Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités qui s'y rapportent, et de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1806586 du 8 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins de décharge à hauteur de la somme de 12 449 euros et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et quatre mémoires, enregistrés les 17 août 2020, 12, 15 et 17 février, et 1er mars 2021, M. B..., représenté par Me Baulac, avocat, demande à la cour :
1°) de réformer ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée à hauteur des impositions restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges lui ont, à tort, refusé le bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
- le crédit de 100 euros correspond à un remboursement de frais exposés dans l'intérêt de son fils ;
- le crédit de 4 800 euros correspond à un chèque émis par la société Sodimaco en remboursement de son compte courant d'associé ;
- le crédit de 45 000 euros peut être assimilé à de l'entraide familiale ou à un prêt familial, et n'est pas disproportionné à l'état de fortune de Mme D..., la mère de ses enfants ;
- le crédit de 30 000 euros porté sur le compte de son fils correspond à un don manuel octroyé par ses deux grands-parents.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 18 janvier et 25 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle au titre des années 2011 et 2012, M. B... s'est vu notifier, par proposition de rectification du 16 décembre 2014, selon la procédure de taxation d'office, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2011, assorties d'intérêts de retard et de la majoration prévue au b) du 1. de l'article 1728 du code général des impôts. Il fait appel du jugement du 8 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil, après avoir constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins de décharge à hauteur de la somme de 12 449 euros, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
2. Aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : / 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (...) ". Aux termes de l'article L. 67 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure (...) ". L'article L. 193 du même livre dispose que : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Il résulte de ces dispositions qu'un contribuable qui a été régulièrement taxé d'office en ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée sur le fondement des dispositions de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, supporte la charge de la preuve de l'absence de bien-fondé ou du caractère exagéré des impositions mises à sa charge en application de l'article L. 193 du même livre.
3. Il résulte de l'instruction que l'administration a finalement imposé d'office, à l'issue de la substitution de base légale opérée en première instance, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, plusieurs sommes portées au crédit de comptes bancaires ouverts à son nom ainsi qu'au nom de son fils, dont il conteste le caractère imposable.
4. En premier lieu, M. B... fait valoir que la somme de 100 euros portée, le 25 mars 2011, au crédit du compte bancaire HSBC n° 00850025446 89 correspond à un remboursement de frais exposés dans l'intérêt de son fils. Toutefois, il n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations, ni ne précise d'ailleurs la nature des frais qu'il aurait exposés, alors qu'au surplus, le ministre de l'économie, des finances et de la relance souligne que le compte bancaire est détenu par son fils. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a imposé d'office cette somme dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, sans qu'y fasse obstacle la modicité de la somme en cause.
5. En deuxième lieu, M. B... fait valoir que la somme de 4 800 euros portée, le 20 juin 2011, au crédit du compte bancaire HSBC 00850003491 91 correspond au remboursement de son compte courant d'associé par la société Sodimaco. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance admet explicitement, devant le juge d'appel, que le crédit en litige a pour origine des sommes versées à son profit par la société, dont il est gérant et associé au vu du chèque produit. Toutefois, usant de son droit d'invoquer, à tout moment de la procédure, tout moyen nouveau de nature à faire reconnaître le bien-fondé des impositions contestées, il demande à la cour de substituer à la base légale rappelée au point 2. les dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts. Dans la mesure où les sommes mises à la disposition des associés directement à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes sont, sauf preuve contraire, considérés comme des revenus distribués sur le fondement de cet article, que cette substitution de base légale ne prive le requérant d'aucune garantie de procédure, et que M. B... ne justifie pas, par les seules pièces qu'il produit, du motif du versement et en particulier, du remboursement de compte courant d'associé allégué, il y a lieu pour la cour d'y faire droit et de maintenir les impositions sur ce nouveau fondement.
6. En troisième lieu, M. B... fait valoir que la somme de 45 000 euros portée, le 30 juillet 2011, au crédit du compte bancaire CRAM Brie Picardie n° 72193987337 67 doit bénéficier de la présomption de prêt ou d'entraide familiale en ce qu'elle émane de Mme D..., mère de ses deux enfants. D'une part et contrairement à ce que soutient le ministre, l'intéressé justifie, par la production - non contestée - d'une copie d'un chèque de 45 000 euros et du relevé de compte bancaire de Mme D... sur lequel un débit de 45 000 euros est porté, de la réalité des mouvements de fonds correspondant à ses allégations. D'autre part, le ministre soutient que la somme ainsi versée serait disproportionnée par rapport aux revenus disponibles de Mme D... en soulignant que l'actif successoral déclaré le 9 août 2011 dont cette dernière a bénéficié serait majoritairement composé de valeurs mobilières, non liquides et évaluées forfaitairement à un montant net de 87 133 euros, et qu'il ne serait pas justifié de la liquidité de l'avance sur succession de 69 000 euros perçue le 14 décembre 2010. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'indépendamment même des éventuels actifs disponibles perçus en 2010 dans le cadre de l'avance sur succession et du solde de l'actif net successoral à percevoir, Mme D... disposait toujours, après le débit de 45 000 euros, d'un solde créditeur de 27 000 euros, de sorte qu'elle possédait des revenus et un capital disponible suffisants pour accorder le prêt ou don allégué. Ainsi, le ministre n'apporte pas d'élément de nature à établir que la somme versée ne correspondrait pas à un prêt ou un don à caractère familial et M. B... est, dès lors, fondé à soutenir, en vertu de la présomption de non imposition de telles sommes qui n'est pas remise en cause, que c'est à tort que des impositions supplémentaires ont été mises à sa charge du fait de sa réintégration dans l'assiette de ses revenus imposables.
7. En quatrième lieu, M. B... fait valoir que la somme de 30 000 euros portée au crédit du compte bancaire CIC EST n° 00073163201 02 provient d'un don manuel octroyé à son fils par ses grands-parents. Toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la seule production de deux déclarations de don manuel en date du 27 avril 2006 par lesquelles les grands-parents maternels de ses deux fils déclarent avoir donné à chacun d'entre eux une somme de 15 000 euros ne suffit pas à établir l'origine familiale de la somme de 30 000 euros créditée le 6 octobre 2011, soit plus de cinq ans plus tard, sur le seul compte du fils aîné de M. B....
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2011 à raison de la réintégration, dans ses revenus imposables, de la somme de 45 000 euros.
Sur le remboursement des frais exposés par M. B... en première instance et non compris dans les dépens :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".
10. Après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer au titre de l'année 2011, à hauteur de 8 190 euros en droits et 4 259 euros en pénalités, sur les conclusions de la demande de M. B... en décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti, et avoir écarté le surplus des conclusions présentées à ce titre, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative motif pris de ce que l'Etat n'était pas, dans cette instance, la partie perdante. Toutefois, dès lors que l'Etat était la partie perdante dans la mesure des dégrèvements prononcés, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour le motif précédemment rappelé, les premiers juges ont rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui en première instance et non compris dans les dépens.
Sur le remboursement des frais exposés par M. B... en appel et non compris dans les dépens :
11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à M. B... au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : M. B... est déchargé, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2011, à raison de la réintégration dans ses revenus imposables de la somme de 45 000 euros.
Article 2 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés et non compris dans les dépens exposés en première instance.
Article 3 : Le jugement du 8 juin 2020 du tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés et non compris dans les dépens exposés en appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2022, à laquelle siégeaient :
M. Bresse, président de chambre,
Mme Bonfils, première conseillère,
Mme Deroc, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 juillet 2022.
La rapporteure,
M. DerocLe président,
P. BresseLa greffière,
C. Fourteau
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
Le greffier,
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N° 20VE02065