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16/11/2022 | FRANCE | N°18VE01153

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 16 novembre 2022, 18VE01153


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Fayolle et Fils a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Puteaux à lui verser la somme de 1 077 311,15 euros au titre de factures non payées, assortie des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1412516 du 20 mars 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement le 4 avril 2018, 17 mai 2018 et 19 décembre 2018, la soci

été Fayolle et Fils, représentée par Me Chabert, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Fayolle et Fils a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Puteaux à lui verser la somme de 1 077 311,15 euros au titre de factures non payées, assortie des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 1412516 du 20 mars 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés respectivement le 4 avril 2018, 17 mai 2018 et 19 décembre 2018, la société Fayolle et Fils, représentée par Me Chabert, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Puteaux à lui payer la somme de 1 077 311,15 euros assortie des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Puteaux le versement de la somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative dès lors qu'il se borne à relever que le manquement de la commune de Puteaux à sa mission de contrôle est sans incidence sur l'obligation pour l'exposante de justifier des quantités réalisées ;

- en application du cahier des clauses administratives générales (CCAG) et du cahier des clauses techniques particulières (CCTP), il appartenait à la commune de Puteaux de lui fournir des constats contradictoires d'achèvement mentionnant les quantités exploitées, qu'elle aurait pu reprendre, conformément à l'article 3.5.1. du cahier des clauses administratives particulières (CCAP), dans des factures détaillées ; faute pour la commune d'avoir établi des constats contradictoires, elle n'a pas été en mesure d'établir des projets de décompte complets ;

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, elle a fourni à la commune de Puteaux tous les métrés et attachements permettant de contrôler l'exécution de ses travaux et de lui régler ses factures ; la commune ne pouvait solliciter des bons de pesées pour des matériaux autres que les enrobés aux termes du bordereau de prix unitaires ; elle n'était par ailleurs pas tenue légalement de lui communiquer les bons de livraisons, les bons de pesées des matériaux évacués et mis en œuvre, assurant le transport en compte propre de ses marchandises ; les plans de recollement étaient complets dès lors que le maître d'ouvrage devait fournir les plans définissant l'épaisseur des couches et sous-couches constituant les corps des chaussées et de leurs fondations ;

- la commune de Puteaux a procédé à des déductions injustifiées sur les factures concernant les rues Charles Chenu, Volta, du bicentenaire, Cartault, Godefroy/Voltaire, Jules Verne et le carrefour Sadi-Carnot / Lorilleux ; elle ne pouvait retenir de manière uniforme des structures de chaussées de 70 cm dans toutes les rues ; l'exposante était libre de déterminer les matériaux qu'elle utilisait pour assurer la démolition des ouvrages situés dans l'emprise de la chaussée ; elle devait réaliser une mise en œuvre à la main pour la démolition de la longrine béton de la rue Charles Chenu et la galerie RTE de la rue Volta compte tenu de la technicité particulière de la réalisation des travaux dans ces zones ;

- l'établissement des bons de commande prouvait l'acceptation par la commune de l'exécution des travaux ; la commune n'a pas effectué sa mission de maîtrise d'œuvre dans des conditions permettant à l'exposante de réaliser les travaux dans de bonnes conditions ; ainsi, elle n'a pas fourni à l'entreprise les caractéristiques indispensables au paramétrage des travaux, telles que le comptage des trafics des chaussées, ou les épaisseurs des sous-couches et couches de la chaussée ; en tout état de cause, l'expert désigné par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a conclu qu'elle avait réalisé les travaux qui lui étaient confiés conformément à leur destination ;

- la commune de Puteaux ne peut se prévaloir du rapport de l'expert désigné dans le cadre de la procédure pénale, qui n'a pas été versé au dossier.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2018, la commune de Puteaux, représentée par Me Goutal, avocat, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la société Fayolle et Fils la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement attaqué est suffisamment motivé dès lors qu'il a écarté comme inopérante la circonstance invoquée par la société requérante selon laquelle la commune exposante n'aurait pas assuré de manière diligente sa mission de contrôle des travaux, l'entreprise ayant l'obligation de justifier des quantités réalisées dont elle réclame le paiement indépendamment des obligations du maître d'ouvrage ;

- contrairement à ce qu'elle soutient, la société requérante n'a pas produit les justificatifs que l'exposante avait sollicités afin de comprendre certains prix et quantités retenus dans les factures ; la société était tenue de communiquer les bons de pesées et de livraison en application de l'article 3.7 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ; la circonstance qu'elle se serait fournie sur ses propres chantiers est sans incidence sur son obligation d'établissement et de remise de tels bons ; il en va de même de la réglementation relative aux transports qui ne peut faire échec aux stipulations contractuelles ; la société était également tenue d'établir les plans de recollement en vertu de l'article 13 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) ;

