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16/11/2022 | FRANCE | N°20VE00229

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 16 novembre 2022, 20VE00229


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Bobigny du 24 septembre 2018 mettant fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directrice générale adjointe avec toutes les conséquences de droit dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune de Bobigny la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à titr

e subsidiaire, de désigner un expert aux fins de vérifier et requalifier l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Bobigny du 24 septembre 2018 mettant fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directrice générale adjointe avec toutes les conséquences de droit dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de la commune de Bobigny la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à titre subsidiaire, de désigner un expert aux fins de vérifier et requalifier l'arrêté litigieux en sanction déguisée.

Par un jugement n° 1811727 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires en réplique, enregistrés respectivement le 21 janvier 2020, le 5 août 2020 et le 16 juin 2021, Mme C..., représentée par Me d'Oria, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la commune de Bobigny de la réintégrer dans l'emploi fonctionnel de directrice générale adjointe à compter du 24 septembre 2018 et de reconstituer sa carrière, son traitement ainsi que son dossier individuel, dans un délai de quinze jours à compter de la lecture de la décision à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard, ou, à défaut de reconstitution de son traitement, de condamner la commune de Bobigny à l'indemniser pour la perte de traitement pendant la période en litige ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bobigny la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif aurait dû, sinon joindre la demande relative à l'indemnisation du harcèlement moral à celle relative à l'annulation de l'arrêté en litige, du moins prendre en compte les faits de la première demande pour se prononcer sur la seconde ;

- le tribunal a commis une erreur de droit dès lors que seul l'avocat du maire de la commune de Bobigny a pris la parole lors de l'entretien du 4 juin 2018, en méconnaissance des dispositions de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 et du principe d'impartialité ;

- il a commis une erreur de droit dès lors que la fin du détachement a pris effet le 26 septembre 2018 alors que, conformément aux dispositions de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, il aurait dû prendre effet le 1er octobre 2018 soit le premier jour du troisième mois suivant l'information du conseil municipal ; l'exposante a été privée d'une garantie et le sens de la décision contestée a été influencé ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- si elle a eu accès à son dossier individuel, elle n'a pu consulter qu'un dossier incomplet en violation de l'article 18 de la loi du 13 juillet 1983 et de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 ; les droits de la défense ont été méconnus ;

- en reconnaissant, dans un jugement du même jour, l'existence d'un harcèlement moral tout en approuvant, par le jugement attaqué, la fin du détachement de l'exposante, le tribunal a dénaturé les faits et commis une erreur de droit ; les critiques qu'elle a formulées à l'encontre de l'autorité hiérarchique, au demeurant non publiques et toujours émises avec réserve, sont justifiées par son refus de subir un harcèlement moral et d'exécuter des ordres manifestement illégaux ; la décision en litige n'a pas été prise dans l'intérêt du service et la prétendue " perte de confiance " de la commune repose sur des éléments fallacieux voire mensongers ;

- l'arrêté contesté est entaché de détournement de pouvoir ;

- en vertu de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983, seule une sanction disciplinaire pouvait lui être infligée pour l'utilisation de sa voiture de fonctions par son époux ; le tribunal a commis une erreur de droit en retenant ce motif pour caractériser la perte de confiance ;

- sa réintégration sur un poste d'archiviste est irrégulière dès lors que ce poste ne correspond pas à son grade, en méconnaissance de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ; elle a été placardisée ; elle a perdu toute mission d'encadrement et toute responsabilité hiérarchique ; elle a subi une perte de rémunération importante ;

- le tribunal a dénaturé les faits du dossier et commis une erreur de droit en ne retenant pas que la réintégration de l'exposante dans un poste d'archiviste constituait une sanction déguisée alors qu'elle s'inscrit dans une situation de harcèlement moral ; cette réintégration a entraîné une importante perte de sa rémunération mensuelle de plus de 2 700 euros et de ses attributions.

