Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour d'un an, dans le délai d'un mois sous astreinte de 15 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente, d'enjoindre à cette même autorité, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant cet examen, et de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 1903313 du 8 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 décembre 2020, M. B..., représenté par Me Magdelaine, avocat, demande à la cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 21 décembre 2018 ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour d'un an dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de le mettre à ce titre en possession d'une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de le mettre à ce titre en possession d'une autorisation provisoire de séjour ;
4° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros à Me Magdelaine au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Magdelaine renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence en l'absence de production de l'exemplaire signé de l'arrêté portant délégation de signature à Monsieur D... C... ;
- il méconnaît le 1. de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- il méconnaît le 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision lui refusant un délai de départ volontaire est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'alinéa 3 du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant interdiction de retour est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'alinéa 1er du III. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Deroc a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né le 6 août 1978 à Hussein Dey (Algérie), a sollicité son admission au séjour sur le fondement des 1° et 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Il fait appel du jugement du 8 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.
Sur les moyens relatifs à l'ensemble des décisions contestées :
2. En premier lieu, par un arrêté n° 2017-3377 du 10 novembre 2017, régulièrement publié au bulletin d'informations administratives du même jour, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné délégation à M. D... C..., sous-préfet du Raincy, pour signer notamment des décisions en matière de police des étrangers au nombre desquelles figurent les décisions contenues dans l'arrêté attaqué. Si M. B... oppose l'absence de production de l'exemplaire signé de cet arrêté, les seules mentions figurant sur l'ampliation de l'arrêté publié au recueil suffisent à établir, en l'absence de toute contestation sérieuse sur ce point, que l'original de l'arrêté de délégation comporte bien la signature du préfet de police. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une absence de délégation de signature régulière, c'est-à-dire spéciale, écrite, motivée et dûment publiée, manque en fait et ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes du 1. de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit (...) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ".
4. M. B... soutient être entré en France le 24 août 2000 et s'y être maintenu depuis lors, soit depuis dix-huit ans à la date de la décision attaquée. Pour refuser de faire droit à sa demande, le préfet de la Seine-Saint-Denis a estimé que l'intéressé ne justifiait pas de manière suffisamment probante sa résidence en France depuis au moins dix ans, notamment pour les années 2008 et 2009. Devant les premiers juges, le préfet de la Seine-Saint-Denis a opposé l'absence de preuves suffisantes de résidence habituelle pour les années 2007, 2008 et 2009, réduisant ainsi la critique à ces seules années. Toutefois, pour l'application des stipulations susmentionnées, il appartient seulement à M. B... de justifier de sa résidence en France à compter du 21 décembre 2008. Par suite, l'insuffisance des éléments de preuve de sa présence au titre de l'année 2007 ne saurait lui être reprochée. Néanmoins, M. B... ne justifie pas, par les pièces qu'il produit, de sa présence en France avant le 12 janvier 2009. En effet, il ne justifie que d'une présence ponctuelle en France au titre de l'année 2008, durant les mois de janvier et juin. Par suite, en l'absence de résidence habituelle de l'intéressé établie depuis plus de dix ans, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait fait une application erronée des stipulations du 1. de l'article 6 ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention 'vie privée et familiale' est délivré de plein droit / (...) / au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / (...) ".
6. M. B... soutient avoir établi sa vie privée sur le territoire français depuis son arrivée en France en 2000 et fait valoir son intégration ainsi que l'existence de liens amicaux tissés avec son entourage. Toutefois, ainsi qu'il a été rappelé au point 4., il ne justifie pas de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans. Il ne justifie pas davantage, par le seule production d'attestations établies pour les besoins de la cause, de la réalité de son intégration personnelle et sociale, ni a fortiori de son intensité. Il ne fait état, dans ses écritures, d'aucun élément relatif à ses conditions de vie en France, ni d'une quelconque autre forme d'intégration, notamment professionnelle ou familiale, alors qu'il est constant qu'il est célibataire et sans charge de famille, et ne fait état d'aucun obstacle l'empêchant de retourner dans son pays d'origine où résident sa mère et des membres de sa fratrie, et où il a vécu la majorité de sa vie. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les stipulations du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien ne peut qu'être écarté, de même que ceux tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur la décision refusant un délai de départ volontaire :
7. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement / (...) / ".
