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25/01/2022 | FRANCE | N°21VE01581

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 25 janvier 2022, 21VE01581


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 19 juin 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002345 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2021, M. B..., représenté pa

r Me Rochiccioli, avocate, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 19 juin 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2002345 du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mai 2021, M. B..., représenté par Me Rochiccioli, avocate, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° d'annuler l'arrêté attaqué ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard, en le munissant d'une autorisation provisoire de séjour ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Rochiccioli renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

M. B... soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le tribunal n'a pas répondu à son moyen tiré de l'absence de garantie procédurale tenant au caractère collégial de la délibération du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

En ce qui concerne la décision rejetant sa demande d'un titre de séjour :

- il n'est pas établi par les services préfectoraux, pas même par la production de l'avis du collège de médecins de l'OFII qui comporte la signature des trois médecins composant ce collège, que cet avis a été rendu de manière collégiale ou encore que cet avis a été rendu à la suite d'une délibération par conférence téléphonique ou audiovisuelle dans le respect des dispositions de l'article 4 de l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2004 relative aux délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle et médicale ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle n'est pas motivée en droit ;

- elle est illégale en conséquence de l'illégalité entachant la décision rejetant sa demande d'un titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle et médicale.

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

- elle n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle n'est pas motivée ;

- elle est illégale en conséquence de l'illégalité entachant la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu :

- le procès- verbal d'audience ;

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2014 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bouzar, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant guinéen né le 1er février 1986 à Labé (République de Guinée), déclare être entré en France le 13 mars 2013. M. B... a bénéficié d'une carte de séjour temporaire pour soins valide du 12 décembre 2016 au 24 juillet 2017. Par un arrêté du 19 juin 2019, le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 23 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. A l'appui de sa demande devant le tribunal, M. B... soutenait notamment qu'il n'était pas établi que les trois médecins composant le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration avaient effectivement délibéré de manière collégiale pour rendre leur avis. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, son jugement doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Versailles.

Sur la légalité de la décision refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire :

4. Aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / (...) ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. / (...) ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

5. En premier lieu, si l'avis émis le 26 avril 2019 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne fait apparaître ni la date du rapport au vu duquel le collège a rendu son avis ni la date à laquelle ce rapport lui a été transmis, il ne résulte d'aucune des dispositions précitées que, du fait de ces omissions, l'avis a été rendu dans des conditions irrégulières. De plus, il ressort des propres mentions de l'avis médical que le rapport médical requis dans le cadre de l'instruction de la demande de titre de séjour de M. B... a été établi par le docteur A... D.... Il en ressort également que ce médecin n'appartenait pas au collège de médecins, composé des docteurs Levy-Attia, Crocq et Ortéga, tous trois régulièrement désignés par décision du directeur général de l'OFII du 18 mars 2019 portant délégation de signature ainsi que par décision de la même autorité du 17 janvier 2017 portant désignation au collège de médecins à compétence nationale de l'OFII. Par ailleurs, cet avis comportait toutes les mentions requises par les dispositions précitées au point 4 de la présente décision, et notamment celle qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, selon laquelle le collège a émis son avis " Après en avoir délibéré, (...) ". Enfin, le collège de médecins de l'OFII n'étant pas une autorité administrative au sens de l'article 1er de l'ordonnance du 6 novembre 2014 relative aux délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial, M. B... ne peut utilement soutenir que les dispositions de l'article 4 de cette ordonnance n'ont pas été respectées. Dès lors, sans qu'il soit besoin de mettre en œuvre les mesures d'instruction sollicitées, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'avis médical du 26 avril 2019 a été émis dans des conditions irrégulières.

