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23/09/2022 | FRANCE | N°21VE02887

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 23 septembre 2022, 21VE02887


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C... veuve F... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la n

otification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retar...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C... veuve F... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai, sous astreinte de 10 euros par jour de retard, en lui délivrant, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2105729 du 5 octobre 2021, tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 26 mars 2021 du préfet du Val-d'Oise, a enjoint au préfet du Val-d'Oise ou au préfet territorialement compétent de délivrer à Mme C... veuve F... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement et a condamné l'Etat à verser à Mme C... veuve F... la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 octobre 2021, le préfet du Val-d'Oise demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de Mme C... veuve E... présentée devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a estimé la première juge, il n'a pas commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée en refusant de faire droit à sa demande de titre de séjour ;

- les autres moyens soulevés par Mme C... veuve F... en première instance ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à Mme C... veuve F... qui n'a pas produit d'observation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... veuve F..., ressortissante marocaine née en 1951, est entrée en France le 12 août 2018, munie d'un visa Schengen valable du 4 juillet au 4 octobre 2018. Le 19 novembre 2020, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 26 mars 2021, le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite. Par un jugement n° 2105729 du 5 octobre 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement. Par la présente requête, le préfet demande l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande de Mme C... veuve E....

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Mme C... s'est prévalue en première instance de sa prise en charge par sa fille, chez laquelle elle réside depuis son arrivée le 12 août 2018, du décès de son époux, de son âge ainsi que l'absence de ressource propre et de son état de santé. S'il ressort des pièces du dossier que l'une de ses filles, qui a acquis la nationalité française, contribue à subvenir aux besoins de l'intéressée, Mme C... n'apporte pas la preuve de l'absence de ressources propres pas plus que de l'impécuniosité de son fils resté au Maroc par les pièces qu'elle produit. Elle n'établit pas non plus que l'assistance financière que lui apporte sa fille ne pourrait pas se poursuivre dans son pays d'origine, où réside au moins l'un de ses fils et où elle a vécu jusqu'à l'âge de soixante-sept ans. Alors que le préfet lui oppose ces circonstances en cause d'appel, elle n'apporte en outre aucune pièce de nature à établir le décès de son époux. En outre, si l'intéressée invoque son état de santé, caractérisé par un diabète de type A, une gonanorthose et un syndrome d'Alzheimer, il est constant que Mme C... souffrait déjà de ces pathologies avant son entrée sur le territoire et elle ne démontre pas non plus par les attestations médicales produites qu'elle ne pourrait être prise en charge au Maroc, alors qu'un de ses fils y réside toujours et pourrait donc l'assister au quotidien. Elle n'a, en tout état de cause, pas demandé de titre de séjour en qualité d'étranger malade et ne s'est pas prévalue de l'impossibilité de bénéficier d'un traitement approprié au Maroc. Ainsi le préfet du Val-d'Oise est fondé à soutenir qu'il n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme C... et que c'est donc à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé, pour ce motif, son arrêté.

3. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur la légalité de l'arrêté du 26 mars 2021

4. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation de l'intéressée. Il comporte des éléments circonstanciés sur la situation personnelle et familiale de Mme C... et précise en particulier qu'elle est entrée sur le territoire français le 12 août 2018 muni d'un visa Schengen valable du 4 juillet 2018 au 4 octobre 2018. Il précise également que Mme C... n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident deux de ses enfants et où elle a vécu jusqu'à l'âge de soixante-sept ans et qu'elle est veuve depuis 2009 et ne justifie pas d'une prise en charge par sa fille, antérieure à sa venue en France, ni que ses enfants restés au pays ne seraient en mesure de la prendre à charge également. Il a en outre, indiqué que l'intéressée n'était pas en mesure de justifier d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois, de sorte qu'elle ne pouvait bénéficier des dispositions de l'article L. 314-11-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, et alors que le préfet n'est pas tenu de mentionner l'ensemble des éléments relatifs à la situation de l'intéressée, l'arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision serait entachée d'un défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressée.

6. En troisième lieu, s'il est constant que l'arrêté précise que deux des fils de A... B... résident au Maroc alors que l'un d'eux apparaissait vivre en Chine à la date de la décision attaquée et non au Maroc, il ne ressort pas des pièces du dossier, au regard des motifs de la décision, que le préfet n'aurait pas pris la même décision s'il n'avait pas commis cette erreur. L'erreur de fait reprochée par la requérante est donc sans incidence sur la décision en litige.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 314-11 dans sa rédaction alors applicable du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : / 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt et un ans ou dans les conditions prévues à l'article L. 311-3 ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; ". Il ressort de l'arrêté contesté que, pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme C... sur le fondement de ces dispositions, le préfet du Val-d'Oise a considéré qu'elle est entrée en France le 12 août 2018 sous couvert d'un visa de court séjour et qu'elle ne peut produire un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. Dès lors qu'il n'est pas contesté que Mme C... ne disposait pas d'un visa d'une durée supérieure à trois mois, exigé par les dispositions précitées du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'elle ne justifie pas par les pièces produites qu'elle serait empêchée d'en solliciter un en retournant dans son pays d'origine, elle ne peut utilement soutenir que les dispositions précitées auraient été méconnues.

8. En cinquième lieu, eu égard à ce qui a été exposé au point 2, et en particulier des attaches personnelles et familiales dont elle dispose au Maroc et de la possibilité d'y bénéficier d'un soutien familial et financier, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Enfin, il résulte de ce qui a été précédemment exposé que Mme C... n'établit pas que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'illégalité. Par suite, elle n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination en raison de cette prétendue illégalité.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val-d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 26 mars 2021. Il y a lieu, par suite, d'annuler ledit jugement et de rejeter la requête de Mme C... présentée au tribunal aux fins d'annulation de l'arrêté du 26 mars 2021, en toutes ses conclusions ainsi que ses conclusions présentées en appel.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 5 octobre 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise par Mme C... veuve F... et ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme G... C... veuve F....

Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président-assesseur,

M. Frémont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 septembre 2022.

Le rapporteur,

O. D...Le président,

P.-L. ALBERTINI

La greffière,

F. PETIT-GALLAND

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous les commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 21VE02887002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02887
Date de la décision : 23/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : GISAGARA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-09-23;21ve02887 ?
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