Par un mémoire en défense, des pièces complémentaires et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 6 juillet 2020, le 25 octobre 2020 et le 14 juillet 2021, la commune de Bobigny, représentée par Me Makouf, avocat, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la requérante à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requérante n'est pas recevable à se plaindre de l'absence de prise en compte par le tribunal administratif de l'existence d'une situation de harcèlement moral et de l'absence de jonction de ses deux demandes dès lors qu'elle n'a pas fait valoir l'existence d'une situation de harcèlement moral en première instance et qu'elle n'a pas sollicité de jonction dans le cadre de l'instance tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 septembre 2018 ; en tout état de cause, le tribunal n'était pas tenu de joindre ces demandes et à supposer qu'il les eût jointes, cette jonction ne pouvait pas influer sur l'issue des deux litiges en vertu du principe de neutralité des instances ;

- le moyen tiré de ce que l'entretien préalable du 4 juin 2018 a irrégulièrement été mené par le conseil de la commune au motif qu'il lui aurait été impossible d'échanger avec l'autorité territoriale dans un cadre impartial est irrecevable, cette branche n'ayant pas été soulevée en première instance ; en tout état de cause, ce moyen n'est pas fondé, dès lors que la décharge de fonctions n'est pas une sanction disciplinaire ;

- la commune n'a pas à justifier d'une délégation de pouvoir consentie à son conseil lors de l'entretien préalable dès lors qu'il ne faisait qu'exercer sa mission de représentation ; la requérante n'a, en tout état de cause, pas été privée d'une garantie dès lors qu'elle a été en mesure de présenter ses observations et de s'adresser au maire ;

- le moyen tiré de ce que le délai prévu à l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 a été méconnu est irrecevable dès lors qu'il n'a pas été soulevé en première instance ; le moyen manque en fait dès lors que la fin du détachement a pris effet le 26 septembre 2018 et non le 24 septembre 2018 ; la requérante n'établit pas en quoi cette méconnaissance aurait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision attaquée ou l'aurait privée d'une garantie ; rien n'empêchait la commune de faire prendre effet la fin du détachement de la requérante à l'expiration d'un délai plus long que celui prévu à l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- l'arrêté en litige est suffisamment motivé ;

- les documents manquants au dossier individuel de la requérante ne sont pas en lien avec la décharge de fonctions, de sorte qu'ils ne lui auraient pas été utiles, alors, au demeurant, qu'elle a été informée des griefs qui lui étaient reprochés ; la requérante ne démontre pas que l'absence d'une pièce a influencé sa ligne de défense ;

- quand bien même une situation de harcèlement moral a été reconnue dans une autre instance, la perte de confiance ayant justifié la fin du détachement est matériellement établie ; ce détachement ne s'inscrit pas dans un contexte de harcèlement moral ; le principe non bis in idem s'oppose à ce que la commune exposante soit sanctionnée pour les mêmes faits à la fois au titre de sa responsabilité et au titre de la légalité de la décision du 24 septembre 2018 ; en tout état de cause, le tribunal a bien pris en compte le fait que la requérante aurait entendu dénoncer certains agissements ; la requérante n'établit pas en quoi des ordres manifestement illégaux lui auraient été donnés ; ce moyen est au demeurant nouveau en appel et donc irrecevable ; la perte de confiance suffit à justifier la fin du détachement dans l'intérêt du service, l'administration disposant d'un large pouvoir d'appréciation sur ce point ; cette perte de confiance est établie par les courriels de la requérante, par un incident avec le directeur général et par l'utilisation par le mari de la requérante du véhicule de fonctions de cette dernière ;

- aucun texte législatif ou réglementaire ne s'oppose à ce que la méconnaissance de la charte d'utilisation des véhicules soit prise en compte pour mettre fin à un détachement ;

- la réintégration de la requérante est régulière dès lors qu'elle n'a pas été imposée et dès lors que le cadre d'emploi correspondant aux fonctions d'archiviste a été précisé ;

- la réintégration de la requérante sur un poste d'archiviste ne constitue pas une sanction déguisée dès lors que l'intéressée n'établit ni une perte de position hiérarchique, ni une perte de responsabilités, ni une perte de rémunération ; en tout état de cause, la proposition de réintégration n'a pas été suivie d'effet ;

- le moyen tiré de ce que la réintégration aurait entraîné une perte de rémunération importante n'a pas été soulevé en première instance ; en tout état de cause, la proposition de réintégration n'a jamais été suivie d'effet.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi du 22 avril 1905 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-1099 du 30 décembre 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique,

- les observations de Mme C... et celle de Me Makouf, pour la commune de Bobigny.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., attachée territoriale, a été détachée en qualité de directrice générale adjointe des services en charge des politiques sociales urbaines de la commune de Bobigny à compter du 1er mars 2015. Elle fait appel du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 22 novembre 2019 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Bobigny du 24 septembre 2018 mettant fin à son détachement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, si Mme C... soutient que le tribunal administratif a commis plusieurs erreurs de droit et dénaturé les pièces du dossier à plusieurs reprises, de tels moyens sont relatifs au bien-fondé du jugement attaqué et sont sans incidence sur sa régularité. Ils doivent, par suite, être écartés.