8. En premier lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la décision attaquée vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et énonce que le risque que l'intéressé se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français est établi du fait qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement notifiée le 31 mars 2015. Ainsi, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait insuffisamment motivée ne peut qu'être écarté. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier des mentions de l'arrêté contesté, qui font état d'éléments de fait propres à la situation personnelle de l'intéressé, que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen complet et particulier de la situation du requérant.
9. En second lieu, il ressort de l'arrêté contesté que le préfet de police a fondé son refus d'octroyer un délai de départ volontaire sur le d) du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. B... soutient qu'il n'existe pas de risque de fuite dans la mesure où, d'une part, le préfet n'apporte par la preuve de la notification de la précédente mesure d'éloignement du 26 mars 2015 et où, d'autre part, cette mesure d'éloignement datée de plus quatre ans ne saurait attester de l'existence d'un tel risque alors qu'il dispose de garanties de représentation solides. Toutefois, le préfet de la Seine-Saint-Denis a produit, devant les premiers juges, l'accusé-réception de notification de l'arrêté du 26 mars 2015, daté du 31 mars suivant, dont les mentions ne sont pas contestées par l'intéressé et il est constant que M. B... s'est soustrait à l'exécution de cette mesure d'éloignement. Dès lors, sa situation correspondait au cas énoncé au d) du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel suffisait pour caractériser un risque de fuite en l'absence de circonstances particulières, les éléments de fait tenant à sa situation personnelle n'étant pas de nature à caractériser de telles circonstances. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit dès lors être écarté.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
10. Aux termes du III. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. /. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
11. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
12. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
13. En premier lieu, la décision prononçant à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, qui vise le III. de l'article L. 511-1 précité, mentionne, notamment, que l'intéressé, entré régulièrement en France en 2000, s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français après l'expiration de son visa mais qu'il ne prouve pas sa présence en France depuis dix ans. Elle fait état également de ce qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement prononcée en 2015. Elle indique que l'intéressé est célibataire et sans charge de famille et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Elle précise enfin que " l'examen d'ensemble de la situation de Monsieur A... B... a été effectué, relativement à la durée de l'interdiction de retour, au regard du huitième alinéa dudit III ". Ainsi, et contrairement à ce que soutient M. B..., cette décision, qui fait bien état de sa situation personnelle, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier des mentions de l'arrêté contesté, qui font ainsi état d'éléments de fait propres à la situation personnelle de l'intéressé, que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen complet et particulier de la situation du requérant.
14. En second lieu et d'une part, il résulte des termes mêmes de la décision contestée que le préfet de la Seine-Saint-Denis a tenu compte des critères précédemment énoncés tenant à la durée de présence de M. B... sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et à la circonstance qu'il a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement. D'autre part, si l'intéressé fait valoir qu'il " entend, par la présente requête, démontrer que la Préfecture a fait une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et des conséquences qu'une telle interdiction entrainerait ", il n'apporte aucun élément à l'appui de son moyen permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors qu'il ne justifie d'aucune circonstance particulière pour s'être maintenu irrégulièrement sur le territoire français et soustrait à une précédente mesure d'éloignement et que les éléments de fait tenant à sa situation personnelle ne sont pas de nature à caractériser de telles circonstances, et au demeurant insuffisamment établis. Dans ces conditions, le préfet, qui a ainsi pris en compte les critères prévus à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire, n'a pas méconnu les dispositions précitées en prononçant une interdiction de retour sur le territoire français et en fixant à deux ans la durée de cette interdiction.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 20VE03163