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23/09/2022 | FRANCE | N°21VE00465

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 23 septembre 2022, 21VE00465


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2020 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de mettr

e à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2020 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2006978 du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 février 2021, M. B..., représenté par Me Matingou, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée dès lors qu'il n'a pas eu communication des informations sur lesquelles ce collège s'est fondé pour apprécier les possibilités de traitement dans son pays d'origine, leur disponibilité, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, ne peut être regardée comme étant établie par l'administration ; l'arrêté ne fait pas état de sa demande de carte de résident ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que la commission du titre de séjour n'a pas été saisie préalablement à son édiction en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que le maire de la commune n'a pas été saisi, en méconnaissance de l'article L. 314-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de son état de santé en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- il justifie, en tout état de cause, de circonstances humanitaires exceptionnelles permettant la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en tant qu'elle se fonde sur la décision portant refus de titre de séjour qui doit être annulée ;

- elle méconnaît les dispositions des 4° et 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen attentif de sa situation, constituant une erreur de droit ;

- elle méconnaît également l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur de droit.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 juin 2022, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant congolais né le 9 décembre 1970, est entré en France selon ses déclarations le 11 mai 2010 sous couvert de documents d'emprunt. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés le 28 février 2011, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 24 mai 2012. Il s'est vu délivrer des titres de séjour en raison de son état de santé renouvelés depuis le 24 mars 2015. Le 18 mars 2019, il a sollicité le renouvellement du titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 22 septembre 2020, le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. B... fait appel du jugement du 19 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'arrêté en litige comporte les éléments de droit et de fait qui le fondent. L'arrêté du préfet de l'Essonne du 22 septembre 2020 en tant qu'il porte refus de titre de séjour est donc suffisamment motivé, ainsi que l'a à juste titre estimé le premier juge, qui a répondu avec une précision suffisante au moyen soulevé. Par les pièces qu'il produit, à savoir une lettre datée du 17 mars 2019 mais sans preuve d'envoi et un courrier confirmant un rendez-vous évoquant un récépissé et un document de circulation étranger mineur, M. B... ne justifie pas du dépôt d'une demande de délivrance de carte résident et ne saurait donc utilement reprocher à l'arrêté de ne pas comporter de précision sur ce point.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des termes de l'arrêté en litige que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la demande de M. B....

4. En troisième lieu, il ressort de la décision en litige que le requérant a saisi le préfet de l'Essonne, le 18 mars 2019, d'une demande de renouvellement de son titre de séjour en tant qu'étranger malade. M. B... soutient avoir complété cette demande d'une autre, tendant à la délivrance d'une carte de résident. S'il produit, pour justifier de la réalité de cette demande complémentaire, un document intitulé " Demande de carte de résident ", daté du 17 mars 2019, ce courrier, toutefois, n'est pas signé et n'est accompagné d'aucune preuve d'envoi ou de réception. En outre, le courrier de la préfecture daté du 23 septembre 2020 dont il se prévaut confirme une prise de rendez-vous dont l'objet est " Récépissé - DCEM- Changement d'adresse et duplicata - EVRY - Guichet 3 " et pour " démarches simplifiées - EVRY - Renouvellement carte de résident et duplicata - Guichet A. Ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, le requérant, par les pièces qu'il produit, n'établit donc pas avoir saisi le préfet d'une autre demande que celle tendant à la délivrance d'un titre de séjour en tant qu'étranger malade, sur laquelle le préfet a statué. Il ne soutient donc pas utilement que les dispositions de l'article L. 314-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives aux conditions de délivrance d'une première carte de résident, auraient été méconnues par le préfet dans son arrêté du 22 septembre 2020.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 (...) ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'avis du collège de médecins de l'OFII est établi sur la base du rapport médical élaboré par un médecin de l'office selon le modèle figurant dans l'arrêté du 27 décembre 2016 (...) ainsi que des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont le demandeur d'un titre de séjour pour raison de santé est originaire. / Les possibilités de prise en charge dans ce pays des pathologies graves sont évaluées, comme pour toute maladie, individuellement, en s'appuyant sur une combinaison de sources d'informations sanitaires. / (...) Afin de contribuer à l'harmonisation des pratiques suivies au plan national, des outils d'aide à l'émission des avis et des références documentaires présentés en annexe II et III sont mis à disposition des médecins de l'office ".

6. Si M. B... soutient que l'avis rendu par le collège des médecins de l'office français de l'intégration et de l'immigration le 5 août 2019 ne lui a pas été communiqué, il ressort des pièces du dossier que le préfet, qui n'était pas tenu de l'annexer à son arrêté du 22 novembre 2020, l'a produit au cours de l'instruction en première instance. S'il soutient par ailleurs que les informations sur la base desquelles ce collège puis le préfet ont estimé qu'il aurait effectivement accès aux soins nécessaires au traitement de sa pathologie dans son pays d'origine auraient dû être précisées dans l'arrêté, ni l'avis du collège de médecins ni l'arrêté préfectoral ne doivent comporter, en l'absence de contestation circonstanciée de l'étranger, d'éléments précis sur l'état du système de soins dans son pays d'origine.

