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01/03/2022 | FRANCE | N°20VE01104

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 01 mars 2022, 20VE01104


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 pour un montant de 58 452 553 euros.

Par un jugement no 1810629 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 avril 2020 et le 14 déce

mbre 2020, M. et Mme A..., représentés par Me Naudin, avocate, demandent à la cour :

1° d'annul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 pour un montant de 58 452 553 euros.

Par un jugement no 1810629 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 avril 2020 et le 14 décembre 2020, M. et Mme A..., représentés par Me Naudin, avocate, demandent à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de faire droit à leur demande ;

3° de condamner l'Etat aux entiers dépens ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'impôt sur le revenu dû à raison des plus-values latentes constatées au jour du transfert de leur domicile fiscal n'est plus dû aujourd'hui dès lors que le délai de huit ans mentionné au 2 du VII de l'article 167 bis du code général des impôts, au-delà duquel cet impôt est dégrevé d'office, est échu le 15 décembre 2019 ;

- les avis d'imposition qui leur ont été notifiés sont entachés de nullité dès lors que, d'une part, l'administration n'a pas répondu en 2012 à leurs interrogations relativement à l'application du dispositif de l' " Exit tax " à leur situation, d'autre part, le litige relatif aux rappels d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2011 avait déjà été porté devant le tribunal administratif de Montreuil avant l'envoi de la proposition de rectification, de sorte que celle-ci est entachée de nullité ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté leur moyen tiré de la non-conformité des dispositions des articles 167 bis du code général des impôts et L. 136-6 du code de la sécurité sociale aux principes de libre circulation des personnes et des capitaux ; le dispositif de l' " exit tax " constitue une entrave injustifiée au transfert de leur résidence fiscale hors de France ; si nécessaire, il convient de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle sur la conformité de ce dispositif avec les dispositions des articles 26, paragraphe 2 et 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- c'est à tort que le tribunal a jugé qu'ils ne sauraient se prévaloir des stipulations de l'accord de libre circulation du 21 juin 1999 conclu entre la Confédération Suisse et la Communauté européenne au motif que leur situation ne relève pas du champ d'application de l'article 12, paragraphe 1, de l'annexe I de cet accord ; les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts sont incompatibles avec les stipulations de l'article 2 de cet accord ;

- les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts et celles du 9ème alinéa du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale sont incompatibles avec les stipulations de la convention fiscale conclue le 9 septembre 1996 entre la France et la Suisse ;

- ces mêmes dispositions sont incompatibles avec les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

- la convention fiscale entre la France et la Suisse signée le 9 septembre 1966 ;

- l'accord entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, signé le 21 juin 1999 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bouzar, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Met, rapporteur public ;

- et les observations de Me Naudin, pour M. et Mme B... A....

Une note en délibéré a été présentée le 8 février 2022 pour M. et Mme B... A....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont décidé de transférer leur domicile fiscal à compter du 21 décembre 2011 en Suisse. Ils ont déposé le 29 mai 2012, conformément au décret n° 2012-457 du 6 avril 2012 relatif à l'imposition des plus-values et créances en cas de transfert du domicile hors de France, une déclaration auprès du service des impôts territorialement compétent, complétée le 16 juillet 2012 d'une déclaration rectificative aux termes desquelles ils ont considéré qu'ils n'étaient pas passibles de l'impôt sur le revenu au titre de l'article 167 bis du code général des impôts. Par une proposition de rectification du 18 novembre 2014, l'administration leur a notifié des rectifications en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2011 à raison, en application des dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts, de plus-values latentes et d'une plus-value en report d'imposition afférentes aux parts détenues par M. B... A... dans la société Jamesmon Ltd, établie à Chypre. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 3 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 pour un montant de 58 452 553 euros.

Sur l'exception de non-lieu à statuer :

2. Aux termes du 2. du VII de l'article 167 bis du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 2. A l'expiration d'un délai de huit ans suivant le transfert de domicile fiscal hors de France (...), l'impôt établi dans les conditions du I du présent article, à l'exception de l'impôt afférent aux créances mentionnées au second alinéa du 1 du même I, est dégrevé d'office, ou restitué s'il avait fait l'objet d'un paiement immédiat lors du transfert de domicile fiscal hors de France, lorsque les titres mentionnés au même 1 ou les titres reçus lors d'une opération d'échange entrant dans le champ d'application de l'article 150-0 B intervenue après le transfert de domicile fiscal hors de France demeurent, à cette date, dans le patrimoine du contribuable ".

