, 35 % de ses factures correspondant à la vente de matériaux, il en ressort que son taux de charges aurait dû être de 57,35 % de 2006 à 2010 et de 59,6 % sur les années antérieures ; si le même raisonnement est appliqué à l'échantillon du service, le taux de charges est respectivement de 57,95 % de 2003 à 2005 et de 56,23 % de 2006 à 2010 ; en refusant d'admettre un taux de charges supérieur à celui retenu par le service, les premiers juges ont mal apprécié les preuves apportées.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 20 avril et 6 mai 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Deroc, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bourdin, représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2008, 2009 et 2010. Lors de ce contrôle, l'administration a constaté que M. E... exerçait une activité de miroitier-vitrier alors qu'il n'avait pas fait connaître cette activité auprès d'un centre de formalités des entreprises et n'avait pas souscrit de déclaration fiscale dans les délais légaux au titre de cette activité. M. E... a alors fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur cette activité sur les années 2003 à 2010 à la suite de laquelle il a fait l'objet de rectifications en matière d'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et de taxe sur la valeur ajoutée, en sus des rectifications d'impôt sur le revenu mises à la charge du foyer fiscal qu'il forme avec son épouse, consécutives à l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle. M. et Mme E... font appel du jugement du 12 octobre 2020, par lequel le tribunal administratif d'Orléans, après avoir déchargé M. E... d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 3 903,50 euros TTC, a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à leur charge et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels M. E... a été assujetti.

Sur la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " I.- Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : / 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) / 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; (...) ". Aux termes de l'article L. 73 du même livre : " Peuvent être évalués d'office : / 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) ".

4. Il est constant que les opérations de contrôle se sont déroulées du 12 juin 2012 au 15 novembre 2012, soit sur une durée de cinq mois et trois jours. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'administration a mis en œuvre la procédure de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'évaluation d'office en matière de bénéfice industriel et commercial, en application des dispositions précitées du livre des procédures fiscales, en l'absence des déclarations correspondant à l'activité de miroitier-vitrier de M. E.... Quand bien même ce dernier aurait déclaré une partie de ces revenus dans sa déclaration d'ensemble des revenus de son foyer fiscal, cela ne saurait suppléer au défaut de toute déclaration spéciale de ces bénéfices. Or, les vices éventuels entachant une vérification de comptabilité sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors que le contribuable se trouve en situation d'imposition d'office et que cette situation n'a pas été révélée par ce contrôle, comme en l'espèce, en l'absence des déclarations correspondant à l'activité de miroitier-vitrier de M. E.... Les requérants, qui ne contestent nullement la mise en œuvre des procédures d'imposition d'office, ne peuvent, par suite, utilement soutenir que l'article L. 52 du livre des procédures fiscales a été méconnu.

5. En second lieu, il ressort de la proposition de rectification du 30 novembre 2012 que, par la mise en œuvre de son droit de communication, l'administration a obtenu la copie des relevés du compte n° 0005101075069, ouvert au nom de M. D... E... et des comptes n°s 0005101212906 et 0003412660380, ouverts au nom de Mme A... E.... Or, le simple examen des crédits de ces relevés de comptes pour identifier ceux qui pouvaient être rattachés à l'activité professionnelle de M. E... ne constitue pas un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle pour les années 2003 à 2007. Par ailleurs, s'agissant du compte n° 0005101212906, il résulte de l'instruction que, dans le cadre de la vérification de comptabilité, M. E... a reconnu, lors de la première intervention du 12 juin 2012, avoir utilisé pour son activité professionnelle ce compte, dont les relevés constituaient donc des pièces justificatives de ses opérations professionnelles et avaient ainsi le caractère de documents comptables même s'ils retraçaient également des opérations personnelles, alors même que ce compte serait ouvert au nom de Mme E... qui est totalement étrangère à l'activité de son mari. S'agissant du compte n° 0003412660380, qui serait également, selon les requérants, un compte privé de Mme E..., l'administration soutient, sans être contredite, qu'aucun rehaussement n'a été fondé sur l'exploitation de ce compte. Par suite, le moyen tiré de ce que le service aurait en réalité procédé, en examinant ces comptes bancaires, à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des requérants sur les années 2003 à 2007 sans respecter les garanties attachées à cette procédure n'est pas fondé et doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

6. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " (...) la charge de la preuve (...) incombe également au contribuable à défaut de comptabilité (...) ". Aux termes de l'article L. 193 du même livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ".