7. D'autre part, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un accès effectif à un traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'office français de l'intégration et de l'immigration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dont il peut effectivement bénéficier dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de M. B... tendant au renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, le préfet du Val-d'Oise s'est fondé sur l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 5 août 2019 qui a considéré que, si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence dans le pays d'origine de M. B... d'un accès effectif au traitement qui lui est nécessaire. Si le requérant, pour contester cette existence, produit plusieurs certificats médicaux attestant du traitement d'une psychose chronique hallucinatoire paranoïde depuis 2012 par un médecin psychiatre ainsi que d'un traitement médicamenteux, pris en charge à 100% par l'assurance maladie dans le cadre d'une affection de longue durée et de la nécessité de poursuivre un traitement en France, ces attestations, peu circonstanciées s'agissant de son suivi en France, et les articles de journaux, de portée très générale, produits par le requérant ne permettent pas d'établir qu'il ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement adapté en République du Congo. Par suite, en refusant de renouveler son titre de séjour, le préfet n'a pas fait une inexacte application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation de son état de santé.

9. En sixième lieu, si M. B... soutient qu'il pouvait prétendre au renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade dès lors qu'il justifiait de " circonstances humanitaires exceptionnelles ", au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces dispositions ont toutefois été abrogées par l'article 13 de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 à compter du 1er janvier 2017. M. B... n'est donc pas fondé à se prévaloir de leur méconnaissance par l'arrêté en litige.

10. En septième lieu, aux termes, d'une part, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes, d'autre part, de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

11. M. B... se prévaut de la durée de son séjour, de son mariage avec une ressortissante de la naissance d'une fille en 2017 et justifie de l'exercice d'une activité professionnelle régulière. Toutefois, en dépit des efforts incontestables d'intégration de l'intéressé par le travail et de la durée de son séjour, il est constant que son épouse est dépourvue de titre de séjour, de nationalité congolaise également et que rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue au Congo. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Les moyens tirés de ce que le refus de titre de séjour contesté méconnaîtrait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent donc être écartés.

12. En huitième lieu, il résulte des articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction alors en vigueur, que la commission du titre de séjour instituée dans chaque département est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à cet article auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Or, en l'espèce, M. B..., pour les motifs exposés aux points 6 à 9, ne remplissait pas les conditions lui permettant de bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions respectives du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet de l'Essonne n'était pas tenu de soumettre le cas de M. B..., qui n'a pas présenté sa demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande.

13. En neuvième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

14. D'une part, en tout état de cause, le refus de titre de séjour contesté n'a pas pour objet de séparer M. B... de son enfant, mineur. D'autre part, rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale de M. B... se reconstitue au Congo, l'épouse de Mme B... étant elle-même de nationalité congolaise et par ailleurs en situation irrégulière. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

15. En premier lieu, il résulte de ce qui a été précédemment exposé que M. B... n'établit pas que la décision portant refus de titre de séjour serait entachée d'illégalité. Par suite, il n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français en raison de cette prétendue illégalité.

16. En deuxième lieu, M. B... reprend à l'identique, en cause d'appel, le moyen tiré de ce qu'en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet du l'Essonne n'aurait pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.

17. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

18. Il ressort des pièces du dossier que M. B... justifie, par les pièces qu'il produit, d'une présence sur le territoire à compter du 20 juillet 2010, au regard du récépissé qui lui a été délivré lors de l'enregistrement de sa demande d'asile. Ce récépissé a expiré le 12 juin 2012 suite au rejet définitif de sa demande d'asile. S'il est constant qu'à compter du 18 avril 2013, M. B... a bénéficié d'un titre de séjour, régulièrement renouvelé jusqu'à la date de la décision en litige, le 22 septembre 2020, M. B... ne justifie pas pour autant d'une présence régulière sur le territoire entre l'expiration de son récépissé de demande d'asile et sa première demande de titre de séjour, enregistrée le 26 octobre 2012. Dans ces conditions, l'intéressé, ne peut être regardé comme résidant régulièrement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les dispositions précitées du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le requérant doit par ailleurs, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, être regardé comme pouvant bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que cette mesure d'éloignement méconnaîtrait les dispositions précitées du 10° du même article doit également être écarté.

19. En quatrième lieu, M. B... ne peut utilement soutenir que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions ne sont opposables qu'à la décision de refus de titre de séjour.

Sur la décision fixant le pays de destination :

20. Si M. B... soutient que la décision fixant le pays de destination serait entachée d'une erreur de droit, compte tenu des " moyens et faits sus-évoqués " et en évoquant une détérioration de ses liens familiaux, ce dernier moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé, M. B... n'apportant en particulier aucune précision sur la détérioration alléguée. Il doit, dès lors, être écarté.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Essonne du 22 septembre 2021. Il y a donc lieu de rejeter ses conclusions à fin d'annulation dudit arrêté ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président-assesseur,

M. Frémont, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 septembre 2022.

Le rapporteur,

O. MAUNYLe président,

P.-L. ALBERTINI

La greffière,

F. PETIT-GALLANDLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme

La greffière,

3

2

N° 21VE00465


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE00465
Date de la décision : 23/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : MATINGOU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-09-23;21ve00465 ?
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