3. Il ressort de ces dispositions que le dégrèvement d'office de l'impôt est prononcé à l'expiration d'un délai de huit ans suivant le transfert du domicile fiscal hors de France si le contribuable justifie toujours détenir dans son patrimoine les titres auxquels se rapporte la plus-value latente ou les titres reçus lors d'une opération d'échange. Un tel dégrèvement n'ayant rien d'automatique, et alors qu'il est constant qu'aucune mesure en ce sens n'ayant été prononcée par l'administration ou constatée par un tribunal, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que, du simple fait de l'expiration de ce délai de huit ans survenu, en ce qui les concerne, le 21 décembre 2019, l'impôt sur le revenu dû à raison des plus-values latentes constatées au jour du transfert de leur domicile fiscal ne serait plus dû aujourd'hui, privant le présent litige de son objet. Au surplus, le ministre fait valoir que les documents produits par les contribuables n'ont pas permis de déterminer s'ils détenaient toujours dans leur patrimoine les titres auxquels se rapportent les plus-values d'assiette de l'impôt qu'ils contestent. L'exception de non-lieu à statuer doit dès lors être écartée.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Si dans une précédente instance, M. et Mme A... ont demandé l'annulation de la décision implicite par laquelle l'administration a refusé de se prononcer sur leur demande visant à ce qu'elle reconnaisse que le dispositif de l'exit tax n'est pas applicable à leur situation et a rejeté les garanties proposées dans le cadre de leur demande de sursis au paiement de l'exit tax, ces circonstances ne faisaient pas obstacle à ce que l'administration notifie ultérieurement des rehaussements en matière d'imposition des plus-values et créances en cas de transfert du domicile hors de France, et mette en recouvrement les droits correspondants.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. En vertu du 1 et du 2 du I de l'article 167 bis du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable, inséré dans le code général des impôts par la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificatives pour 2011, les contribuables fiscalement domiciliés en France pendant au moins six des dix années précédant le transfert de leur domicile fiscal hors de France sont imposables lors de ce transfert au titre des plus-values latentes constatées sur les droits et titres répondant à certains critères et déterminées par différence entre la valeur de ces droits et titres lors du transfert du domicile fiscal hors de France et leur prix d'acquisition par le contribuable ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. En vertu du III du même article, le transfert hors de France du domicile fiscal d'un contribuable est réputé intervenir le jour précédant celui à compter duquel ce contribuable cesse d'être soumis en France à une obligation fiscale sur l'ensemble de ses revenus. En application du V du même article, lorsqu'un contribuable transfère son domicile fiscal dans un Etat autre qu'un Etat membre de l'Union européenne ou qu'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen présentant des garanties de coopération suffisantes en matière fiscale, il peut être sursis au paiement de l'impôt correspondant aux plus-values latentes sur sa demande expresse sous réserve qu'il constitue des garanties et désigne un représentant fiscal en France. Ces dispositions, enfin, sont applicables aux transferts de domicile fiscal intervenus à compter du 3 mars 2011.

6. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale : " I. Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux ayant déjà supporté la contribution au titre des articles L. 136-3, L. 136-4 et L. 136-7 : / (...) e bis) Des plus-values et des créances mentionnées au I et au II de l'article 167 bis du code général des impôts ; ".