- la commune exposante a procédé à des déductions justifiées au regard des incohérences ou du caractère excessif de certains prix reportés dans les projets de décompte, ainsi qu'il résulte d'ailleurs du rapport de l'expert désigné dans le cadre de la procédure pénale ; en tout état de cause, les stipulations de l'article 12.5 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) faisaient obstacle aux demandes de paiement de la société requérante à défaut de constatations contradictoires des prestations réalisées ; l'exposante a pu procéder à des réductions sur les plus-values de mise en œuvre à la main sur la totalité des travaux de mise en œuvre de terre végétale pour le réaménagement de la voirie sans aucune justification ; les travaux réalisés sur le branchement RTE, la longrine en béton dans la rue Charles Chenu et la fondation en béton dans la rue Jules Verne ne concernaient pas des travaux sensibles susceptibles d'endommager des ouvrages ; elle n'établit pas avoir déposé des déclarations d'intention de commencement de travaux afin de connaître la localisation de ces ouvrages ;

- la commune exposante devait, en application de l'article 3.5 du CCTP, vérifier les quantités effectivement réalisés par les entreprises pour fixer sa rémunération ; elle devait vérifier le service postérieurement à l'émission des bons de commande et préalablement au règlement des factures ; le paiement d'une partie des factures ne permet pas d'établir que le reliquat des factures impayées était dû ; les conditions de réalisation de sa mission de maîtrise d'œuvre est sans incidence sur l'obligation de vérification des factures par le maître d'ouvrage ; l'expert désigné par le tribunal administratif a refusé de contrôler la réalité des prestations réalisées par l'entreprise ;

- elle reprend, à titre subsidiaire, ses arguments de première instance relatifs à l'irrecevabilité et au caractère mal fondé des conclusions de la requérante.

Par un courrier du 28 septembre 2022, une mesure d'instruction a été diligentée par la cour aux fins de connaître l'état d'avancement de l'instruction pénale.

Par un mémoire enregistré le 6 octobre 2022, la commune de Puteaux a répondu à cette mesure.

Par un mémoire, enregistré le 6 octobre 2022, la société Fayolle et Fils a répondu à cette mesure.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics,

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux ;

- l'arrêté du 9 novembre 1999 relatif aux documents de transport ou de location devant se trouver à bord des véhicules de transport routier de marchandises ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Janicot, première conseillère,

- les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Chabert pour la société Fayolle et Fils et celles de Me Peyronne, substituant Me Goutal, pour la commune de Puteaux.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Puteaux a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert en vue de la conclusion d'un marché à bons de commande pour une durée de quatre ans portant sur la rénovation et le réaménagement de sa voirie. Par un acte d'engagement du 30 juin 2009, le marché a été confié à la société Fayolle et Fils qui a réalisé les travaux de rénovation et de réaménagement de la voirie communale dans les rues Cartault, Volta, du Bicentenaire, Lorilleux, Jules Verne, Voltaire et Chenu. A l'issue de la réalisation de ces travaux, la société Fayolle et Fils a adressé à la commune de Puteaux sept factures pour un montant total de 3 827 626,55 euros. La commune de Puteaux n'a réglé que partiellement ces factures en lui versant la somme de 2 750 311,15 euros. Sur la base du rapport établi par un bureau d'études géotechniques, la commune de Puteaux a constaté l'existence d'anomalies sur les chaussées faisant craindre que les voies soient rendues impropres à leur destination et constituent un danger pour la circulation publique. Par une ordonnance du 6 septembre 2012, le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, à la demande de la commune, désigné un expert afin, notamment, de déterminer si la société Fayolle et Fils avait exécuté les missions qui lui avaient été confiées contractuellement et si des malfaçons ou des erreurs avaient affecté la réalisation de ses prestations. Après remise du rapport, dans lequel l'expert concluait que la société Fayolle et Fils avait exécuté les travaux conformément aux plans émis par le maître d'œuvre, la société, par un courrier du 13 juin 2013, a mis en demeure la commune de Puteaux de lui régler le solde de ses factures. En l'absence de réponse à ce courrier, elle a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner la commune de Puteaux à lui verser la somme de 1 077 311,715 euros au titre des factures impayées, assortie des intérêts moratoires. Elle relève appel du jugement du 20 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte de l'examen du jugement attaqué qu'après avoir indiqué qu'en application des stipulations de l'article 3.7. du cahier des clauses techniques particulières (CCTP), il appartenait à la SA Fayolle et Fils de produire des pièces justificatives permettant au maître d'ouvrage de contrôler le montant des quantités sur la base desquelles elle avait établi ses factures, le tribunal administratif a mentionné que " la circonstance que la commune de Puteaux n'ait pas, au cours de l'exécution du marché, assuré de manière diligente sa mission de contrôle des travaux, est sans incidence sur l'obligation incombant à la société requérante de justifier des quantités réalisées dont elle réclame le paiement ". Il a ainsi, contrairement à ce que soutient la société Fayolle et Fils, indiqué, avec une précision suffisante, le motif sur lequel il s'est fondé pour écarter l'argumentation de la société Fayolle et Fils selon laquelle elle n'aurait pas été mesure de présenter les justificatifs des quantités indiquées sur les factures faute pour la commune de Puteaux d'avoir assumé le contrôle des travaux pendant l'exécution du marché. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé sur ce point.