6. En deuxième lieu, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

7. Pour refuser de délivrer une carte de séjour temporaire à M. B..., le préfet de l'Essonne a rappelé la teneur de l'avis émis le 26 avril 2019 par le collège de médecins de l'OFII, qu'il a fait sien, aux termes duquel si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard toutefois à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Si M. B... soutient souffrir d'un syndrome de stress post-traumatique sévère, de diabète et d'hypertension artérielle, les certificats médicaux qu'il produits ne sont nullement circonstanciés sur l'impossibilité alléguée qu'il ne pourrait poursuivre ses traitements en République de Guinée. Les autres documents dont il se prévaut par ailleurs, tels que par exemple les indicateurs de l'Organisation mondiale de la Santé concernant la République de Guinée, de par leurs termes par définition généraux, n'établissent pas que, concernant sa situation particulière, il ne pourrait effectivement poursuivre ses traitements en République de Guinée. S'il soutient que certains des médicaments que son traitement requiert ne sont pas disponibles dans ce pays, tels que le Cymbalta et le Théralène, il produit toutefois un document daté de l'année 2012. S'il se prévaut également d'un autre document daté du 6 juillet 2018 concernant le Cymbalta, il ne ressort pas des pièces du dossier que seul ce médicament est de nature à lui permettre de poursuivre effectivement son traitement. A cet égard, le certificat médical établi par le docteur E... mentionne simplement qu'il existe " une bonne alliance thérapeutique et une bonne compliance au traitement " composé du Cymbalta et du Théralène. Enfin, il n'est pas davantage établi que son retour en République de Guinée l'exposerait à voir ses troubles psychiatriques s'aggraver. Dans ces conditions, sans qu'il y ait lieu d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Essonne a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

8. En troisième lieu, M. B... ne peut utilement invoquer les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que ni l'intéressé dans sa demande ni le préfet de l'Essonne dans sa décision ne se sont fondés sur ces dispositions.

9. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M. B... et leurs deux enfants vivent en République de Guinée et que l'intéressé vit seul France, pays qu'il a rejoint en 2013 mais dans lequel il ne justifie d'aucune vie sociale et privée telle que le refus de séjour puisse être regardé comme y ayant porté une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. En dernier lieu, pour les motifs exposés aussi bien au point 7 qu'au point 9 de la présente décision, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer la carte de séjour temporaire qu'il a sollicitée, le préfet de l'Essonne a commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

11. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger (...) ; / (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, (...) ". En l'espèce, la décision contestée vise les textes dont il est fait application, notamment, dans son intitulé même, le I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette décision, dont la motivation se confond avec celle du refus de séjour, mentionne également les éléments de fait, d'ordre médical et familial notamment, qui en constituent le fondement. Le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit donc être écarté.

12. En deuxième lieu, il résulte des motifs exposés concernant la légalité de la décision refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire que M. B... n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'exception, que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; ". Il résulte cependant des motifs exposés au point 7 de la présente décision que M. B... n'est pas fondé à soutenir que, en adoptant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, le préfet de l'Essonne a méconnu les dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ce moyen doit être écarté.

14. En dernier lieu, en l'absence de tout nouvel argument articulé à l'appui de son moyen, M. B... n'est pas fondé, pour les mêmes motifs que précédemment exposés, à soutenir que l'obligation de quitter le territoire a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :

15. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) ". Alors que le préfet de l'Essonne n'a pas décidé que M. B... était obligé de quitter le territoire sans délai mais lui a au contraire laissé un délai de trente jours à cette fin, il n'était pas tenu de motiver sa décision.

16. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en laissant à l'intéressé le délai de droit commun de trente jours pour quitter volontairement le territoire français, le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ou, comme allégué, d'une erreur de droit.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

17. En premier lieu, cette décision, qui indique que l'intéressé pourra être reconduit d'office à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité, mentionne que M. B... n'encourt pas de risques de tortures, de traitements et peines inhumains et dégradants en cas de retour contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, cette décision est motivée.

18. En deuxième lieu, il résulte des motifs exposés concernant la légalité de l'obligation de quitter le territoire français que M. B... n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'exception, que la décision fixant le pays de destination est illégale.

19. En dernier lieu, si M. B... soutient qu'il a été contraint de quitter son pays à raison des persécutions qu'il y a subies, ses allégations ne ressortent nullement des pièces du dossier. Par suite, alors au demeurant que sa demande d'asile, présentée pour les mêmes motifs, a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 mai 2015, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile du 12 avril 2016, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

20. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de M. B..., ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2002345 du 23 juin 2020 du tribunal administratif de Versailles est annulé.

2

N° 21VE01581


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01581
Date de la décision : 25/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Mohammed BOUZAR
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-01-25;21ve01581 ?
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