7. Ainsi qu'il a été rappelé au point 4., l'administration a fait usage des procédures d'imposition d'office pour les impositions litigieuses, consécutives à la vérification de comptabilité de l'activité de M. E..., qui n'a, par ailleurs, présenté aucune comptabilité. Il incombe dès lors aux requérants d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition ayant servi pour l'établissement des impositions contestées.

En ce qui concerne le délai de reprise :

8. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. (...) / Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable exerce une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite. / Le droit de reprise mentionné au troisième alinéa ne s'applique qu'aux seules catégories de revenus que le contribuable n'a pas fait figurer dans une quelconque des déclarations qu'il a déposées dans le délai légal. Il ne s'applique pas lorsque des revenus ou plus-values ont été déclarés dans une catégorie autre que celle dans laquelle ils doivent être imposés ". Aux termes de l'article L. 176 du même livre : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts. (...) Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts (...) lorsque le contribuable exerce une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite ".

9. Il est constant que M. E... a exercé une activité de miroitier-vitrier au cours des années 2003 à 2010, qu'il n'a jamais déclarée au centre de formalités des entreprises, et pour laquelle il n'a jamais déposé les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée ni les déclarations spéciales de bénéfices industriels et commerciaux correspondantes. Toutefois, il fait valoir, uniquement pour les années 2003 à 2007, que cette activité ne revêtait pas de caractère occulte, dès lors qu'une partie des recettes issues de cette activité professionnelle a été déclarée dans la catégorie " traitements et salaires " de sa déclaration d'ensemble de revenus. Il résulte ainsi de l'instruction que M. E... a déclaré comme " traitements et salaires " une somme de 37 987 euros en 2003, 37 546 euros en 2004, 38 332 euros en 2005, 32 187 euros en 2006 et 31 116 euros en 2007. Or, aucune source de revenus, autre que celle de son activité non déclarée de miroitier-vitrier, n'apparaît sur les relevés bancaires du couple, qu'ils produisent intégralement, ni sur aucun autre document. Dès lors, ces revenus déclarés correspondent nécessairement à l'activité de miroitier-vitrier de M. E..., ainsi que l'administration l'a d'ailleurs elle-même admis pour les années 2009 et 2010. En effet, s'agissant de ces deux années, l'administration a conclu, à l'issue de l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, que " l'analyse [des] comptes bancaires a permis de déterminer [qu'ils n'avaient] pas perçu de salaires au titre des revenus 2009 et 2010 " et a admis, en conséquence, la déduction du montant figurant dans la catégorie des " traitements et salaires ", que M. et Mme E... ont déclaré de façon strictement identique et dans des proportions similaires aux années 2003 à 2007, des rehaussements envisagés par le vérificateur en 2009 et 2010. Ainsi, ces déclarations faisaient obstacle à ce que l'activité de miroitier-vitrier exercée par M. E... présente, au titre des années 2003 à 2007, un caractère occulte au sens des articles L. 169 et L. 176 du livre des procédures fiscales. En conséquence, leur situation ne relevait pas du deuxième alinéa de ces articles, permettant à l'administration fiscale d'exercer son droit de reprise jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ou la taxe est devenue exigible et M. et Mme E... sont, dès lors, fondés à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 à 2007, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. E... au titre de ces mêmes années.