Au fond :

En ce qui concerne les pièces justificatives des travaux facturés par la société requérante:

3. Aux termes de l'article 1.2.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) : " Tous les travaux feront l'objet de devis chiffrés sur la base du bordereau de prix qui doivent être acceptés par le Pouvoir adjudicateur, lequel établira alors un bon de commande ". Aux termes de l'article 3.5 de ce cahier, relatif aux modalités de règlement des comptes : " Les travaux sont rémunérés par application des prix unitaires aux quantités réalisées ". Aux termes de l'article 3.5.1 du même cahier, le projet de décompte établi mensuellement " comporte le relevé des travaux ou prestations exécutés, tels qu'ils résultent des constats contradictoires ou, à défaut, de simples appréciations, conformément à l'article 13.13 du CCAG Travaux ". L'article 3.5.2 stipule que le projet de décompte final établi par l'entreprise comporte notamment " le délai des travaux ou prestations exécutés, la date d'exécution des travaux ou prestations, le détail des prix unitaires et des quantités, le montant hors TVA des travaux ou prestations (...), la variation des prix le cas échéant, la date de facturation ". Enfin, aux termes de l'article 3.7 du CCTP : " (...) Tous les documents bons de livraison (béton, bordures, graves, enrobés, sable, double des factures des fournisseurs) ainsi que tout document attestant de la provenance des matériaux devront être remis quotidiennement au pouvoir adjudicateur (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 12 octobre 2011, la commune de Puteaux a rejeté partiellement les factures que la société Fayolle et Fils lui avait transmises au motif qu'elle ne disposait pas des métrés et des attachements correspondants aux travaux réalisés conformément à l'article 3.5 précité du CCAP. Après que la société Fayolle et Fils lui a transmis, en réponse à cette demande, un certain nombre de pièces, la commune de Puteaux a indiqué à la société, dans un courrier du 27 janvier 2012, que les éléments reçus étaient partiels et insuffisants dès lors que les métrés ne comportaient que des éléments de surface, que les attachements étaient insuffisamment explicités et seulement partiellement justifiés, que les plans de recollement étaient incomplets en l'absence des coupes-types de l'existant et du réalisé et qu'enfin, les bons de livraisons et les bons de pesées des matériaux évacués et mis en œuvre n'avaient pas été transmis. Dans ce même courrier, la commune de Puteaux, après avoir également relevé que les quantités figurant sur les factures n° 5501022191 et n° 5501021717 n'étaient pas réalistes ou n'étaient pas justifiées, a demandé à la société Fayolle et Fils de lui transmettre toutes les pièces justificatives (plans de recollement complets, métrés complets, bons de livraisons et bons de pesée des matériaux effectués et mis en œuvre) permettant de vérifier l'exactitude des prestations réalisées et des sommes réclamées. Enfin, dans un courrier du 12 mars 2012, la commune de Puteaux a, à nouveau, indiqué à la société que certains prix et/ou quantités mentionnés dans certaines factures n'étaient pas justifiés et a réitéré sa demande de transmission de tous les documents permettant de vérifier l'exactitude des prestations facturées. La société Fayolle et Fils n'établit pas avoir répondu à ces demandes. Ainsi, si elle a produit, lors de la phase de règlement du marché, les métrés contradictoires et attachements correspondants aux travaux réalisés, elle n'a pas produit les informations complémentaires réclamées par la commune de Puteaux pour apprécier l'exactitude des prix et quantités retenus dans les factures transmises. A cet égard, si la société Fayolle et Fils soutient qu'elle n'était pas légalement tenue de transmettre des bons de pesée et de livraison, il ressort toutefois des dispositions de l'arrêté du 9 novembre 1999 susvisé dans leur version applicable à la date des chantiers qu'elle devait établir un bon d'enlèvement ou de livraison comprenant notamment la nature et la quantité ou poids ou volume de la marchandise. Par ailleurs, si la société Fayolle et Fils soutient qu'elle n'était pas davantage tenue contractuellement de fournir des bons de livraison et des bons de pesées pour les matériaux autres que les enrobés au vu des unités prévues dans le bordereau de prix unitaires, il résulte également de l'article 3.7 du CCTP qu'elle était tenue de remettre des bons de livraison et de pesées pour des matériaux autres que les enrobés. Enfin, il résulte de l'article 13 du CCAP qu'elle était tenue de communiquer au maître d'ouvrage les plans de recollement, conformément à l'article 40 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) travaux applicable au marché en litige en application de l'article 2.2 du CCAP. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait produit les pièces justificatives réclamées par la commune de Puteaux et justifiant les quantités mentionnées sur les factures en litige et que la commune aurait, par suite, refusé à tort de procéder au règlement desdites factures.