3. En second lieu, la jonction de deux requêtes pendantes devant la même juridiction, qui ne peut avoir d'influence sur le sens des décisions à prendre sur chacune d'entre elles, ne constitue jamais une obligation pour le juge. Par suite, en n'usant pas de son pouvoir de joindre l'affaire relative à la demande indemnitaire de Mme C... fondée sur l'existence d'un harcèlement moral, à celle relative à sa demande d'annulation de la décision mettant fin à son détachement, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'irrégularité.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

4. En premier lieu, contrairement à ce que soutient Mme C..., l'arrêté contesté mettant fin à son détachement sur l'emploi fonctionnel de directeur général adjoint des services, vise les textes applicables, précise le motif de cette mesure et indique les éléments caractérisant la perte de confiance, en se référant notamment à plusieurs courriels émanant de l'intéressée. Il est ainsi suffisamment motivé.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 : " Tous les militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté. " Et aux termes de l'article 18 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires alors en vigueur : " Le dossier du fonctionnaire doit comporter toutes les pièces intéressant la situation administrative de l'intéressé, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 16 mai 2018, Mme C... a été informée de l'engagement d'une nouvelle procédure de fin anticipée de son détachement sur l'emploi fonctionnel de directrice générale adjointe des services et a été invitée, par ce même courrier, à prendre connaissance de l'intégralité de son dossier individuel. Ayant consulté son dossier individuel le 29 mai 2018, elle a constaté, ainsi qu'il résulte du document qu'elle a établi le même jour, que son dossier de formation était incomplet, que la liste de " nomenclatures numérotées " était absente, qu'il n'y avait pas d'élément concernant sa retraite, qu'aucun dossier d'évaluation n'y figurait, de même qu'aucun rapport d'absence ou rapport disciplinaire. Elle a également mentionné l'absence de dossier de médecine préventive. Toutefois, ce même document relève la présence de 14 pièces dans le sous-dossier formation, de 5 pièces pour la médecine préventive, de 12 pièces pour la notation et de 4 pièces pour la retraite. Si Mme C... fait valoir qu'il n'est pas à exclure qu'une pièce pouvant modifier sa ligne de défense et qui aurait dû figurer dans son dossier ne s'y trouvait pas, elle n'apporte aucune précision suffisante sur la nature des pièces manquantes qui auraient pu être utiles à sa défense. En outre, l'arrêté contesté n'étant intervenu que le 24 septembre 2018, elle a disposé d'un délai suffisant pour demander, le cas échéant, la communication des pièces manquantes. Mme C... n'ayant été privée d'aucune garantie et le sens de l'arrêté contesté n'ayant pu être influencé par l'éventuelle absence de certaines pièces dans son dossier, le moyen doit être écarté.

7. En troisième lieu, en vertu des dispositions du 10ème alinéa de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en vigueur à la date de l'arrêté contesté, la fin des fonctions de directeur général adjoint des communes de plus de 2 000 habitants est précédée d'un entretien de l'autorité territoriale avec les intéressés.

8. Il résulte de ces dispositions que l'entretien préalable à la fin de détachement d'un agent sur un emploi fonctionnel, prévu pour lui permettre de présenter ses observations à l'autorité territoriale, doit être mené, compte tenu de la nature particulière de ses fonctions exercées auprès du chef de l'exécutif territorial, directement par cette seule autorité et non par un agent des services. Cet entretien constitue pour l'agent concerné une garantie dont la privation entache d'illégalité la décision mettant fin au détachement sur l'emploi fonctionnel.

9. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le maire de la commune de Bobigny était présent lors de l'entretien préalable du 4 juin 2018. Ainsi, et en tout de cause, l'avocat de la commune n'avait à justifier d'aucun mandat pour assister le maire lors cet entretien. Si le maire n'est pas intervenu personnellement lors de cet entretien et si les débats ont été conduits par le conseil de la commune, cette circonstance n'a pas fait obstacle à ce que l'agent s'explique directement devant le chef de l'exécutif territorial qui pouvait intervenir. En outre, elle ne caractérise aucun manquement au principe d'impartialité. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'entretien préalable à l'intervention de l'arrêté contesté doit être écarté.

10. En quatrième lieu, en vertu des dispositions du 10ème alinéa de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en vigueur à la date de l'arrêté contesté, la fin des fonctions de directeur général adjoint des communes de plus de 2 000 habitants prend effet le premier jour du troisième mois suivant l'information de l'assemblée délibérante.