En ce qui concerne l'incompatibilité alléguée de ces dispositions avec le principe de libre circulation des capitaux et le principe de libre circulation personnes :

7. Les dispositions précitées aux points 5 et 6 n'emportent par elles-mêmes aucune conséquence sur la liberté de circulation des capitaux. Par ailleurs, la Confédération suisse n'ayant pas adhéré au marché intérieur de l'Union européenne, M. et Mme A... ne peuvent utilement se prévaloir de la libre circulation des personnes. Par suite, ils ne peuvent utilement soutenir que ces dispositions sont contraires aux stipulations des articles 26, paragraphe 2 et 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Ils ne peuvent davantage utilement soutenir qu'il existe une discrimination dans l'exercice de ces libertés résultant de ce que les contribuables transférant leur résidence fiscale dans un Etat tiers à l'Union européenne et à l'espace économique européen doivent présenter des garanties pour une durée de huit ans en ce qui concerne l'impôt sur le revenu et les contributions sociales dues au titre des plus-values latentes et pour une durée indéterminée en ce qui concerne les mêmes impositions au titre des plus-values en report d'imposition. Enfin, pour le même motif, ils ne peuvent utilement soutenir que l'obligation faite à ces mêmes contribuables de désigner un représentant fiscal en France serait contraire à la libre circulation des capitaux. Par suite, sans qu'il soit besoin d'adresser une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, ce moyen doit être écarté.

En ce qui concerne l'incompatibilité alléguée des dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts avec l'accord du 21 juin 1999 conclu entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Confédération suisse, d'autre part, sur la libre circulation des personnes, signé le 21 juin 1999 :

8. Aux termes de l'article 1 de cet accord : " L'objectif de cet accord, en faveur des ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne et de la Suisse, est : / a) d'accorder un droit d'entrée, de séjour, d'accès à une activité économique salariée, d'établissement en tant qu'indépendant et le droit de demeurer sur le territoire des parties contractantes (...) ". L'article 4 du même accord stipule que : " Le droit de séjour et d'accès à une activité économique est garanti sous réserve des dispositions de l'article 10 et conformément aux dispositions de l'annexe I ". Selon l'article 12 de l'annexe I de cet accord, un indépendant est une personne " désirant s'établir sur le territoire d'une autre partie contractante en vue d'exercer une activité non salariée ". Enfin, l'article 16 de cet accord, intitulé "référence au droit communautaire", stipule que : " 1. Pour atteindre les objectifs visés par le présent accord, les parties contractantes prendront toutes les mesures nécessaires pour que les droits et obligations équivalant à ceux contenus dans les actes juridiques de la Communauté européenne auxquels il est fait référence trouvent application dans leurs relations. / 2. Dans la mesure où l'application du présent accord implique des notions de droit communautaire, il sera tenu compte de la jurisprudence pertinente de la Cour de justice des Communautés européennes antérieure à la date de sa signature. La jurisprudence postérieure à la date de la signature du présent accord sera communiquée à la Suisse. En vue d'assurer le bon fonctionnement de l'accord, à la demande d'une partie contractante, le comité mixte déterminera les implications de cette jurisprudence ".

9. En premier lieu, la Confédération suisse n'ayant pas adhéré au marché intérieur de l'Union, l'interprétation du droit de l'Union concernant la liberté d'établissement ne peut être automatiquement transposée, en l'absence de stipulation expresse de l'accord du 21 juin 1999. Les articles 1er, 4 et 6 précités de l'accord du 21 juin 1999 et l'annexe I à laquelle ils renvoient ont pour objet de définir les conditions du droit d'entrée et de séjour sur le territoire des parties contractantes. Ces stipulations précisent également le droit de bénéficier dans le pays d'accueil d'un traitement équivalent à celui accordé par ce dernier à ses propres ressortissants en ce qui concerne l'exercice d'une activité ou les conditions de séjour en tant qu'inactif. Aussi, le droit d'établissement reconnu par l'article 4 de l'accord n'est pas comparable à la liberté d'établissement garantie par le droit de l'Union européenne. Par ailleurs, le paragraphe 1 de l'article 16 de cet accord n'a pas pour effet de rendre applicables toutes les dispositions de ce droit mais est limité aux droits et obligations qui découlent des actes du droit dérivé de l'Union mentionnés à l'annexe de ce même accord. Enfin, le paragraphe 2 de l'article 16 ne permet d'invoquer la jurisprudence pertinente de la Cour de justice de l'Union européenne antérieure à la date de signature de l'accord que lorsque son application implique des notions du droit de l'Union.