En ce qui concerne le bien-fondé des réfactions opérées par la commune de Puteaux sur les factures émises par la société Fayolle et Fils :

S'agissant de l'application du prix 183 :

5. Il résulte du bordereau de prix unitaires que le prix 183 permet d'appliquer une plus-value, par 5 cm d'épaisseur supplémentaire, sur le prix 179 lequel est relatif à la démolition d'enrobé ou d'asphalte à la main et sur le prix 181 lequel est relatif à la démolition mécanique de fondation béton jusqu'à 10 cm d'épaisseur.

6. S'agissant des travaux effectués dans les rues Charles Chenu, Cartault, Jules Verne et au carrefour Sadi Carnot/Lorilleux, la société Fayolle et Fils se borne à se prévaloir des mentions qu'elle a portées sur les attachements des 17, 23 et 30 novembre 2011 sans justifier du bien-fondé des profondeurs qui y figurent, ni critiquer les profondeurs réduites que la commune de Puteaux a retenues. S'agissant des travaux réalisés dans la rue Volta, si la société Fayolle et Fils soutient qu'elle a dû facturer une " profondeur de 3 mètres [en raison de] la démolition d'une galerie RTE désaffectée ", elle ne produit toutefois aucun document établissant la démolition de cet ouvrage à une telle profondeur, telle qu'une déclaration d'intention de commencement des travaux effectuée auprès d'EDF. La société Fayolle et Fils ne critique donc pas utilement la réduction opérée par la commune de Puteaux sur la profondeur de démolition du béton.

S'agissant de l'application du prix 29 :

7. S'agissant des rues Charles Chenu, Volta, du Bicentenaire et du carrefour Sadi Carnot/Lorilleux, la société Fayolle et Fils se borne à constater qu'en l'absence de toute mention dans les attachements sur ce prix, la commune de Puteaux a différencié " la mise en œuvre entre terrassement mécanique en pleine masse et démolition mécanique de fondation béton " et en conclut que seule la mise en œuvre fait en réalité débat entre les parties. Il suit de là qu'elle n'apporte aucun élément de nature à justifier l'application qu'elle a faite du prix 29 relatif au terrassement mécanique en pleine masse et ne critique aucunement les choix effectués par la commune de Puteaux. Les modifications de prix effectués par la commune de Puteaux ne sont donc pas utilement contestées. Par ailleurs, s'agissant de la rue Cartault et de la rue du Bicentenaire, si la société requérante relève que la commune de Puteaux a réduit les quantités de profondeurs qu'elle avait facturées, elle n'apporte là aussi aucun élément de nature à justifier les quantités de profondeur de terrassement qu'elle soutient avoir réalisées en terrassement mécanique en pleine masse dans ces deux rues.

S'agissant de l'application du prix 49 :

8. Il résulte du bordereau de prix unitaires que l'article 49 prévoit une plus-value pour mise en œuvre à la main. Aux termes de l'article 45.1 du CCTP : " Cet article concerne tous les travaux nécessaires à l'enlèvement des matériaux et ouvrages devenus inutiles dans l'emprise des terrassements objet du présent CCTP qu'ils soient en surface ou enterrés ". Aux termes de l'article 45.2 du même cahier : " Les ouvrages en béton et béton armé existant dans l'emprise des travaux à exécuter sont démolis à l'aide des matériels laissés au choix du titulaire mais agréés par le pouvoir adjudicateur. Les débris de béton et les aciers éventuels sont évacués à la décharge du titulaire ". Il résulte de ces stipulations que, si l'entreprise a le choix du matériel qu'elle utilise pour démolir les ouvrages situés dans l'emprise de la chaussée, il appartient en revanche au pouvoir adjudicateur de contrôler les techniques mises en œuvre pour évacuer les ouvrages à démolir.