11. Il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal a été informé de l'intention de mettre fin au détachement de Mme C... lors de la séance du 27 juin 2018. La fin du détachement de Mme C... pouvait donc prendre effet à compter du 1er septembre 2018. En prévoyant qu'elle prendrait effet à compter de sa notification, soit le 26 septembre 2018, la décision mettant fin au détachement de la requérante n'a dès lors pas méconnu les dispositions de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984.

12. En cinquième lieu, le maire de Bobigny n'a pas commis d'erreur de droit en fondant sa décision notamment sur un fait susceptible de faire l'objet d'une procédure disciplinaire.

13. En sixième lieu, la circonstance que la fin du détachement de Mme C... a entraîné pour elle une perte de rémunération est sans incidence sur la légalité de cette décision.

14. En septième lieu, il peut être mis fin au détachement des agents occupant les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 53 pour des motifs tirés de l'intérêt du service. Eu égard à l'importance du rôle des titulaires de ces emplois et à la nature particulière des responsabilités qui leur incombent, le fait pour un directeur général adjoint des services d'une commune de s'être trouvé placé dans une situation ne lui permettant plus de disposer de la part de l'autorité territoriale de la confiance nécessaire au bon accomplissement de ses missions peut légalement justifier qu'il soit, pour ce motif, déchargé de ses fonctions.

15. Il ressort des pièces du dossier, en particulier d'un courriel du directeur général des services du 4 décembre 2017, que Mme C... a remis en cause l'orientation d'un projet d'information jeunesse en bureau municipal le 13 novembre 2017, faisant preuve d'un comportement déplacé à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques. Ce comportement déplacé a une nouvelle fois été constaté en bureau municipal le 4 décembre 2017. Par ailleurs, il ressort de plusieurs courriels envoyés par Mme C... que celle-ci a fréquemment fait preuve d'un ton de défiance et de suspicion à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques, en les menaçant d'engager des actions en justice. Ces menaces ont d'ailleurs été réitérées lors de l'entretien préalable du 4 juin 2018. Dans ces conditions, compte tenu du climat de très forte tension existant entre Mme C... et sa hiérarchie, l'arrêté contesté mettant fin à son détachement sur un emploi fonctionnel pour perte de confiance n'est pas entaché d'erreur de fait ou d'une erreur manifeste d'appréciation.

16. En huitième lieu, si Mme C... a été victime d'un harcèlement moral dans l'exercice de ses fonctions de directrice générale adjointe des services de la commune de Bobigny, ainsi qu'il résulte de l'arrêt de la cour n° 20VE00236 de ce jour, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté contesté mettant fin à son détachement sur cet emploi fonctionnel ne constituerait que l'un des éléments de ce harcèlement moral ou qu'il présenterait le caractère d'une sanction déguisée.

17. En neuvième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté mettant fin au détachement de Mme C... serait entaché de détournement de pouvoir.

18. Enfin, Mme C... soutient que sa réintégration sur un poste d'archiviste est irrégulière dès lors que ce poste ne correspond pas à son grade en méconnaissance de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984. Elle soutient également qu'elle a perdu toute mission d'encadrement et a subi une perte de rémunération importante, cette mesure constituant une sanction déguisée s'inscrivant dans le contexte de harcèlement moral dont elle a fait l'objet. Toutefois, l'arrêté contesté du 24 septembre 2018 se borne à mettre fin au détachement de Mme C... et à prévoir qu'elle sera réintégrée dans le cadre d'emploi des attachés territoriaux, et ne comporte aucune mesure de réintégration dans un emploi d'archiviste, cette réintégration ayant fait l'objet de deux courriers du maire de la commune de Bobigny les 21 septembre 2018 et 27 septembre 2018. Par suite, les moyens invoqués par Mme C... sont inopérants.

19. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la commune de Bobigny à certains des moyens de la requérante, que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bobigny, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme sollicitée à ce titre par Mme C.... Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions de même nature présentées par la commune de Bobigny peuvent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Bobigny au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et à la commune de Bobigny.

Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,

M. Camenen, président assesseur,

Mme Janicot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2022.

Le rapporteur,

G. B...La présidente,

C. Signerin-Icre

La greffière,

C. Yarde

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

No 20VE00229


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-03-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Détachement et mise hors cadre. - Détachement.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Gildas CAMENEN
Rapporteur public ?: Mme SAUVAGEOT
Avocat(s) : SCP UHRY D'ORIA GRENIER

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 16/11/2022
Date de l'import : 20/11/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20VE00229
Numéro NOR : CETATEXT000046575744 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-11-16;20ve00229 ?
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