10. Il résulte de ce qui précède que, contrairement ce qu'ils soutiennent, M. et Mme A... ne peuvent utilement invoquer la liberté d'établissement prévue à l'article 49 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et la jurisprudence y afférente de la Cour de la justice de l'Union européenne, par le seul effet des stipulations des articles 4 et 16 de l'accord du 21 juin 1999. Leur moyen doit par suite être écarté.

11. En second lieu, aux termes de l'article 2 de l'accord du 21 juin 1999 : " Les ressortissants d'une partie contractante qui séjournent légalement sur le territoire d'une autre partie contractante ne sont pas, dans l'application et conformément aux dispositions des annexes I, II et III de cet accord, discriminés en raison de leur nationalité ". Les dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts comme celles de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale n'ont ni pour objet ni pour effet de créer une discrimination en raison de la nationalité du contribuable, contraire aux stipulations précitées de l'article 2 de l'accord du 21 juin 1999. A supposer qu'ils invoquent également le principe de non-discrimination tel que consacré dans le droit de l'Union européenne, en tout état de cause, les contribuables ayant leur résidence fiscale en Suisse ne sont pas dans une situation analogue à ceux ayant leur résidence fiscale dans un Etat de l'Union européenne et ou dans un Etat de l'espace économique européen. Par suite, ce moyen doit également être écarté.

En ce qui concerne l'incompatibilité alléguée des dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts et de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale avec les stipulations de l'article 15, paragraphe 5 de la convention fiscale entre la France et la Suisse signée le 9 septembre 1966 :

12. Aux termes du 4 de l'article 4 de la convention fiscale conclue entre la France et la Suisse le 9 septembre 1966 : " Lorsqu'une personne physique a transféré définitivement son domicile d'un Etat contractant dans l'autre, elle cesse d'être assujettie dans le premier Etat aux impôts pour lesquels le domicile fait règle dès l'expiration du jour où s'est accompli le transfert du domicile. L'assujettissement aux impôts pour lesquels le domicile fait règle commence dans l'autre Etat à compter de la même date ". Aux termes du 5 de l'article 15 de cette même convention : " Les gains provenant de l'aliénation de tous biens autres que ceux qui sont mentionnés aux paragraphes 1, 2 et 3 ne sont imposables que dans l'Etat dont le cédant est un résident ".

13. Les stipulations du 5 de l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse qui réservent à l'Etat de résidence l'imposition des plus-values réalisées lors de la cession de valeurs mobilières, qui ne relèvent pas du 2 ou du 3 de cet article, ne font pas obstacle à ce qu'une personne ayant son domicile fiscal en France soit imposée sur les plus-values constatées lorsqu'elle transfère son domicile fiscal hors de France. Par suite, M. et Mme A... qui, en application du 4 de l'article 4 de cette même convention, conservaient la qualité de résident de France jusqu'à l'expiration du jour où s'est accompli le transfert de leur domicile en Suisse, ne sont pas fondés à soutenir que l'article 15 de la convention fiscale franco-suisse faisait obstacle à l'imposition de leurs plus-values latentes.

En ce qui concerne l'incompatibilité alléguée des dispositions de l'article 167 bis du code général des impôts avec les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

14. Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes ". A défaut de créance certaine, l'espérance légitime d'obtenir la restitution d'une somme d'argent doit être regardée comme un bien au sens de ces stipulations.

15. Compte tenu de l'objet et de la portée de l'article 167 bis du code général des impôts et de la marge d'appréciation dont disposent les Etats en cette matière, l'imposition des plus-values latentes à la date du transfert du domicile fiscal hors de France, alors même que le sursis de paiement de cette imposition est subordonné à l'obligation de constituer des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor, ne porte pas atteinte au droit au respect des biens protégé par les stipulations précitées de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, leur moyen doit être écarté.

16. Il résulte de tout de ce qui précède, sans qu'il soit d'examiner la fin de non-recevoir opposée par ministre, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande. Leur requête doit par suite être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens, ces dernières conclusions étant au demeurant dépourvues d'objet.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

2

N° 20VE01104


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01104
Date de la décision : 01/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Plus-values de cession de droits sociaux, boni de liquidation.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Mohammed BOUZAR
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : TIRARD NAUDIN SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-03-01;20ve01104 ?
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