9. Il résulte de l'instruction que, s'agissant de l'application du prix 49, la commune de Puteaux a procédé à une réduction des montants réclamés sur l'ensemble des attachements, à hauteur de 85 %, estimant que les quantités prétendument mises en œuvre à la main étaient anormales et injustifiées. Si, s'agissant des rues Charles Chenu, Volta et du carrefour Sadi Carnot/Lorilleux, la société Fayolle et Fils soutient que cette réfaction a été opérée de manière arbitraire et que la mise en œuvre à la main est justifiée lorsque les travaux sont réalisés en espace urbain, l'entreprise étant conduite à rencontrer en profondeur des ouvrages appartenant à d'autres sociétés, elle n'établit pas, s'agissant des travaux réalisés dans ces rues, avoir rencontré des ouvrages spécifiques justifiant une mise en œuvre à la main. La commune de Puteaux était donc fondée à opérer une réduction sur ce prix dans l'ensemble de ces rues. Par ailleurs, s'agissant de la rue Cartault, si la société requérante estime que la réduction de 85 % opérée par la commune s'est faite de manière forfaitaire et sans justification alors qu'une " réduction de 33 % aurait pu se justifier " comme l'a d'ailleurs fait le maître d'œuvre pour le prix 29, la société requérante n'établit pas les raisons pour lesquelles la réduction opérée sur le prix du terrassement mécanique en pleine masse devrait s'appliquer, pour déterminer les prix et les quantités dues en cas de mise en œuvre à la main, ces deux techniques étant différentes.

S'agissant de l'application du prix 21 :

10. S'agissant de l'application du prix 21 qui concerne la démolition de chaussées et de trottoirs pavés en même temps que les matériaux de fondation de la chaussée, si la société Fayolle et Fils soutient que le maître d'œuvre a procédé à une réduction du décaissement constaté sans aucune logique en le ramenant à une profondeur de 70 centimètres dans la rue Godefroy et à l'angle de la rue Voltaire, elle ne produit aucun élément de nature à justifier la profondeur de 90 centimètres qu'elle avait facturée.

S'agissant du prix hors bordereau :

11. S'agissant de la somme facturée, hors bordereau de prix, au titre de la pose de pavés granit en queue de paon sur sable joint à l'émulsion, la commune de Puteaux a appliqué à la réalisation de ces travaux le prix n° 119 du bordereau de prix unitaires. La société Fayolle et Fils soutient que la technique " en queue de paon " mise en œuvre et facturée hors bordereau implique une pose plus compliquée nécessitant la mise en œuvre d'une plus grande variété de produits et l'intervention d'une équipe plus qualifiée et plus importante. Si l'avenant signé le 19 octobre 2011 avec la commune a introduit ce type de réalisation au bordereau de prix unitaires, cette circonstance ne suffit pas à établir qu'une telle technique aurait été mise en œuvre. La société Fayolle et Fils ne produisant aucun document permettant d'établir la réalité de cette mise en œuvre, elle n'est pas fondée à soutenir que la commune de Puteaux aurait à tort appliqué un prix du bordereau.

S'agissant du prix 169 :

12. S'agissant de la rue Jules Verne, la société requérante soutient qu'elle a mis en œuvre 15 centimètres de béton pour assurer la résistance de l'ouvrage. Elle n'établit toutefois pas avoir demandé la mise en œuvre de l'article 12.5 du CCAG afin de faire constater qu'elle devait ainsi effectuer des prestations non prévues au contrat et n'apporte, en tout état de cause, aucun élément de nature à établir qu'elle aurait réalisé ces travaux supplémentaires.

13. Il résulte de ce qui précède que la société Fayolle et Fils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Puteaux, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Fayolle et Fils demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Fayolle et Fils le versement à la commune de Puteaux d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Fayolle et Fils est rejetée.

Article 2 : La société Fayolle et Fils versera à la commune de Puteaux la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Fayolle et Fils et à la commune de Puteaux.

Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,

M. Camenen, président assesseur,

Mme Janicot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2022.

La rapporteure,

M. A... La présidente,

C. Signerin-Icre La greffière,

C. Yarde

La République mande et ordonne au préfet des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 18VE01153 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01153
Date de la décision : 16/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: Mme Mathilde JANICOT
Rapporteur public ?: Mme SAUVAGEOT
Avocat(s) : SELARL GOUTAL, ALIBERT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-11-16;18ve01153 ?
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