En ce qui concerne la base taxable retenue par l'administration et restant en litige :

10. Les requérants critiquent le taux de charges de 51 % retenu par l'administration pour la détermination de la base imposable relative à l'activité professionnelle de M. E.... Il ressort en effet de la proposition de rectification du 30 novembre 2012, que, pour la détermination des charges déductibles, l'administration a procédé à deux évaluations et a retenu celle, plus favorable au contribuable, de l'évaluation par comparaison en déterminant le montant des charges par référence aux achats et frais généraux déductibles déclarés par six entreprises similaires dans le même ressort géographique d'activité et de taille équivalente. Après avoir déterminé, pour les années 2008 et 2009, un taux de charges moyen par rapport au chiffre d'affaires de ces entreprises, à l'exclusion des salaires et charges sociales, M. E... n'employant pas de personnel, il a appliqué la moyenne des deux taux pour déterminer le taux moyen de charges pour les années 2003 à 2010. Il a ainsi obtenu pour l'année 2008, un taux moyen de 50,88 % et pour l'année 2009 de 51,60 % et donc pour les années 2003-2010, un taux de 51 %. Pour appuyer leur critique, les requérants se fondent tout d'abord sur trois fiches de chantier, toutes d'un montant inférieur à 700 euros, concernant un unique client en 2009, qui démontreraient un taux moyen de charges de 71,33 %. Toutefois, le faible nombre de fiches de chantier produites ne permet pas de juger de leur représentativité et, à l'exception des achats de matériaux, aucun des autres frais mentionnés dans le calcul établi par M. E... n'est accompagné d'un justificatif. Les requérants estiment, ensuite, que l'administration fiscale doit retenir un taux de charges minimum égal au taux de charges applicable aux entreprises de miroiterie imposées sous le régime des micro-entreprises. Or, M. E... ne justifie ni même n'allègue qu'il aurait pu relever de ce régime. En outre, si la fiche statistique produite par les requérants, qui n'explicite pas les données prises en compte pour les calculs, et les données des entreprises de l'échantillon reprises dans la proposition de rectification montrent que les achats de matières premières représenteraient, en moyenne pour ces entreprises, respectivement 35 % et 28 %, ces taux ne correspondent pas à la réalité de l'activité de M. E... dont les quelques fiches de chantier produites font état d'une moyenne de 14 %. De surcroît, la valeur ajoutée moyenne figurant sur la fiche statistique produite par M. et Mme E..., qui est calculée à partir de la production d'une entreprise de laquelle sont déduits l'ensemble des coûts directs et indirects dont se prévaut M. E... dans ses écritures, s'élève à 55 % environ, soit un taux de charges global de 45 %. Ce taux est sensiblement inférieur à celui de 51 % retenu par l'administration lors du contrôle. Les requérants n'établissent donc pas que le bénéfice reconstitué par l'administration, en tenant compte d'un tel taux de charges, serait exagéré.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans, après avoir déchargé M. E... d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 3 903,50 euros TTC, a refusé la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu mises à leur charge au titre des années 2003 à 2007 et de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. E... au titre des mêmes années, ensemble la décharge des pénalités les assortissant.

Sur les autres conclusions de la requête :

12. En l'absence de litige né et actuel relatif à un refus de paiement des intérêts moratoires dus aux contribuables au titre de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, les conclusions de M. et Mme E... tendant au paiement de ces intérêts sont sans objet et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme E... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1 : M. et Mme E... sont déchargés des rappels d'impôt sur le revenu au titre des années 2003 à 2007, ensemble les pénalités les assortissant.

Article 2 : M. E... est déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2003 à 2007, ensemble les pénalités les assortissant.

Article 3 : Le jugement n° 1802332 du 12 octobre 2020 du tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme E... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme E... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Besson-Ledey, présidente de chambre,

Mme Danielian, présidente assesseure,

Mme Liogier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 décembre 2022.

La rapporteure,

C. C...La présidente,

L. Besson-Ledey La greffière,

C. Fourteau

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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